Je relance le sujet avec une lettre ouverte au Parc. Bonne lecture.
Très cher Parc Naturel des Calanques, je t’écris en mon nom mais aussi en celui de nombreuses autres personnes qui ont moins le temps de prendre la plume, ou plutôt le clavier.
D’abord pour te remercier d’exister, d’être là, de faire ce que tu fais, de protéger un peu cet espace si précieux et fragile. Et justement, en parlant de cela je voudrais te parler de ta façon de la protéger. D’abord un aparté, pardonne moi de te tutoyer, mais comme je me sens proche de toi, je me permets cette familiarité. Et puis pour dire ce qu’il faut que je te dise, c’est plus approprié je trouve que de se cacher derrière une fausse politesse à laquelle je préfère une vraie sincérité. Fin de l’aparté, et suite : Protéger un espace comme celui-ci, c’est plusieurs choses. Sauver l’existant quand il est danger, créer les conditions de la sauvegarde par tous les moyens, prévenir les menaces futures par la pédagogie et l’implication des habitants, essayer de rétablir les choses et êtres détruits par l’incivilité humaine…
Pour tout cela, cher Parc, il te faut l’adhésion de ton public. Et je dois te dire qu’il y a toute une partie du public des Calanques, un public fortement impliqué, très attaché à toi et qui te fréquente assidûment qui est en ce moment déçu. Oh ! Ce n’est pas irrémédiable, je vais t’expliquer.
Depuis que tu es arrivé, les grimpeurs ont l’impression d’être de vilains petits canards. Non pas des canards, parce que tu aimes les oiseaux. Enfin tu le dis. Des nuisibles on va dire alors. Des empêcheurs de tourner en rond. Je ne sais pas ce qui t’as fait croire ça ; peut-être ces petits bouts de métal qui peuplent le rocher de certaines falaises, peut-être le fait que souvent les escaladeurs sortent des sentiers que tu veux faire emprunter aux randonneurs ? Mais pourtant, les grimpeurs ne sont pas des nuisibles. Et même, je te le dis, ce sont tes amis, tes alliés. Ils ne sont pas là pour embêter les oiseaux auxquels tu tiens tant ni pour piétiner les parterres d’asphodèles. Ils sont là parce qu’ils aiment cet endroit, le protège depuis toujours (c’est même écrit dans tes pages, sur ton site), viennent y trouver ce qui leur manque en ville, la liberté, la vue qui porte loin, le temps qui passe doucement, le vert le blanc et le bleu. Et toi, depuis quelques mois, tu les arrête ces grimpeur, les mets face à un juge et les place à côté des criminels, des délinquants. Alors que non, non, ils ne méritent pas ça… Ceux qui ouvrent des voies, équipent des lignes sont des amoureux des Calanques et des défenseurs du Parc, de toi. Ils ne veulent que partager leur passion, élargir les possibilités qu’offre ce massif aux portes de Marseille, rendre accessible à plus de monde ces escalades vertigineuses… S’ils ne font pas toujours les demandes de travaux que tu imposes, c’est qu’il n’en ont pas l’habitude, ce sont des amoureux, des passionnés, des hommes et femmes d’instinct, ils oublient (c’est le propre des amoureux, ça !) de t’informer et surtout, ils ont peur d’être éconduits. De recevoir un « NON ». Non, alors que quelques tiges métalliques dans un bout de caillou au-dessus d’un sentier ou très loin de lui, c’est quoi ? Qui cela gêne-t-il ? Les lézards ? Les sangliers que les chasseurs peinent à contrôler après les avoir un peu trop bien implantés ? Un couple de volatile en période de nidification ? Les interdictions temporaires sont là pour ça… Et même, en fait, pourquoi ces petits bonhommes qui grimpent régulièrement dans les falaises ne seraient-ils pas tes aides plutôt que des gens que tu dois contrôler ? Ca ne serait pas plus malin ça, hein, de leur demander de te rendre service plutôt que de les prendre pour des enfants turbulents qui vont tout casser sur leur passage ? Tu as bien vu que c’est souvent dans les voies les plus parcourues (mais loin des sentiers battus et rebattus par les randonneurs-chasseurs que nos amis faucons viennent nicher.
Alors non, ces gens-là ne sont pas dangereux ni nuisibles. Souvent ces gens-là sont empreints d’écologie, ils ramassent les déchets qu’ils trouvent (plastique, boites de conserves, cartouches) et respectent le milieu qu’ils adorent, chérissent et pratiquent toute l’année. Et ces gens là sont informés et intelligents. Alors, quand ils voient la mer en face de Cortiou, les poteaux et les câbles en bas de Canaille, les rejets d’Altéo, tes tracts qui volent à Luminy ou à la Gardiole, les pins de Kedge qui sont abattus ; ils ne voient plus le blanc, le vert et le bleu, ils voient rouge. Tu comprends pourquoi ? Parce qu’ils se disent « deux poids, deux mesures ». On rejette en plein cœur de parc des horreurs, des résidus mortifères, de la merde, des huiles, des plastiques, des métaux lourds non traités, on abat une forêt déjà si souvent attaquée par les fous du feu pour le profit d’une entreprise privée (même si on sait qu’on ne t’as pas trop demandé ton avis à ce sujet !), qu’on en abat d’autres pour diffuser des informations déjà de nombreuses fois affichées et à côté, on ennuie, on attaque les personnes qui aiment le plus cet endroit… Ce n’est pas possible, c’est incompréhensible ! Et c’est pour ça que je t’écris, Parc, parce que nous les grimpeurs, sommes aussi des randonneurs, des observateurs de la nature, des citoyens, des usagers très actifs du par cet de notre région. On voudrait bien ne pas être les dindons de la farce et voir petit à petit notre patrimoine tomber en désuétude. Car c’est bien un patrimoine historique mondialement connu que la grimpe en Calanques. Si tu marches à Pâques, à la Toussaint ou en été sur tes sentiers tu entendras parler toutes les langues du monde et chanter tous les accents de France. Bien sûr aucun n’est aussi beau que le nôtre, mais tout de même, il faut les accueillir comme Marseille sait le faire. Alors s’il te plaît, arrête, et au lieu de donner du bâton, essaie de comprendre et de parler avec les grimpeurs et Ré/équipeurs de voies ! Ils ne veulent aucun mal à ta faune et ta flore, ils veulent faire rayonner ton nom dans le monde.
Réfléchis bien à cela je t’en prie. Je ne suis pas pressé, en fait je ne demande même pas de réponse, juste de ne plus voir des fonds marins dévastés, de l’eau marron et puante et des équipeurs devant le juge…
Reçoit mes saluations cher Parc National,
Bon courage,