Sans parler d’anciennes cotations, j’aurai dû plus me méfier de la mention « attention départ physique » sur le dernier site où je suis allé grimper (enfin essayer de grimper du coup…).
Equivalence anciennes cotations et cotations ouvertes modernes
Bon il pleut alors je continue mon petit survol historique. J’ai expliqué (et entre temps confirmé par mes recherches dans mes vieux topos dont certains tombent en lambeau) qu’il n’y a pas (du moins j’en ai pas trouvé) de voies cotées en VI (avant 1960) dans ces topos-là (et je pars sur l’idée que c’est la base pour une comparaison entre les cotations) qui soient au-dessus de 6b maintenant. Et 6b c’est presque exagéré, il y en a très peu et encore ça mérite une explication. Dans chaque cas que j’ai trouvé c’est du 6b actuel si on refuse de toucher le clou salvateur (je dis bien le clou, pas le spit ou le ring). Par exemple j’avais parlé du mur. Bon la première longueur, 6b+ actuel c’est simple avant c’était A1 donc rien à discuter. La deuxième est actuellement 6b. Et à l’origine ? V+/VI-, VI. Donc à première vue on a bien un VI devenu maintenant 6b. Oui mais… mais dans mon topo j’ai rajouté au crayon: deux pitons. Ce qui veut dire que c’était du VI en s’aidant de deux pitons. Et bien entendu de nos jours en n’y touchant plus ça fait plus dur.
Bref ça c’était avant 1960. Et après ? Après c’est long, donc je ne vais parler que de la période où on ne parlait pas encore de 6a, 6b etc… et où dans les topos Lucchesi il y avait des nombres écrits en romain. Là aussi j’ai recherché et finalement ça ne change pas tant que ça par rapport à avant 60. Mais quand même. Pour un habitué du coin on voit nettement que le VI+ d’avant 60 (face sud de la bougie) n’a pas grand rapport avec celui de 1964, année d’ouverture de la gamma à Envau. La gamma, un mythe pour les grimpeurs de ma génération. On la regardait d’en bas, ou d’en face, en se demandant si on la ferait un jour. Moi je l’ai faite sur un coup de tête. On glandait sur la plage après avoir fait la sortie des artistes et on se demandait ce qu’on allait faire après. En rigolant j’ai dit on n’a qu’à faire la gamma. le copain m’a regardé éberlué « tu déconnes », et puis il s’est soudainement transformé et il a bondi « allez on y va ! » . Un chouette souvenir. Revenons à nos moutons. La gamma c’est vraiment un cap dans le niveau à l’époque, cotée VI+ à l’ouverture c’est aujourd’hui toujours 6c. Mais c’est loin d’être une généralité, ça reste L’exception. Là aussi j’ai cherché et dans les années 60 j’en ai pas trouvé d’autres de cet acabit. Même d’autres voies ouvertes par Guillot, certainement le meilleur grimpeur de cette époque. par exemple la révolution, toujours à Envau, cotée VI- à l’ouverture est 6a de nos jours. Autre grande voie marquante: la Coryphène, cotée VI à l’ouverture est maintenant 6a+ (6a+ de derrière les fagots, mais bon, 6a+ quand même) mais je reconnais qu’il a pu m’en échapper, mais certainement pas beaucoup. Donc au final les équivalences données plus haut par @Gros me semblent tout-à-fait pertinentes.
Petit apparté sur l’artif: il y a eu un glissement sur la différence entre libre et artif. Aujourd’hui tout ce qui n’est pas du libre c’est de l’artif. Autrefois c’était le contraire, tout ce qui n’était pas de l’artif c’était du libre. Dit comme ça ça paraît con, mais en fait ça explique que des passages aient pu être cotées d’une manière qui ne correspond pas vraiment à la difficulté. Je m’explique:le A0 n’existait pas; l’artif c’était quand on plaçait un clou (ou qu’on l’utilisait s’il était déjà là) pour placer un étrier sur le quel on se hissait pour placer un autre clou plus haut etc … Si on en faisait pas ça on faisait du libre, c’est-à-dire que si on plaçait un clou, on se tirait dessus pour choper une prise sans avoir mis de pédale, c’était du libre. Et franchement on ne se posait pas la question, pour la plupart le but c’était d’arriver en haut, un point c’est tout. Alors ne vous étonnez pas si un jour vous partez dans une voie peu parcourue et que vous êtes vert dans un 4+, p’t^t ben qu’avant y avait un clou dans les parages !
Café !
La première longueur de la Bouffigue est cotée 5c+ par C2C (enfin ceux qui ont renseigné le topo) alors que la cotation historique est V- (5 inf ou 5a) soit 2,5 cotations au-dessus de sa difficulté réelle …pas étonnant que les forums regorgent de septogradistes qui randonnent dans le 6
Petit apparté qui résume très bien le changement d’approche et qui explique clairement des recotations de Livanos ou Ravier pour les Pyrénées. Merci pour ta contribution qui sent bien le grimpeur qui a bien grimpé…
C’est faux.
Quand c’était du libre, on s’efforçait de passer en libre. A partir du moment où tu te tirais sur le clou, c’était enfreindre l’éthique de l’époque, et certains s’asseyaient dessus sans scrupules, cette époque révolue n’était pas spécialement plus respectueuse des règles. Quand le topo précisait que c’était de l’artif, pas de scrupules, l’artifice était employée, à des degrés divers: tire-clou, étriers, etc. Seule une minorité élite « jaunissait » certains pas d’artif et c’est très progressivement que cette tendance s’est affirmée pour devenir une règle : libérer les voies d’artif.
Bref, les indications du topo en vigueur (il n’y en avait qu’un pour le secteur considéré) c’était la bible. Après, sur le terrain, chacun était confronté à sa propre conception de l’éthique.
Tirer sur un clou n’a jamais été du libre ! Libre à toi de ne pas te poser de questions !!!
Peux-tu développer pourquoi tu dis que c’est faux ?
Ce que dit Pire va dans le meme sens que tout ce que j’ai pu lire et est aligne avec la notion de « french free climbing » qui a tant fait rire les anglo-saxons
oui, vous avez bien raison ! c’est probablement là qu’est l’un des premiers leviers de la hausse des cotations.
Juste pour ajouter une pièce constructive à votre débat, (et que RMC2 ne se sente moins seul), j’ai ré-ouvert le Rébuffat de 1973, chapitre le Grand Capucin face Est, voie Bonatti, page 212.
L1: IV puis V devient 6a+ actuel
L2 :IV puis V devient 6a+ actuel
L3 : V puis III devient 6b+ actuel
après on se peaume, dur de comparer chaque longueur strictement.
Mais en gros pour Gaston, rien ne dépasse le V+, pour des longueurs actuellement côtées en libre entre 6a+ et 7a+
détail ici :
L1 6a+
L2 6a+
L3 6b+
L4 6b/6b+
L5 6a+/6b
L6 6b+
L7 7a+
L8 5c
L9 6a+/6b
L10 6b+/6c
L11 7a
L12 6c
L13 6b+
L14 5c
L15 5c
Pour synthétiser cette page, le V+ de Gaston faisait pas rigoler !!! et inversement les 6b+ modernes font bien rigoler les vieux !
En gros, de mon point de vue, son V+ se traduit par du gros 6a+/6b actuel (L7 & L11 en 7a mise à part), donc dire que le VI de Gaston Rebuffat de 73 devait coller au 6b+/6c n’est pas une aberration non plus !
Bonne journée à tous
En tout cas, à Toulon, quand je vois des voies équipées dans les années 80 (c’est pourtant pas si vieux), je sais que je vais en chier. Bon, la patine n’y est pas pour rien. Il m’est même arrivé (1 fois) de buter sur un 5b !
Mais les cotations toulonnaises, c’est connu pour être un monde à part…
Ca c’est encore un autre débat, c’est plus vraiment de l’ancienne cotation pour moi. Année 80, on est déjà dans le Huitième degré. Et avec des Parisiens qui se tiraient la bourre avec les Sudistes…
Noname123, je ne me sens pas seul à défendre mes convictions puisque les voies dont je parle, je les ai parcourues, j’en parle donc en connaissance de cause.
Je te laisse à ta connaissance livresque des itinéraires que tu mentionnes.La vraie solitude, c’est d’argumenter par personne interposée (Rébuffat, etc), faute d’expérience vécue. Ce qui m’intéresse, c’est de débattre avec des grimpeurs qui ont constaté, sur le terrain, cette « escalade » insensée des cotations terrain versus topo…
« Avant » c’est à dire jusqu’aux années 70/75, artif = étrier, libre = pas étrier. Tu te tirais au clou, on estimait que c’était du libre. Tu mettais une pédale, on estimait que tu passais en artif. C’était comme ça.
Mais je me demande pourquoi je ramène ma fraise vu que @pire l’a déjà chanté sur tous les tons.
ça, c’est enfonçer le clou du coup, reste à savoir si RMC2 va tirer dessus
Certains peuvent continuer à défendre l’indéfendable, je ne suis pas certains qu’ils aient tiré une grande satisfaction à tirer sur un clou dans du libre, surtout quand ce précepte constitue une règle permanente. On a l’éthique qu’on mérite
Bon, c’est étonnant comme en une semaine la perception change. …
Maintenant, alors que j’étais intervenu pour louer sa patience, je trouve que ce sont pire et gros qui ont bien de la patience … Le propos de très général a été restreint aux Calanques sur une petite période, les très bons arguments ne servent à rien visiblement …
Bref, ce fil de discussion me semble maintenant stérile et je vais voir si on peut arrêter d’être informé des nouveautés
Bon monologue !
utile pour un débat sur les cotations !
T’inquiètes pas sur ce sujet !
Concernant l’évolution de la définition de l’escalade libre, voir cette discussion (dont le sujet initial était juste la recherche de la mention la plus ancienne de « escalade libre ») : Escalade libre
Sauf que
La voie Bonnatti a été essentiellement ouverte en artif (en trois séances, ça a fait un tollé à l’époque, les mecs avaient pas encore vu débarquer les américains !). Elle se parcours encore régulièrement en mixte artif/libre en 2020. Jean-Claude Droyer a tenté de libérer cette voie en 1977 et n’y est pas parvenu, il a laissé 9 points d’aide. Avant cette date, cette voie se parcours en tirant au clou allègrement, c’était la norme de l’époque. Et quand tu retires les PA, tu peux aussi bien te retrouver avec du 8 …
La conversion admise par l’UIAA avec VI = environ 6a s’entend bien évidement pour du libre … Convertir de l’artif en libre, ça peut être n’importe quoi à la sortie.
La preuve ?
- La Bonatti-Oghi au Grand Cap, c’est TD+/V+/A31 dans les années 70 et 7a+ en libre en 2020.
- La Directissime de la Concave de Livanos en 1966, c’est IV/A2/A31 … et 8a en libre en 1994 par Jérome Rochelle.
Donc Rébuffat rigolait pas avec ses V+ qui valaient 7a+, mais Livanos rigolait encore moins avec son IV qui valait 8a …
(1) et en fait ces deux voies sont A1 en artif moderne, mais on va perdre du monde là
Comparez ce qui est comparable : du libre avec du libre. Et c’est uniquement ce que nous comparons @pire et moi-même.
D’ailleurs, la boucle est bouclée entre les Calanques, Livanos, Bonatti :
Nul n’est prophète en son pays… Ce sont des Italiens qui ont mené à bien la plus belle escalade réalisée l’été dernier en France, et ce sont des Français qui ont triomphé du plus difficile itinéraire des Dolomites !
La première ascension de la paroi est du Grand Capucin, dans la chaîne du Mont Blanc par Walter Bonatti, de Monza, et Luciano Ghigo, de Turin, ouvre le premier itinéraire des Alpes occidentales où les moyens artificiels d’escalade ont dû être obligatoirement employés autant que dans certaines voies célèbres des Alpes orientales. Il fallut quatre jours et trois bivouacs, pour passer, aux premiers ascensionnistes qui avaient fait l’an dernier une tentative très poussée arrêtée par le mauvais temps. Quelques jours plus tard, deux grimpeurs de Cortina d’Ampezzo, Luigi Ghedina et Lino Lacedelli reprirent la voie, en ne faisant qu’un bivouac, tout près du sommet. Ils estiment que c’est la voie la plus difficile par sa continuité qu’ils aient parcourue, et on sait qu’ils avaient gravi ces dernières années les plus rudes parois des Dolomites…
En ouvrant la voie directe de la vaste paroi ouest de la Cima Su Alto, dans le groupe de la Civetta, les marseillais Robert Gabriel et Georges Livanos ont couronné d’une façon superbe deux campagnes dolomitiques. Cette voie avait été auparavant vainement tentée. Nos camarades ont réussi du premier coup, au prix de deux bivouacs, en enfonçant 120 pitons. Sans doute ont-ils ouvert ainsi la voie la plus difficile des Dolomites, témoignage éclatant du niveau qu’a atteint l’escalade en France.
La Montagne, 1951.
Je comprends mieux pourquoi certaines voies te sont accessibles, si tu tires sur tous les clous qui se présentent dans les longueurs en libre.
Dont acte.
Par curiosité, en quelle année as-tu jauni la Bouffigue ?