Tu as bien cerné le côté provocateur de mon message. Je m’étais fait pourrir quand j’avais mentionné l’incertitude sur la cotation de Eagle 4 (la 9b de Julia Chanourdie) étant donné le peu de personnes qui l’avaient réussi (3 à ma connaissance) et les différences de styles et gabarits.
Alex, qui fait 1m73 et a des doigts en titane, trouve que Bibliographie est la voie la plus dure du monde. Il la côte 9c.
Stefano, qui fait à peu près le même gabarit (1m70) mais a un style beaucoup plus porté sur l’endurance, trouve qu’en fait ça va et donc c’est 9b+. Probablement que l’endurance d’Alex était son facteur limitant sur cette voie.
Qu’en penserait Ondra, qui fait 1m85 et dont le style est marqué par sa souplesse, sa technique, sa puissance et son endurance, mais qui est à la peine dans les réglettes et les monodoigts?
Peut-être que Laura va mettre des essais dedans, et on se rendra compte qu’un des mouvements est quasi impossible si on n’a pas l’allonge d’une personne d’1m65 au moins. Ou peut-être qu’elle va trouver ça encore plus facile que Stefano, car en fait pour elle les monodoigts c’est des bidoigts, et elle arrivera beaucoup mieux à les valoriser en positionnant son centre de gravité plus proche de la paroi.
Soit on décrète qu’une cotation est donnée uniquement par les personnes dont le gabarit correspond le mieux à la voie, soit on accepte que les cotations sont quelque-chose de très personnel et on arrête les news sensationnalistes de « untel est le premier à réussir telle côte ».
Autre exemple récent : Tristan Chouvy. Je l’ai croisé il y a quelques week-ends de cela au Cuvier, à la peine sur une 6C. Pour autant la semaine d’avant son père postait une vidéo de Tristan dans Duel 8A. Il n’était pas en forme le jour où je l’ai croisé? Non, c’est juste que Duel est côté 8A par des grimpeurs plus grands que Tristan. Pour lui c’est peut-être plutôt comparable à du 7B.
Tout ça pour dire que Laura qui passe Erebor n’est pas nécessairement la « plus grosse perf féminine en escalade ». Sans parler des problématiques d’anorexie supposée où je ne suis pas sûr qu’elle donne un bon exemple aux jeunes grimpeuses qui aspirent un jour à grimper dans le 9. La performance de Julia était tout aussi admirable, tout comme la performance d’Angy quelques années avant. Et ce malgré l’absence d’un « /+ » dans la désignation de leurs voies respectives. Et quand à l’incertitude sur les cotations, ce n’est pas une histoire d’hommes contre femmes mais purement de gabarit.