Mon témoignage d’habitant à la campagne et de cycliste roulant en zone de chasse.
Un groupe peut avoir un pouvoir d’influence largement supérieur aux différents aspects relatifs de la place qu’il occupe dans la société. Ça s’appelle un lobby. Et dans le milieu rural, la chasse est le lobby le plus puissant avec celui de l’agriculture. Pour tout ceux qui vivent en campagne, il n’y a là rien de nouveau…
Les chasseurs sont souvent des gens du cru, depuis plusieurs générations, qui ont fourni une bonne part des personnels politiques qui dirigent les communes, les cantons et qui sont bien représentés au niveau sénatorial. Leur tissu relationnel dans le village, leur connaissance et fréquentation du milieu politique, le fait qu’ils soit des relais importants sur lesquels il faut jouer pour se faire élire, les rend quasiment inattaquable sur le plan social, surtout que leurs « adversaires » n’appartiennent pas à un groupe homogène capable d’agir de manière soudée et systématique. Quand on subit un désagrément dominical avec des chasseurs, on passe outre sans chercher à rentrer en contact avec le randonneur qui a eu la même mésaventure, ou avec le Vttiste, etc… On a autre chose à faire de notre temps libre… Alors qu’eux, à l’inverse, leur temps libre et leur passion consistent à pratiquer et à défendre la chasse. Ajoutons à ça une conscience de classe fortement marquée, encore renforcée/radicalisée ces dernières années par le fait qu’ils se sentent menacés, voire en voie d’extinction (périurbanisation galopante et sa conséquence des néo-ruraux qui sont des urbains, mode de vie rural en recul dans la société, remplacement du sexe par la mort dans le registre de l’obscène, etc).
Il est logique (mais pas moralement normal, entendons-nous bien) que rien ne bouge sur les dangers que ces gens-là font peser sur les autres personnes qui partagent le même espace au même moment. De plus, le ratio entre la fréquentation des espaces ruraux et les morts par balle perdue (jamais perdue pour la victime…) est bien trop faible pour que ce soit un problème important au niveau national, dont les politiques se sentiraient obligés de se saisir. Enfin, et bien que je supporte pas du tout les chasseurs (comme déjà dit, je suis cycliste et on a quelques anecdotes sur des histoire de balle -presque- perdue), on peut aussi reconnaître qu’ils sont nécessaires à une gestion de la faune sauvage, que l’antériorité de leur pratique et leur nombre leur donnent le droit de se battre pour qu’ils puissent continuer à exercer leur « loisir », etc.
Bref, il n’ya pas de victime, la gendarmerie est en sous-effectif pour des missions bien plus urgentes, il n’y aura pas de suite judiciaire. Mais la plainte est absolument nécessaire, elle constitue une archive, un précédent qui pourrait être éventuellement utilisé en cas d’accident grave.