J’interviens sur ce poste en ayant parcouru vos réponses. Je dirais en plus qu’en escalade, il faut de la lucidité pour déterminer ce que j’appelle la peur objective de la peur subjective. Je m’explique.
La peur objective vient d’une situation où la chute porte à conséquence pour des raisons multiples: risque de chuter sur une vire, démarrage d’une voie, clippage du premier point, et parfois du deuxième, dalle rapeuse en étant loin du dernier point… Dans ces cas là, seuls le discernement et l’expérience ramèneront la quiétude et la confiance pour franchir ces pas.
La peur subjective est celle qui vous prend aux tripes, qui n’a souvent pas de lien avec le risque de se faire mal, et qui paralyse totalement la progression. Quand on est sujet à ces peurs incontrôlés, on devient esclave de celles-ci.
Une partie du jeu de l’escalade vient du discernement entre ces 2 formes de peur. Car la première découle d’une analyse clairvoyante d’une situation où l’engagement naît d’une volonté, alors que dans le deuxième on subit la peur. Bien sûr que nombre d’éléments sont là pour modifier la perception: la confiance dans l’assureur, le vent qui accentue la peur subjective, la topologie de la falaise, la forme…
En SAE, le milieu aseptisé peut donner aux débutants l’illusion de trop de sécurité. Mais les risques sont réels. Les points sont rapprochés et jusqu’au troisième point, si l’assureur est une brêle, la chute se termine souvent au sol: ce dernier matant les gonzesses ou s’étant reculé pour avoir les pieds au chaud (ceux qui connaissent Espace Vertical à Grenoble comprendront…).
Un assurage sec alors qu’on se trouve proche du dernier point fait qu’en cas de chute le retour est violent et peut donner la perception au grimpeur débutant que la chute est rude. Alors que plus le vol est haut, plus la réception est souple à condition de ne pas finir au sol. Là encore l’assureur doit assuré!
Pour vaincre ses peurs, il faut donc faire ce discernement entre la celle objective et celle dite sujective: connaître ses capacités, « avoir en tête » le scénario de sa chute à chaque moment, surveiller l’assureur si on ne le connaît pas ou peu. L’autre aspect primordiale qui peut sembler contradictoire est l’envie de réussir et donc de ne pas trop réfléchir à autre chose que sa progression. C’est seulement l’expérience et l’habitude qui font que ce discernement devient un automatisme, et qu’on peut alors s’affranchir de ses peurs.
Bonne grimpe
Gilles