Posté en tant qu’invité par Nicolas Ecarnot:
Bon, on avance.
D’après vos remarques et idées, je commence à rassembler les éléments de départ qui me semblent les opérations les plus simples, rapides et saines.
Je me dois de faire le pénible, et d’écarter les idées de facilité, du genre dépose sur une vire, appel de l’hélico, des autres grimpeurs, utilisation d’un des deux brins, utilisation de matos spécifique (genre spéléo), longueur de corde propice…
En effet, ce sont des cas particuliers qu’on ne peut pas généraliser, et donc qui risquent de ne pas être disponibles.
Je rappelle aussi que la corde est forcément à double. Je considère que l’utilisation d’une corde à simple est réservé aux couennes, donc une seule longueur, et donc que dans ce cas, on se contente de mouliner son pote au sol.
Si on peut trouver une solution la moins compliquée qui fonctionne dans tous les cas, c’est gagné.Le jour où le problème se produit et que vous disposez d’un élément facilitant, grand bien vous fasse.
** 1 ** Redresser son pote
Donc le rejoindre au plus vite, coûte que coûte (musculairement et émotionnellement), mais sans sacrifier sa propre sécurité.
Deux écoles : soit on veut récupérer son huit qui est actuellement en tension et qui assure le pendu, soit on l’abandonne au relais et on sait qu’on tapera les rappels sur demi-cab.
Personnellement, ça ne me dérange absolument pas de descendre en rappel sur demi-cab, surtout à double.
Pour ceux qui veulent récupérer leur huit, je propose :
(Quand je dis ‹ clef ›, c’est super-méga-double-triple clef de la muerte)
Je fais une clef sur mon huit(/tre/demi-cab/toucan/reverso/…) encore en tension.
Je prends mon ficelou, j’en fais un autobloquant au dessus de mon huit encore en tension et je l’attache sur mon pontet.
Je libère la clef du huit, et je laisse filer la corde jusqu’à me retrouver en tension sur le
ficelou. Je vire le huit.
J’attache le brin libre du dessous du ficelou au relais, au plus court.
Je m’élève de quelques centimètres afin de mettre la corde en tension.
Je vire le ficelou.
Pour ceux qui abandonnent le huit au relais, je propose :
Je fais une clef sur mon huit.
J’approche mon bassin du relais - toujours faisable, qu’on soit plus haut ou plus bas que le relais.
Je clippe le huit dans le relais.
Je me déclippe du huit. Bien sur, je suis longé d’autre part au relais !
La deuxième méthode doit prendre 10 secondes pour faire la clef, et 10 secondes pour clipper le huit au relais, grand max.
Maintenant, comment atteindre son pote ?
Vous aurez noté que j’adopte la technique consistant à vacher la corde au relais. Après vos remarques, ça me parait en effet plus simple et présente finalement des avantages, comme celui d’être certain de pouvoir revenir à ce relais en cas de balancier, ou simplement de voie désaxée comme on l’a évoqué plus haut.
De plus, le pendu faisant office de contre-poids, on dispose d’une corde tendue sur laquelle on peut remonter sans se préoccuper de la sécurité du pendu.
Vous aurez aussi noté que je ne cherche pas à jouer avec des demi-cordes, c’est-à-dire que je ne cherche pas à utiliser un seul brin pour faire ceci et l’autre brin pour faire cela. En effet, en encordement à double, on ne peut pas parier qu’on aura ce jour là le côté ‹ milieu › ou le côté ‹ extrémité › de la 100m en 9,5mm.
Pour ceux qui utilisent des rappels coupés, tant mieux pour vous, il doit y avoir moyen de réfléchir à optimiser. Dans le doute, je généralise et je simplifie.
Pour remonter :
-
soit c’est vraiment pas raide, et on peut faire comme Ivan préconise, à savoir remonter en via ferrata avec deux longes (votre longe + une longe en sangle), en passant les dégaines comme des déviations de spéléo, donc en les reclippant après son passage (ça permet le guidage du rappel qui suivra)
Mais si c’est si peu raide, le gars aurait sans doute pu être mouliné sur une vire ou au moins une pente, et donc ça améliore un peu la situation.
-
soit c’est vraiment vertical, et là, on doit utiliser un autobloquant. J’aurais tendance à encore essayer de gagner du temps en mettant un seul ficelou et en grimpant en tirant sur les clous, la corde, etc…et avec un machard bien ouvert pour qu’il coulisse bien.
C’est la méthode qui me parait appropriée à la majorité des situations, qui est assez rapide, et qui préserve la sécurité du sauveteur.
-
soit c’est déversant (pas de bol, votre pote s’est cogné dans la seule partie non déversante, mais vous avez un toit à franchir pour le rejoindre…) (et il va bientôt neiger :o). Là, vous devez sortir le matos de remontée sur corde :
Au pontet, un machard.
En face du nez, un machard (le mieux, c’est le machard autour du corps d’un mouskif, je ne connais pas le nom, c’est génial car ça remonte tout seul). (Voir Machard avec Mousqueton : http://olivier.humbert1.free.fr/Noeudautobloquants.html)
Et pendu sous ce machard, la pédale pour le pied, ou le tour mort autour du pied.
Inutile de vous préciser qu’on se longe toujours sur son autobloquant de pédale afin de doubler l’assurance.
Très safe, mais très lent.
On ne remonte pas comme un cinglé parce que :
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c’est long et ça fatigue, et qu’il vaut mieux arriver un poil plus tard que de ne jamais arriver
-
les mouvements de yoyo (vous êtes sur une corde dynamique) font frotter la corde. S’il y a une arête tranchante sur le trajet de la corde, c’est pas bon du tout.
En remontant, on reclippe les points sous soi.
On arrive au dernier point en haut.
Là, je ne vois pas trop de raison de rejoindre le pendu. Ca aurait certes l’avantage de le redresser plus vite, mais on ne serait pas plus avancé et ça entraîne des galères par la suite. Je considère donc qu’on doit le rejoindre vraiment si on a traîné sur la remontée précédente. Pour descendre sur corde tendue, voir le bas de cette page :
http://www.grimpavranches.com/decoincer%20quelqu’un%20sur%20un%20rappel.htm
Donc je continue dans mon optique : J’arrive au dernier point (béton) qui est donc constitué d’un point (une plaquette ou un goujon, c’est moderne), une dégaine passée dedans, et la corde à double dans le mouskif du bas de la dégaine.
Je rajoute un mouskif primaire dans le mouskif du haut de la dégaine. Je m’y vache.
Perso, j’ai une vache assez longue, ce qui est pratique, surtout pour la suite.
Si vous avez une vache très courte, mieux vaut se vacher avec une sangle longue.
Je vais mouffler le copain par effet de balancier, en installant un système de remontée sur corde (sauf dans le cas numéro deux évoqué plus haut avec passage de surplomb, auquel cas ce système est DEJA installé).
Donc idem : machard au bide, machard aux mains + pédale et feu !
En même temps qu’on pompe, on tire la corde du pote vers le haut, et par effet de balancier bien bourrin, on tracte son ami.
Plus intelligent : On ne se longe pas au point. On remonte un peu, on tire la corde du gars ce qui nous fait redescendre, puis on remonte un peu, puis…
On se retrouve donc avec le copain au même niveau que soi, on peut donc le redresser, le réconforter
Etape numéro un achevée !
** 2 ** Descendre son pote
Maintenant, je suis vaché sur la mouskif primaire qui est sur le haut de la dégaine.
Je sais comment envisager la suite, mais je suis encore hésitant sur la meilleure façon de faire, donc je vais rester volontairement évasif sur ce que je ne sais pas, on travaillera ensemble plus tard sur les détails.
Je longe mon pote à moi et je le décorde. J’ai viré mon matos de remontée.
Je me retrouve donc avec dans les mains soit le milieu de la corde de 100m, soit les deux brins d’extrémité de la corde de 100m, soit les deux brins d’extrémité d’un rappel coupé.
Si c’est le milieu, j’installe un rappel classique en clippant très simplement ce milieu sur le mouskif du bas de la dégaine.
Si c’est les extrémités, je les raboute (noeud de huit tressé, pécheur double, …) et je clippe cela dans le mouskif du bas de la dégaine.
L’idée est de descendre à double et de pouvoir rappeler sa corde.
Dans le premier cas (milieu de corde), c’est un rappel classique.
Dans le deuxième cas (extrémités raboutées), c’est semblable à une descente de canyoning quand on raboute deux cordes pour avoir la bonne longueur.
Ensuite on descend en rappel. Si on a gardé son huit, on l’utilise. Comme on veut rajouter du frein parce le copain est lourd, on descend en vertaco.
Si on n’a plus de huit, on descend sur demi-cab.
Dans les deux cas, on peut rajouter un frein sur le cuissard.
Dans les deux cas, on peut rajouter un machard. Ca sera bien utile de pouvoir lâcher les mains pour déclipper (ou non) les dégaines.
Concernant le cheminement, vu que la voie est en diagonale, il est nécessaire de laisser quelques dégaines pour se rapprocher à la descente le plus possible du relais d’en dessous.
Dans ce cas-là, il faut bien sur ne clipper qu’une seule corde. C’est évident dans le cas du noeud rabouté. Mais même dans le cas du milieu de corde, c’est trop risqué de s’exposer à un clippage intempestif du milieu sur une dégaine intermédiaire lorsqu’on rappellera la corde.
A noter : dans le cas du raboutage, évidemment, on aura pris soin de mémoriser quelle corde tirer.
A noter : si on se trouve dans une 27ème longueur, on aura besoin de beaucoup de mousquetons de déviation. On peut alors découpler les mousquetons des dégaines.
Ensuite on arrive au relais, on s’y vache, on vire le noeud de la corde, on la rappelle et on continue la série de rappels jusqu’en bas.
A noter qu’à ce moment-là, on a peut-être un peu plus d’aisance et on peut utiliser une descente plus académique telle que celle-ci :
http://www.grimpavranches.com/Descendre%20un%20blesse.htm
A n’utiliser que lorsque les risques de frottements sont nuls. En effet, cette technique n’est pas très douce pour la corde. Sinon, classique : copain vaché sur son pontet et descente sur huit avec toute la batterie de freins qu’on connaît.
Etape numéro deux achevée !
Des remarques…
Descendre en rappel sur demi-cab, ça file déjà pas mal. Mais avec un loustic supplémentaire pendu au baudard, ça doit filer encore plus vite. Le frein qu’on fera au cuissard peut être :
- un simple passage : peu de frein supplémentaire
- un tour mort : déjà mieux
- carrément un demi-cab : gros freinage
Il faut détailler les séquences de décrochages, parce que sur le papier, ça parait hyper simple d’écrire « je détache mon pote et je l’accroche à mon pontet ». Avec un gugusse de 80kg qui saigne, avec 250m de gaz dans le dos et les vautours qui tournent impatiemment, ça doit être moins facile.
En plus, il va bientôt neiger.
Dans le cas de la descente en rappel sur noeud rabouté, il faut comprendre qu’on commencera par « faire tourner la corde en boucle » en ne tirant qu’un brin, jusqu’à faire venir à soi le noeud de raboutage, pour le défaire, afin de pouvoir rappeler la corde.
Vous aurez noté que je ne vous aurez pas infligé les sempiternelles recommandations du style « ne faites pas ça chez vous », « entraînez-vous avant », « dites bonjour à la dame ». C’est cool, non ?
A noter / A solutionner : Le tout premier rappel se fait sur un point. Même s’ils sont censé être béton, c’est quand même assez moyen. D’autant plus que si on trouve une méthode pour palier à ça, on se permet de généraliser au T.A.
Selon ma liste de matos cité au début, je peux toujours tenter de renforcer le point du haut avec mes coin-coin ou un friend, mais ça me parait plus psychologique que réaliste.
A noter : Je suis en train de me dire (oui parce que je n’ai pas tapé tout ça en deux minutes) que lors du premier rappel, si la déviation entre le relais du bas et le point du haut n’est pas trop importante, et que la paroi ne comporte pas trop de protubérances, on peut envisager de virer toutes les dégaines à la montée.
A la descente, on sera guidé par la corde qui sera restée fixée au relais du bas.
Au pire, on devra se tirer jusqu’au relais. Normalement pas de problème pour lâcher les mains, puisqu’on a mis un autobloquant pour taper le rappel, n’est-ce pas ?
A noter : Sur le point du haut, j’ai mis un mousqueton primaire par réflexe.
Après réflexion, il est plus décoratif qu’autre chose. Peut-être qu’il me servira lors d’un balancier ou équivalent quand vous m’aurez proposé une solution détaillée lors du vachage du copain sur mon pontet.
A vous.
Nicolas Ecarnot