Retour au sol de 20 m. Témoignage

Bonjour à tous.

le 6 aout dernier j’ai eu un accident sur le secteur des drailles blanches à Bessans en haute maurienne.
Avec mon amie nous comptions passer quelques jours pour faire de la grimpe, du vélo, et un peu d’alpi en logeant à lanslevillard. La veille de l’accident nous avons fait le col du Montcenis en, vélo. Le matin du 6 nous faisons l’approche à vélo pour aller au site de grimpe. Mon amie est rincée avant de commencer à grimper. Après coup, je pense que ça a bien joué dans l’accident.
Sur le site un guide fait grimper deux jeunes vacanciers. Mon amie commence à faire une voie assez facile. C’est à mon tour d’y aller. Je me fais un 5c qui se termine par une dalle couchée. Arrivé au relais je me vache, crie vaché et demande du mou. La configuration de la fin de voie fait qu’on ne se voit plus quand je me trouve au relais. Le mou arrive je fais rapidement la manip. Puis je demande qu’elle me prend et annonce que je me dévache. Je descends jusqu’à la première dégaine, je l’enlève. Là je sens un peu de mou mais rien de bien méchant. Je m’assois dans le baudard et je commence à filer jusqu’au sol. Au bout d’une seconde je comprends que je ne vais pas être repris, j’hurle et me repousse du mur avec des mouvements de pieds comme si je courrais sur le mur. Je m’écrase au sol et hurle de douleur. J’ai cru que c’était fini un bref instant, là j’ai vraiment mal et suis en position cocon. Je suis complètement bloqué du torse au genoux. Je pense être paralysé, mon corps est lourd et ma cheville me tire. J’arrive à bouger la cheville et demande à mon amie de m’enlever le chausson. J’arrache l’herbe devant moi et n’arrête pas d’ hurler. Les pompiers et policier arriveront au bout de 10 minutes puis 20 minutes pour l’hélico et le médecin. Placé dans le matelas coquille, ils m’emmènent et m’installent ensuite dans leur camion qui a pu s’approcher à 30m de la falaise.
1 bonne dose de morphine :slight_smile: et une 20 aines de minutes plus tard je me retrouve aux urgences de l’hôpital de Saint jean de Maurienne.

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Bilan: arrachement osseux des trois insertions ligamentaires, fracture du calcanéum, fracture du coccyx, et des cotyles (hanches) avec bel hématome. EN gros je m’en sors très bien.


interprétation de l’accident
: Une mauvaise communication. mon amie n’a pas entendu le mot vaché, elle ne me voyait plus. Au relais je demande du mou, elle pense que j’avance dans la voie. Et quand je dis que je me dévache elle comprend que je me vache. là elle lache l’assureur pour boire un coup. Moi je descends jusqu’à la première dégaine en me croyant assuré (hors c’est avec le gros tirage de la corde (à double)).
Les erreurs sont partagées…Mais le cumul fait beaucoup dégâts.

Salut,

Merci pour ton partage d’expérience et j’espère que tu t’en remettras physiquement et psychologiquement.

J’aimerais apporter ma contribution au témoignage en répétant un conseil donné par un BE il y a 10 ans et que j’applique sans aucune exception : en couenne, même quand le grimpeur est vaché, l’assureur ne doit jamais enlever son système d’assurage avant le retour au sol. Si ça peut te servir ainsi que ceux qui nous liront …

C’est à mon avis la seule faute commise. Tout le reste (mauvaise communication, on ne se voit pas, on est fatigué par l’approche ou les soucis du boulot ou la teuf de la veille, etc …) sont des choses tout à fait normales et inhérentes à l’activité.

+1
Ce n’est pas un conseil: c’est la règle. Non seulement on enleve pas son systeme d’assurage, mais on garde la main sur la corde sous le systeme d’assurage. On peut par contre boire d’une seule main.

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Posté en tant qu’invité par matmut:

[quote=« mathieu lulu, id: 1187204, post:3, topic:111339 »]

+1
Ce n’est pas un conseil: c’est la règle. Non seulement on enleve pas son systeme d’assurage, mais on garde la main sur la corde sous le systeme d’assurage. On peut par contre boire d’une seule main.[/quote]

+1, c’est une base, trop d’accident sur des poses de moulinettes qui auraient pu être évités en ne cassant jamais la chaine d’assurage .

Et merci pour le témoignage, c’est en partageant qu’on peut faire évoluer les choses. J’espère que tu t’es bien retappé.

Salut Laurent, et merci pour ce retour d’expérience.
Tu pourrais créer une sortie et l’associer à cet article sur les accidents et incidents en montagne : /articles/201881/fr/base-de-donnees-recits-d-incidents-et-accidents

Dans le doute, je bloqie la corde par un retour de boucle dans mon descendeur. Pas très dynamique comme assurage, mais bon

Et sinon, petite question, ca n’as pas du être évident à gérer pour elle non plus… ?

Posté en tant qu’invité par aaa:

Bonjour,
Je te souhaite un bon rétablissement et j’espère que maintenant tu vas mieux.
En effet je rejoint les remarques précédentes. Il m’est arrivé un cas « similaire » dans le sens ou je me suis jeté en arrière après avoir fait ma manip et mon assureur n’avait pas entendu que j’avais fini ma manip (a peu près la meme config où on ne se voyait pas, s’entendait pas très bien avec beaucoup de tirage et il se mettait à pleuvoir) j’ai commencé a filer et a crier mais mon assureur avait gardé son système d’assurage et il a pu freiner (il y avait pas mal de tirage).
Je lui en serait éternellement reconnaissant. Surtout que je n’appliquais pas toujours cette technique moi meme à l’époque. Inutile de dire que depuis cet incident je garde mon système d’assurage sur moi et une main sur la corde (ou un noeud après le grigri si j’ai besoin de mes mains).

l’autre solution est d’utiliser l’auto moulinette en installant son propre appareil sur le coté opposé à celui auquel on est attaché

reste sinon les codes traditionnels pour communiquer en grande voie quand on ne se voit ni ne s’entend, ici tirer sur un mètre une corde, puis sur l’autre. Ce tirage différencié est un code pour dire « je me vache », correspondant au mouvement de fixation d’un brin, puis l’autre

Bonjour a tous,
comme quoi un accident est si vite arrivé!
on m’a toujours appris et c’est ce que je dis aussi aux gens, c’est de vérifier d’être pris sec avant de se dévacher.
Dans un cas comme ca, tu aurais pas enlevé ta vache tout de suite. Enfin, c’est facile d’oublier un petit instant la sécurité surtout avec la fatigue

Ça n’a pas été évident pour elle. Heureusement le guide a appelé les secours et essayé de la rassurer. En fait le tirage était tellement important que je pensais être pris et assuré. Comme quoi croire n’est pas suffisant!
Sinon je me remet petit à petit de l’accident. C’est la cheville qui a le plus pris. j’avais repris le vélo pour la rééducation mais me suis luxé le coude il y a un mois! Rebelotte le platre!

Vu sur un autre site : Chute de 10 m a cause d’un malentendu similaire. Le grimpeur, hors de vue de l’assureur, est en difficulté et dit quelque chose comme « fait gaffe ». L’assureur a cru que le leader était vaché au relais. Il enlève carrément son système d’assurage pour aller boire un coup. vous devinez la suite.

laurentbg, de ce que je comprend de ton récit; ta copie avait gardé son système d’assurage en place au baudrier ? Ou bien l’avait-elle enlevé ?

Donc, pour les débutant qui liraient ce post : pendant la manip au relais de son leader, on donne du mou , mais on n’enlève jamais le système d’assurage .Et mieux : on garde une main dessus jusqu’à la descente du leader.

Posté en tant qu’invité par Jacques:

tout d’abord, je suis très heureux de savoir que cette chute impressionnante n’ait pas eu de conséquences plus graves encore.

Pour ce qui est des manip et habitudes en grimpe, j’ai été habitué dès mes débuts, bien lointains maintenant, à tout faire au plus simple.
La simplicité a cet avantage de créer plus facilement des comportements-réflexes qu’on reproduit machinalement même dans des conditions difficiles.

Une des habitudes ainsi prises est l’économie de paroles. Si elle a toute sa raison d’être en montagne, elle peut aussi s’appliquer en falaise.
Au départ d’une voie, je conviens de codes avec mon coéquipier. En grande voie, avec une corde à double, je tire quelques mètres d’un des brins convenu à l’avance, le second sait que je suis vaché au relais. Ensuite , quand la corde se tend, c’est le signe de départ pour le second. Le tout sans un mot. En falaise, la distance étant relativement courte, s’il y a visibilité directe un signe de la main avec contact visuel suffit pour donner l’ordre de me descendre. Si on ne se voit pas, je crie « bon » ou « ok ». De toute façon, l’assureur doit rester concentré tout le temps que son coéquipier grimpe.

Cette économie de paroles me semble avantageuse aussi pour les cordées voisines, dans certains cas, il y a tellement d’ordres et informations criées au sein des cordées qu’on ne sait plus à qui elles s’adressent, et peuvent ainsi être source de danger.
De plus, au moins la moité de toutes ces informations ne servent à rien: du style « bout de corde », quand il est à bout de corde, le premier va déjà s’en rendre compte tout seul il me semble…

[quote=« aaa, id: 1187216, post:8, topic:111339 »]Bonjour,
Je te souhaite un bon rétablissement et j’espère que maintenant tu vas mieux.
En effet je rejoint les remarques précédentes. Il m’est arrivé un cas « similaire » dans le sens ou je me suis jeté en arrière après avoir fait ma manip et mon assureur n’avait pas entendu que j’avais fini ma manip (a peu près la meme config où on ne se voyait pas, s’entendait pas très bien avec beaucoup de tirage et il se mettait à pleuvoir) j’ai commencé a filer et a crier mais mon assureur avait gardé son système d’assurage et il a pu freiner (il y avait pas mal de tirage).
Je lui en serait éternellement reconnaissant. Surtout que je n’appliquais pas toujours cette technique moi meme à l’époque. Inutile de dire que depuis cet incident je garde mon système d’assurage sur moi et une main sur la corde (ou un noeud après le grigri si j’ai besoin de mes mains).[/quote]

J’ai eu le même incident il y a quelques années, toujours à cause d’un pb de communication: du vent et une dalle couchée au sommet qui empêchait mon assureur de me voir. Heureusement, il tenait toujours la corde sous son huit…
Depuis, je ne la lâche jamais non plus et engueule les gens quand ils ne le font pas (pour ceux que je connais, sinon, je leur dit poliment). Par ailleurs, pour éviter les problèmes de communication, j’emporte toujours un talkie-walkie en grande voie où il est fréquent de ne pas ce voir, ce qui m’a également déjà évité quelques soucis…

laurentbg, de ce que je comprend de ton récit; ta copie avait gardé son système d’assurage en place au baudrier ? Ou bien l’avait-elle enlevé ?

Ma copine avait conservé son système d’assurage (un reverso2) au baudard.

Posté en tant qu’invité par Raskar:

Bonjour, ce message me rappel une frayeur !
Avec mon compagnon de cordée habituel, après 6 mois de grimpe ensembles tous les week-end, l’autre jour arrivé au relais en couenne je me vache et crie « vaché », et au lieu de me dire « ok » comme d’habitude il me dit « libre ». Sur l’instant, je prends le mou pour faire la manip, puis « tilt » : comment ça « libre », on est pas en grande voie là, et j’ai dis « vaché », pas « relais » ??? Je jette un oeil en bas et vois qu’il a retiré son système d’assurage et est parti boire un coup. Je regarde ma vache commence à psychotter (questions du style : la sangle en dyneema s’est peut-être pas top, en plus avec une tête d’allouette qui réduit sa résisitance…, et si elle pète, youhou 25m et retour au sol !). Je me magne de faire la manip en lui gueulant de me reprendre, que c’est n’importe quoi… Il me reprend, me redescend. Il ne comprend pas alors je lui dis de visualiser un peu : et si ma vache pète, et si je crois être pris et vais pour me laisser pendre dans mon baudard après m’être dévaché. Sur quoi il me répond : ah ouhai, pas con, j’y avais pas pensé, tout le monde faisait ça où j’ai appris à grimper (j’ai préférer ne pas savoir où c’était…) et j’ai toujours fais ça. Et là je repense à tous ces week-end où il m’assurai… Gloup… En fait, même quand il disait pas « libre » mais « ok » il retirai le système d’assurage… Maintenant ça va nickel, on est super potes et grimpons toujours ensembles tous les week-end. Suffit d’apprendre les bonnes manip du premier coup et de toujours réfléchir à est-ce vraiment sécu ??? Pendant 6 mois j’ai eu une bonne étoile et c’est resté au stade de frayeur. Bon rétablissement à toi ! A tous les autres, vérifiez bien vos manips et aussi celles de votre assureur, même si vous vous connaissez bien et grimpez ensemble depuis longtemps, vous n’êtes pas à l’abri de surprises !

Bof, faut pas s’inventer des dangers, non plus: suspendu en statique sur une sangle Dyneema, tu ne risque rien, tant qu’elle n’est pas abimée!
On fait ça souvent, par exemple en grande voie à trois pour changer de leader.

Bon courage à vous 2 et bon rétablissement! Il n’y a que ceux qui ne font rien qui ne font jamais d’erreurs. Et souvent, c’est un enchaînement de petites coïncidences qui font qu’il y a l’accident.

Théoriquement quand le grimpeur est au relais, on peut lâcher l’assurage mais dans la pratique, je pense comme beaucoup ont dit, que sur des voies de une longueur, on assure jusqu’à ce que le grimpeur soit redescendu, mais je dis ça aujourd’hui, après avoir vu trop d’accidents. A mes débuts, je pensais pouvoir lâcher quand le grimpeur était au relais et j’ai dû le faire comme beaucoup d’autres.

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bon retablissement