« Georges : Tu veux que j’te raconte un souvenir?
Dino : Un souvenir? Oh oui.
Georges : Oh laisse tomber, tu t’fous de ma gueule?
Dino : Oh non j’me fou pas de votre gueule, jamais de la vie.
Georges : Et ben j’vais te raconter l’histoire de ce malade qui s’est pointé un soir dans ma chambre d’hôtel, un putain d’énergumène. »
C’était il y a quelques années quand je commençais à grimper. Je grimpais rarement en tête et je ne connaissais que la couenne. Motivé avec des potes on est parti dans les calanques en voilier histoire de taquiner de la grande voie. On fait quelques petites voies histoire de se mettre dans l’ambiance, tout va très bien…
Vient le jour J… On se lève tôt (soleil oblige), tout le monde prépare le matos, un coup de zodiac, un peu de marche et hop on est au pied de la voie. Tout le monde est motivé, on commence à s’encorder à trois, je passe en second…
C’est là que le psychologique entre en jeu: le dernier à grimper, donc juste en dessous de moi refuse de mettre son casque car il a trop chaud… On a beau lui faire la morale rien n’y fait, il accroche son casque à son baudrier. Il faut savoir que déjà à cause de cette personne on a du se faire des vaches avec de la corde dynamique car il nous avait déjà fait plusieurs fois le coup de monter, vacher, au dessus du dernier point…
Bon, malgré cela on grimpe et arrivé au deux tiers de la première longueur mes mains se mettent à transpirer de façon horrible, le soleil me tape dans le dos violemment. Avec le soleil les prises suintent aussi… c’est la totale! Je m’arrête et commence à stresser, à tétaniser… Rien ne va plus, gros stress… Mon pote en-dessous (donc sans casque) commence à me mettre la pression pour que je continue, rien à faire… Ce « cul » décide d’enlever une chaussure car son pied y est trop serré et ce qui devait arriver arriva… Une de ses chaussures tombe au pied de la paroi… La cerise sur le gâteau!
Je ne peux plus avancer, mon cerveau refuse et mes membres sont tétanisés… Le premier de cordée me rassure et me dit qu’il va me moufler, qu’il a besoin d’un peu de temps (une première répétition qui lui sera bien utile pour la suite!)… Je m’accroche, fait le vide en moi pour tenir vaille que vaille! Le mouflage en place je remonte doucement mais surement rejoindre le relais, je me vache… ouf c’est fini… Un rappel pour retrouver le plancher des vaches et aussi la chaussure de l’autre « cul »! Je me remets difficilement de mes émotions et me sens très déçu de ma réaction, bref, j’y retournerai un de ces jours
Quelques jours plus tard dans les calanques, une nouvelle grande voie est prévue mais je ne me sens pas d’y aller, trop d’images négatives me hantent… Finalement c’est le frère du premier de cordée qui prendra ma place et le « cul » parti, il sera remplacé par un pote… Levé 6 heures du mat, préparatifs, le zodiac est chargé et ils partent.
La suite me sera raconté par les protagonistes: Il font les deux ou trois premières longueurs sans soucis mais survient le drame! Le frère de mon pote avait fait beaucoup de natation et les méthodes de son entraineur russe lui avait couté ses épaules… Il avait tendance à se déboîter facilement l’épaule ce qui arriva au milieu de la longueur. Heureusement celui-ci se l’était déjà demis plusieurs fois et avait l’habitude de ce type de douleur, et deuxième point important, mon pote qui était au relais avait pu s’exercer sur le mouflage auparavant! Mouflage, rappels, arrivée au zodiac… Cela prend du temps et la douleur s’intensifie… Le zodiac s’est coincé sous de la roche et le moteur a reçu des pains de toutes part (la roche est ultra abrasive au pied de la paroi)… heureusement il marche encore malgré les lacérations en tout genre… Ils ramènent très vite le blessé sur la plage.
Les secouristes se trouvent embêtés car ils ne peuvent rien faire pour lui et doivent l’évacuer sur Marseille pour qu’on s’occupe de lui… Trois heures après l’incident il arrive aux urgences sans être tombé une seule fois dans les pommes, véritable exploit d’après les médecins!
Du coup, je n’étais plus trop motivé à l’idée de faire de la grande voie et ce n’est que depuis récemment que je m’y suis mis… Je grimpe désormais en tête, je finis les voies et j’y prend un grand plaisir!
« Georges : Et voilà c’était mon souvenir, En tout cas, s’il cherchait pour du trouble, il est venu à la bonne place. »
Dialogues extrait du film « la classe américaine »!