Posté en tant qu’invité par Christine SAUTENET:
Bonjour Jérôme,
Au sujet de ton enquête sur « L’excellence sportive en tant que vecteur de communication en escalade ».
D’abord mon contexte personnel.
Je suis une femme, ingénieur, j’ai 30 ans, je grimpe depuis 13 ans, actuellement dans le 6b/c. J’encadre depuis 10 ans au sein du CAF. Après Vesoul, Dijon, Nancy, Chambéry, Grenoble, Montpellier, j’habite à présent à Chambéry. Ma pratique favorite, c’est les grandes voies et surtout le terrain d’aventure.
Ensuite, les réponses à tes questions.
Définition du haut-niveau. Pour moi, le haut niveau en escalade, c’est un niveau (dans le 8), une forme de pratique (passer des journées entières à essayer la même voie ou faire de la compét), une hygiène de vie (manger light, ne pas faire la fête, ne pas trop marcher, ca donne des grosses cuisses…) et beaucoup de temps (les activités professionnelles ou les autres activités physiques sont anecdotiques).
Bref, une vision de l’escalade qui ne correspond pas du tout à ma pratique.
Haut-niveau, compét, pub et matériel. Le haut-niveau est sans doute dissociable de tout cela : il y a de très forts grimpeurs (à Chambéry et ailleurs), qui sont totalement inconnus du grand public et qui ne pratiquent pas ou peu la compétition.
C’est par contre un moyen pour certains grimpeurs de s’assurer un plus grand confort matériel dans la pratique de leur activité.
L’escalade et le haut-niveau. Je pense que l’influence existe. La compét a servi de support médiatique à l’activité, elle a permis de quantifier l’escalade. L’escalade devenant sport “ officiel ” à travers la compét, les clubs ont pu négocier la création de SAE avec les collectivités. Grâce aux SAE, l’escalade est devenue accessible à un plus grand nombre. A à travers les écoles et une initiation plus facile en club, l’escalade est devenue sport de masse. Conséquence : la pratique est de plus en plus gymnique (le caractère “ découverte et aventure ” est mis de côté) et de plus en sécurisée (le risque n’a pas le droit d’exister en sport de masse).
Les magazines et le haut-niveau. Le haut niveau, c’est comme la pub, dans les magazines, je zappe. Pour moi, y’en a toujours trop : ça ne m’intéresse pas. Vertical était spécialisé dans le “ dur ”, il y a quelques années. Photos glacées, voies “ extrêmes ” sensées faire rêver le lecteur. A force de ne lire que des choses inaccessibles écrites par un groupe de grimpeurs nombrilistes, j’ai renoncé à acheter ce magazine. D’autres, comme Alpinismes et randonnées ou Montagnes… y consacrent une demi-page de temps en temps. Ca suffit largement.
Remarques. Je me demande quel peut être l’intérêt du quidam grimpeur pour le haut-niveau, et la portée du message commercial qu’une activité ou un grimpeur de haut-niveau peut porter. Quasi nul pour moi en tout cas.
Je ressens les pages consacrées aux grimpeurs de haut-niveau comme de la presse people. Que Machin aie répété une voie en 8b+ ou gagné ou une compét me laisse totalement indifférente, sauf s’il s’agit d’une personne que je connais personnellement. Savoir que le meilleur espoir français mange de la crème de marron avant la compét, qu’il aime écouter les Doors et qu’il pratique la sophrologie sont des informations aussi intéressantes que s’il s’agissait de Stéphanie de Monaco.
Quand au choix du matériel, ce n’est pas parce que le champion du monde grimpe avec une corde Bidule que j’achèterai une corde de cette marque. Parce que nos pratiques ne sont pas les mêmes, notre matériel sera forcément différent. Et parce qu’une pub n’a jamais reflété la qualité réelle d’un produit.
Je suis très sensible à ma propre expérience, à l’avis de copains ou de connaissances plus expérimentés que moi ou à des tests comparatifs. Lors d’un achat j’écarte toute marque dont le matériel m’a joué de vilains tours, je privilégie les magasins avec un vrai service après-vente et les marques dont j’ai déjà constaté la qualité, quitte à remplacer à l’identique. Sur un produit nouveau, je rechercherai une information réellement vécue, en direct.
Je pense que cette situation ne m’est pas propre : en club, les encadrants ont une influence réelle sur le matériel acheté par des débutants. Les marques, le type de matériel, les magasins à fréquenter… sont directement conseillés par celui qui apporte la connaissance de l’activité. Au matériel d’un débutant, on peut parfois reconnaître le cadre bénévole ; et au matériel du cadre, le formateur !
Pourras-tu diffuser la méthodologie et les conclusions de ton travail sur le site ?
Merci