Posté en tant qu’invité par Bubu:
Ce que j’aimerai savoir, c’est comment quelqu’un qui se disait
peu expérimenté en décembre arrive à prévoir les ruptures
potentielles de plaques et leurs conséquences dans une pente
comme le trou de la mouche ? Comment savoir si la plaque va se
détacher au dessus, voir à distance et quelle taille ? Etait il
sûr qu’il n’y avait personnes au dessous?
Peu expérimenté en général, mais connaissant bien cet itinéraire par toute conditions, et surtout le connaissant avant la chute de neige (donc il sait ce qu’il y a dessous).
Quand on retourne toute les semaine dans le même massif, on acquière une connaissance de l’état de la neige bien meilleure que celle qui est rendue dans les bulletins nivos (les nivologues ont cette connaisance, mais un BRA est un résumé, sinon il faudrait des dizaines de pages !).
Quand je sortais souvent en Lauzière, il m’est arrivé de surveiller la chute en cours depuis la vallée, puis de prévoir que le lendemain je trouverai 15cm sur croute ici, 25cm sur carton là, 35cm sur ancienne poudre plus haut, avec des plaques naturelle ici et là de telle taille avec telle épaisseur à la cassure, que je ferais partir de petite plaque dans ce talus et à l’entrée de ce goulet… le lendemain c’est exactement ce qu’il y avait. Ce n’est pas de la magie, c’est juste de l’observation par rapport à une chute similaire les années précédentes et lors des sorties récentes.
Du coup, en regardant une chute on s’attend à un risque 4, mais on sait assez précisément ce qu’il veut dire: telle pente et tel couloir vont purger, telle pente est dangereuse, par contre en passant ici et là on est à l’abri, etc (en prenant de la marge et en corrigeant son appréciation une fois sur place évidemment ! statistiquement, ça marche, mais il faut rester vigilant pour détecter les cas où on sort de la moyenne).
Il faut bien comprendre qu’un risque 4 ou 3 n’est pas absolue: on ne passe pas de 3 à 4 par un saut ! Il y a un continuum. Lorsqu’on connait un itinéraire par risque 3, on peut imaginer ce que ça donne avec un peu plus de neige et de risque… Si on a l’occasion de pouvoir vérifier son idée, on peut corriger son « modèle ». En faisant plusieurs étapes de ce genre, on arrive à imaginer ce que ça donne par risque 4. Et la plupart du temps, les incertitudes ou même la réalité conduit à ne pas aller à tel endroit. Mais certains itinéraires ou une meilleure précisions sur les conditions permettent de sortir quand même, en sachant bien que le risque est plus grand que sur un itinéraire plus sûr: la marge d’erreur sur l’évaluation des conditions est plus faible, on y va en connaissance de cause.
C’est sûr qu’en débarquant dans un massif ou un vallon que l’on ne connait pas, c’est facile de se faire avoir, et il faut prendre plus de marge… ce qui peut amener à ne pas sortir en rando dans ce massif ou ce vallon.