Avalanches : dans quelles mesures peut-on prévoir les risques?

Posté en tant qu’invité par Kheira:

Précision : je ne parle pas du critère « facteur humain » de Munter qui a bien sa place dans le choix d’un itinéraire mais de tout ce qui a trait aux émotions, motivations, passions.

Hier vers Ornon, observant les faces alentour, je me suis rapidement dit que ce n’était pas le jour à faire du raide. De nombreuses coulées spontanées avaient eu lieu, et des plaques de la dernière chute évidemment partaient hyper facilement dès 35/40°.
J’ai beaucoup de mal avec cet accident d’hier. Il m’apparaît évident que les risques étaient trop forts, juste après cette chute de neige ventée. Et en même temps, je -nous- n’avons pas à juger -condamner…- trop vite.
J’ai pour ma part à quelques reprises aussi été confronté à des expositions trop importantes, qui sont en général le résultat d’une trop grande motivation au regard des conditions. C’est le noeud du problème.
Mes condoléances sincères à la famille si elle vient à lire ce post…
Je citerai pour terminer René Char:
“ Il n’y a que deux conduites avec la vie : ou on la rêve, ou on l’accomplit. ”
(C’est la limite du rêve et de la réalité qu’il convient d’établir ou rétablir avec objectivité lorsqu’on va en montagne.)

  1. Je suppose que tu utilises ici le terme « risque » comme « probabilité de déclenchement ».

Et que tu mets donc le curseur à un niveau raisonnable - qui ne sera pas toujours « zéro ».

Mettras-tu le curseur au même niveau si tu est accompagné de deux ou trois coéquipiers que tu connais bien, solides dans leur tête et dans leurs jambes, ou si tu « conduis » un groupe de touristes que tu ne connais pas?

Mettras-tu le curseur au même niveau si tu peux considérer qu’un renoncement en cours de sortie n’a pas grande conséquence, ou si au contraire, ce serait une catastrophe pour certains? Cas de la dernière étape d’une sortie sur plusieurs jours, se terminant le dernier jour des congés?

Et si tu prends les deux cas combinés? Les touristes qui doivent « absolument » arriver à destination pour cause de contraintes sociales/professionnelles versus la petite équipe de copains « solides » qui peuvent facilement décider de faire demi tour si, sur place, ça sent le rouissi.

  1. Supposons que tu considères le risque globalement comme probabilité*dommages.
  • Les dommages contiennent eux mêmes une probalité de s’en sortir ou pas. Tu ne crois pas que les chances de s’en sortir dépendent au moins en partie du savoir faire de tes compagnons?

  • Les dommages ne sont-ils pas plus importants si 5 chefs de familles sont concernés que si le groupe comporte seulement deux célibataires?


J’arrête là … les FH interviennent dans toutes les décisions, y compris au moment de la préparation.
Même si on refuse de l’admettre, inconsciemment on en tiendra compte - il faut l’espérer.

PS : J’avoue que personnellement l’expression « facteurs humains » me hérisse souvent le poil, en particulier quand on tend à se focaliser sur ces facteurs au détriment de considérations plus carrées.

Mais il vaut mieux quand même admetttre que les facteurs humains peuvent contenir bien des pièges, et qu’il vaut mieux apprendre à les reconnaître et à les gérer, du début à la fin.

humidité!

Posté en tant qu’invité par davidof:

Plutot dans le 45-50 ° pour ce couloir (coté 5.2 ou 5.3 je crois - très raide et exposé, quoi). Peut-être qu’il espérait que les pentes avaient déjà purgé? Le monsieur avait déjà skié le couloir l’année dernière, peut-être la familiarité a joué un rôle? Il s’agit d’un peige de l’inconscience.

Également un couloir serait probablement plus sûr qu’un grand pente ouvert, mais il était dans l’entonnoir de sortie quand il a déclenché la plaque (comme disait bubu, sans doute formé par la neige fraiche et le vent de NW). En tout cas bien maudit cet vallée de Gleyzin par temps de « fort » risque.

Condoléances à sa femme et sa famille.

Posté en tant qu’invité par tiery:

Je prépare moi aussi les sorties comme J2LH, c’est-à-dire que le facteur humain ne doit pas intervenir dans ma décision de prendre un itinéraire plutôt qu’un autre en ce qui concerne le déclenchement d’une plaque. Je pars du principe que l’on ne doit en aucun cas déclencher une plaque. Pas d’avalanche est ma règle. D’ailleurs les professionels qui dressent un BERA tous les soirs, ne prennent jamais en compte un niveau ou une expérience des pratiquants, ils Estiment un Risque d’Avalanche. je continue de mon coté l’estimation du risque sur le terrain toujours sur le même principe. Une pente dans le bulletin N-O à risque, l’est pour tout le monde. Après chacun sa pratique de la montagne et je comprends que des gens expérimentés, je veux dire qui connaissent le risque qu’ils prennent, n’hésitent pas à s’engager dans des pentes douteuses, l’engagement est une composante essentielle à la montagne, à chacun le sien.

Moi, ce qui m’épate en général, c’est qu’il n’y ait pas plus de trente morts par an (en moyenne, sur plusieurs années et malgré l’explosion de l’activité). Car une demi-journée, une journée après chaque chute de neige, c’est déjà tracé de partout et dans tous les coins, que ce soit HP ou itinéraires de rando. Alors là, ça me sidère !
Comme dit l’autre, dans 99% (reste 1%…) des cas il devrait se passer quelque chose et il ne se passe rien… C’est a vous dégouter d’apprendre et d’appliquer des méthodes de réduction et autres productions des gourous de l’avalanchologie.

[quote=« Francois, id: 1468668, post:47, topic:129680 »][/quote]
Je fais le même constat.

Posté en tant qu’invité par the devil:

+1 pour françois, c’est exactement la vérité ; dès que ça tombe, la meute part dans ts les coins, et au final, il n’y a que très peu de décès…

c’est comme le loto : statistiquement le nombre de gagnants à chaque tirage est au dessus des probabilités…pourquoi ? personne ne le sait…la montagne, c’est pareil, pourquoi depuis le début de saison, beaucoup prennent des risques et très peu se font piéger…??? moi, j’ai halluciné des couloirs descendus depuis le début de l’hiver, même du 4.1 en nord, je m’y serai risqué pas avant ce we, mais pas avec du 50 cm stocké en une nuit avec un vent fort…donc il fallait repousser l’échéance…mais d’autre pentes ont été descendues…et dans les même conditions

avec tous les calculs qu’on peut faire…la nivologie ne sera jamais une science, mais une théorie revendiquée par des cerveaux humains, qui veulent appliquer une logique à la montagne…!!! c’est comme dresser un chat !!! :lol: :lol:

[quote=« Francois, id: 1468668, post:47, topic:129680 »]Moi, ce qui m’épate en général, c’est qu’il n’y ait pas plus de trente morts par an (en moyenne, sur plusieurs années et malgré l’explosion de l’activité). Car une demi-journée, une journée après chaque chute de neige, c’est déjà tracé de partout et dans tous les coins, que ce soit HP ou itinéraires de rando. Alors là, ça me sidère !
Comme dit l’autre, dans 99% (reste 1%…) des cas il devrait se passer quelque chose et il ne se passe rien… C’est a vous dégouter d’apprendre et d’appliquer des méthodes de réduction et autres productions des gourous de l’avalanchologie.[/quote]

je me fais la même réflexion.

Si ce nombre reste constant et que la pratique augmente c’est que le BRA est lu.

[quote=« mai, id: 1468674, post:51, topic:129680 »][/quote]
Lire que le BRA est une chose. En tenir compte en est une autre. D’autre part, il est manifeste que ceux qui tracent n’importe où et n’importe comment, comme on le constate après chaque chute de neige, n’ont pas lu le BRA. D’ailleurs, sur le tas, je me demande combien savent ce qu’est un BRA.

Alors je ne vois comment on peut expliquer la chose.

Moi non plus. C’est ce que j’ai dit: ça me dépasse !

@mai et @the devil franchement, je ne suis pas du tout d’accord avec cette vue fataliste. D’ailleurs quand j’amène des jeunes du club alpin, je m’adhère strictement au méthodes de Munter, lequel disons en passant, a été fait pour justement éliminer au max le facteur humain. C’est pas bien compliqué, tu suis les règles, tu regardes les expos, le degré des pentes etc et ça te crache un chiffre qui te dit si tu peux y aller ou pas. D’après mon expérience il est plutôt conservatif, et effectivement, quand je sors avec les potes pour faire des courses engagées ça arrive qu’on les fait malgré que Munter dirait non. En passant, pour du raide la méthodolgie ne s’applique pas (>45), c’est Munter qui l’a dit dans un des cours de perfectionnement qu’on avait avec lui… cela dit, si ça te donne qui tu peux pas aller dans du 35-40, alors se mettre dans du >45…

ça me choque aussi des phrases du genre « c’était une plaque de novembre qui est partie ». Est-ce que tu étais là? Tu as regardé et analysé le profil sur place? Perso, j’étais pas là donc je sais pas si ça date du novembre ou d’hier. Je sais même pas, si elle est parti à 10m de la sortie, à 50m ou à 150m… donc j’évite de me prononcer la-dessus avec des affirmations (mais effectivement l’hypothèse qui me semble le plus plausible c’est celui de Bubu, sans être sûr et affirmatif)

D’ailleurs, j’en ai vu quelques avalanches, et dans aucun des cas ce n’était (malheureusement) pas une surprise au moment où c’est parti, mais tu te dis avant « ouais, nous sommes expérimentés, ouias, si ça part, on va tirer un tout droit, ouais, ça craint, mais la neige est tellement bonne, ouais, dans le couloir précédent c’était bon, ouais, c’est un couloir encaissé, ça encre bien (d’ailleurs, si qqun sait si l’avalanche est partie dans la partie encaissée ou à la sortie où ça s’élargit?) », ou tout simplement la personne est allé dans la partie de la pente où on a dit de ne pas aller. Dans tous les cas sauf 1, la méthode Munter aurait dit déjà à la maison de ne pas y aller. Le cas restant était là pour montrer que même cette méthode n’est pas infaillible (BRA 1-2, alors que sur place on a déclenché 2-3 plaques à distance et 1 en allant plein dedans … bref c’était du fort 3/ faible 4 sur place et à la montée les signaux étaient pas tellement évidents)

+1 pour François (et parfois j’en suis coupable, moi aussi), à Cham’ par risque 4, ça trace dans du 45-50 sans hésitation (voir quelques sorties dans le couloir des Cosmiques après des fortes chutes de neige). Pas plus loin qu’hier dans les Bauges, BRA 4 et ça trace dans tous les sens. Nous on est arrivé plus tard (en partant de la voiture à 13h15), tout tracé, même dans du >30. Cela dit, sur place tout semblait stable et probablement le BRA était surestimé dans ce coin, n’empêche, ça montre un peu l’ambiance… (eh ben oui, on en a aussi profité de la trace et que d’autres sont allés faire les « fusibles »…). Mais encore une fois, si tu prépares la course à la maison à la Munter, on aurait jamais du la faire (bon, pour se donner bonne conscience on visait un col nettement moins raide, du <25, et sommes allés dans du plus raide que quand avons croisé les gens qui l’ont fait et ont raconté les conditions + le matin on a skié en hors-piste de proximité et avons vu qu’il y avait nettement moins de vent que ce qu’annonçait le BRA)

Condoléances à sa femme et sa famille.

Voici une réflexion qui demanderait quelques développements concernant le" facteur humain"…

@François :stuck_out_tongue:

bon, ce cas particulier était encore pas pire :smiley: (j’en ai fait certainement des plus douteux en voyant que ça passe pour d’autres groupes) Tu vises une course difficulté ski 1.2 (pente en fait 15 degrés après vérification) où tu peux choisir ton chemin pour pas être trop expo à des pentes environnantes. Tu croises des gens qui viennent de faire une course plus raide, mais ils disent neige pas soufflée du tout (à l’inverse ce que le BRA dit!), 4-6 traces de descente. Tu vois le matin en hors-piste de proximité que la neige est poudreuse sans être soufflée. Donc tu ajustes le BRA à la baisse.

Effectivement tu pourrais te demander si c’est pas l’euphorie de la descente qui fait parler les gens croisés, et si ils sont pas biaisés: « elle est trop bonne la neige et rien n’a bougé! »

Après… les sections étaient pas expos, y avaient 4-6 personnes de descendu, pas de gros départs ailleurs dans le vallon, les sommets « fumaient » pas, vu dans la région que le vent des journées précédentes moins fort que prévu, on avait l’airbag (aaaah, la mauvaise excuse celle-là :lol: ) - donc en tout pas mal de facteurs positifs (justifications pour se donner bonne conscience? :smiley: à quel moment les « bonnes » raisons passent le cap et deviennent des justifications semi-acceptables pour se donner bonne conscience? :expressionless: )

Mais bon, au final, Munter aurait dit non à priori (pas forcément non, si tu ajustes le BRA en fonction de tes observations sur place!)…

[quote=« Francois, id: 1468687, post:54, topic:129680 »]

Moi non plus. C’est ce que j’ai dit: ça me dépasse ![/quote]
C’est sans doute ce qui explique le statut de MONTAGNE SACREE dans de nombreuses sociétés: on y constate de nombreux et fréquents miracles !!!
Tiens , une question: comment peut on imaginer qu’une pente qu’on n’avait pas envie de parcourir et qui vient d’etre skiée ,sans que rien ne bouge,soit réputée stable, ou stabilisée.( sur ce seul critère)…alors que de nombreux exemples prouvent le contraire!!!
Au bout des comportements et des raisonnements, intuitions diverses, ne restet il pas une forme d’abandon devant une forme de fatalisme positif: j’ai envie d’y aller…c’est un peu tendu…mais je saurais surmonter et alors ce sera l’extase!!!et dans 99% des situations ça le fait.
Rien ne sert de courir pour échapper à son destin…c’est s’y précipiter encore plus vite. :rolleyes:

Posté en tant qu’invité par Vieux Con:

En réalité dans ces 99%, il s’est peut être passé quelque chose. Tu es peut être passé à la limite de la correctionnelle. Mais, tu ne le sais pas. Peut être que ça partait en faisant ton virage un peu plus à droite ou à gauche, ou avec une personne plus lourde, ou un peu plus tard/tôt dans la journée.
Le problème du ski est simplement que nous validons positivement des mauvaises décisions de façon récurrente.

En alpinisme, escalade, cascade, on remarque beaucoup plus facilement quand on fait une boulette. Les 10m sans points avec facteur 2 sur relais pourri laisse des traces indélébiles dans la tête et dans la mémoire. Rien de tel en ski, on grille des cartouches régulièrement et c’est fun. Le soir, on se rappelle juste de la bonne peuf.

La seule différence avec la plaine c’est l’altitude et la densité de population.

Seule la faible densité de population peut contribuer au statut de MONTAGNE SACREE et ceci à cause des puissances de l’air qui y sont moins présentes. Comprendra qui pourra.