Alors ce risque, accepté ou pas, défini comment et par qui ?

Peut être que passer tout ou presque en « TA » rendrait plus serein…

peut être que ça sera l’alternative : les sites ne seront plus recensés comme « sites sportifs » mais « TA », même si l’équipement sera riche (donc cotation P2- par exemple)

Histoire de sensibiliser le grimpeur à être acteur de sa propre sécurité et ne pas se limiter à penser « je clippe la dégaine donc c’est 100% safe »

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Pas certain que si du matos est en cause on n’aille pas rechercher celui qui l’aura installé ou le fabricant. Est-ce un risque normal et prévisible qu’un point cède par exemple ou encore qu’un caillou en équilibre ne soit pas purgé lors d’une visite du site par le concessionnaire.

C’est dans cette précision que réside la subtilité : " Toutefois, pour ne pas restreindre considérablement les possibilités pour une victime d’agir en responsabilité dès lors qu’un accident serait survenu à l’occasion d’un sport de nature ou d’une activité de loisirs, il est proposé de limiter expressément l’exonération du gardien d’un espace naturel à l’acceptation d’un risque par le pratiquant. Ce dispositif permet ainsi d’alléger la responsabilité des gestionnaires des sites naturels, en responsabilisant les usagers qui auraient des pratiques dangereuses ou qui exerceraient leur sport dans des espaces naturels non aménagés, tout en conservant le droit des victimes à obtenir réparation dans certaines situations. Par ailleurs, l’appréciation de la normalité et de la prévisibilité du risque permettra de tenir compte du comportement du pratiquant mais également de l’aménagement ou non du site ou des installations et signalétiques mis en place . »

Cette notion de « risque accepté » est un faux-ami : elle est très restreinte en droit français, et consciencieusement évitée par la jurisprudence. Grosso modo, elle ne dédouane que les pratiquants de sports nécessairement violents, où le dommage corporel est inévitable, indissociable voire recherché - KO en boxe, plaquage au rugby…
Je doute que les personnes pratiquent l’escalade ou l’alpinisme dans le but de se prendre des pierres, des avalanches, ou de tomber sur les tiers. Encore que… ça ferait un nouveau sport de combat original (« tiens, prends-toi cet éboulement hahaha ! - Hop j’esquive hihihi… - Caramba, encore raté ! »)

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Et ce serait intéressant de revisiter l’affaire de Vingrau avec la loi telle que modifiée à présent, est-ce qu’on arriverait à une conclusion différente? Pas certain.
Ainsi et par exemple, pour l’une ou l’autre des victimes le risque était-il acceptable, voire prévisible attendu qu’ils évoluaient sur un terrain équipé ? Pouvaient-elle accepter un risque (et jusqu’à quelle hauteur ) qu’elles auraient évalué pour en décider ainsi ? De telles blessures étaient-elles un risque acceptable? Les assurances auraient-elles renoncé à répéter le montant de leurs indemnisations ?

« L’affaire Vingrau » met en scène un guide et sa compagne dans une falaise qu’ils connaissaient parfaitement (surtout lui, un équipeur historique). Donc sa plainte n’aurait peut-être jamais suivie, aujourd’hui, de suites. Ou alors une attaque plus ou moins fictive de l’une contre l’autre pour amorcer des dommages. Un expert mandaté par la commune dirait sans doute aujourd’hui: Qui mieux qu’un guide est apte à juger de l’état d’une paroi (qu’il connait). Bref, la faute à pas de chance et pas de procès (?). Après faut-il se plaindre qu’il y ait des assureurs pour payer des dommages corporels, sans doute pas, vu l’état des blessures… Reste que cette affaire et son jugement, ont eu des répercutions dont nous verront encore les effets pendant un moment.

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Cette notion d’acceptation d’un « risque normal et prévisible » (sic) promet de faire couler encore beaucoup d’encre… Qu’est-ce qu’un risque normal, d’abord ? En milieu naturel, tout grimpeur sait bien qu’il n’est jamais exclu qu’un bloc se détache ou que des pierres chutent. Au fond, cette histoire de responsabilité sans faute du gardien d’un site naturel est insensée. Le site, est, par définition, exposé aux éléments et on ne peut soutenir, de bon sens, que le « gardien » (propriétaire du site) aurait la parfaite maîtrise de la chose placée ainsi sous sa garde !

Le plus logique aurait été d’en revenir à la responsabilité pour faute, en vérifiant que les diligences normales d’entretien de l’équipement et de purge (j’imagine que des bonnes pratiques sont définies par l’usage et la FFME, notamment, en la matière) ont bien été accomplies, comme on a pu vérifier que le grimpeur de tête était guide, connaissait bien les lieux et qu’il n’avait pas pu déceler la fragilité du bloc…

Au delà des diligences normales, il reste toujours un risque qui n’est pas maîtrisable. Ce risque accepté, c’est nécessairement celui qu’on prend en l’absence de faute (du grimpeur ou de l’équipeur, ici, FFME). C’est l’absence de faute et le choix de la victime de s’engager dans l’itinéraire, qui définissent le risque normal. Rien d’autre, à mon sens.

Mais on risque de déraper, dans les procédures, dans des débats jésuitiques.

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(Je radote mais il faudrait vraiment éviter la formulation « risque accepté » lors de discussions sur les sports et loisirs de nature, où il n’y a pas de recherche de dommage physique. Quitte à goupiller un terme nouveau, « risque impondérable résiduel de l’environnement » - RIRE - ou que sais-je…)

Je n’ai pas suivi tous les débats autour de l’accident, aussi je me demande s’il a été envisagé (ou non, et dans ce cas pourquoi) la création d’un service public de l’accessibilité des falaises - sur le modèle des contrats de droit public qui organisent et sécurisent l’accueil du public dans les forêts [notamment privées], tout en tranquillisant quelque peu leurs propriétaires.

Un service public de l’accueil… euh, non, pas vraiment. Actuellement, la pose de panneaux d’information du public près des sites d’escalade est laissée à l’initiative du délégataire chargé de l’équipement. Sur certains sites, cela se fait. Mais je ne suis vraiment pas sûre que l’information du grimpeur soit une parade suffisante.

Dans l’affaire de Vingrau, ce sujet n’était pas dans le débat car le grimpeur de tête était un guide et la victime était sa femme, qui l’assurait. On ne peut pas dire qu’il se soit agi de grimpeurs néophytes pour qui une information préalable aurait permis d’éviter l’accident.

Risque impondérable : oui ! Mais malheureusement, ces notions de « risque normal » ou « raisonnablement prévisible », comme « d’acceptation du risque » sont les termes utilisés dans la jurisprudence… C’est le grand retour de cette idée foireuse d’acceptation du risque qui, comme le disait un contributeur plus haut, avait été écartée depuis longtemps dans l’appréciation de la responsabilité pour les activités sportives dites « à risque ».

Pour l’accueil du public en forêt (qu’il s’agisse de naturalistes, de champignonneurs, de randonneurs, d’AMM, de guides de montagne, de skieurs…), il n’est pas question de panneaux ni d’information préalable : juste de la mission de service public, qui est donc régie par un contrat de droit public.
edit: Sans bien sûr que ça n’altère la nature du fonds - il n’y a pas de contrainte supplémentaire ou dépossession du propriétaire, juste sa tranquilisation - d’où le succès de cette formule en vigueur depuis 20 ans.

Pour simplifier, les questions de risque et de responsabilité se règlent dès lors non plus entre le visiteur-victime-potentielle et le propriétaire, mais entre le propriétaire et la puissance publique, cette dernière remplissant une mission d’ouverture des lieux aux promeneurs, sportifs, avec si besoin aménagements ou contrôles divers… Tout ceci dans le cadre d’une politique nationale de promotion de la santé, du sport, d’éducation à l’environnement ou autre.

C’est vrai en alpi, mais sur un site école purgé et aménagé ?
Peut on vendre un topo pour financer un site et en même temps considérer que les chutes de blocs sont un impondérable ?
Ds le cas de Vingrau, la victime était guide, ca n’a pas empêché son assureur d’attaquer le gestionnaire du site…

En site dit « école », certes la falaise est en principe « purgée » régulièrement des écailles ou blocs instables par l’équipeur, ce qui en principe garantit un meilleur niveau de sécurité. La vente des topos participe au financement des diligences de l’équipeur pour l’entretien des voies, mais on ne peut pas dire que ce soit une garantie d’aseptisation au point où peut l’être une SAE (qui, pour le coup, est bien un objet sous la garde d’un exploitant).

Sur les falaises et les voies équipées en moyenne montagne (que beaucoup considèrent comme très sûres), on peut toujours rencontrer des écailles décollées, quelques blocs qui bougent. Un site naturel, c’est soumis au travail des éléments : la pluie, les écarts de température.

Le risque peut être minimisé en falaise école, mais il n’est jamais nul, quand bien même il y aurait un topo et un équipeur vigilant qui visiterait le site à chaque début ou fin de saison et serait attentif aux remontées d’infos des utilisateurs. Mais apprécier ce qui est « normal et prévisible » pour tempérer une responsabilité sans faute du propriétaire du site (Commune ou particulier), cela relève un peu du doigt mouillé…

Le problème, c’est que les nouveaux textes laissent subsister cette responsabilité du fait de la chose, qui est indépendante du comportement du gardien du site, en prétendant seulement l’écarter quand on peut opposer le « risque normalement prévisible » auquel la victime se serait exposée. C’est, en somme, dire au propriétaire qu’il est responsable dans tous les cas, quoi qu’il fasse, sauf risque normalement prévisible. On compare des choux et des carottes, sans augmenter la sécurité juridique de qui que ce soit.

Au départ, les fédérations ont milité pendant des mois pour obtenir une réforme qui aurait écarté purement et simplement la responsabilité sans faute du gardien du site, ce qui a été refusé pour des raisons d’opportunité qui tiennent à la recherche de la possibilité d’indemniser une victime par un responsable, même en l’absence de faute. Cela veut dire qu’en réalité, nous sommes dans une société qui n’est plus capable d’accepter la prise de risque.

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Oui
Une question
Quid de la « haute montagne » rando ou alpi etc
Quelle est le distingo juridique qui exonère les maires des communes ou autres propriétaires d’être mis en cause pour chaque accident de personne ??

Il n’y a pas d’exonération a priori. Une recherche des fautes (y compris de la victime) et responsabilités (même partielles) a lieu dans tous les cas… et c’est heureux.

Je parle de la responsabilité du « gardien de la chose »
Pas des acteurs eux mêmes
Une chute de pierre ou une plaque de glace mal placée, un relais ou un point d’assurage foireux …

Quelques éléments dans les attendus du colloque « Escalade et droit » tenu à Grenoble en mars 2014 (N3438_Escalade-et-droit_MEP4.indd).
Chapitre « Accidents d’escalade et responsabilité civile ». Paragraphe 2B: « les responsabilités sans faute ».

Citation
Par ailleurs, il faut noter que la responsabilité du fait des choses joue, que la chose à l’origine du dommage soit mobilière ou immobilière ; et à ce titre, une question est de savoir si elle pourrait être invoquée à l’égard du propriétaire d’une falaise. A priori, cela semble peu plausible, dans la mesure où il faudrait établir que le propriétaire des lieux conserve effectivement les pouvoirs d’usage, de direction et de contrôle sur cette dernière.
À ce stade, deux précisions s’imposent. En premier lieu, lorsqu’une chose inerte est à l’origine du dommage, la jurisprudence considère que la responsabilité du gardien est subordonnée à la démonstration du rôle actif de cette dernière, à savoir son anormalité. En l’espèce, cela renvoie essentiellement à un défaut d’entretien caractérisé et donc – peu ou prou – à la responsabilité pour faute. En second lieu, s’agissant des sites naturels équipés, les propriétaires peuvent conclure des conventions d’équipement dont l’effet est de transférer la garde de la falaise à l’institution contractante, une association ou la Fédération. Cependant, la responsabilité a tout lieu d’être retenue en raison d’une faute dans l’entretien ou dans l’équipement et non sur le terrain de la responsabilité du fait des choses. Quoi qu’il en soit, il ne semble pas que la responsabilité du gardien d’une falaise ait déjà été retenue sur le terrain de l’article 1384 du Code civil en raison de dommages subis par des grimpeurs.

À noter que depuis, la décision relative à l’accident de Vingrau a partiellement remis en cause cette conclusion. Cela dit, il s’agissait d’une falaise équipée et conventionnée. D’ici à ce qu’un tribunal en arrive à juger qu’une plaque de glace mal placée relève de la responsabilité de la commune… il y a sûrement beaucoup de marge!

Bref, comme dans beaucoup de domaines du droit, il n’y a pas d’« exonération » explicitement mentionnée comme telle dans un texte, mais une jurisprudence complexe et évolutive (comme les montagnes).

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Pour mémoire…

Le randonneur, alpiniste, géologue (…) posant le pied sur une pierre -qui se barre sur la tête d’un passant- n’en ayant pas la maîtrise ni le contrôle (contrairement au zozo qui s’amuse à jeter des cailloux)… il n’est pas considéré gardien de la chose. Cf. Cour de Cassation, Chambre civile 2, du 24 avril 2003, 00-16.732, Publié au bulletin - Légifrance (legifrance.gouv.fr)

Par chance pour les maires des communes littorales ou montagnardes, la balance entre responsabilité pour faute et pour risque penche (penchait ?) plutôt vers la première. La faute même légère d’une victime - imprudence, équipement ou comportement inapproprié au lieu ou aux circonstances - tend (tendait ?) à atténuer voire exempter la responsabilité du gardien de la chose. Cf. Cour de Cassation, Chambre civile 2, du 29 novembre 1967, Publié au bulletin | Doctrine

Mon interrogation est
Le « gardien » ou « gardien par délégation » etc de la falaise de vingrau a été déclaré responsable ( Ffme ) et son assurance a payé
Pourquoi le « gardien » des grandes Jorasses ou du sentier GR ou PR ou de la pente en herbe bien grasse et raidasse n’est pas déclaré aussi quasi systématiquement fautif du fait de la chose dont il a la garde, et dont il a pas interdit matérialisé etc l’accès en cas d’accident comme il s’en produit xx par jour en été ?
Et en hiver, avec le risque d’avalanche

Dans quelle espèce ?