Posté en tant qu’invité par Juanito:
Intéressant tous vos messages! Ayant une petite expérience du trail et de la course en montagne, je ne résiste pas à quelques remarques tous azimuts.
D’abord l’idée de courir en montagne semble a priori peut-être éloignée des préoccupations de ce site, et pourtant ça fait partie intégrante de la montagne. Relisez les exploits des grands anciens, d’Edward Whymper à Victor Chaud, et vous verrez qu’ils étaient tous d’incroyables marcheurs, ces « coureurs des montagnes »… Pas sûr qu’on arrive à les suivre de nos jours! Et faire « péter les horaires » en montant au refuge. Avec l’âge on s’en moque ( ou on y arrive plus ), mais à 20 ans qui ne l’a pas fait?
Ensuite sur le fameux « esprit trail » (ça on est d’accord, c’est de la com à deux balles), il faut quand même constater que l’ambiance est effectivement très sympa. Un peu la même que dans les triathlon iron man. A part les tous premiers, un des premiers enjeux pour la grande majorité est quand même d’arriver au bout! Et l’aide des autres concurrents est fondamentale, surtout passé un certain temps de course. Pour moi c’est ça la différence avec faire la même chose tout seul: tous unis dans le but d’arriver au bout! Et on se fait de sacrés potes, généralement bien originaux comme il faut
Sur l’aspect effort de longue durée, il faut le vivre pour le croire: à partir d’un certain temps de course (disons vers les 7-8h pour une course sur la journée, ou après pour du plus long en gérant différemment) on est en état d’hallucination complètement incroyable, où on sent son corps en équilibre sel-sucre, où l’alimentation ne sert qu’à courir, où on rêve à moitié. Tout est dans la tête à ce moment. Ce n’est plus de la course, c’est du yoga! C’est vraiment intéressant comme expérience, et pour certain il est clair que ça doit s’apparenter à une drogue.
Principal inconvénient du paragraphe précédent: ça pompe à mort, et ça détruit physiquement. J’ai rencontré d’anciens champions avec des jambes totalement refaites: genoux et articulations. Même plus possible d’aller aux champignons ou aux génépi! Mais comme d’habitude, une pratique tranquille et sans forcer permet généralement d’éviter d’en arriver là… Ceci dit j’ai eu une mauvaise expérience, à mettre plusieurs mois à me remettre d’une course, jusqu’à un sentiment de dépression. On sent bien qu’on joue avec des limites quand même, ce n’est pas à prendre à la légère.
Pour l’âge: il est clair que ce genre de course favorise le diesel! Donc on est généralement meilleur à 40 qu’à 20 (pour une fois!). J’ai vu des jeunes se prendre des sacrés croûtes en trail, alors qu’il se ballade sur bitume. Mais c’est classique: souvent un coureur à pied fait des 10km à 20 ans, des 20km à 30 et monte sur marathon à la quarantaine…
Pour l’aspect fric, là je suis d’accord c’est désagréable. Et c’est pour ça que je fuis ce genre de manifestation. Il y a tout plein d’autres moyens de faire de la course en montagne ou du trail dans des conditions hyper sympa. l’utmb c’est comme le marathon de new-york: ça surfe sur son image de course suprême qu’il FAUT faire quand on pratique. Mais bon c’est Chamonix aussi, n’est-ce pas?
De mon côté j’aime bien les gens qui font ce genre de truc. Ils sont tous un peu allumés et complètement obsessionnels. Rarement inintéressants en tout cas, car quand on court autant, on en passe du temps à méditer et réfléchir! Mais se lancer là dedans, ça demande d’y consacrer pratiquement tout son temps. Mieux vaut être en accord avec son conjoint… Mais pour le coup, pour faire de la montagne aussi…
Pour moi l’idéal c’est de partir en groupe de potes, de faire la même chose plusieurs jours avec nuits en gîte et bouffe conviviale (et pourquoi pas arrosée!). C’est un peu ce qui se passe sur le défi de l’oisans, sauf en 2011 où ils ont organisé une épreuve non-stop. Même sans ça, avec un peu d’organisation ça se fait très bien, ça fait moins mal, et surtout ça colle quand même plus à l’« esprit » montagne, non? Et il reste le plaisir d’aller en montagne sans sac, l’esprit libre en allant le plus vite possible, en ayant l’impression d’« avaler » cols et sommets. Moi ça j’aime bien.