Un couple modèle ? (Divagations)

J’ai ce petit faible pour la notion de cordée qui me fait penser que l’acte de s’encorder est l’un des plus beaux qui soient. Et vous ?

J’aime à imaginer que cet ombilic créé un lien indestructible avec l’Autre, un lien qui dépasse l’espace et le temps pendant lequel les deux baudriers sont effectivement reliés. J’ai toujours été fasciné par cette corde et la symbolique qu’elle porte, par la force de l’acte qui nous fait mettre la responsabilité de notre vie dans les mains de l’autre.

Nous devrions nous encorder avec doute et résignation. L’acte semble trop grave et trop contraignant : il nous imposera ce compagnon pendant des heures, il faudra marcher à son rythme, dans la même direction, sans l’espoir d’un bon de sortie. Et pourtant, nous nouons toujours cette corde avec sincérité et confiance. Avec soulagement même. Car nous savons que la cordée nous affranchit de nos limites personnelles, qu’elle nous rend plus que deux fois plus forts.

Mais aussi qu’elle rend possible l’impossible.

Posté en tant qu’invité par K2:

Non.

[quote=« Rolando, id: 1606613, post:1, topic:141489 »]J’ai ce petit faible pour la notion de cordée qui me fait penser que l’acte de s’encorder est l’un des plus beaux qui soient. Et vous ?

J’aime à imaginer que cet ombilic créé un lien indestructible avec l’Autre, un lien qui dépasse l’espace et le temps pendant lequel les deux baudriers sont effectivement reliés. J’ai toujours été fasciné par cette corde et la symbolique qu’elle porte, par la force de l’acte qui nous fait mettre la responsabilité de notre vie dans les mains de l’autre.

Nous devrions nous encorder avec doute et résignation. L’acte semble trop grave et trop contraignant : il nous imposera ce compagnon pendant des heures, il faudra marcher à son rythme, dans la même direction, sans l’espoir d’un bon de sortie.[/quote]

c’est très joli ce que t’écris. Mais c’est exactement pareil que quand tu montes dans une voiture comme passager. Arretons de croire que l’escalade ou l’alpinisme sont des activités extraordinaires, supérieures aux autres. Y 'a rien de magique à s’encorder. Un paquet de gens s’encordent avec des gens rencontrés sur le Net qu’ils connaissent à peine, et qu’ils ne revoient plus après. Y’a pas de liens magique indestructible ou je ne sais quoi.

Posté en tant qu’invité par Isis:

Il y a aussi des gens qui trouve un partenaire sur le net pour « baiser »… mais ça n’a rien à voir avec une relation (ni sexuelle ni humaine).
Pour la cordée, c’est peut-être la même chose : en s’encordant avec un inconnu trouvé au hasard, on ne fait que pallier au manque ?

Personnellement, je crois que je saurais citer chaque personne avec qui je me suis encordé (hors SAE). Et c’est vrai que sans corde et sans cordée, certains passages nous seraient interdits.

Maintenant…

Isis

Idem. J’ai mis récemment un peu d’ordre dans mon carnet de courses et l’évocation de mes compagnons de cordée en me renvoyant illico aux courses réalisées ensemble m’ a bien aidé autant que de passer des heures sur des topos et des cartes plus ou moins annotés.
Cela dit, il reste des zones blanches qui justement sont impossibles à combler : le nom de copains de passage rencontrés par le jeu des circonstances et avec qui il avait décidé de faire telle ou telle course.
Par conte, partir systématiquement en montagne ou se faire assurer grace à des rencontres réalisées sur un site collaboratif ( ou sur place en falaise) comme on le voit par exemple sur le forum partenaires me surprend toujours et ne cadre pas avec ce que j’attends d’une courses : une joie profonde partagée avec un bon copain. J’avoue que le compagnon de cordée est au moins aussi important que le but de la course dans le plaisir escompté de la sortie.
D’un autre coté, les efforts consentis en montagne, sont un sacré décapant social. Les bonnes ou mauvaises surpises sont aussi le miracle accompli par la cordée… En ce sens, le partenaire internet, c’est un peu comme l’occupant du siege voisin en TGV, une attente de belle surprise

Je suis d’accord avec vous sur les bons moments en course passés avec quelqu’un ; mais ca n’a rien à voir avec la corde. Tu retrouves ces sentiments en ski de rando, voire en rando pédestre, ou en vélo de route. (Allez faire du vélo de route, vous verrez si les liens avec vos equipiers ne sont pas aussi forts qu’en grimpe…)

Oui, j’avoue : la corde n’est une symbolique. Elle n’est pas vraiment nécessaire pour former une cordée. Ceci dit, sans penser que l’escalade ou l’alpinisme soient des activités « supérieures » (la piscine, ça a l’air vachement intéressant aussi), je crois quand même qu’elles ont un côté extra-ordinaire. Extraordinaire (sans être unique) à mes yeux de part l’engagement qu’elles demandent. Extraordinaire car elles sont à la limite du mode de vie et du sport. Alors, oui, dans ces moments, je ressens un niveau de partage fort avec celui qui partage ma corde, un bout de rocher, un sommet ou un champ de poudreuse vierge.

Oui, pour moi, ces activités n’ont du sens que par le partage avec l’Autre. Je peux aller à la piscine seul, faire des longueurs. Je peux aller à la muscu avec un inconnu ou un collège de travail. Mais je n’ai jamais fait de ski de rando seul ; jamais de bloc seul ; jamais d’alpinisme avec un semi-inconnu. Je ne dis pas que ce soit « bien » ou « mal » (je rate sûrement de belles rencontres ?) mais c’est ma vision : le moyen de doper mon bonheur d’être en montagne. Un avis de passionné… donc forcément partial :wink:

Erri de Luca a écrit de très belles lignes sur la montagne et sur la cordée, voir par exemple « Le Contraire de Un » ou bien « Le Poids du Papillon ».

effectivement, je pratique ce sport depuis 2 ans (qui est d’ailleurs un très bon complément au ski de rando) et je le constate bien quand on suit le premier à 20 cm roue à roue pour être aspirer et être donc moins fatigué.

Posté en tant qu’invité par nimp:

Il faut en parler à Ueli Steck‎, Messner et tous les autres !

la corde peut etre plus qu’un lien . C’est un engagement réciproque, un lien de destinée qui dépasse de loin un simple lien d’entente ou d’amitié qui se construit par exemple quand tu roules longtemps avec un coéquipier à vélo. On le voit dans des situations ou en toute logique il vaudrait mieux se désencorder , par exemple en progression corde tendue dans une face nord. Et pourtant , au nom d’un engagement partagé, tu hésites mais continues encordés. Ce lien, vitale ou … létale, tu ne l’as pas dans beaucoup d’autres activités.

Posté en tant qu’invité par Sigmund:

[quote=« Rolando, id: 1606613, post:1, topic:141489 »]J’ai ce petit faible pour la notion de cordée qui me fait penser que l’acte de s’encorder est l’un des plus beaux qui soient. Et vous ?

J’aime à imaginer que cet ombilic créé un lien indestructible avec l’Autre, un lien qui dépasse l’espace et le temps pendant lequel les deux baudriers sont effectivement reliés. J’ai toujours été fasciné par cette corde et la symbolique qu’elle porte, par la force de l’acte qui nous fait mettre la responsabilité de notre vie dans les mains de l’autre.

Nous devrions nous encorder avec doute et résignation. L’acte semble trop grave et trop contraignant : il nous imposera ce compagnon pendant des heures, il faudra marcher à son rythme, dans la même direction, sans l’espoir d’un bon de sortie. Et pourtant, nous nouons toujours cette corde avec sincérité et confiance. Avec soulagement même. Car nous savons que la cordée nous affranchit de nos limites personnelles, qu’elle nous rend plus que deux fois plus forts.

Mais aussi qu’elle rend possible l’impossible.[/quote]

Tu as oublié d’évoquer le « cordon ombilical » et d’autres clichés comme ça on aurait eut la totale.
Du beau lyrisme comme on en fait plus que dans les vieux bouquins.

Est-ce pour se déculpabiliser de faire une activité ultra égoïste que d’essayer de mettre « l’autre » en scène?
Quand on grimpe et/ou ski, c’est souvent obsédant au mauvais sens du terme puisque seul cette obsession n’a d’importance.
Pourquoi ne pas reconnaître cette fêlure et faire croire qu’elle est plus belle que celui qui pousse de la fonte au fitness?
C’est sur que c’est plus facile de dire que l’on n’a pas envie d’aller bosser pcq on préfère aller « contempler ces paysages majestueux qui nous font comprendre que l’on est tout petit » plutôt que de dire « je vais pousser de la fonte pcq je suis obsédé par mon corps »

Je pense que ces liens n’ont rien d’extraordinaire, personnellement je croise certaines personnes uniquement au pied des voies ou sur les skis.

Posté en tant qu’invité par dams0:

certains devrait changer d’activité. Il pourrait « pousser de la fonte au fitness » ! :rolleyes:

Posté en tant qu’invité par nimp:

Enfin bon, a chacun son point de vue.
Mais l’alpinisme, le ski, voir même l’escalade ne sont pas seulement des pratiques divines se faisant dans une cordée. J’ai beaucoup de ski tout seul, j’ai fait de l’alpi et de l’escalade tout seule et cela me semble bien plus proche des sources de ces activités qu’une approche idéalisé via un bout de polyester reliant 2 personnes.

N’oubliez pas que l’alpi a débuté sans réellement de corde (au sens moderne) et sans réellement d’assurage (au sens moderne).

-> Désolé pour le lyrisme mais, enfant, au petit dej, mes parents me donnaient des chocapics et du Samivel :wink:

[quote=« Sigmund, id: 1606692, post:12, topic:141489 »]Est-ce pour se déculpabiliser de faire une activité ultra égoïste que d’essayer de mettre « l’autre » en scène?
Quand on grimpe et/ou ski, c’est souvent obsédant au mauvais sens du terme puisque seul cette obsession n’a d’importance.
Pourquoi ne pas reconnaître cette fêlure et faire croire qu’elle est plus belle que celui qui pousse de la fonte au fitness?[/quote]

-> « Egoïsme, culpabilité, fêlure » : nous ne devons pas pratiquer la même activité… ou en tous cas, pas de la même manière. Pour moi, la montagne n’est synonyme que de partage, d’amitiés, de bien être ; c’est profiter d’un environnement exceptionnel pour passer des bons moments ou faire de belles choses (avec parfois des difficultés et un peu de stress). C’est faire de l’alpinisme avec ma femme, du ski de rando avec mes amis, de l’escalade avec ma fille. Je n’ai rien à me faire pardonner en faisant de la montagne ; je ne cherche pas à fuir ma vie d’en bas quand je suis en haut ; je n’ai (plus) rien à me prouver ni à prouver aux autres ; ce n’est pas une thérapie (juste un impératif d’équilibre).

Quant à comparer alpinisme avec fitness ou cyclisme, je veux bien tenter l’expérience avec vous…
… mais je ne trouve aucun point commun entre Lance Armstrong et Patrick Berhault ; aucun non plus entre Benoist/Graziani et Rolland/Voeckler.
… et j’ai du mal à imaginer que soulever de la fonte indoor puisse apporter la même chose qu’une Rébuffat à l’Aiguille du Midi.

Avocats du diable, à vous… :wink:

Posté en tant qu’invité par nimp:

Rolando, tu sembles dans une logique de pratique loisir social, avec probablement une fréquence/temps/investissement « moyen ».

Il y a d’autres pratiques.

De la même façon, on peut avoir une pratique cyclisme/piscine/pétanque en tant que loisir social. Mais, on peut également tendre vers une pratique intensive, exclusive, performance comme Armstrong ou Berhault.

L’alpinisme, l’escalade, le ski sont des sports individuel, voir individualiste. Tu te rassures en évoquant la corde, cordée, pour avoir une petite touche collective. Mais, c’est que dalle à comparer des sports réellement collectifs.

Il y a tout de même des notions de cordée, de solidarité et de partage qui n’ont guère d’équivalent. Au moment où on comprend que le faux pas de l’un coûtera la vie à l’autre, il y a fatalement quelque chose de plus fort qu’au football ou à la salle de sport et un monde de différence par rapport à sucer la roue du cycliste de devant, fût-il mon meilleur ami. En tout cas, à la lumière de ma récente et faible expérience. Je ne suis pas sûr que ce soit pour trouver une excuse sociale, encore moins pour se déculpabiliser de pratiquer des activités que certains déclarent égoïstes, mais je trouve quelque chose de particulier dans le partage du risque et de la joie en montagne. Par contre il est certain que je pratique en amateur et pas dans une optique de performance, donc je ne suis pas encore au bout de l’émerveillement. Je biberonne moi aussi volontiers aux Rébuffat et autres Samivel bien plus qu’à Steck ou Armstrong, ça doit venir de là aussi.
Arrêtons de faire les blasés, la montagne est magique aussi pour les moments qu’on y partage. Donc oui, il y a une magie, ou une alchimie, ou un lien particulier dans la cordée, qu’on ne retrouve pas ailleurs (chez les marins, peut-être?).

Posté en tant qu’invité par Sigmund:

C’est peut être parce que la montagne est magique qu’elle peut devenir une drogue…
Et donc te faire devenir égoïste… Et la corde ne change pas grand chose la dedans.
Le vrai altruiste est « au front » en train d’aider son « prochain » pas en train de glorifier son union avec une corde avec son pote pour faire un 7a.

L’espace de liberté peut se transformer en prison (et en plus que ça si l’on vient ajouter la dimension écologique la dedans) si l’on regarde un peu plus loin que son petit bonheur personnel.

On me répondra que ça n’est pas vrai, que la corde, que la beauté, que ci, que ça.
Sans doute pcq il est difficile d’être objectif sur sa propre pratique et pcq c’est le propre des passions de se déguiser pour nous faire croire qu’elles nous sont nécessaires.

Je parle en connaissance de cause puisque j’ai du mal à passer à autre chose.
Mais c’est courant: tu connais la route mais elle est difficile à suivre

Faut arreter un peu avec cette dramatisation. La plupart du temps, l’erreur de l’un ne coute rien du tout (et heureusement). C’est pas pareil qu’en Rallye, si le copilote par exemple se plante… sortie de route à 100 %

Je suis totalement d’accord avec Nimp et Sigmund.

En lisant vos messages, je vois souvent apparaitre le mot « égoïsme » et certains mettent en opposition escalade/alpinisme avec les sports collectifs.

Pourtant en montagne, on n’est pas seul ; en escalade, on a besoin d’un assureur (il fait partie intégrante de l’activité ; il est inévitable ; alors que le vélo peut se pratiquer seul en standard). Ce sont donc bien des sports co’, non ? En tous cas, ce ne sont pas des sports individuels (individualistes parfois j’en conviens).

La différence est que l’équipe est très réduite (2 ou 3 personnes en général pour escalade, alpinisme). N’est ce pas cette concentration des équipiers et donc des liens qui fait ressentir une particularité à ce niveau ? N’est ce pas parce que certains d’entre nous pensent pratiquer un sport individuel et d’autres un sport co’ (tout en pratiquant la même activité) que la cordée prend une valeur différente dans nos ressentis ?