Solo

Posté en tant qu’invité par candide:

bonjour,

en regardant pas mal de sorties rentrées, je constate que beaucoup ont été effectuées en solo, parfois sur des itinéraires glaciaires assez tourmentés. En regardant dans le topo guide, certains ne rentrent que des courses faites en solo, je m’interroge.

ma question s’adresse en particulier (mais pas seulement) aux auteurs de ces sorties,
qu’est ce qui vous fait préférer le solo à la cordée ? quelles sont vos motivations ?

merci de vos réponses

Candide

[%sig%]

Posté en tant qu’invité par Fab:

J’ai un peu d’expérience en solo et je peux te dire que le rapport avec la montagne et avec les gens que tu peux rencontrer sont vraiment différents.
Une grande course en solo est vraiment quelque chose à vivre !
L’autre avantage est d’être libre comme l’air sur ces horaires et son rythme.
Le danger, tout le monde le connait.
Soyez prudents.
Fab
http://skyandsummit.com

[%sig%]

Posté en tant qu’invité par philippe:

Comme toi je suis effrayé par cette pratique aléatoire qui consiste à randonner seul sur un glacier tourmenté. A la rigueur traverser sans s’encorder un glacier plat et sec comme souvent la Mer de glace en été pour aller aux refuges, on le fait sans vouloir faire du solo.
Mais sinon, je ne vois pas l’interet (par ex ce jour, le Mont-blanc du Tacul, sortie n°9414, oü il dit « se méfier des plaques à vent et séracs »…je ne sais pas comment)
Si quand même, il y a des avantages: pas de corde ni de baudrier ni de poulie ni de broche ni attendre que la corde soit tendue, …c’est plus simple.
Je suis vieux-jeu mais je n’ai pas envie de visiter les crevasses

Posté en tant qu’invité par Dani:

Il y a un animal qui habite seul. Le hibou.
Et souvent les hiboux ont un oeil grand ouvert avec lequel ils regardent attentivement, en silence, l’extérieur.
Et l’autre oeil qui semble fermé.
Mais que en réalité observe attentivement, en silence, l’intérieur.
Il ne fait qu’observer… l’intérieur et l’extérieur.

Quand on est seul les sens et la perception s’affûtent.
C’est difficile de l’expliquer mais on vit tout plus intensément.
On fait plus d’attention a notre vie intérieur, a nos sensations… a notre corps…
a nos pensées… a nos inquiétudes…
mais aussi a les perceptions de l’extérieur, au rocher, a la lumière, aux couleurs…
On est 100% attentifs, soit sur notre intérieur, soit sur l’extérieur.

Je pense que ça à a voir aussi avec le fait d’être en silence.

Et c’est pareil pour la montagne que pour d’autres moments de la vie, en fait,
comme le voyage, par exemple.

Et curieusement, dans la solitude choisie, on est plus ouvert au rencontre.

En tout cas c’est bien de devenir parfois un hibou.

Posté en tant qu’invité par Real Flo:

Je peux comprendre cela sur certains itinéraires (la majorité peut-être); mais quel intérêt de finir tout seul au fond d’une crevasse en traversant un glacier débonnaire (du moins en apparence).
Un pote a fait le whymper au printemps dernier, seul. Pour aller au couvercle et à l’attaque il a traversé bons nombres de crevasses (visibles ou pas). Même avec tous tes sens en éveil, si un pont doit casser il cassera, ce n’est pas comparable avec la concentration que tu peux améliorer quand tu grimpe seul par exemple.
Ma question (à qui chacun apportera une réponse personnelle): cela vaut-il la peine de prendre des risque pendant plusieurs heures sur un glacier « facile » (souvent l’approche)et gravir un sommet ou on redescend sans même une photo (eh ouais faut bien quelqu’un pour te tirer le portrait une fois la haut!)
Voila pensée du soir, bonne nuit…

Posté en tant qu’invité par Charlotte:

Le solo ne se fait pas dans un but « sécuritaire » ;la cordée a fait ses preuves à ce niveau là… la description faite par Dani me semble assez juste…et l’état « d"hypersensibilité » est difficile (voir impossible )à retrouver en cordée

Posté en tant qu’invité par Michel:

En montagne comme dans la vie, mieux vaut être seul(e) que mal accompagné.

Posté en tant qu’invité par Fer:

Je me retrouve pleinement dans ce qui a été dit précédemment par les pratiquants du solo. Après bien des années de montagne, les souvenirs les plus forts qui me viennent spontanément à l’esprit sont majoritairement des courses en solo. C’est si intense, on se sent si libre, et comme dans un état de conscience particulier. On tutoies les dieux…

Posté en tant qu’invité par marco:

petite question suite suite aux réponses de nos soloistes:

pour le même sommet (même, et surtout un sommet facile), est ce que la ‹ joie › d’être arrivé là tout seul est plus intense que si on y arrive à deux?

Posté en tant qu’invité par Fer:

Difficile de quantifier la joie ressentie. C’est différent. Le champ se réduit à soi et à l’environnement. Pas de société, donc pas de partage, mais aucune image de soi à renvoyer aux autres. Rien que du vrai.

Posté en tant qu’invité par Michel:

Fer a écrit:

Je me retrouve pleinement dans ce qui a été dit précédemment
par les pratiquants du solo. Après bien des années de montagne,
les souvenirs les plus forts qui me viennent spontanément à
l’esprit sont majoritairement des courses en solo. C’est si
intense, on se sent si libre, et comme dans un état de
conscience particulier. On tutoies les dieux…

Fais gaffe quand même, nombreux sont ceux qui les ont approchés de si près les Dieux, qu’ils ne se sont plus quittés.

bonnes courses,

Michel,

Posté en tant qu’invité par Bubu:

philippe a écrit:

Mais sinon, je ne vois pas l’interet (par ex ce jour, le
Mont-blanc du Tacul, sortie n°9414, oü il dit « se méfier des
plaques à vent et séracs »…je ne sais pas comment)

Parce qu’encordé on y arrive mieux ?
Et oui c’est difficile de prévoir la chute d’un sérac ou d’une plaque, mais aucun rapport avec le solo.
Quand on se dit de se méfier, c’est tout simplement repérer les zones dangereuses (essentiellement les trajectoires des blocs en cas de chute), éviter de faire des pauses dans ces zones et les traverser rapidement.
Il a raison de le répéter, car d’autres sorties rapportent que ces précautions élémentaires ne sont pas toujours respectées.

Posté en tant qu’invité par doud:

c´est peu etre valable que pour moi mais apres une course en solo, je me rappelle de tout les pas, les details… en cordée j ai des trous je suis moins attentif…

en solo je me parle, tout le temps, le début de la folie ou la fin ?..

Posté en tant qu’invité par Fer:

Pas la folie, mais un comportement souvent rapporté.
En fait il semble du même ordre que celui, curieux, de la prise de décision losqu’on est seul : on analyse objectivement une situation, on décide d’agir de telle façon (on se le dit à soi-même) et… on fait autre chose.
Je crois avoir lu quelque part que d’une façon générale la prise de décision n’est pas consciente. En solo ça semble encore plus vrai.

Posté en tant qu’invité par rs:

Je fais parti des personnes que tu cites.
J’aime grimper seul, mais ça tient surtout a mon caractére, je suis plutôt du genre solitaire, c’est tout.J’ai grimpé deux fois avec un compagnon de cordée et j’en garde pas de bon souvenir.Une fois je suis tombé sur un neophyte qui n’ecoutait rien de ce que je lui disait et qui ma fait chier durant toute la course et une autre fois sur un gars hyper acclimaté et avec une super caisse qui m’en a fait bien baver et qui avait tendance a vouloir prendre trop de risques.Alors je me sens mieux tout seul et j’ai l’impression de prendre moins de risques.c’est moi qui prend les decisions, c’est moi qui decide, je me connait suffisament pour savoir ce que je suis capable de faire ou de ne pas faire.
Il est certain que seul sur un glacier ça augmente fortement le risque d’accident mais il faut aussi savoir ne pas faire n’importe quoi.respecter les horaires, renoncer sur les glaciers trop enneigés et crevassés, renoncer par mauvaises conditions meteo.Bien sur quand t’es seul t’a pas le droit de glisser et c’est pour ça qu’il faut rester bien en dessous de son niveau reel.mais c’est un risque que tu dois accepter, comme tous les risques que l’on peut prendre dans la vie: route, train, avion, maladies…etc…
Je grimpe seul parce que je me sens bien comme ça et que ça me plait et je me dis que finalement la majorité des accidents touchent surtout des cordées, quand t’es seul t’es vachement vigilant et tu reflechis a deux fois avant de t’engager.
Enfin grimper seul c’est la liberté totale, t’es seul avec toi même et quand arrives au sommet t’es seul au monde ( enfin ça depend des fois )

[%sig%]

Posté en tant qu’invité par Seulaumonde:

Ce sont des moments extrêmement forts qu’une cordée ne peut même pas effleurer…
L’appréhension, tu l’as avant, elle te ravage et ne disparaît que dans l’action.
Plus c’est délicat, engagé, et plus ton degré de concentration est maximal, tu grimpes à une vitesse stupéfiante, tu atomises les horaires. Mais c’est vrai que tant que tu n’as pas retrouvé le plancher des vaches, tu n’es pas tranquille, tu ne profites pas du paysage, de la beauté des longueurs tellement tu es obnubilé par la suite, et même au sommet par la descente si elle est délicate…
Cela fait plus de 20 ans que je pratique le solo, et l’émotion est toujours intacte à chaque fois. Je ne l’ai jamais banalisé, cela doit rester une entreprise ponctuelle, suprême comme dirait le Blond. Il m’est arrivé d’attendre plusieurs années pour mener à bien un projet, attendre d’être au top mentalement, car tout est dans la tête.
Pour moi, le solo ne peut être qu’intégral, auto-assuré on perd la spontanéité et la magnificence de cette dicipline à part, il ne resterait que le côté besogneux et fastidieux…

Posté en tant qu’invité par julien:

et en solo integrale tu magnifie la discipline jusqu’a quel niveau ? parce que moi j’y vois pas beau quand tu ne fais pas que ca de passer du 5 ou plus a 3000m sans assurrance dans une voies de 1000m !! perso je me le joue besogneux vivant et souvent je m’estime heureux meme d’etre sortit.

Posté en tant qu’invité par EUDE:

Seulaumonde a écrit:

Pour moi, le solo ne peut être qu’intégral, auto-assuré on perd
la spontanéité et la magnificence de cette dicipline à part, il
ne resterait que le côté besogneux et fastidieux…

Je suis assez d’accord avec ce que tu dis avant (intensité des émotions, liberté totale, etc …) mais perso je vis les même choses choses lorsqu’il s’agit de solos autoassurés (dans des voies plus dures bien entendu).
Mais j’avoue garder une certaine marge en solo intégral, c’est peut être pour ça.

Posté en tant qu’invité par Bruno:

salut,

je trouve la question de candide vraiment intéréssante et vos réponses également. Je rêverai rien que de pouvoir envisager sérieusement une course en solo intégral. Mais je sais que n’aurais jamais assez de courage vu que j’ai vraiment peur en montagne (même encordé), une peur qui me paralyse alors qu’elle galvanise d’autres.

Donc vu de la vallée, peut-être qu’une des motivations c’est de retrouver dans cet engagement quelquechose de primal, d’animal. La survie, le bon choix, l’exécution parfaite du bon geste, la maitrise de soi. L’image qui me vient c’est celle d’un tigre, à l’état sauvage.

bon j’arrête là, je ne peux que rêver à l’idée de ces grandes aventures …

Les soloistes pourraient-ils donner quelques exemples de courses réalisées en solo ?

Enfin, jetez un coup d’oeil au compte rendu de sortie suivant. Je l’ai trouvé personellement très émouvant.

http://alpinisme.camptocamp.com/sortie2613.html?cname=*verte*&sidc=1883

Bruno

[%sig%]

Posté en tant qu’invité par Seulaumonde:

j’essaie de garder une marge substantielle entre le niveau théorique d’une voie réalisée à vue et ce que je suis capable de gravir encordé, sachant également que le niveau peut aussi être pondéré par le haut vu les conditions. Et ne pas oublier qu’on grimpe avec un sac, aussi léger soit-il. En gros, ça m’a permis de ne pas trop m’affoler cet été quand je me suis retrouvé dans un dièdre détrempé, ruisselant, sans être certain de l’itinéraire dans le pilier chapoutot en face nord du pic sans nom, ou dans la cheminée verte transformée en torrent de glace à la PA à la Meije. Du bon gros Vsup !
Cela dit, je trouvais çà très expo, alors que j’avais déjà soloé du 7b/c falaise.
Ce qui fait aussi flipper, c’est l’épaisseur de la glace, et traverser au petit matin à la frontale le glacier de la Brenva, sans autre halo alentours, et passer une rimaye vitreuse et superficielle réserve de grands moments d’émotion…