Posté en tant qu’invité par JP Haberer:
L’Aigle est sans doute le dernier témoin de “l’âge d’or de l’alpinisme”. Il reste lié à l’histoire de la Meije (relisez le livre d’Henri Isselin), a sauvé bien des vies et, à ce titre de refuge, il a joué son rôle d’abri pour alpinistes en perdition.
Si à l’heure du GPS on considère que plus personne ne peut perdre sa route dans la tempête, et que l’Aigle devient un simple lieu de confort, un point de départ de courses pour les foules, alors c’est que l’alpinisme n’est plus qu’un exercice de consommation banal.
Pour compenser notre vie moderne, nous avons besoin de terrains d’aventures authentiques, avec leurs difficultés, leurs incertitudes.
Si “vivre avec son temps” s’est aller plus vite, plus haut, il ne faut pas niveler les montagnes, mais au contraire les conquérir telles qu’elles sont. Si, avec top-matos et fric, nous parcourons les cimes aseptisées, trouvons assistance de gardiens dans les refuges, où est notre mérite ?
La sur-fréquentation ? Je l’ai connue à l’Aigle quelques fois, on fait avec et cela fait partie des souvenirs. Le confort du gardien ? Je ne vois pas l’utilité de sa présence. Ceux que j’ai connus ne le faisaient pas comme métier, mais comme expérience de vie, deux mois d’été, dans l’esprit “bénévole”. Quand à celui qui l’a choisi comme alternative à la prison, il s’est sûrement mieux reconstruit en raison même de l’inconfort et du dénuement où il s’est trouvé plongé.
Je suis persuadé que cette nécessité de “sécurité”, de confort, vient de gens qui, en vieillissant, se sont habitués à des voitures plus grosses, a des routes plus larges, en un mot, à plus de facilité dans tous les domaines. N’en déplaise à eux (et j’ai leur âge), ils doivent laisser aux jeunes et aux générations futures la possibilité de découvrir (et de se découvrir) un monde à la mesure de leurs forces.