Je vais essayer de donner quelques éclairages :
Distinguer assurage d’un premier ou d’un second
Retenir un premier de cordée (grimpeur placé plusieurs mètres au-dessus de l’assureur est un tout autre histoire que d’assurer un second.
En « randonnée alpine », le premier est sensé NE PAS TOMBER. C’est un pari, un engagement. C’est ce que nous supposerons ici
(Dans le cas contraire on serait dans une situation d’alpinisme pur et dur et là on serait sensé disposer de l’artillerie lourde (« vraie » corde, harnais, casque, pitons, coinceurs,…) )
Distinguer assurer et rassurer :
La corde peut gêner ou même déséquilibrer. Dans certains cas, il est préférable pour la sécurité de ne pas s’encorder.
Dans quelques cas les encordements et assurages sont pratiqués pour remonter le moral du second (seul moyen de se sortir d’affaire) mais l’assureur sait pertinemment qu’en cas de chute du second ce sera la chute finale pour tout le monde. Situation à éviter autant que possible ! (Je préfère ne pas penser au cas où l’assurage est illusoire mais que personne ne s’en rend compte !)
Dans le cas de l’assurage d’un second, distinguer assurage contre glissade et assurage contre chute dans le vide:
-Chute
En cas de chute dans le vide il faut exercer 70Kg sur la corde pour retenir 70Kg : c’est très dur.
-Glissade
Typiquement une glissade arrive sur un terrain pentu(par exemple 45°) où même pendant la glissage une partie du poids (disons la moitié) reste supportée par le sol, une partie du freinage est réalisée par les frottements sur le sol. La force que doit fournir l’assurage est donc bien moindre. Retenir quelque de 70Kg nécessitera seulement d’appliquer par exemple 20 à 30Kg sur la corde : cela devient réalisable en assurage direct.
Distinguer assurage direct/assurage relayé:
En direct, la corde va de l’assureur à l’assuré sans être accrochée au terrain. l’assureur exerce la force sur la corde en s’arcboutant sur ses pieds pour résister.
En relayé, la corde passe dans un point fixe (mousqueton fixé sur spit, sangle, coinceur ou bien la corde passe elle-même sur un becquet, un tronc d’arbre…). Une grande partie de la force est absorbée par le frottement sur le relais (50% avec un mousqueton); la direction de la force est connue; si l’assureur lâche la corde il reste une chance que tout le monde se retrouve pendu au relais; l’assureur peut bloquer l’assuré suspendu et établir un « hissage/descendage » de secours.
Distinguer assurage au corps/assurage sur frein
L’assurage sur frein (plaquette, descendeur, ou demi-cabestan) freine fortement.
-Il s’applique logiquement en assurage relayé (que ce soit accroché au harnais ou sur le relais lui-même).
-Par contre, en assurage direct, il risque de n’être pas assez dynamique (le moindre choc va nous faire tomber aussi). Il convient seulement si on se sent capable d’encaisser la force sans broncher (corde tendue, risque de glissade mais pas de chute)
L’assurage au corps a l’avantage d’être très vite mis en place. Il est très dynamique (il freine peu). Il est très bien adapté pour retenir en direct une personne sur un névé pour lui éviter de perdre l’équilibre ou pour enrayer une glissade. Mais il n’est pas adapté si on peut avoir a tenir un assuré suspendu (falaise, crevasse). Nos ancêtres ont fait comme ça mais ils n’avaient pas d’autre solution.
Méthode :En assurage au corps, on ne tient pas « avec les mains » : ça c’est dans les films ! Même un mâle viril et tatoué se retrouverait rapidement les mains brûlées et sanguinolentes et…lâcherait la corde !
Il faut répartir le frottement de la corde sur le maximum de surface possible (c’est cette surface qui sert de frein), les mains servant de commande comme avec un frein mécanique. Typiquement il y a
-l’assurage à l’épaule (sous l’aisselle vers l’assuré, puis sur l’autre épaule)
-l’assurage à la taille (corde autour de la taille, dans le dos) : freine moins.
Porter des gants de cuir est recommandé en assurage au corps.
Ceci étant dit, il est fortement recommandé d’expérimenter ces différentes formes d’assurage en conditions sûres pour se rendre compte par soi-même de leurs possibilités et de leurs limites. Cela permettra de les choisir en connaissance de cause selon les circonstances auxquelles on sera confronté.
Exercice classique :
-assurer en direct un camarade qui se laisse glisser sur une pente de neige (non dangereuse)
Harnais ou pas ?
Le harnais est nécessaire s’il y a de risque de choc ou de suspension.
Il s’agit d’être cohérent selon le cas :
-si on veut simplement enrayer des glissades sur névé assurage direct au corps, encordement direct autour de la taille vont bien ensemble.
-si on craint des chutes verticales, une suspension, il faut des harnais mais aussi de quoi poser un relais et éventuellement des points intermédiaires, et puis il faudra les casques, etc…
Enfin, une remarque sur la « randonnée-alpine » :
Cette expression est récente et assez floue.
Mon expérience est que trop souvent des personnes s’encordent pour se rassurer ou « faire comme des alpinistes » alors qu’au fond ils manquent de maitrise technique (usage du piolet notamment) : le risque est alors non pas réduit mais multiplié. La priorité c’est de s’exercer aux techniques individuelles, afin de réduire au minimum les cas où la corde aura à encaisser un choc.