Par ce sujet, je ne veux surtout pas polémiquer, mais plutôt me renseigner.
Petite intro pour situer :
Je n’ai pas une longue vie d’alpiniste derrière moi et je tente naturellement, petit à petit, d’améliorer mon expérience de la « montagne » notamment par l’observation (tant qu’à faire…)
Mon grand père (qui lui avait une longue vie d’alpiniste derrière lui) a toujours dit : « pas de courses de neige/glace après le 14 juillet », « pas de descente sous le cagnard » et il ne disait pas « ski de rando » mais bien « ski de printemps », etc. Bon, au-delà des poncifs et des déclarations éculées, je considère souvent ce que je vois avec ces quelques menus conseils en tête (le poids des traditions sans doute…)
Les faits :
L’objectif du Weekend était l’aiguille d’Argentière pour dimanche. Samedi, après de longues minutes de queue, on arrive enfin aux Grands Montets, il est bien 10H30. Le couloir Chevalier était aussi une option pour samedi histoire de se mettre en jambes, mais arrivé au bas, il fait très très chaud. On hésite, un bon moment. La neige est bien lourde, il est tard, la rimaye bien ouverte, trois personnes se préparent pour skier le couloir… Allez on laisse tomber, on va installer le bivouac et on ira se chauffer ailleurs. Les grandes faces nord commencent à se dévoiler au fur et à mesure de notre descente, c’est grandiose par ce temps. Et là, surprise, du monde à l’attaque du Couturier… En fait le Couturier est carrément blindé, des cordées à l’attaque, au milieu, sur les pentes finales, au moins 12 personnes. Il est 11H. On avance, du monde à la rimaye pour le col de l’aiguille verte. Des traces au bas des droites, on se prend à rêver : « y’en a qui se sont fait plaisir… » . En fait, ils se font toujours « plaisir », ils ne sont pas encore sortis de la première longue dalle de glace. On traverse le glacier pour aller se planter en face d’où la vue est magnifique. On avait bien vu un peu plus tôt deux ou trois cordées aux Suisses, mais on se rend compte qu’une cordée n’est même pas au tiers de la voie. Il doit être 13h maintenant. Deux cordées sont dans le Lagarde, dont une bien bas, mais ils progressent vite. Montage de tente, grignotage, glandage, envoûtement : il est 15h, il fait une chaleur à crever, on scrute l’objectif du lendemain et on voit trois personnes sur le cône de déjection du Y, même pas à l’attaque.
Depuis le début on trouve que tous ces gens s’y prennent bien tard, même pour des faces nord, mais là, c’est quand même balèze. C’est peut être un délire du genre « on se fait deux sommets dans la journée », je sais pas, mais ça me parait quand même fou. On monte en direction du tour noir et on entend que ça parpine allègrement depuis l’arête du jardin, les gars sont au milieu du couloir…
On ne sait pas comment la plupart des cordées a fini mais on a vu la dernière cordée atteindre le sommet des courtes peu avant qu’on aille se coucher, vers 18H30.
Le lendemain, journée plus froide que la veille (brouillard et neige), une grosse chute de séracs à lieu vers midi depuis le col de l’aiguille verte.
Notre expérience relative nous fait sans doute prendre trop de précautions, renoncer alors qu’on pourrait, etc. Mais c’est pour moi la bonne manière d’appréhender les choses et de se former, je ne suis pas adepte de la formation par le risque en montagne…
Ces gens sont-ils inconscients ? A l’arrach’ ? Expérimentés (on s’est souvent répétés que pour faire ce genre de voies dans les faces nord, il fallait pas être un bleu et qu’ils savaient sans doute ce qu’ils faisaient…) ?
Comment redescend on des droites ou de la verte en milieu ou fin d’aprèm ? (J’ai toujours entendu dire : « le Whymper, malheureux ! Faut entamer la descente au lever du jour ! » (Ok, ils sont en skis, mais les caillasses choisissent elles préférentiellement les gens en rappel ?)
Voilà les quelques questions que nous nous sommes posées durant cette magnifique journée.
Peut-être aurez vous des réponses (si vous avez eu le courage de lire jusqu’au bout).