Question aux alpinistes-parents

En quelques mots: est-il moralement acceptable que deux passionnés de montagne ayant pris le temps de concevoir deux jolies petites filles entre deux sorties s’encordent sur la même corde tout au long de l’année?
Plus le temps passe et plus je me dis que si on tombe on est deux beaux égoïstes…

Pffiou, grosse question!
Effectivement il y a une part d’égoïsme dans la pratique d’une activité à risque comme l’alpinisme ou le ski de rando… Personnellement, je n’ai pas de réponse toute faite. Déjà que je me pose des questions lorsque je pars seul faire du ski de rando (certes sur des itinéraires réputés peu exposés,donc s’il m’arrivait malheur il reste ma compagne pour notre p’tit gars, mais bon…).
Je crois cependant qu’il ne faut sûrement pas s’arrêter de pratiquer, même à deux, surtout si c’est un des ciments de votre couple. Lorsque vous êtes en montagne, vous vous remplissez à un certain point et quand vous revenez, vous pouvez déverser votre trop-plein sur votre entourage (enfants, conjoints, etc…). C’est la théorie des vases communicants.
Peut-être que ton (votre) interrogation pourrait aller vers le maintien de votre pratique mais en privilégiant des sorties où l’exposition est plus faible de manière à minimiser les risques?
En tous cas, c’est comme ça que j’envisage les choses depuis que je suis papa…

[quote=« GregH (ex passerand), id: 1025739, post:2, topic:99540 »]Peut-être que ton (votre) interrogation pourrait aller vers le maintien de votre pratique mais en privilégiant des sorties où l’exposition est plus faible de manière à minimiser les risques?
En tous cas, c’est comme ça que j’envisage les choses depuis que je suis papa…[/quote]

+1

Mais on, il ne faut pas arrêter mais seulement lever le pied et faire des trucs plus faciles et pas expo. C’est ce que j’ai fait quand mes gamins étaient petits, et en prime c’est bien agréable de se balader dans des trucs largement sous son niveau. On a l’esprit beaucoup plus libre.

C’est marrant, c’est une question qu’on s’est posée hier avec ma femme qui vient de terminer son congé de maternité (on a 2 gamins). Déjà, notre temps libre peu important réduit les sorties, mais elle a ajouté que ce sera dorénavant sans elle pour les trucs engagés. Bref, plus de cordées à 2 avec ma femme.

j’ai levé le pied depuis l’arrivée de notre fille il y a 2 ans, lever le pied ne veut pas dire en faire moins, mais effectivement moins expo et en dessous de mon niveau et il faut dire que c’est bien agréable !

+1. De ttes façons avec l’age (enfin c’est le cas pour nous…) on tend souvent à passer du stade de passionné d’alpinisme pur et dur à passionné de montagne au sens plus large (yc voyage, découverte…). Bref pas besoin d’être encordé pour être heureux. Et pour les quelques « gros truc prestigieux » qu’on a quand même encore envie de faire (mais c’est assez ponctuel), on part avec des guides qu’on connait et par conditions optimales.

Le risque résiduel le plus important est finalement peut-être à ski de rando…mais on n’est pas encordé et en s’espaçant on peut toujours espérer qu’il y en ait un qui survive pour élever les enfants :lol: ! En tous cas on préfère mille fois partir à deux que seul en laissant l’autre à la maison, le bonheur de vivre un beau sommet en couple reste pour moi bien supérieur que de simplement le partager avec un pote montagnard, même au bout de X années…mais c’est là aussi un ressenti personnel et pas un jugement de valeur.

Bon avouons honnêtement que nos 4 parents à nous, qui veillent régulièrement sur nos 2 moustiques, ne seraient pas fâchés de nous voir plus souvent à la maison. De toutes façons, plus les enfants grandissent et plus on fait des trucs intéressants avec eux (jolies randos, escalade facile, treks exotiques…), donc les choses s’arrangent d’elles-mêmes.

Posté en tant qu’invité par solo en couple:

Cela me rappelle ce passage de Nicolas Jaeger dans « carnets de solitude », lorsque il avoue que, tout compte fait, il est beaucoup moins frustré au moment où il écrit son texte que plusieurs années auparavant, lorsque sa femme a radicalement refusé de partager sa passion pour l’alpinisme, s’asseyant sur son sac et disant obstinément « non, j’y vais pas » ! Depuis il a trop vu de couples disparaître en même temps …

Posté en tant qu’invité par papa67:

Depuis que je suis papa,si je fais de la montagne avec ma compagne j’évite d’etre sur la même corde. je prefaire partir a 4.
En ski on s’espace, (normal non?)

Posté en tant qu’invité par solo en couple:

la solution de pas mal de couple de copains, notamment pour la rando à ski, est de partir à tour de rôle, éventuellement associés avec d’autres couples

Père de deux petits enfants, j’ai changé ma pratique. Je m’interdis les grandes courses d’alpinisme classique. Donc Chamonix, c’est fini pour moi (pourtant j’y ai un appartement de famille) sauf en touriste à la mer de glace. Globalement, j’ai banni le terrain glaciaire de ma pratique car trop de risques objectifs : crevasses, séracs…
Je me suis plus concentré sur les voies rocheuses de montagne, sans grand danger objectif. Bon faut dire que par chez moi, dans le Mercantour, c’est ce qui domine. Et puis il y a aussi, les grandes voies de falaise pure où on ne craint pas grand chose.
Pour le ski de rando, que je trouve vraiment accidentogène, je suis devenu vraiment frileux. Il faut vraiment que les conditions soient bonnes pour que je sorte. Dès que le BNA annonce des conditions un peu douteuses, je fais autre chose.
Reste la cascade et les courses de mixte pour lesquelles je me limite à quelques sorties par an, en essayant de toujours bien me protéger.
Au final, je n’ai pas l’impression de me priver car malgré ces restrictions, j’ai des projets à gogo et une envie toujours intacte.
Bien sûr, j’ai quelques anciens projets mis en stand-by (Devies-Gervasutti à l’Ailefroide, face S Meije…) mais ça n’a jamais tourné à l’obsession. Peut-être dans 20/25 ans si j’ai encore la pêche.
Si vraiment, c’est votre passion il ne faut pas arrêter mais trouver une pratique qui soit en accord avec ce que vous estimez raisonnable comme prise de risque. A un moment, j’avais jugé plus raisonnable d’arrêter la montagne. Erreur ! Je devenais carrément dingue et insupportable tellement j’étais malheureux. :lol:

Malheureusement l’actualité montre que cela arrive au moins pour un parent.

Alors dur pour les enfants quand c’est les deux qui partent.

Le rôle des parents est avant tout de protéger leurs enfants.

le plus simple est de sortir à tour de rôle.

bonne rando.

merci à tous, vos réponses sont très parlantes.
ce qui me perturbe le plus c’est que je vois le danger alors qu’il était diffus auparavant, je m’inquiète plus et je cogite à fond.
Sinon je fais comme vous dites, de bonnes conditions, pas trop de neige et bien dans le niveau.

Faut pas être perturbé :slight_smile: T’aimes tes filles et tu as, de fait, juste revu à la baisse le niveau acceptable d’engagement. Comme tous les papas, enfin je crois :slight_smile:

C’est probablement un passage obligé de la vie d’un parent responsable. Cela questionne mais c’est, je pense, une saine réaction qui oblige à trouver des réponses pour fixer une limite à l’engagement.

[quote=« leonmarcel, id: 1025707, post:1, topic:99540 »]En quelques mots: est-il moralement acceptable que deux passionnés de montagne ayant pris le temps de concevoir deux jolies petites filles entre deux sorties s’encordent sur la même corde tout au long de l’année?
Plus le temps passe et plus je me dis que si on tombe on est deux beaux égoïstes…[/quote]

Effectivement, grande question! Mais ne roulez vous jamais dans le même véhicule, ou dans le même avion? Parcourir les montagnes ne présente pas plus de risques que la vie de tous les jours, et surtout ça fait un bien énorme à la tête et au corps. Maintenant, c’est sûr qu’il ne faut pas être trop ambitieux dans le choix des itinéraires et des difficultés si l’on veut être encordé avec sa moitié et qu’il y a des petits à voir grandir :rolleyes:

Ce serait naïf de croire à cela, ou alors se voiler la face pour ne pas avoir à se poser les vraies questions. Il suffit de regarder le nombre de drames qui ont endeuillé C2C ces derniers mois et années. Bien peu de ces accidents ont eu lieu dans des itinéraires très engagés.
Le risque d’accident mortel en alpinisme n’est pas comparable à la vie de tous les jours.

Posté en tant qu’invité par Benji:

  • Grande voies spitées (en se double vachant aux relais plein gaz)
  • Choix d’itinéraire très restrictif en ski de rando (mais dans tous les massifs il y a des sorties à faire par risque relativement élevé)
  • « rêves » avec un guide
  • Alpinisme en emmenant des débutants (comme ça c’est sympa quand même même si c’est facile)

Je ne suis pas un expert en stat, mais je pense qu’en appliquant ces principes on doit ramener le risque de la pratique au risque que vous prenez quand vous êtes en bagnole à 2

Le plus gros problème c’est de trouver la baby-sitter.
Mais l’alternance, c’est quand même beaucoup moins bien

(3 enfants à notre actif)

C’est une question complexe.
J’imagine que vous ne vous posez pas la question quand vous prenez la voiture ensemble.
Je dirais que la vie est ainsi faite, qu’il faut la vivre avec passion, sans prendre de risques inconsidérés, et qu’il vaut mieux partager ces moments de passion (c’est à dire construire ensemble des projets) que de générer de la frustration au point de se séparer.
Pas facile.

[quote=« Lutin, id: 1025918, post:19, topic:99540 »]C’est une question complexe.
J’imagine que vous ne vous posez pas la question quand vous prenez la voiture ensemble.
Je dirais que la vie est ainsi faite, qu’il faut la vivre avec passion, sans prendre de risques inconsidérés, et qu’il vaut mieux partager ces moments de passion (c’est à dire construire ensemble des projets) que de générer de la frustration au point de se séparer.
Pas facile.[/quote]

Très bien résumé, Lutin.