"Pourquoi la montagne est-elle sublime"

Je m’inscris plutôt en faux par rapport à cette idée que tous les paysans des hautes vallées, de par le dureté de leur condition, ne peuvent / ne pouvaient voir en la montagne autre chose qu’une contrainte / un danger / un lieu maléfique. Certes ils fréquentent / fréquentaient peu la haute montagne, par manque de temps, de moyens, de techniques ou par superstition, mais contemplent / contemplaient avec fierté et félicité les incroyables paysages qu’ils avaient sous les yeux.

J’ai mis volontairement les temps au présent et au passé pour souligner que cet état de fait passé en Europe est encore très actuel dans de très nombreuses chaînes de montagne à travers le monde.

Les témoignages émerveillés d’autochtones, malgré la dureté de l’existence et des conditions de vie, sont également nombreux. Trouver la montagne merveilleuse n’est pas un privilège d’homme repu, bien au contraire.

Je souscris donc plutôt au témoignage de Catherine:

Chaque être humain, aussi misérable que soit sa condition materielle, peut être épris par ce sentiment de sublime en contemplant la montagne.

2 Likes

Pour appuyer là-dessus: il paraît que lorsque les premiers alpinistes « officiels » sont arrivés au sommet de l’aiguille du plat de la selle ils ont trouvé un cairn. Ce serait étonnant qu’il ait été construit par des chamois …
A titre personnel je me souviens que dès l’enfance quand je voyais une vague bosse une envie impérieuse d’en atteindre le sommet me prenait et ne me lâchait plus. C’était pareil pour les arbres. J’adorais lire et rien ne me plaisait plus que de lire installé le plus haut possible dans un arbre. J’imagine sans peine que l’idée d’aller « là-haut » a été présente chez bien des paysans de montagne.

3 Likes

Bonjour,

si je peux me permettre un encart publicitaire, la question de la sublimité de la montagne fait l’objet du chapitre 10 du modeste bouquin que notre chère maison d’édition chamoniarde bien connue (les livres rouges) a eu l’amabilité de publier il y a une dizaine d’années (« Pourquoi grimper sur les montagnes ? » , Guérin, 2012).

Il me semble judicieux, si l’on veut réfléchir sur ce qu’il y a de « sublime » dans la montagne, d’être attentif à ceci : qu’en son sens exact, cet adjectif n’est pas le superlatif de « beau ». Il signifie autre chose et plus que « extrêmement beau ».

J’indique dans ce chapitre quelques pistes de lectures, pour approfondir.

Bonne lecture à tous, en espérant qu’on m’excusera pour cette petite intervention professorale. Que voulez-vous, on ne se refait pas !

Cordialement à tous.

Patrick Dupouey

5 Likes

Ah oui intéressant !
Merci pour cet encart publicitaire :wink:
Quelques remarques et commentaires au sujet de ce livre sur Babelio
Pourquoi grimper sur les montagnes ? - Patrick Dupouey - Babelio!

…si je puis me permettre : le dessin de la page de couverture mérite une mise à jour importante.
Il est vrai qu’en 2012 (année de parution), les smartphones n’avaient pas encore envahi nos vies et nos comportements de self-istes.


Peut-être faudrait-il aussi rajouter quelques pages sur l’importance (pour certains) d’afficher leurs exploits sur les réseaux sociaux. :innocent:

1 Like

“Pourquoi la montagne est-elle sublime”

Parce-que la montagne, c’est passer du souffle brisé par l’effort au souffle coupé par la beauté.

Je me permets de citer ici le regretté Michel Parmentier:

	Le vent était très fort et je suis sorti de la tente pour partir dans la pente. Vers le haut. Parce que là-haut, au bout des forces du corps, il y a la paix de l'esprit. Parce que là-haut, il n'y a plus de pensées, ni de vent, ni de douleur, ni de plaisir.
	Sous le sommet, très proche de la vie, je me suis arrêté, je n'étais pas paisible et le vent était si fort que j'avais du mal à regarder au-dessus de moi la pyramide blanche que j'allais gravir.
	Jamais je n'avais été aussi loin des conquérants de l'inutile. Au contraire, j'étais conquis, et l'utilité c'était la beauté, c'était cette oscillation entre la douleur et le plaisir qui m'indiquait le bon chemin. La montagne, c'est çà. Passer du souffle brisé par l'effort au souffle coupé par la beauté.
6 Likes

Merci pour cette référence intéressante, en effet !
On en avait discuté sur le forum à plusieurs reprises, il a une dizaine d’années :

Et son livre est cité dans l’article qui esquisse une bibliographie d’ « Alpinisme et Philosophie »
Dommage que le sommaire des chapitres avec la pagination n’apparaisse pas explicitement dans l’édition de 2012…
Pour convaincre un peu ceux qui ont échangé ici sur ce sujet de lire ces quelques pages de « Pourquoi grimper sur des montagnes », le chapitre 10 sur **le sublime se trouve p117, et expose avec clarté la différence entre le beau et le sublime. Il est encadré du chapitre 9 III, p107 : « Architecture III : la cathédrale gothique » et du chapitre 11, p131 Silence, thèmes abordés par plusieurs posts dans ce fil. :wink:

3 Likes

Bravo pour ce livre @patrick_dupouey. On me l’avait offert, je l’ai beaucoup apprécié et j’y ai trouvé des éléments de réponse très intéressants. À lire !

1 Like

Sans vouloir faire le psy à 2 balles, plus on avance à la lecture de ta phrase, plus on y devine des éléments de réponse. J’ai l’impression que ta fascination pour les orages semble en partie bâtie sur les mêmes fondations.

Pas faux. Plus généralement un intérêt pour les phénomènes météorologiques qui sortent de l’ordinaire. Ce que les gens appellent beau temps, j’appelle ça temps ennuyeux. (bon c’est quand même mieux pour faire de la montagne)

"Le vent se lève, il faut tenter de vivre" (Paul Valery).

Tu aimes (aussi) la montagne parce qu’elle te fais peur, de la même manière que tu aimes regarder l’orage au plus près bien qu’il suscite en toi la crainte. D’ailleurs, c’est ce que tu reproches à la mer, d’être trop paisible et accueillante, de ne pas faire de vagues… alors qu’en montagne tout n’est que vague…
Même le topo d’ailleurs bien souvent…

Je ne pense pas que @pasinvite aime se faire peur en montagne, même en étant « en sécurité ».
Par contre les choses grandioses, surhumaines (dans le sens où « on est peu d’chose ! »), accessibles, ça doit être un élément de réponse. Surtout si l’habitude vient s’ajouter par-dessus. Quand on a l’habitude d’un truc on edt dans une zone de confort mental et on occulte volontiers le reste : mer, plaine, forêt, stade d’athlétisme …

Non non j’ai peur de la mer. Enfin surtout ce qu’on ne voit pas les bêtes monstrueuses qui se cachent sous sa surface.

Disons que ça peut me bloquer. Mais je suis quand-même attiré par des trucs souvent au dessus de mon niveau de blocage.
Mais bon on s’éloigne un peu du sujet.
Effectivement un truc facile de fastoche va à priori me barber (la promenade digestive c’est pas mon truc)
Je suis satisfait d’une rando si j’ai tutoyé mes limites que ce soit physiques ou morales.

Oui, on digresse carrément si je relis bien le titre du sujet " pourquoi que c’est-y sublime ces bosses ?". Et pas « pourquoi que j’aime ça ? ».

Je ferme ? :innocent:

1 Like

Il y à une différence entre parcourir la mer et rester sur la plage.
Je pense, à tord peut-être, que la même choses animent ceux qui parcourent les hautes-mers et la haute-montagne.
T’aimes peut-être la mer au fond, mais pas les plages, chouchou, serviettes, parasol.

Je suis pas sur qu’on s’en éloigne, je pense que la peur est un élément central dans la pratique. D’une on ne peut pas la supprimer, de deux, si on ne l’accepte pas, on raccroche vite le matériel.

Comme je l’ai précisé, dans mon esprit c’est bien pourquoi j’aime ça.
J’avais juste saisi l’occasion du titre d’une émission de radio mais j’aurais pas du ca porte à confusion.

1 Like

C’est vrai que les seules fois où j’ai aimé être en mer c’est sur un zodiac qui volait sur les vagues manquant de chavirer à chaque fois, ou quand j’ai chassé à la main des pieuvres. Une question d’adrénaline que les chouchous et le cramage au soleil n’offrent pas.

Je suis assez d’accord avec ça. Ça doit être proche en tout cas.
Amoureux des éléments. De se confronter un peu nu (c’est relatif) aux éléments.
Mais aussi d’aller voir ce qu’il y a derrière l’horizon. Ou là haut.

Mais disons que là c’est plus des symptômes que leur explication. Mais c’est un debut’

Je suis étonnée que personne (du moins il me semble) n’est parlé d’une dimension mystique de s’élever quand on va en montagne, d’aller tutoyer le ciel (et donc Dieu).
Ce n’est pas ma vision des choses, mais qui sait, plus ou moins consciemment chez certains…?

1 Like

Je ne sais pas si ça concerne beaucoup de passionnés de montagne. Pour ça il y a les pèlerinages y compris autour de monts élevés. Mais le rapport avec la passion pour la montagne (celle de ceux qui ont envie de grimper dessus) me semble pas évident.
Ça empêche pas de se sentir éventuellement un peu plus proche de la réalité des choses (je sais pas bien dire ça), de l’essentiel…quand on est là-haut. Petit côté mystique oui sans forcément parler de religion.
Et plus facile à ressentir quand on est seul là-haut qu’en collective du CAF, quand au sommet l’un sort sa bouteille de rouge, l’autre ses cakes au poireau et la-e troisième sa tarte aux pruneaux :slight_smile:
(J’ai dit CAF par facilité mais ça aurait pu être autre chose hein)