Posté en tant qu’invité par Paul G:
Témoignage sur une sortie de 3 jours, avec quelques incidents heureusement sans conséquences. Histoire d’avoir votre avis sur la manière de prendre des décisions dans un groupe ?
Les choses sont racontées de mon point de vue, avec la sensibilité de qq un qui a l’habitude d’encadrer des sorties en club (CAF…).
Avant toute chose, je dirai que c’était globalement un bon we.
N’allez pas croire qu’on a passé notre temps à s’engueuler !!!
Un petit code de lecture sur ma manière de voir :
Incident * : pas grave, mais révélateur
Incident ** : que se serait-il passé si… ?
Incident *** : on n’a eu de la chance que ca se soit bien fini
Le groupe :
Nous sommes 5, et j’appellerai les 4 autres A, B, C, D.
Au départ, je ne connaissais personne.
Par contre, A, B, et C se connaissent déjà.
Avec du recul, je dirai :
-
A et B montent vite, et sont de bons skieurs.
-
C monte vite, et est un skieur moyen
-
D est plutôt « débutant prudent », monte doucement, descend doucement. Il est équipé en télémark.
-
Et pour ma part, c’est ma première sortie de l’année (boulot, déménagement). Je monte doucement (300m/h, pauses incluses). Sur le plan de la sécurité, je pense souvent que si le pire n’est jamais sûr, il est toujours possible…
A priori, difficile de dire les compétences de chacun. Je suis le seul « breveté » du groupe, et je crois être celui qui pratique depuis le plus longtemps.
La sortie s’est décidée à la dernière minute, le jeudi soir, à la réunion au local. Nous sommes d’accord pour qq chose de cool, genre 1000m/jour, PD max. Sur des critères nivo-météo, j’ai proposé le massif (Beaufortain), et j’ai trouvé le gite le vendredi midi, pour un départ vendredi soir (5h de route). Tout le monde est pratiquant depuis plusieurs années, et possède son propre matériel, y compris ARVA.
Météo / nivo : beau temps chaud, iso zero vers 2500m, neige de printemps évoluant de manière classique. Les versants ensoleillés sont mous vers 9-10h, les versants ombragés sont mous vers 12-13h.
Samedi : Rocher des Enclaves (F, Nord Ouest, deniv = 1200m)
Incident **
A mi-pente, A décide de passer à gauche d’une butte, commence à galérer dans un passage raide, enlève ses skis pour monter.
Pendant ce temps, C passe par la droite, suivi des deux autres.
Je n’ai plus la possibilité de voir tout le monde. Je vérifie que A ne galère pas trop, et je reprends ma marche en passant à droite, derrière les 3 autres.
On se retrouve tous 10mn + tard, et je fais remarquer que ca me semble mieux de rester en vue les uns des autres, parce qu’on ne sait jamais ce qui se passe…
Note PG : Si A avait un problème, j’étais seul et isolé pour le secourir. Et qd je suis parti à droite et l’ai perdu de vue, il n’était pas encore complètement en sécurité ; je ne voyais plus les autres, retrouvés 10mn plus tard.
Incident *
A, B, C, s’arrête sur une antécime. Ils ne peuvent nous voir. C continue vers le sommet (1km + loin, 100m + haut), hors de vue.
J’arrive à l’antécime. D est encore 5mn derrière.
Il est midi, je trouve qu’il fait chaud, et qu’on devrait descendre sans tarder. B décide de continuer vers le sommet, pour ne pas laisser C seul.
Je fais remarquer qu’ils forcent un peu la main, que D ne semble pas à l’aise, et que ca me semble mieux de descendre rapidement. On convient de s’attendre vers le bas, en dessous de tous les passages « risqués ».
D arrive, on fait demi-tour à 3. Les deux autres nous rejoindront un peu avant que nous soyons au point de RV.
Note PG : Si B et/ou C avait un problème vers le sommet ou dans la descente, nous n’avions aucun moyen de le savoir.
Dimanche : Legette du Mirantin (AD, Est, deniv = 800m)
Le choix de course est restreint compte tenu du faible enneigement.
D est OK, mais semble s’attendre à ne pas aller jusqu’en haut (pente à 35°).
Incident **
Pour rejoindre la pente finale, il faut soit traverser une pente avalancheuse (nombreuses traces de boules et coulées), soit redescendre 30m pour traverser un replat.
Je suis 100m derrière, et C choisit la traversée, dans la partie raide. Les autres passent + bas, au pied des coulées, ou au milieu du replat.
Note PG : Je ne pense pas que ca craignait à ce moment là, mais je ne vois pas l’intérêt de rajouter un risque.
Incident ***
A la descente, nous sommes passés légèrement + bas. Il faisait franchement chaud, on s’est retrouvé devant une traversée ensoleillée dans une pente raide et chargée, que je qualifierai de « toxique ». Je suis devant, le plus haut sur une croupe. B et D sont derrière moi, A et B sont 30m + bas. La neige est très molle, ce n’est pas facile pour eux de remonter. Je leur demande d’attendre un peu, je leur dirai depuis l’autre côté s’ils peuvent passer à leur niveau. Je m’engage et passe rapidement le passage, suivi à distance par ceux qui étaient à mon niveau. J’indique aux deux autres une zone qui me semble « correcte ». B s’engage et galère. A n’attend pas, le suit de près puis se lance, le double et traverse.
Note PG : Pour illustrer le danger : je me suis arrêté une seconde au milieu, pour décider comment passer. J’ai tout de suite senti que ca coulait, et que mon ski pesait 30kg. Je n’ai pas traîné… Pour moi, dans un court passage craignos, ce n’est pas la peine d’y aller à deux. Je pense que les deux derniers ne voyaient que la difficulté, et pas du tout le danger.
Incident ***
B passe le plus difficile, puis s’arrête pour se déshabiller parce que trop couvert.
Je lui fait remarquer qu’il est au + mauvais endroit, au milieu de la combe qui ramasse tout, et qu’il peut facilement avancer de 20m. Mais il a déjà posé son sac, et me dit qu’il a bcp trop chaud.
Note PG : au moins 5mn de pause dans la zone de risque maxi…
Lundi : Grand Mont par les remontées, et descente par versant nord (400m montée F, 1300m descente PD)
Incident *
Dans une liaison entre 2 téléskis, D chute, déchausse. Mais sa fixation est une télémark, avec un système de sécurité qu’il ne connait pas. Les 3 autres voient le déchaussage, mais ne s’arrêtent pas, et prennent le téléski suivant.
On mettra 10mn à comprendre le problème et trouver la solution. Il faut forcer assez fort, et on n’est pas trop de deux.
A l’arrivée du téléski, je fais remarquer (en termes un peu vifs) aux trois premiers qu’ils n’étaient pas très solidaires. Ils n’ont guère apprécié, et m’ont dit qu’ils seraient redescendu si ca avait trop duré.
Note PG : pas de souci majeur de sécurité sur ce coup là, mais nos forfaits arrivaient à expiration dans le quart d’heure suivant. J’étais un peu stressé sur le timing de la réparation. On risquait surtout de se croiser sans se voir, et au pire de se prendre une heure de retard (avec conséquence sur la qualité de la neige, etc…).
J’aurai pu faire remarquer à D qu’il est bon de connaitre son matériel avant de partir, mais vu son profil « débutant » je n’ai rien dit.
Conclusion
Pour info, nous avions parlé de sécurité lors d’une soirée. C me racontait qu’il avait perdu des amis du club dans une avalanche, et qu’il était donc bien sensibilisé.
J’ai voulu savoir ce qui s’était passé, il m’a dit que « c’était la faute à pas de chance », et « qu’ils étaient très compétents », mais je n’en ai pas su plus.
Je crois que mon approche de la sécurité n’est pas du tout la même que celle des autres participants « expérimentés ». Je n’aime pas la fatalité, j’essaye de lui laisser le moins de place possible.
Je n’ai pas les moyens physiques d’être le premier dans la montée (quelques années et quelques kilos en trop…)
Je comprends que les gens veulent se faire plaisir, on est là pour ça. Il fait beau, ils sont + rapides que moi à la montée, ils ont envie d’avancer.
Que faire ? Suis-je un peu parano ? Je sais bien que tout le monde se croit compétent, et que je n’ai pas de raison d’être supérieur. Mais un « breveté » (donc au moins + formé que les autres) doit il se taire qd il pense qu’il y a une source de risque ? Faut-il laisser chacun choisir « sous sa responsabilité », sans rien dire ?
A mon avis, pour les sorties « officielles » du club, je callerai les choses lors de la réunion préparatoire, en exigeant des participants qu’ils restent en vue de celui qui précèdent. Je crois qu’il vaut mieux être « cassant » avant la sortie, pour éviter des soucis ensuite.
A moins que la seule solution ne soit des collectives à 20, avec interdiction de sortir de la file ?..
J’attends vos avis avec impatience, mais j’aimerai qu’ils concernent la globalité, et ne s’arrêtent pas à un seul détail.
[%sig%]