Posté en tant qu’invité par Marcel Demont:
Caro a écrit
Je ne nommerai que ceux qui sont marquants:
- en tête de liste: Panossière: le gardien est franchement affreux
La très intéressante histoire de la cabane Panossière commence en 1881, lorsque la section Monte Rosa du Club Alpin Suisse, faisant oeuvre de pionnier, aménagea sommairement une grotte sise au pied même du Grand Tavé.
A la base de la paroi du Tavé, au milieu de quartiers de blocs éboulés, un grand rocher laisse au-dessous de lui un vide suffisant pour servir d’abri.
Largement ouverte au sud-ouest, mais en partie protégée par l’éboulis, cette cavité pouvait avoir déjà abrité des bergers de moutons.
Deux murs furent construits, l’un au sud, contre l’éboulis, l’autre faisant façade à l’ouest. Ils formaient un angle droit. Le mur donnant sur le glacier, à l’ouest, fut percé d’une porte et de deux minuscules fenêtres.
Reposant sur des poutres encastrées dans le roc, un plancher séparait le refuge dans le sens de la hauteur, aménageant ainsi deux étages reliés par un raide escalier constitué de blocs de pierre.
Au rez-de-chaussée, il n’y avait pas de plancher. Quant aux murs, ils étaient nus.
Quelques chevilles de bois, servant à suspendre couvertures, habits et matériel étaient fixées ici et là.
Le mobilier était spartiate.
L’étage inférieur, « le rez », équipé d’une table et de deux bancs adossés aux murs, servait de cuisine ; il contenait un fourneau de fer, deux marmites, un seau en bois, une poêle à frire, une poche à eau, quatre couteaux, quatre fourchettes, quatre assiettes, douze tasses, une cafetière, un pot, un chandelier en bois, une scie et une hache.
L’étage supérieur était utilisé en guise de dortoir. Il comprenait un cadre-lit de camp garni de paille et sept couvertures… pour huit places.
Tout un chacun pouvait utiliser le refuge absolument librement, sans avoir à payer quoi que ce soit. Par contre, chaque caravane devait fournir son bois.
Il s’agissait d’un lieu fort peu accueillant, fréquemment envahi par la neige et la glace ; du plafond formé par un pan déversant de roc tombaient des gouttes d’eau.
En dépit du confort rudimentaire qu’il offrait, l’abri était néanmoins fort apprécié en toutes occasions, et d’un grand secours, lorsque la tempête battant la montagne menaçait les alpinistes de ses serres glacées.
Voyons ce qu’en dirent quelques messieurs, à cette époque :
« Au retour de l’ascension du Grand Tavé, nous arrivons à la cabane Panossière où nous avons prévu de passer la nuit.
Pénétrer au rez-de-chaussée de cette sorte de cave humide s’avère difficile, car les lieux sont encombrés de neige et de glace.
Après bien des efforts, nous exhumons d’une congère le fourneau-potager, doublé d’une couche de glace.
A l’étage supérieur, celui du dortoir, tout un côté est envahi par la neige.
La paille revêtant les couchettes est humide et à demi pourrie. Tant pis, l’heure venue, nous y étalerons nos membres endoloris pour un repos bien nécessaire.
Enfin, nous allumons un bon feu, non sans avoir, au préalable, démoli une caisse pour avoir du bois, car notre guide et son porteur n’en ont guère transbahuté.
Sur le poêle ronflant nous préparons une soupe et du thé dont nous nous délectons, oubliant presque, pour un bref instant, que nous avons les pieds et les fesses dans l’eau.
L’un d’entre nous joue un air entraînant avec son fifre.
En dépit de l’inconfort, le lendemain nous réalisons l’ascension du Grand Combin, et, au retour, décidons de faire encore les cinq heures de marche nécessaires pour rejoindre le Châble ! »
« Après avoir réussi l’ascension du Combin de Corbassière, au cours de l’après-midi, pour nous ragaillardir, nous concoctons, dans le respect de toutes les règles de l’art culinaire, une bonne soupe.
Nous y mettons tous les excellents produits que nous pouvons trouver, y compris un os de jambonneau abandonné par des prédécesseurs, et dont la moelle doit remplacer le beurre.
Pendant que la soupe mijote, nous nous installons au soleil, sur les rochers, en avant de la cabane.
Enfin, l’un d’entre nous apparaît, jubilant, avec la marmite fumante.
Etonnement général!
Une épaisse mousse blanchâtre, parsemée de petits fragments ressemblant à des vermicelles, recouvre la soupe.
Qu’est-ce ?
A la lumière du jour, l’énigme est vite éclaircie : le malheureux os de jambonneau ne contient que des asticots ! Les moins délicats tentent bien d’ingurgiter quelques cuillerées, mais… ils y renoncent promptement, et le contenu de la marmite va irriguer la moraine. »
Cette première cabane Panossière existe toujours ( en ruines). Pouquoi ne pas la visiter? Y loger? A l’ancienne. C’est gratuit.
Aujourd’hui, la nouvelle cabane Panossière (la cinquième du nom) est une des plus belles cabanes des Alpes. Propre, bien gérée, nourriture bonne et abondante, genépi offert.
[%sig%]