Posté en tant qu’invité par DerF:
Salut,
Un exemple sur les dangers potentiels de l’extraction de l’or:
Une vague de cyanure échappée début février 2000 d’une mine d’or en Roumanie, a contaminé deux rivières hongroises, la Szamos et la Tisza, avant de pénétrer dans le Danube en Yougoslavie. La pollution est entrée dans les eaux du Danube à Stari Slankamen, à 50 km environ au nord de Belgrade. De grandes quantités de poissons morts flottaient sur le Danube… Le Danube dessine la frontière roumano bulgare sur plus de 800 km avant de bifurquer dans un delta dont l’un des bras marque la frontière avec l’Ukraine. Ce delta est l’une des principales réserves naturelles d’Europe.
V.2/ Les origines de la catastrophe
La catastrophe a été provoquée par la rupture d’un mur d’un réservoir d’un site d’extraction d’or localisé à Baïa Mare (Nord de la Roumanie) dans la nuit du 31 janvier 2000. Ce site appartient à la société compagnie Esmeralda Exploration . C’est dans cette digue en terre qu’une brèche de 25 mètres de long s’est formée, à la suite de précipitations abondantes, permettant le déversement de plus de 100.000 mètres cubes d’eau mélangée à du cyanure sur la plaine avoisinante, puis dans la rivière Lapus.
La cyanuration est un procédé utilisé couramment dans l’industrie minière pour extraire le métal précieux de sa gangue minérale. Ce procédé est largement utilisé dans les pays où l’or est exploité, notamment, en Australie, aux Etats-Unis, au Canada et en Amérique latine. Il est réservé au traitement des minerais à basse teneur en or, très oxydés.
Concrètement, le minerai d’or, une matière en général assez meuble, est broyé puis disposé en tas de quelques mètres de hauteur sur des bâches imperméables. Ces tas sont arrosés par aspersion avec une solution très diluée de cyanure. La solution cyanurée agit comme un percolateur à travers le minerai, et dissout l’or au passage. Cette solution est ensuite extraite du tas, puis conduite sur des colonnes qui contiennent du charbon actif. Sur ces charbons, le sel d’or cyanuré est détruit et l’or se redépose. C’est un procédé facile à maîtriser. Il y a de nombreux procédés industriels qui présentent de plus gros risques.
Il semble que le projet n’ait pas pris en compte les facteurs climatiques de la région : la compagnie Esmeralda Exploration n’a pas prévu de système de fonctionnement spécifique en hiver. De plus, le gel et le dégel successifs, fréquents en hiver, sont susceptibles de produire des brèches dans les digues. Il a suffit que des pluies abondantes tombent pendant plusieurs jours et qu’une épaisse couche de neige fonde pour que l’eau s’infiltre à travers la digue et provoque une large brèche.
Un lac s’est formé suite au stockage des eaux provenant des différentes étapes de traitement du minerai pour l’extraction de l’or. L’aménagement de ce lac respecte les normes de protection de l’environnement. Le lac est entouré par deux digues et tapissé par une feuille isolante en caoutchouc qui empêche que la solution de cyanure ne pénètre dans le sol et ensuite dans la nappe phréatique. Selon les habitants, une forte odeur de cyanure se dégage du lac, aujourd’hui recouvert de glace, qui s’étend sur 95 hectares. « Nous nous sommes habitués à cette odeur. En été, les oiseaux morts se comptent par dizaines », dit Anton, un chauffeur de camion qui décharge un mélange de terre et de résidus censés renforcer la digue de protection.
V.3/ Les conséquences écologiques
Au moins cinq puits du village de Bozanta. le plus proche du lieu du désastre, ont été contaminés au cyanure, selon l’Agence de la Santé publique.
Dans certains puits la concentration du cyanure est 5 à 7 fois supérieure au taux admis, alors que dans d’autres, elle dépasse 50 fois ce taux. Cependant, selon certains spécialistes, l’eau ne pose pas de danger pour la santé, à moins qu’elle ne soit consommée en quantités énormes.
Par contre, à cause du cyanure, des centaines de tonnes de poissons morts ont été sortis de la Tisza en Hongrie mais ce n’est pas tout, loin de là. De nombreux poissons morts ont afflué vers la Yougoslavie de telle sorte que les quantités ne peuvent pas être précisées exactement.
Les poissons ne sont que le dernier maillon de la chaîne alimentaire mais la nourriture des poissons a été aussi tuée (petits crabes, des escargots, les plantes aquatiques) Les oiseaux ont déjà quitté les rives du fleuve, intuitivement ils ont réalisé qu’ils ne pouvaient pas manger la nourriture en provenance du fleuve Tisza. L’eau de la Tisza est aussi utilisée pour l’irrigation des champs, ce que l’on ne pourra plus faire une fois la vague de cyanure passée, car il faudra beaucoup de temps avant que la rivière ne redevienne pure.
Les autorités assurent que de l’hypochlorite de sodium (eau de javel) a été aussitôt déversée sur les lieux et dans l’eau afin de neutraliser l’effet de cette substance très toxique qu’est le cyanure. Plusieurs scientifiques ont évoqué le recours excessif à I’hypochlorite de sodium, sous entendant que certains pays voisins à la Roumanie ont pu avoir ou la main trop lourde.
Ce n’est paradoxalement pas le cyanure qui va poser les plus graves problèmes. Les concentrations de cyanure étaient revenues en dessous du niveau toxique le 13/02/2000 en Hongrie. Le cyanure peut être dilué mais des métaux lourds très toxiques se sont déposés dans la boue au bord de la rivière. Ces métaux lourds piégés dans des particules extraites de minerai d’or sont libérés et peuvent se disperser dans l’environnement. Les métaux ainsi dispersés sont le fer, le cuivre, le plomb, le zinc et souvent le cadmium. Ce type de métaux se désintègre beaucoup plus lentement et empoisonne l’environnement pour une période beaucoup plus longue. Des concentrations anormales de fer et de cuivre ont ainsi été constatées dans la Tisza, un affluent du Danube, selon le ministère yougoslave de l’Agriculture, qui n’a pas de donné de précisions chiffrées. Ironie du sort, les installations roumaines, dans une démarche qui se voulait exemplaire pour l’environnement, traitent des déchets minéraux d’une ancienne mine exploitant le cuivre, le plomb et le zinc.
« Le cyanure est une pollution qui a des effets immédiats sur la faune. Avec les métaux lourds, on est en présence d’une pollution plus insidieuse, qui aura des effets à long terme », explique de son côté un spécialiste de l’association écologiste France Nature Environnement, Christian Hosy. Ces éléments toxiques, au lieu de s’éliminer progressivement, vont être stockés dans les différents organismes de la chaîne alimentaire, depuis les végétaux jusqu’aux mammifères et à l’homme, en passant par les mollusques, les poissons et les oiseaux.
Une partie de ces métaux va de plus s’accumuler dans les sédiments des cours d’eau. Là, sous l’influence de facteurs physico-chimiques ou de bactéries, ils peuvent acquérir des formes beaucoup plus toxiques que le composé que l’on avait au départ.
Le Fonds mondial pour la nature (WWF) a exhorté la Roumanie et la Hongrie à mettre au plus vite sur pied un plan d’action. Selon le WWF, la Tisza abrite 19 des 29 espèces de poissons protégées et la pollution a éradiqué toute forme de vie sur 400 kilomètres de rivière. « Nous savons déjà que la réhabilitation de la rivière va prendre des décennies. »