Je suis un peu perplexe devant ce débat. Je suis sensible aux Calanques que je fréquente, plus en tant que randonneur qu’en tant que grimpeur. Je suis donc aussi concerné par ces réserves intégrales dans des secteurs qui comptent parmi les plus beaux de l’éventuel futur parc.
Connaissant bien d’autres parcs nationaux, je trouve que l’on marche un peu sur la tête dans cette démarche. Il me semble que le stade Parc National avec des niveaux de protection analogues à ceux des parcs existants est déjà un premier stade suffisamment intéressant pour la protection mais aussi déjà très perturbant pour son acceptation, sans qu’il soit nécessaire d’en rajouter une couche en transformant une grande partie du cœur du parc en réserve intégrale. Déjà ce premier stade nécessitera de grands efforts de persuasion auprès des populations, des associations pour qu’ils acceptent le parc et auprès des élus pour qu’ils signent l’adhésion de leur commune. Vouloir créer une vaste réserve intégrale m’apparaît comme agiter un chiffon rouge de façon à provoquer le rejet du parc. Certains se sont sans doute un peu emballés dans ce sens - quel jeu jouent-ils ? - et ils vont devoir faire machine arrière très vite au risque de ne pas avoir l’adhésion des communes. Dois-je aussi rappeler que le CA d’un Parc National est à majorité d’élus ?
Il ne faut pas se faire d’illusion, l’adhésion des communes au parc se marchandera, car sans adhésion des communes, pas de parc. Et ce marchandage se fera au niveau de ce que certains appelleront des passes-droits concernant les cabanons, les accès et différents droits d’utilisation pour les locaux, bref au niveau des contraintes imposées aux utilisateurs. Donc, en tant que grimpeurs, randonneurs, pécheurs et usagers locaux, nos amis des communes concernées, et Marseille en est une, auront leur mot à dire, ne serait-ce qu’à travers les enquêtes publiques obligatoires pour un tel projet.
D’un autre côté, je suis surpris et pour tout dire déçu des réactions et des arguments que je lis sur ce forum. D’une part, il n’y a pas de prise en compte des raisons qui pousseraient à un tel classement. Pourtant, ce genre de projet doit être argumenté. D’autre part, les arguments se résument à ‹ pas touche à mon terrain de jeu › sans remise en cause des pratiques. C’est un peu court.
Si les grimpeurs s’arque boutent sur cette position, ils se marginaliseront. Vu l’importance de l’escalade dans les Calanques, il y aura nécessairement un chapitre de la charte ou une convention qui en régira la pratique, et donc des évolutions de celle-ci. Celle-ci ira obligatoirement dans le sens d’une pratique respectueuse de l’environnement. Ne dites pas que ce n’est pas possible, car dans ce cas vous connaissez déjà la solution et vous êtes vent debout contre.
Qu’au contraire donc, ce débat soit plutôt l’occasion d’une remise en cause de petits travers et de petites entorses qui, mis bout à bout, détériorent les pentes, abîment le rocher, détruisent des biotopes de plantes rares, dérangent les oiseaux, et que sais-je encore.
Bref, il vaut mieux sortir par le haut de ce débat, en améliorant les choses qu’en pratiquant la politique du pire.