Si vous avez raté le début :
1 – La montée au refuge d’Argentière
2 – Le sauvetage en crevasse
3 – La rimaye du Glacier du Milieu
[u]4 – SOS crampons[/u]
Je me suis jetée de côté pour échapper au gouffre béant, et j’ai planté de toutes mes forces mon piolet, tout en m’y agrippant,
pour freiner la terrifiante glissade infernale qui allait s’ensuivre…
Cette technique d’arrêt, révisée cent fois sur névés, je la réalisai de manière automatique, réflexe, elle pouvait me sauver la vie !
Bernard a sauté à mes côtés : « mais qu’est-ce que tu fabriques ? »
En fait, il n’y avait aucun risque, et j’étais complètement ridicule… mais par contre, et ça m’a permis de sauver la face, c’est que mon crampon droit était comme désarticulé, en 2 morceaux, la petite barrette avait cassé net, et l’avant pendouillait lamentablement, retenu seulement par la sangle. Au magasin, ils n’avaient sans doute pas retrempé l’acier…
On a ficelé le tout, y compris la chaussure avec de la cordelette à prussik : c’est incroyable les bricolages que l’on peut réaliser avec ces cordelettes, ça m’est même arrivé de réparer des chaines à neige avec ! J’en ai toujours des brins plus ou moins longs dans mon sac, qui sont bien utiles en cas de dépannage, et qui m’évitent de détricoter mes machards.
Nous sommes descendus en prenant mille précautions, plus question de faire les fiers !
J’ai marché comme sur des œufs jusqu’à ce que la neige suffisamment ramollie nous permette de descendre « en chaussures »,
et nous sommes arrivés au refuge, bien perplexes sur la suite du déroulement de notre aventure…
Il nous restait plusieurs jours de nourriture, la météo était bonne, nous étions très motivés pour continuer et Bernard n’avait pas du tout envie de redescendre !
Nous avions prévu le Couloir en Y à l’Aiguille d’Argentière pour la suite, et il était justement en excellentes conditions d’après deux gars qui en revenaient.
De plus nous venions de faire connaissance avec Philippe et Jean-François qui y allaient le lendemain et qui pouvaient faire une cordée de trois avec Bernard
Il me fallait descendre de suite dans la vallée pour la réparation, et remonter le lendemain, cela nous semblait la meilleure solution.
Mais j’avais beau demander, personne ne descendait…
J’avais encore en souvenir le sauvetage de la veille, il était hors de question que je descende seule sur le glacier !
Tout le refuge fut au courant de mon infortune, et un guide m’a proposé de réaliser un rafistolage. Le gardien nous a donné du fil de fer et je me retrouvai bientôt avec des crampons bricolés qui pouvaient tenir à condition de les manier avec délicatesse, et de ne pas trop abuser de « pointes avant ».
Je revins triomphalement rejoindre mon acolyte, mais son accueil fut moins enthousiaste :
« tu es sûre que ça va tenir ? »
« mais oui ! c’est un guide qui me les a réparés ! Tu te rends compte, un guide ! Il a dû en bricoler déjà des dizaines pour ses clients ! »
Je ne comprenais pas son inquiétude, mais ce n’est qu’un peu plus tard que je vis ce qu’il avait lu dans le livre du refuge…
(à suivre…)
la suite est là : 5- Le couloir en Y