Posté en tant qu’invité par l’Urbain:
Ha !
Marcel, tu vois, j’avais oublié.
Merci de me remettre ça en mémoire.
Quel âge avais-je ?
Je ne sais pas.
Gamin, ça, c’est sûr.
Disons 10 ans. C’est rond.
A 5 ans, pourtant, on avait bien fait un tour sur la mer de glace, mais je n’avais rien vu. Les sommets étaient trop loins pour que j’aille y faire des conneries. Et puis, il y avait la bienveillance des parents…
Alors j’ai attendu.
Jusqu’à ce jour fatidique d’un certain mois de Juillet.
Les parents de mon ami d’alors s’étaient décidés à m’emmener avec eux pour les grandes vacances, au bord de la grande bleue. Pour y aller, deux jours de trajet, dans le camping-car familial, le long de cette fameuse nationale.
Nous voilà donc au camping, pour la nuit.
Moi qui vient de la région centre, je suis esbaudis : la végétation, le relief, rien n’est pareil. On m’aurait débarqué sur la lune que je n’aurais pas été plus étonné.
Il y a là un joli lac, et au dessus, une taupinière. Cette dernière est fort ravinée, et je me souviens encore de l’effet qu’elle me fit, avec ses grandes blessures rouges et rondes.
Ce n’est plus une montagne, c’est bien plus. C’est une promesse. C’est l’inconnu. C’est un territoire vierge. C’est une occasion de faire quelque chose de grand, mais d’incompréhensible. C’est ma première femme nue. C’est quelque chose d’incroyablement vivant, quelque chose de troublant. C’est la mort, peut-être. Ou le destin. Ou un autre truc de philosophe auquel nous, les sensibles, ne comprenons jamais rien.
La décision est vite prise : il nous faut y monter, et en passant par les ravines, évidemment.
Nous partons à l’aube : il s’agit d’être de retour avant le départ.
Dans les ravines rouges, nous fonçons tête baissée : l’appel du sommet est impérieux, madame ne veux pas attendre. Ça glisse un peu, et on se salit très vite. Quelle ambiance ! Le dépaysagement et l’absence d’encadrement me montent à la tête. Je suis ivre. Plus vite, plus vite ! Au dessus, le terrain est toujours raide, et il faut composer avec la végétation. Mais de ça, les solognots ont l’habitude.
Le sommet est noyé dans les arbres. Pas de vue. On ne s’arrête même pas : on se contente de constater que monter n’est plus possible, et qu’il faut vite descendre au camping, sinon, c’est la raclée.
Après ça, les vacances à Sète, je ne m’en souviens même plus.