La méthode Munter à Grenoble

Montagnes Magazine et le CAF Grenoble-Oisans organisent une soirée sur la méthode dite de « réduction des risques » d’avalanches de Werner Munter.
Une méthode largement adoptée en Suisse et qui semblerait-il porte ses fruits.

Soirée animée par

Philippe Descamps, rédacteur en chef de Montagnes Mag,
Françoise Gendarme, Présidente du syndicat des guides
et Isabelle Petit, Présidente du caf Grenoble Oisans.

Le Mardi 5 Février au CRDP à Grenoble

Voir le site :

http://www.cafgo.org/spip.php?article238

La soirée, c’est le :

Mardi 5 février 2008 à 20 h 30

Grande salle du CRDP - Avenue du Général Champon à Grenoble

Elle n’est pas plus efficace qu’un autre, elle montre simplement qu’il est préférable de se poser des questions avant de sortir, belle découverte…

Elle n’est pas plus efficace qu’un autre, elle montre simplement qu’il est préférable de se poser des questions avant de sortir, belle découverte…[/quote]
Elle permet de se poser les bonnes questions; on peu se poser des milliers de questions; si ce ne sont pas les bonnes ça sert à rien.

Même pas à mon avis.

Un exemple : le facteur humain qui ne devrait jamais être pris en compte dans le choix d’un itinéraire quand on se pose la question du risque d’avalanche (je ne dis pas que le facteur humain n’entre pas en compte dans le choix de la course, je dis qu’il n’entre pas en compte quand on étudie le risque d’avalanche), on sait parfaitement maintenant que les experts se font aussi facilement prendre que les néophytes.

entre départs spontanés et départs déclenchés, il y a quand même intervention d’éléments extérieurs, non? (humains, chamois, météorites, extra-terrestres…)

par ailleurs, je ne crois pas que FdF ait écrit que cette méthode était « plus efficace qu’une autre »…

Qui a dit contraire ? Je dis simplement que le facteur humain ne devrait pas être pris en compte dans le choix de l’itinéraire quand on l’envisage uniquement du point de vue des avalanches.

Je ne sais pas si la méthode Munter est la (ou une) bonne méthode…

Mais quand je monte là-haut, j’essaye d’assumer des prises de risque « réfléchies », « maitrisées(?) ». Je voudrais essayer.
Et je trouve qu’il y a beaucoup de choses qui font réfléchir dans ce que dit Werner Munter. (cf:Montagnes Mag décembre).

Il dit par exemple qu’il y a PLUS de progrès à faire dans l’étude des comportements (la psychologie) des skieurs qu’en nivologie…

Sur « l’expérience » que nous avons chacun accumulé, il n’y va pas avec le dos de la cuillère :
-" Le monsieur"je sais tout" a fait son temps. Il a été à l’origine de trop d’accidents…"
Plus loin il dit :
-" L’expérience est primordiale pour choisir un itinéraire, mais elle ne suffit pas pour prendre une décision dans les situations critiques…On peut faire la même faute pendant des années et accumuler une fausse expérience. « j’ai toujours fais comme ça, je n’ai jamais eu d’accident » n’est pas valable. Si 1000 guides font cette faute il y aura beaucoup d’accidents…En étudiant les accidents, je peux connaitre les mauvaises expériences de centaines de milliers de skieurs. On peut démontrer aujourd’hui que les accidents les plus graves, autour du monde sont provoqués par des professionnels très expérimentés, qui connaissaient les lieux…"

Et il en appelle à appliquer « une stratégie rationnelle » dans laquelle « l’expérience est très utile » mais qui laisse moins de place au « pifomètre ».

D’où le travail sur sa méthode, qui il faut le rappeler a été adopté par les guides et clubs alpins de plusieurs pays.

Encore une fois son interview mérite réflexion et débat avec tous ceux qui se sentent concernés.
D’où la soirée de mardi à Grenoble…

Eh bien, continues à penser ce que tu veux, mais arrête de marteler des contre-vérités !
Il y a des tas d’exemples qui contredisent ce que tu martèles.

Lorsque j’encadre un groupe, je tiens compte entre autres des gens du groupe dans le choix de la sortie elle-même, mais aussi dans le choix de l’itinéraire, et ce à tous les niveaux de la méthode 3 X 3.

Une seule personne trop lente, ou ne pouvant pas faire de conversions dans une pente raide, ou pas assez disciplinée peut faire qu’elle-même, voire tout le groupe se retrouve dans une situation dangereuse du point de vue avalanche si l’on n’a pas pris en compte ce problème à temps pour adapter l’itinéraire.

C’est un aspect qui me tient énormément à coeur, de tenir compte des gens avec qui je suis, même au-delà de la sécurité : il en va du plaisir et de la convivialité aussi !

Je vous conseille vivement d’y aller. Qu’on aime ou pas sa methode, c’est vraiment un excellent orateur et pédagogue qui s’exprime en très bon français.

il vous sortira surement un des ses expressions favorites concernant les plaques d’epaisseur faible ou modérée: « mas ce sont des tonnes et des tonnes de neige ». Avec l’accent germanique bien sur le « t », c’est délicieux :lol:

bonne conf!

C’est ce soir !

Bonne journée.

J’ai assisté à la conférence de Werner Munter hier soir à Grenoble.
J’ai bien apprécié sa présentation de l’historique de la méthode, et de la méthode elle même.
Je résume en gros.

Dans les années 80 en Suisse, il y a eu une « série noire » d’accidents d’avalanches déclenchées, avec au moins un accident par an comprenant au moins 5 morts d’un coup, alors que les groupes accidentées étaient tous expérimentés (au moins les responsables dans le cadre de groups de club), et qu’un grosse proportion impliquait des guides (corrigez-moi si je me trompe).
Et Munter était un de ceux qui avait fait la formation avalanche des accidentés… Donc grosse remise en cause.
Les méthodes employées jusque là pour évaluer le risque d’une pente étaient du style coin glissant, analyse stratigraphique du manteau, etc. C’était long, compliqué, et visiblement inefficace !

Il a donc tout repris à zéro, en analysant ce qui n’allait pas avec les méthodes du type coin glissant.
Le résultat d’un coin glissant est : coin fragile, moyen, solide. Ce résultat n’est pas extrapolable à la pente adjacente ! Car dans la plupart des pentes en neige sèche, si on fait des coins partout, on trouvera des coins fragiles, moyens, solides, mais avec des proportions différentes et avec une répartition uniforme ou rassemblée par type. La seule utilisation possible d’un coin glissant est de faire des statistiques sur de nombreux coins.
Munter a fait 600 coins glissants dans de multiples conditions, et fait des statistiques par rapport au risque du bulletin, la pente, l’orientation.

Influence du risque donné par le BRA
Il a remarqué que pour les autres paramètres fixés, si il y a 5% de coins fragiles par risque 1, il y en a 10% par risque 2, et 20% par risque 3. La proportion double lorsqu’on passe d’un niveau de risque à un autre.
Il a donc donné un « potentiel de danger » à chacun des niveau de risque du BRA, avec un doublement entre chaque niveau : 2 pour risque 1, 4 pour risque 2, 8 pour risque 3. Pour le risque 4 (et 5), sa méthode n’est plus applicable (elle est toujours saturée).

Attention, le risque 4 en Suisse commence à un niveau plus élevé qu’en France. En découpant le risque 4 français en 3 (4-, 4o et 4+), le risque 3 suisse comprend le risque 3 français, plus le risque « 4- » français. Le risque 4 suisse comprend le risque « 4o » et « 4+ » français. Le risque 5 est le même entre les 2 pays. Cette différence est importante pour l’application de la méthode Munter en France.

Influence de la pente
Pour les autres paramètres fixés, si il y a 10% de coins fragiles sur une pente à 30°, il y en a 20% sur une pente à 35° et 30% sur une pente à 40°.
Il y a donc moins de risque avec une pente plus faible. Il a donc donné un « facteur de réduction de risque » de 1/4 pour les pentes de 34° et moins, 1/2 pour les pentes entre 35° et 39°, et 1 pour les pentes de 40° et plus, en sachant que la méthode ne fonctionne pas pour les pentes très raides (45° et plus, mais parfois à partir de 41° :slight_smile: - la raison sera expliquée plus tard si vous êtes sages).

Influence de l’orientation
Pour les autres paramètres fixés, si il y a 10% de coins fragiles sur une pente quelle que soit l’orientation, il y en a 20% dans la moitié W > N > E, et 30% dans le quart NW > N > NE.
Il a donc donné un « facteur de réduction de risque » en fonction de l’orientation de la pente :

  • 1/4 si la pente est dans la moitié S et qu’elle n’est pas dans les plages d’orientations et d’altitudes signalées comme risquées dans le BRA,
  • 1/3 si la pente ne se trouve pas dans la moitié N,
  • 1/2 si la pente ne se trouve pas dans le quart N,
  • 1 si la pente se trouve dans le quart N.
    Ceci n’est valable que pour de la neige sèche.

Influence du nombre de personnes et de la fréquentation
Le même type de raisonnement amène à un facteur de réduction de 1/3, 1/2 et 1 selon l’espacement dans le groupe et les traces déjà présentes (je ne détaille pas).

Méthode Munter
La méthode Munter consiste à évaluer les facteurs de réductions, et à calculer « l’indice de Munter » (dénomination perso pour ne pas se perdre dans les explications) en multipliant le potentiel de danger (issu du BRA) par les facteurs de réduction.
Munter estime que le risque est acceptable si l’indice est inférieur ou égale à 1. Pas la peine de s’imposer un indice de 0,8 ou 0,5 par exemple, car on renoncerait à beaucoup d’itinéraires pour ne pas gagner grand chose en risque, car pour atteindre un indice de 1, on a déjà renoncer à la plupart des itinéraires dangereux.
Il y a beaucoup d’arbitraire dans la conception de la méthode. Mais en la confrontant avec l’expérience, il a pu choisir des facteurs de réduction adaptés, et vérifier si elle fonctionnait. Et la plupart du temps, ça marche. Et surtout, la plupart des gros accidents auraient pu être évités.
Cette méthode est juste un outil pour évaluer le risque d’une pente, et doit être utilisée à l’intérieur de la méthode 3x3 pour être vraiment efficace. Lorsque la méthode 3x3 ne nous a pas fait renoncer, on applique la méthode Munter : si c’est encore bon, on peut y aller, car le risque de déclencher une avalanche sur cette pente est faible (mais pas nul bien sûr).

Adaptation à la France
La méthode Munter repose sur les bulletins de prévision des risques d’avalanche. Ceux-ci sont élaborés entre autre à partir de tests ponctuels (comme le coin glissant) effectués chaque jour dans les stations de ski. Les tests ponctuels sont donc toujours utilisés, alors que Munter a voulu les abandonner : ça parait contradictoire. Mais en fait, le risque du BRA est calculé à partir d’un grand nombre de tests ponctuels, et on peut faire des statistiques dessus, comme l’a fait Munter pour concevoir sa méthode. De plus, le bulletin ne se base pas que sur les tests ponctuels.

Par contre, les BRA français sont différents des BRA suisses :

  • le niveau de risque pour le risque 4 est différent
  • le BRA français donne un risque par massif, alors que le BRA Suisse donne une carte (en plus du texte) avec des zones d’ « isorisque »
  • le BRA français donne des orientations plus risqué, mais peu précises (souvent sans précision de massif, donc valable pour tout le département), alors que le BRA suisse donne des « camemberts », en nombre variable selon l’hétérogénéité des conditions.

Le SNGM a réfléchi à une adaptation. Elle est en cours d’évaluation. C’est pourquoi elle n’est pas diffusée au grand public, car elle est susceptible d’être modifiée. Déjà que certains à la sortie de la conf n’avait pas compris grand chose, si les règles changent tous les 3 mois c’est pas gagné.
Et comme cette méthode simple pourrait être utilisé comme argument dans un procès, il ne faut pas que l’adaptation soit foireuse. Mais en attendant, chacun peut faire son adaptation perso.

Critique de la méthode Munter
La méthode Munter est utile pour toujours se poser les bonnes questions, et éviter les erreurs dû à la routine ou aux grosses conneries (effet de groupe, « c’est mi avril, pas de problème sous 3000m, go ! », …).
Par contre, pour pouvoir faire la plupart de mes sorties, il aurait fallu que je limite l’indice de Munter à 2 et non 1 :smiley:
Donc perso, j’affine encore la méthode avec des facteurs de réduction supplémentaires. En fait je n’utilise pas cette méthode, mais ça y ressemble, sans que ce soit chiffré.

La grosse découverte de Munter est d’avoir conjecturé et participé à montrer que le risque du BRA donnait une mesure logarithmique du potentiel de danger (donc le potentiel de danger varie comme l’exponentielle du risque du BRA).
Ca ressemble aux échelles d’intensité des tremblements de terre (il y en a plein) basées sur l’observation des dégats (différent de la magnitude qui mesure l’énergie totale libérée lors du tremblement de terre, mesurée sur l’échelle de Richter).
Cette découverte peut aboutir à des résultats intéressants…

Un compte-rendu structuré comme ça, ça pourrait faire un bon article non?

Merci bubu pour ce très bon résumé de la conf d’hier soir.
Il a un sacré look Munter, un mélange d’Hubert Reeves et de ZZ top !
Par contre l’intervention de Françoise gendarme n’était pas géniale. Elle semblait mal à l’aise pour remettre en cause certains aspects de la méthode Munter devant son auteur. Ce serait pas mal de savoir ce que les guides français veulent modifier et pour quelles raisons.

D’accord avec Mic’hel pour l’article.

Ben oui, mais c’est beaucoup trop perso à mon goût, et il manque pas mal de choses.
Je ferai surement un article, mais après critique dans cette discussion.
En fait, j’ai voulu relancé la discussion pour avoir d’autres avis, et un article pourra faire une synthèse de tout ça.

En exposant sa methode, au fil de la conference, Herr Munter dit aussi que pour une course donnee, certains des facteurs de reduction sont constant (en particulier la pente et l’exposition).

Si on considere que le groupe est discipline (distance de secu), …
Si on considere que c2c-v5 (bien exploite) permet de calculer la frequentation de la course, …
Si on considere qu’un script Perl extrait automatiquement le risque nivologique du bulletin MF, …

… on pourrait presque calculer automatiquement l’indice Munter dans les pages html des itineraires !

Delire, non ?

Ok, je science-fictionne…

J’y étais aussi.

J’ajoute à cet excellent résumé deux choses :
La méthode ne s’applique pas aux pentes raides (45/50° et plus)
Il y a une deuxième soirée à la maison du tourisme ce soir.

Je ne dis pas qu’une personne faible techniquement n’est pas un facteur aggravant dans une situation déjà mauvaise mais qu’il est illusoire de penser, quand on prépare l’itinéraire chez soi, que le niveau des participants protège des avalanches.
Tu peux considérer qu’un itinéraire présente (ou pas) un risque acceptable pour ce qui concerne les avalanches, mais jamais relativement au niveau des randonneurs.

Et sa grosse erreur est de vouloir résumer une situation complexe à partir de quelques facteurs statistiques et sans grandes précautions vis à vis de ces facteurs.
On peut prendre l’exemple de l’orientation des pentes, on aura beau avoir constaté que les pentes N sont statistiquement plus dangeureuse il arrive fréquemment que ce ne soient pas le cas, en tout cas pas dans les proportions des facteurs de réduction proposées par Munter. Pourtant la méthode demande de toujours appliquer les mêmes facteurs. Globalement sur des centaines de situations la méthode de Munter rejoint les statistiques (normal, elle est basée sur ces statistiques) mais chaque situation est une situation particulière qui s’en fout un peu des statistiques.