Posté en tant qu’invité par SM:
Discussion intéressante, ne fût-ce que par quelques francs éclats de rire qu’elle a pu m’occasionner … Avec le frisson dans le dos qui lui fait suite, on se croirait chez Molière.
Cependant, me permettez-vous de pointer je que je crois être une couche fragile dans vos raisonnements ? Cela fait dix pages que l’on cause du « risque », sans que jamais personne ne se sente tenu d’en proposer une définition.
J’ai cherché à en savoir un peu plus là-dessus, et c’est utile : on y croise du beau monde (j’y reviendrai).
Une définition, disons « commune » du risque serait : « contingence indésirable ».
Soit, mais encore ?
J’ai trouvé : « existence d’une probabilité de voir un danger se concrétiser », ou bien : « combinaison de la probabilité d’un évènement, et de sa conséquence ». Je trouve que c’est déjà mieux et plus précis.
Mais ce sont bien entendu les mathématiciens qui en donnent la définition la plus pointue et efficace. Ceux qui ont travaillé dans le domaine de la théorie des jeux, bien sûr, avec des calibres du genre de Pascal, Fermat, Huygens … C’est un certain Daniel Bernoulli qui propose en 1738 : « le risque est l’espérance mathématique d’une fonction de probabilité d’évènement » (in Specimen theoriae novae de mensura sortis), ce qui peut s’écrire sous la forme : risque = ∑ (pxC),
Où p est la probabilité de l’évènement, et C la conséquence, la somme étant celle des aléas de la situation.
Nous y voilà, et j’en viens au fait.
1/ Pour connaître un risque, il faut par définition connaître tous les scénarii possibles.
… Hu ! Hu ! Comm’ qui dirait …
2/ Il faut en connaître et mesurer la probabilité. Il n’y a qu’une et une seule possibilité : répéter une expérience contrôlée.
C’est pour cela que l’on sait que la probabilité de sortir un « six » en jetant un dé non pipé est de 0,1666666666 …
Appliqué à une pente de neige, il suffit de répéter le passage du skieur sur la même trajectoire et dans les mêmes conditions de neige (c’est-à-dire sur la pente non skiée), et de compter le nombre de fois où cela déclanche, sur … 100 passages, par exemple.
Vous, je ne sais pas, mais pour ce qui me concerne, je vois comme une difficulté à organiser le plan expérimental, non ?
De ceci, il résulte qu’il est impossible de connaître le risque réel de déclanchement sur la pente précise que l’on a devant soit.
Et que ce que l’on appelle « évaluation » du risque n’est rien d’autre qu’une synthèse plus ou moins pifométrique de l’expérience que l’on peut avoir sur la « moyenne » des pentes comparables. Disons : à peu près comparables, pour autant que l’on puisse en juger, sur 2, 15 … 50 pentes que notre mémoire consciente ou inconsciente arrive à identifier …
Y-a de quoi sourire, non ?
Résumons : le risque estimé par le kiki sur le terrain n’est que la moyenne empirique de son expérience.
Le risque réel est inconnaissable.
Que dire de la comparaison entre le risque estimé et le risque réel ?
Je ne crois pas opportun de vous donner mon avis sur cette manière de faire : vous n’avez que faire de mon avis, vous avez bien raison !
Sinon, sans trop parler de mes petites affaires, je dois vous dire que je ne suis pas tout neuf. Toujours vif cependant (en tout cas, il me semble).
Ce qui me laisse le loisir de songer aux si belles pentes que j’ai renoncé à skier, et dont certaines reviennent faire scintiller mes rêves.