Gestion du risque d'avalanche : méthodes d'évaluation et vigilance

Les méthodes dites « d’aide à la décision » (nivotest, 3x3, réduction…) ont déjà été souvent abordées ici, mais je trouve très intéressant les concepts de vigilance proposés à ce sujet par Alain Duclos, qui visent plus à adapter le comportement une fois sur le terrain qu’à simplement dire go/no go (un résultat qui peut être adapté pour la phase de choix d’une course, mais un peu trop rigide pour être efficace sur le terrain, toute la difficulté se situant dans le « gris » entre « go » et « no go »).

Des critères d’évaluation simplifiés pour être facilement utilisable à chaud :

et les adaptations de comportement associées :

Pour plus de détails et de contexte, un article dans la revue Guides :
http://duclos.transmontagne.pagesperso-orange.fr/2011-04-11%20revue%20SNGM.pdf

Posté en tant qu’invité par Matt:

Très intéressant, au moins pour y réfléchir et comparer aux autres méthodes/pratiques.
Par contre il n’y a rien sur le choix et la préparation de l’itinéraire, point qui me parait quand même très important.
Merci pour le lien.

Je trouve pas vraiment de contradictions avec le 3x3 à peine une angle d’approche légèrement différent. L’un des 3 concerne la prise en compte permanente du terrain et de ce qu’il révèle

l’intégration de l’expérience des couches profondes dures de l’avalanche de Valmeinier, pas détectées par les informateurs de Météo France …

et la prise en compte du fait que les deux-tiers des victimes d’accidents d’avalanche le sont dans le cadre d’accidents touchant plusieurs personnes à la fois, d’où l’intérêt de la réflexion pour qu’il reste toujours au moins une personne dessus pour donner l’alerte et commencer les recherches. Et celui de l’entraînement à la recherche multivictimes comme l’indique pertinement le site de l’ANENA

Ben d’un autre côté, la recherche multivictimes c’est déjà pas simple, mais le pelletage multivictimes, tout seul ça risque fort de faire N-2 morts…
D’où l’importance d’arriver non à ce qu’il reste au moins un en surface, mais à ce qu’il n’y en ait au plus qu’un seul dessous!
Il insiste pas mal plus dedans dans l’article, il faut ne s’exposer qu’un à la fois. C’est là où on retrouve finalement l’influence du niveau technique, pour pouvoir s’attendre dans des endroits parfois éloignés sans passer des plombes entre deux abris.

Posté en tant qu’invité par Matt:

Moi je trouve qu’on a beaucoup plus ce problème à la montée : le cas typique d’une belle face un peu longue où il n’y pas de protection avec un groupe de 4 ou 5 randonneurs (quand c’est pas plus…)
Impossible de monter un par un dans la face si on ne veut pas y passer la journée. Ce cas m’a déjà fait gamberger une paire de fois en pensant très fort « si ça part on est mal… »
Là finalement tu est content quand il y a de bons écarts de vitesse : les rapides devant et les lents derrière ça permet de limiter un peu le temps où tout le monde est exposé. Mais ça suppose des randonneurs à peu près autonomes qu’on peut laisser un peu en arrière sans risque.

A la descente même avec un peu d’écart de niveau entre skieurs, ça va toujours plus vite de passer un par un.

C’est pour ça que je partage tout à fait l’opinion d’Alain Duclos quand il dit qu’on s’expose beaucoup plus à la montée avec plus de risques de multivictimes.

J’aime beaucoup le point 2.3.

[quote]2.3 « On peut estimer un risque et c’est sur cette estimation que doivent s’appuyer nos décisions » : illusoire

L’accumulation d’expérience, de connaissances et d’observations peut elle conduire à une vision à la fois juste et précise du danger d’avalanche ? Sans aucun doute, la réponse est NON. Dans le cas contraire, les meilleurs professionnels ne se feraient pas surprendre (guides, pisteurs, moniteurs, etc.)

L’objectif n’est plus de prévoir les avalanches ou d’estimer précisément le risque, mais de ne plus se faire surprendre dans des conditions qu’un novice aurait identifiées comme dangereuses.[/quote]

L’article va à mon avis dans le bon sens et en accord avec ma méthode perso

c’est l’exacte démarche de Munter en Europe et de Ian Mc Cammon aux USA !

L’estimation du risque sur une base statistique _ qui est le contraire d’une estimation « précise », le calcul des probabilités n’est pas une science exacte_ n’est qu’un garde-fou contre les pièges heuristiques visés par la partie en gras, pas une méthode unique de décision exclusive de tout autre élément. Bref la prise en compte des éléments de danger objectif apparents.

Une appartée, pour ta méthode, tu n’as apparemment pas compris tout d’Alain Duclos, sa thèse de doctorat est précisément consacrée à l’hétérogénéité du manteau neigeux, qui rend inutile la nivologie classique, incapable d’une prédiction quelconque. Bref inutile de faire un sondage ponctuel dans le manteau neigeux au cours d’une course, alors qu’une zone fragile peut exister dix mètres plus loin et déclencher toute la pente si tu passe dessus. Ou pas, si tu passes à coté …

Munter a d’ailleurs mis en évidence par des études de terrains nombreuses et fouillées que le nombre de zones fragiles dans une pente est en corrélation statistique avec le niveau de risque calculé par les prévisionnistes, mais que ces zones fragiles sont réparties sur toute la pente, en fonction notamment de la morphologie du terrain. Ce sont des mines, si tu touches ça pète, si tu touches pas ça passe. Et de ces zones il y en a toujours, plus ou moins, même en risque 1

Lorsque on fait traverser un par un, prendre des distances, larguer les lanières des skis et les courroies des bâtons, remonter les foulards sur la bouche, sortir un bras de la bretelle du sac, etc. bref toutes les précautions classiques, on le fait en fonction de l’observation et d’un calcul de probabilité plus ou moins conscient à partir de l’observation. La méthode Munter, ou celle du syndicat des guides français avec laquelle je ne vois pas de désaccord fondamental, ou ce qui est exposé plus haut, ne fait que contraindre à prendre en compte les éléments d’observation objectivement visibles.

Le point 2.3 est en totale contradiction avec la méthode de réduction de Münter qui lui essaie d’estimer le risque.

C’est toi qui n’a pas compris l’intérêt du sondage qui se justifie pleinement même avec un manteau hétérogène. Si tu détectes quelque chose en sondant c’est un signal d’alerte mais si tu ne détectes ça ne veut pas dire grand chose.
Il ne s’agit pas d’évaluer le risque mais de faire le tour des éléments objectifs pour prendre une décision.
Il ne faut pas rester bloquer sur l’image du champ de mine, elle n’a pas grand chose à voir avec le manteau hétérogène. Quand une avalanche part on voit qu’elle le fait en général sur un plan de glissement qui n’a rien d’hétérogène. Evidemment on sonde au mieux la pente que l’on va emprunter, pas une contre-pente. Si le sondage est inutile parce que le manteau est hétérogène alors il faut aller au bout de ton raisonnement : toute observation du manteau neigeux est inutile.

Quand tu en es là il faut renoncer (si c’est encore possible), je ne parle pas des précautions basiques comme s’écarter.

Non, non et non : renoncer c’est facile, le problème c’est de gérer la zone avant, où il y a un risque petit mais non négligeable, et où donc ça peut quand même partir.
Et pour ça, des mesures de réduction des dommages potentiels : qu’il y en ait un seul qui se fasse prendre (distances parfois imposantes, notament à la montée comme bien rappelé par Matt), et qu’il ne se fasse pas ensevelir (enlever les lanières…) sont les seules réellement efficaces.

Là c’est du grand J2, l’hiver revient… Disons pour faire simple que le ratio coût/information du sondage est faible. :rolleyes:

ce n’est pas mon raisonnement, c’est celui de Munter dans son bouquin, lorsque il dit qu’il faut laisser ce genre de chose aux scientifiques (et aux observateurs en vue de la confection du BRA), mais qu’en course ce n’est qu’une perte de temps.

D’autant que si on identifie une zone à risque dans le modelé de terrain, la dernière chose à faire est d’aller y toucher !!!

Relis ce que freenours a écrit, il ne parlait pas que de s’espacer, ça allait jusqu’à retirer un bretelle du sac à dos.
Je ne sais pas vous mais moi quand je m’engage, par choix, dans une pente c’est que je pense que le risque est très faible, si j’ai un léger doute on passe un par un ou on s’espace mais si j’ai clairement un doute je n’y vais pas, je ne vais pas prendre des précautions comme celles préconisées par freenours si j’ai le choix. Ou alors je prends presque systématiquement la précaution de retirer une bretelle dès que la pente fait plus de 30° mais je sens que ça va vite me gonfler ça :confused:

Il y a les bons côtés de la saison et puis il y a moi :stuck_out_tongue:

Le coût est faible, 2mn quand la sonde est facilement accessible (mais ne doit-elle pas l’être de toute façon ?) à chaque fois qu’on sonde, au max 3 sondages par sortie c’est pas la mort.

Ce n’est pas le sondage qui va changer grand chose à la fragilité de la couche.

Ben voilà on est d’accord :smiley: : y’a pas mal de niveaux de vigilance, avec précautions associées, avant d’en arriver au niveau de renoncement.
Après, on peut discuter du rapport coût/efficacité de certanes précautions : certains trouvent gonflant d’enlever une bretelle de sac (moi aussi d’ailleurs, j’ai un sac ABS), d’autres préfèrent ne pas aller charger le manteau aux points sensibles où le scientifique pourrait aller faire un sondage avec un certain profit. Ou alors ils vont sonder, mais en lévitation (pas facile de manipuler la sonde quand même). :lol:

Je ne sais pas si on est d’accord mais si j’ai d’autres choix, y compris le renoncement, que d’emprunter un passage qui demande des précautions au delà du passage un par un je ne vais pas dans ce passage. Le renoncement arrive avant d’enlever une bretelle du sac.

Si je n’y vais pas au dessus d’un risque que j’estime à 1/1000 alors quand j’estime le risque à 1/100 ce n’est pas en faisant passer ce risque à 1/110 en enlevant une bretelle du sac que je vais y aller.

Euh, le principe du sac ABS est de rendre le skieur plus gros. Donc plus le sac est gros, mieux c’est, et il ne faut surtout pas l’enlever !
Déjà juste pour la protection dorsale que procure un sac, je fais tout pour que mon sac ne s’en aille pas si jamais je suis emporté dans une avalanche.
Un sac de 25-30kg peut être gênant dans une avalanche, mais ça ne m’est jamais arrivé de porter un tel sac ski au pied (les fois où j’ai dépassé les 20kg c’était avec 1 ou 2 paires de skis sur le sac).

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Posté en tant qu’invité par bruce:

A chacun son truc…
certains imaginent qu’ils détiennent (ou recherchent) la clé pour se sortir de toute situation ; d’autres se contentent d’etre heureux de rentrer à la maison pour regarder le foot ;certains psy pensent que l’alpiniste pur doit mourir en montagne de son addiction…( souvent vérifié :rolleyes: )
On peut se dire qu’au delà des "techniques exposées"le vrai danger est celui qu’on aura pas vu …aveuglé que l’on sera par:
la banalité de la situation :lol: …la taille grandissante de son ego :lol: son désir de se rendre remarquable dans un "exploit"retentissant :lol: la qualité de son expérience assortie d’une formation d’élite :lol:
On constate d’ailleurs que ce ne sont pas les manoeuvres les plus osées, ni les dangers les plus présents qui ravagent les troupes les plus hardies, ou les plus « formées ».Bien souvent , ce sont davantage l’erreur idiote, le petit acte manqué…sournois
Cela à été dit plus haut: certains gros malins très expérimentés se sont fait coffrer , la ou un débutant ne serait jamais allé , n’en ayant tout simplement pas ressenti le besoin :rolleyes:
Après celà , on à le droit de vivre l’alpinisme comme on veut, et meme d’y mourir aussi comme on peut de ses rèves .
Un grand salut amical à Monsieur Duclos pour l’originalité de ses réflexions.

Et moi qui vérifie que j’ai bien mis la sous-cutale :lol: :lol: :lol: :lol:
Bonne randos

Toute méthode incitant à la réflexion et à l’analyse basée sur des critères objectifs (niveau de risque issu du BRA, orientation et angle des pentes, observation du terrain, etc.) avant l’action, est à mon avis, bonne à prendre.
Ce qui me semble important, ici comme ailleurs, c’est de réfléchir avant d’agir.

Ben oui, mais être expérimenté (= avoir de nombreuses sorties à son actif) n’implique pas nécessairement que l’on sait utiliser correctement son expérience. J’estime que ceux qui se font prendre ont fait une erreur évitable s’ils avaient raisonné correctement, et non que c’était impossible de voir le risque et que « n’importe qui se serait fait prendre » comme je lis souvent après un accident.

Oui, mais il y a quand même une limite. Si le nb de morts devient trop grand, l’alpinisme risque d’être interdit purement et simplement. Et là tous les alpinistes seront perdants.

Posté en tant qu’invité par tiery:

Et toi bubu ,penses-tu te faire prendre un jour ?ou penses-tu "raisonner correctement"pour y échapper?