Posté en tant qu’invité par Cassandre:
Bonjour à tous,
Le réel danger quant à l’équipement à Canaille, c’est l’utilisation des goujons en acier (zingué ou galvanisé, c’est un dépôt de zinc sacrificiel déposé par électrochimie qui forme une mince couche protectrice contre la corrosion usuelle mais PAS CONTRE LA CORROSION EN MILIEU MARIN) dans bcp de voies équipées par l’équipe Fenouil-Dupaquis ( cf leur dernier topo 6c max). La corrosion est exacerbée dans cette falaise en raison de son exposition aux vents dominants très salins. Il n’y a qu’à voir l’état des goujons acier dans la partie basse surplombante de certaines voies qui n’ont pas 10 ans. La partie haute plus ventée et exposée aux pluies subit moins les effets du sel et donc la corrosion est moins importante (séchage et lessivage des agents oxydants). Les traces de « piquage » de rouille sur les plaquettes acier doivent inciter à une EXTREME prudence car la corrosion est extrêmement rapide dans les zones les moins aérées. En d’autres termes, la tige du goujon se détruit par l’intérieur…aucune visibilité donc. Ce phénomène conduit également à la destruction des lames de piton à l’intérieur du rocher alors que la tête extérieure du piton reste parfaitement solide. Une suspension simple peut conduire à la rupture du piton ou du goujon si la corrosion est avancée…alors que la plaquette est d’apparence solide…
Bref, c’est une hérésie que d’équiper en acier dans le massif des calanques et d’autant plus à Canaille. Il en va avant tout de la sécurité des grimpeurs et accessoirement de l’avenir de ces voies. Les tests montrent également que les goujons sont inadaptés au grès ( c’est d’ailleurs rappelé dans les notices FIXE), l’expansion provoque des micro fissures en arrière plan qui peuvent conduire à une rupture de la zone dans laquelle est enfoncé le goujon; en gros, le goujon part avec son socle rocheux…!). Des tests très intéressants ont été menés sur Canaille :[topo-calanques.com/compte_rendu/traction.pdf]. Et ne pas oublier que ces tests n’ont pas été effectués sur des points corrodés (résistance bien moindre…) et que ce sont des tests en traction (extracteur en traction) qui ne correspondent pas à la réalité en escalade ( sauf en plafond). La résistance en cisaillement est d’environ 70 % de la résistance en cisaillement…donc, il faut relire les tests d’un oeil critique et prendre garde à Canaille…
L’équipement optimal à Canaille repose sur l’utilisation de broches scellées INOX qualité marine ou environnement corrosif ( Inox AISI 316 dit acier A4 ou acier marin dans le langage usuel); à défaut, inox classique (inox AISI 304 dit inox A2) moins cher. Ce dernier, inox A2 est inadapté aux milieux tropicaux ( Madagascar, Thailande…) en raison de taux élevé d’humidité et des températures élevées qui intensifient la corrosion. Néanmoins, cet inox A2 SEMBLE SUFFISANT pour l’équipement des falaises marines tempérées ( pas encore de recul sur 20 ans). Les autres équipeurs ont compris d’ailleurs cette problématique puisqu’ils équipent
# soit en en scellements Brouet Badré ( acier recouvert de zinc à chaud: dépôt de zinc sacrificiel fondu qui s'accroche très fortement et sur une couche plus importante que dans le procédé électrochimique) . Ces scellements en fait leur preuve dans les calanques depuis 20 ans vis-à-vis de la corrosion même si quelques-uns sur les milliers sont corrodés ( problème ponctuel à la fabrication sans doute). Ce type de scellements est utilisé par la SNCF, EDF, PTT pour fixer des câbles et poteaux ). Mais ils sont très chers ( 4 euros/ points) et il faut percer à 14 mm de diamètre et 10 cm de profondeur. Donc bcp de colle, d'énergie... et d'argent. Mais grosse masse métallique et très bonne résistance à la corrosion.
# soit en scellements inox qualité A2. 2 euros 95 euros /points. Perçage à 12 mm de diamètre et 8 cm de profondeur. Donc mois de consommation en batterie et moins de colle, et moins d'argent...La broche A4, ça coûte: 4 euros 20...La broche acier, ça coûte: 2 euros 40 ( pas bcp de différence avec la broche inox A2, dc penser à long terme...)
Il est à noter que l’acier inox de la marque Raumer est de qualité A2. La société FIXE a récemment développé un inox marin ou inox A4. Dès lors, sur les broches FIXE, on peut voir l’inscription 304 ( Inox A2) ou 316 ( Inox A4); si ces inscriptions n’apparaissent pas sur les broches inox, ce sont les broches inox antérieures, donc A2. Idem pour les plaquettes FIXE.
Quant aux goujons, ils suffit de lire les inscriptions sur les écrous;certains d’entre vous ont peut-être remarqué que sur les écrous est gravé 2 chiffres séparés par un point. Par exemple 8.8 . Le premier chiffre indique la résistance à la rupture en traction exprimé en dizaine de Kg/mm², Le deuxième est la limite élastique en dizaines de % par rapport à la limite de rupture. On peut ainsi calculer les résistances des goujons en traction et cisaillement. Voir la page: [b.urbani.free.fr/pagevisserie/visserie.htm]
La seconde inscription, c’est la qualité de l’inox: A2 ou A4. Si rien n’est écrit, c’est de l’acier simple !!! Ou alors, l’écrou est retourné. Pas de chance…Il est facile de différencier de l’acier inox de l’acier simple en milieu marin: l’acier simple est piqué ( traces grises de sel au début puis noircissement puis gonflement et feuilletage)
Tous les ancrages Peztl sont de qualité A4 ( Plaquette, scellements, goujons), ce qui explique leur prix. Dommage que Peztl n’inscrive pas la qualité de son inox sur ces plaquettes. Car à ce jour, on pourrait croire que seul FIXE a développé un inox marin…Peztl l’avait fait dès le départ…il y a plus de 20 ans…
Un autre point crucial qui ne semble pas être bien connu des équipeurs car on rencontre une association très dangereuse: le montage d’une plaquette INOX sur un goujon acier: la corrosion est accélérée uniquement sur l’acier de piètre qualité; à savoir le goujon…corrosion invisible, le goujon se détruit alors que la plaquette est en parfait état…Ce phénomène est pourtant connu depuis bien longtemps dans l’industrie et décrit dans les ouvrages de chimie universitaires…Il se forme des micro-piles de corrosion
Cependant, l’inox, même marin, s’oxyde sur une couche infiniment mince qui le protège ensuite ( phénomène dit de passivation). Les plaquettes se recouvrent d’une sorte de vernis brun qui n’altère pas l’acier. C’est pourquoi, il faut lustrer régulièrement les rambardes et rampes extérieures en inox des bateaux pour retrouver l’éclat de l’inox. La rondelle entre la plaquette et l’écrou, quant à elle, peut connaître un piquage préférentiel car elle a subit des contraintes mécaniques importantes lors de la fabrication ( écrouissage, emboutissage). Ce qui peut donner l’illusion que l’ancrage est corrodé. Mais cela ne concerne que la rondelle.
Quant aux plaquettes en aluminium, légère, de type spéleo, utilisées ds les années 80 en ancrages d’escacalade: ça ne vaut rien contre la corrosion en milieu marin…ça devient…poreux…je ne vous fais pas de dessin…
A l’aube du futur parc national, il faut également souligner que les possibilités de rééquipement seront très complexes voire nulles…il est donc fondamental de choisir un équipement pérenne et fiable sous peine de perdre un certain nbre de voies d’ici une décennie. Il sera bientôt impossible de les sauver car les gardes surveilleront toute activité d’équipement sauvage…Et la FFME ne peut pas conventionner en site sportif et donc participer à l’entretien de ces voies à Canaille en raison du caractère déliquescent de cette falaise ( à l’époque romaine, l’effondrement d’une partie de la falaise a provoqué un tsunami dans la région…)
Il est donc fort regrettable que l’argent issu des ventes du topo de Canaille 6c MAx ne permette pas de financer des voies pérennes en acier INOX…alors que la plupart des autres équipeurs ont choisi l’inox et même les broches inox sur leurs propres deniers le plus souvent. Alors que chacun sait que le « brochage » est plus laborieux que le « goujonnage »
Pour information, une plaquette inox fixe inox A2 de 10 mm: 1 euros 30. ( catalogue Au Vieux Terre 2010) Le goujon Raumer inox A2 court de 10*66 simple expansion: 1 euro 8. Le goujon lnox Raumer long A2 de 10 * 85 double expansion: 2 euros 16 ( catalogue EXPE 2010): pas loin du prix d’une broche inox Fixe inox A2…bien sûr il faut ajouter la colle. Mais le parc rechignera à vouloir démonter les voies scellées…et c’est l’équipement le plus sûr pour les grimpeurs…Quant au doute sur le sika (gris): l’industrie l’utilise depuis belle lurette et ses caractéristiques mécaniques sont excellentes. Et il n’y a pas de pb d’adhérence sur l’inox. ( Toutes les colles n’adhèrent pas correctement sur l’inox). Il faut néanmoins faire un mélange et ne pas se tromper dans les proportions sous peine d’altérer les résistances. ce qui explique le choix de la colle rose HILTI en pistolet mélangeur…mais très chère…
Bref, activez-vous pour parcourir ces itinéraires, ou bien essayez de convaincre les équipeurs en question qu’il faut rééquiper en inox pour sauver leurs « oeuvres », ou bien donnez-leur un coup de main…Qui sait, cela peut créer des vocations…
Bonne grimpe et regardez bien sur quoi vous allez…voler…ou sur quoi vous ne devez pas…voler ! :lol: