Entrainement Eperon Walker

le bouquin d’Arno Ligner existe en français :
https://livre.fnac.com/a7819953/Arno-Ilgner-La-voie-des-guerriers-du-rocher

lecture difficile mais très enrichissante (et pas que pour la grimpe d’ailleurs)

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Ca m’est arrivé de devoir renoncer à grimper des voies (surtout des voies de glace et de mixte) parce qu’il y avait trop de cordées, oui.

Par contre, rebrousser chemin dans une voie comme la Cassin sur l’éperon Walker, ou sur une autre grosse face, c’est très souvent illusoire. Une fois qu’on est engagé dans la face, il y a souvent un point de non-retour (la seule sortie étant par le haut, principalement parce que les grosses faces ne sont pas (heureusement, en termes d’éthique; mais malheureusement, en termes de sécurité) équipées de relais permettant une retraite en rappel. Il faudrait donc abandonner une grosse quantité de matériel pour fabriquer les relais; matériel qui est de toute façon en insuffisance pour redescendre 1000m (voire plus) de face).

Mais la question de l’aide aux autres cordées est évidemment importante. Si je devais faire le choix entre sortir une voie ou aider une cordée en situation critique, j’opterais pour l’aide, bien sûr.

Dim.

Si tu dois renoncer dans la face, tu n’as pas 1000m à descendre, mais 400 ou 600m. Entre le matos en place (j’ai lu qu’il t avait beaucoup de pitons) et le matos de 2 cordées, il y a de quoi faire pas mal de rappels.

Tu sors ton téléphone et appelle le Saint Bernard. En 2018, l’engagement de ces faces est très relatif, quand le Saint Bernard peut voler.

L’engagement de ces faces a significativement diminué avec les secours peuvant intervenir quasi instantanément lorsque la météo est ok. L’engagement subsiste quasiment seulement quand les secours ne peuvent pas intervenir à cause du mauvais temps.

C’est ce que je voulais savoir de la part des prétendants : jusqu’à quel point acceptent-ils l’engagement VI (ça me parait énorme avec un refuge gardé au pied, mais bon pourquoi pas).
Car si on y va en se disant qu’en cas de pépin on se fait helitreuiller , l’engagement n’est plus de VI mais I ou II. Auquel cas, pas besoin de préparation psychologique particulière.

Il pleut à Ailefroide j’en profite pour lire ce fil.
Quand tu vas dans un 7c pour l’enchainer tu ne parts pas dans l’idée de tirer à la dégaine sinon tu choisis un objectif moins élevé.
Si avant de partir tu penses déjà que de toute façon l’hélico est à ta disposition cela veux dire que tu n’es vraiment pas prêt. Et au moindre petit problème il y a de grandes chances que ça devient vite la cata.

Le yoga, l’entraînement, la préparation technique … ne sont que des moyens de mettre le maximum de chance de réussite de ton côté.
Comme toute grande course en montagne si tous les voyants sont au vert tu vas penser que c’était une ballade.
Mais si quelque chose ne tourne pas rond c’est l’expérience qui te servira.
Dans des conditions très difficiles j’ai vu des gens posés, réfléchis… qui étaient paniqué et faisaient n’importe quoi.
À mon sens, il faut un minimum d’expérience et de connaissance de soit pour partir avec encore plus de chance et de sécurité

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Je vais chipoter encore, mais je lis « préparer le mental », « être bien dans sa tête »,… et dans le même paragraphe il y a une flopée de questions existentielles, du yoga, de la méditation.
Ça me paraît bien compliqué quand on est sensé être bien dans sa tête. C’est probablement même l’inverse ? Auquel cas le voyant « mental » n’est pas encore au vert.

Quand on est bien dans sa tête, pas besoin d’artifices, on le sait. Et ça ne s’organise pas comme des séances d’entraînement, c’est juste lié à la vie quotidienne, des équilibres entre vie professionnelle/vie privée, alimentation/sommeil/entretien corporel, repos psychologique/famille/égoïsme/loisirs…

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Je ne serais pas aussi catégorique, pour connaitre des gens bien dans leur tête qui se sont mis au yoga et autres pour profiter encore mieux de se bien être.

Ceci étant posé, je suis personnellement comme tu le décris. Quand je suis bien, je le sais, point. Tu sais que ça va passer que ça va sortir. L’expérience te prépare à ce que ça foire, t’es prêt à y rester, à voir ton compagnon de cordée y rester aussi, ça fait partie du jeu. Mais ça c’est la tête qui le dit. Cette même tête qui te retiens d’y aller parce que tu sais que tout les voyants physiques ne sont pas au vert.
Mais les tripes, le coeur, ils te disent autre chose. Ils te disent d’y aller, que c’est ton moment. Comme si le caillou était là pour toi. Un truc entre la montagne, ton pote, et toi. Bien sûr, c’est parcouru 3 fois par jour… on le sait. mais quand même, quand tu le sens à ce point, c’est comme un appel irrésistible. T’y penses tout le temps.

Sûr que sur une course comme ça le choix du compagnon est essentiel. Et ça fait partie de ta certitude : tu as le bon type à l’autre bout du fil. Avec lui tu passes, avec toi il passe.

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Bubu, spécialiste des grandes courses, va nous expliquer que faire demi tour dans la walker au bout de 500m, c’est facile, car il a lu qu’il y avait beaucoup de pitons.

Plus sérieusement, vous etes marrants avec votre hélico. Je ne connais personne qui appelle l’hélico comme ça dès que ça va mal, ou qui part la fleur au fusil en se disant : pas de soucis, j’appelle l’hélico au cas où. Ce genre de discours de vieux « oh avant c’est plus couillu » me fait rigoler. Les gens d’aujourd’hui sont pas moins couillus ou moins débrouillards qu’avant.
j’ai fait la Pierre allain cet été, 2 cordées derrrière nous ont fini l’une à 1H du mat, l’autre à 3h… et ils ont pas appellé l’hélico, ils ont fini comme ils pouvaient, en se débrouillant.

On essaie toujours de se débrouiller… par ailleurs les portables ne captent pas toujours (le mien doit être pourri, c’est le cas les 3/4 du temps en montagne)
Et l’hélico ne peut pas toujours décoller, et de toute façon en cas de blessure grave avant qu’il arrive il peut se passer pas mal de trucs. Donc oui, dans ce genre de trucs, il y a de l’engagement.
Ok, c’est pas l’annapurna mais c’est pas une voie Cambon au rocher de l’homme.

Voilà, sur ce, j’ai pas fait la Walker, donc pas de conseil à donner

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Je te laisse installer et exploiter tes rappels, dans ce cas :slight_smile:

Pourquoi je trouve ton raisonnement absurde:

  1. Qualité du matos sur place: La moitié des pitons que j’ai croisés dans la voies sont des clous du style « Cassin 1 » qui ne se vendent plus depuis 40 ans… Parfois, pour tester leur solidité, je tirais dessus à main nue avant de les retaper… Et hop! certains sortaient rien qu’à la force de mes doigts :slight_smile: Donc je sais pas pour toi, mais je ne vais pas m’amuser à me pendre dessus en invoquant Jesus, Marie et Joseph. Et cela dit, ce n’est pas parce que c’est écrit « équipement en abondance » sur les CR, que c’est le festival de la couenne local avec des points tous les mètres… Je te laisse grimper les Dalles Noires et les Dalles Grises de la Walker… Tu m’en diras des nouvelles…

  2. Temps de manoeuvre: As-tu déjà fait une longue série de rappels? Pour exemple, Ca m’a pris 3h pour faire 18 rappels de 30m sur l’Aiguille Noire, lors de notre sortie au mont Blanc par l’Intégrale de Peuterey. Donc 3h pour 500m. Et je peux te dire qu’on était efficace. Pour les rappels du Whymper (Sur le Couloir Whymper de l’Aiguille Verte), j’ai mis 4h… Et il y en a 22… Les rappels, ça prend du temps (en supposant que le matos sur place est suffisant, ce qui n’est absolument pas le cas de la Walker; voir point 3 ci-dessous). Donc pour tout te dire, tu as parfois meilleur temps de sortir par le haut que de redescendre en rappel. Tu serais parfois étonné de voir que ça pourrait prendre moins de temps.

  3. Terrain et équipement non propices aux rappels: Sur la Walker, les rappels seraient insupportables et bien trop dangereux… Pourquoi? Parce que contrairement à l’Aiguille Noire de Peuterey ou au Couloir Whymper, la Walker n’a pas été conçu pour les rappels, mais pour la grimpe! Alors que les itinéraires de la Noire et du Whymper ont été prévus à cet effet… l’itinéraire de la Walker, c’est des zig-zags (c’est pas une directissime). Bonjour le tirage et les coincements de cordes si tu veux utiliser le matos qu’il y a sur place.

  4. Si un jour (et je ne te le souhaite pas) tu devras entreprendre une retraite inattendue sur une face N, tu te rendras bien vite compte que les théories, c’est joli, mais faut les mettre en pratique. Je ne dis pas que redescendre la Walker en rappel serait impossible. Je dis juste que ça donnerait naissance à des ulcères, des bonnes vieilles crises d’angoisses, et des jolies syncopes.

ABE.

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As-tu déjà mis les pieds sur une grande face N pour avoir une telle certitude? L’engagement, c’est aussi être sur un pas compliqué, et ne pas pouvoir se permettre une chute (parfois synonyme de mort quasi certaine).

L’engagement n’est pas qu’une question de distance par rapport à la civilisation. Relis la définition de C2C ou de n’importe quelle référence alpine.

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Mention d’un helitreuillage alors qu’il n’y a aucun blessé, juste de la fatigue et un créneau conditions trop court (mais prévu : neige durant la nuit mais beau le lendemain, du coup rocher humide ou verglacé) : Camptocamp.org

Ca confirme ce que je disais : pris par le temps, il décidé de se débrouiller, et ont bivouaqué. Ensuite, ca s’est pas passé comme prévu, et c’est une autre histoire.
(alors qu’avec ta théorie, cela aurait si facile d’appeller les secours vers 14h-16h quand tu vois bien que tu exploses l’horaire…)

par ailleurs ton lien mentionne une autre cordée qui s’est débrouillé seule… donc ca confire plutôt mes dires.

Fais des grandes courses, après tu viendras donner des leçons.

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Si au refuge on avait dit â la cordée qui s’est fait helitreuiller que quel que soit le temps, l’helico ne viendra pas, serait-elle partie dans la voie ?

j’en sais rien, et ce n’est pas le sujet. Le sujet c’est l’engagement.
Que tu le veuille ou non, l’helico c’est pour la majorité des gens (oui, car tu es un gens, comme moi…) le dernier recours, qu’on ne prend que quand ça va mal.
Et être contraint à un bivouac, voilà un signe certain de l’engagement… donc avec ton exemple tu te tires une balle dans le pied.

Encore une fois ca n’a surement rien d’extreme, mais la walker c’est pas non plus engagement II comme tu le dis !! engagement VI j’en sais rien (je ne connais pas l’usine à gaz C2C) mais surement pas II parce qu’il y a un refuge en bas ( le refuge en question est à plus de 2h par glacier…) et le téléphone.

A se demander si on pratique le même sport…

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Sans aucun doute, les 2 contributions les plus enrichissantes de l’alpinisme des dernières décennies. Vas-y Boris, fonce !

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En effet, avec une bonne préparation psychologique on peut foncer quel que soit son niveau et son expérience réelle.
C’est d’ailleurs bien cela qui fait peur avec ces histoires de préparation psychologique.
Et c’est pour ça que je pose des questions : jusqu’où sont ils prêt à se mentir à eux même sur leur niveau grace à cette préparation psychologique ?

J’aimerai beaucoup voir une cordée « préparée psychologiquement » mais « techniquement juste » engager la viande sur 10m au dessus des vieux pitons dans la longueur du dièdre rébuffat :joy:

@Kryst0f c’est certain que l’engagement n’est pas le même qu’en 1938. Peut-être sommes nous beaucoup moins suicidaire également ? :wink:
Mais le moindre pépin c’est à la cordée de le gérer (perte d’un piolet, une chute de pierre qui mériterai 5 points de suture…) => le touriste appelle les secours, l’alpiniste endure et donne tout ce qu’il peut avant de s’avouer vaincu ?

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Voilà. Tout est dit. C’est aussi ça l’expérience: réaliser qu’une même course (et pour la même cordée!) peut paraître une balade lorsque tout ce passe bien, comme tourner au cauchemar lorsque des éléments n’allant pas dans notre sens s’enchaînent.

Quand j’ai « fait » la Walker, on a été contraint à bivouaquer dans la voie (pour plus de détails du pourquoi du comment, voir mon CR). Conséquence: on s’est pris l’orage le lendemain. En ayant discuté avec des potes qui l’ont « faite » également, j’ai réalisé aussi à quel point ils ont vécu une toute autre course que moi.

Conclusion: l’engagement, c’est aussi une variable latente. Ça indique aussi que quand les choses peuvent mal tourner, tu peux te retrouver dans le pétrin.

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