Encordement court rando/alpi

Je plussoie.

On peut ajouter que sur une pente de neige, placer la corde côté aval permet d’arrêter plus facilement la chute avec le piolet planté côté amont.

Sur l’encordement à 2 m, lors d’un lointain stage autonomie, le guide nous avait expliqué qu’on raccourcissait l’encordement à 2 m pour la marche en pente raide quand le risque lié aux crevasses est réduit, mais toujours à corde tendue de sorte à pouvoir empêcher la prise de vitesse en cas de chute et donc, se donner plus de chances d’arrêter la chute du second. Je suis d’accord, cependant, que si le premier risque de partir aussi, la technique a ses limites.

Pour arbitrer sur la longueur d’encordement en neige, il y a un compromis à trouver constamment entre la raideur de la pente, l’exposition (encordement court) et le risque lié aux crevasses (encordement long).

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Oui c’est vrai ça. Un guide m’avait donné une leçon sur la descente du Dome des Écrins, car il jugeait qu’on était encordés trop longues. Mais moi je craignais plutôt les crevasses. C’est vrai qu’il caillait sévère (iso 0 à 3000m toute la journée) et le glacier était bien rempli même pour un fin Aout.

Effectivement encordement court je dirais que c’est bien corde tendue dans une descente avec le plus expérimenté en amont. Et sans risque de crevasse.
En traversée ça semble moyen moyen.
My 2 censes

@Rob.Bonnet.guide : Très bonne synthèse ! Juste un ajout : il en est de même en ascension de certains couloirs # des conditions et des personnes.

Mon guidos préféré assurait en ascencion assez raide en neige à pied (raid ski rando) le moins aguerri d’entre nous :
Il utilisait une sangle en dyneema en très court donc, et gardait bien sûr le bras à 90° pour armortir comme un piston pour tuer dans l’oeuf le moindre début de glissade.
Et on gardait la corde dans le sac.
Optimisé à mon avis.

Les manips d’auto secours en crevasse, soyons honnête, sur la voie normale du goûter c’est anecdotique… Ça ne concerne que la montée au Dôme du goûter, et vu la fréquentation et la trace, être correctement encordé c’est déjà bien.
Par contre le risque principal sur l’itinéraire c’est la chute dans l’aiguille du goûter ou sur l’arête des boses. Et là si on ne maîtrise pas la situation, c’est toute la cordée qui part ! Voir les cordées autour fauchées au passage…

Or pour une cordée de 2 ou 3 personnes, pour évoluer encordé en sécurité sur ce type de terrain, il faut nécessairement un leader très expérimenté et nettement plus à l’aise que les autres. Sinon s’encorder ne sert à rien (pire c’est dangereux car plus de morts) : on n’est accroché nul part sur la montagne, et il est illusoire pour une personne peu expérimentée de retenir la cordée.

Pour le coup je vais être provoc : une prise de conscience de beaucoup d’alpinistes amateurs et certains guides (qui ne font pas prendre conscience de ça en formant les gens) est vraiment nécessaire sur les limites de l’évolution encordé en courses de neige (gestion du risque de chute, on parle pas de la gestion du risque glacier) :wink:

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Merci Rob de ce point de vue.
J’ai vécu un accident d’un membre de ma cordée sur une bête pente de neige (ripage du crampon sur un bout de glace et zip direct en bas de la pente avec une vitesse impressionnante) Dégâts sérieux mais pas dramatiques (on s’est débrouillé sans appeler les secours)
On était 3 par cordée et j’avais décidé pour cette pente qu’on ne s’encorderait pas alors que les deux cordées qui nous suivaient s’était encordées.
J’ai eu des débats et beaucoup de questionnement après l’accident : est-ce que si on s’était encordé j’aurai réussi à retenir celui qui a zippé (il était en second) en évitant l’accident ?
ou est-ce que je serais parti avec lui en embarquant le 3e et probablement les deux cordées qui suivaient ? (big strike…)
Mon sentiment est que je n’aurais pas réussi à le retenir et que ma stratégie était la bonne.
Mais ça va un peu à l’encontre des pratiques habituelles, notamment en club.

A mon idée ça peut encore s’envisager à 2 avec le 1er qui tient en laisse sérieusement et très court le second.
Mais à 3 avec plusieurs mètres entre le 1er et le second, très peu de chance d’arrêter une chute dès qu’il y a un peu de pente (35°) ?
Je vois d’ailleurs une certaine différence de pratique entre l’alpi dans le cadre du ski de rando (remontée de couloir) où on s’encorde rarement, et l’alpi estival où beaucoup ont l’habitude de s’encorder systématiquement, même à trois dans des pentes de neige.

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Oui, parfois vaut mieux pas s’encorder. Même quand on croit maîtriser mais que l’on a 2-3 gugus très sympathique devant mais complètement en panique, vaut mieux pas s’encorder !

En fait non: vaut mieux pas partir :pensive:

Pour moi les critères pour lencordement en neige (progression simultanée sans pouvoir poser de protections) sont assez clairs :

On s’encorde uniquement si tous les critères sont réunis :

  • Cordée de 3 maximum en terrain facile et peu exposé ou sur portion courte (arête de l’aiguille par exemple ok, VN de bionnassay non) ; cordée de 2 maximum ailleurs
  • Leader expérimenté, très à l’aise physiquement et techniquement, capable de garder la tension de la corde en permanence avec une légère traction, bras plié (sert de fusible).
  • Différence de niveau marquée avec le second, de sorte qu’on puisse considérer que la probabilité d’une chute du leader soit quasiment nulle. (En effet si c’est le leader qui chute il entraînera toujours son second…).
  • encordement « en laisse », distance minimale entre les membres de la cordée (juste assez pour ne pas se faire cramponner…), 10 anneaux max dans la main.
  • Lencordement doit empêcher la chute du second en empêchant d’aller plus loin que le déséquilibre. Passé ce point c’est trop difficile…

Avec quelques exceptions en étant conscient des risques, notamment évoluer encordé entre personnes de même niveau expérimentées pour une jonction en neige entre deux passages plus techniques.

Si on regarde objectivement ces critères, on réalise la problématique principale : les courses de neige sont dangereuses pour des cordées autonomes du niveau de la course…
Certains accidents l’ont tristement illustré : décès d’un père et ses enfants à la cime du vallon, gros carton au glacier du milieu à Argentiere,…
Quand je parcours l’arête de l’aiguille du midi, ça fait peur le nombre de cordées qui descendent en étant encordé sans en avoir le niveau : encordements inappropriés, leader taquet, cordées de 5,… Ils feraient mieux de descendre en solo !

Pour aller encore un peu plus loin, en pratique guide où l’on utilise beaucoup lencordement « en laisse » (et ça fait du sens cf. Critères plus haut), on oublie jamais la consigne de sécurité principale : surveiller les pieds du client, et surtout rassurer et donner des consignes claires et fréquentes, la première étant « prend ton temps, ici il ne faut pas tomber ».
Car ça reste ça le plus important pour la sécurité !

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Tiens, justement, une question à ce sujet.
J’avais appris qu’en neige, on se fait une poignée quand on est en corde courte. Du coup, j’avais pris l’habitude d’avoir seulement 1,5-2m de corde sortie, et ma poignée. Mais j’étais l’autre jour en formation à l’ENSA, et les gars préconisent d’avoir plutôt 6-8m de corde déroulée (donc des anneaux à la main), en plus de la fameuse poignée.
Quel est l’intérêt d’avoir toute cette corde déroulée, si c’est finalement pour faire une poignée au bout ? D’autant que sur une pente de neige uniforme, on a aucune raison de changer la longueur de corde, contrairement à du terrain varié… Bref, si vous avez une explication, je suis preneur :slight_smile:

Je rajouterai que samedi dernier, y’avait des passages déjà bien en glace et ca va pas s’arranger! Donc, on est plus trop sur 1 course de neige uniquement.
La fatigue et l’altitude font aussi qu’on perd de la lucidité, que même une course facile devient plus dure par ces facteurs et qu’il y a des endroits où la chute n’est pas permise :smiley:

Bonjour Rob, je suis intrigué par ton conseil « regarder les pieds du client »
ca m’interesserait vraiment d’en savoir plus
je suis initiateur alpi, j’emmene du monde, donc ton savoir pourrait me permettre de m’améliorer (et le niveau de sécurité)

à te lire
montagnardement

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Moi aussi ça m’intéresse, je suis dans le même cas. D’autant plus que si c’est évident à la descente où le leader est derrière, ça parait moins évident en montée. :slightly_smiling_face:

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Bonjour,

C’est une réflexion que je m’étais faite personnellement. Quand j’emmène des gens en rando, je regarde comment ils posent leurs pieds, et je sais rapidement quels passages leur poseront des problèmes, suivant qu’ils savent positionner leurs pieds sur les points stables ou qu’au contraire ils les posent n’importe où, là où ça glisse ou ne tient pas, ou bien qu’ils hésitent et ne savent pas où les poser.

Bernard

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Ok avec toi sur ce point en rando. Mais c’est pas si évident à faire comprendre (viser les pierres scellées dans le sol…)

Perso j’essaie de guetter les pieds et les mains du second, et d’indiquer les prises si nécessaire. Tant que les pieds sont bien posés à plat et que mon partenaire n’a pas besoin des deux mains, je suis à l’aise pour progresser en corde courte. Dès qu’on commence à avoir besoin des mains, ou à chercher les prises de pieds, je bascule dans les modes supérieurs (micro-longueurs, voire mini-longueur).
Souvent, on navigue un peu entre ces deux situations. En général, j’essaie de jouer avec la tension de la corde pour indiquer au second l’arrivée imminente d’un pas à franchir. Je garde la corde un peu plus molle tant qu’on est dans du facile, je met un coup de pression quand on a un passage plus dur, même si ça dure qu’un mètre. Ca me semble efficace pour garder le second mobilisé.

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L’idée d’avoir une réserve de corde c’est de pouvoir s’adapter aux différentes situations rencontrées : mini ressaut à franchir, arrivée inconfortable à un relai ou replat, passage en arête,… Avec 10 anneaux max ça ne gêne pas la préhension de la clé de blocage, donc pas d’inconvénients même si tu ne t’en sers pas.
Pour donner un exemple sur l’arête de l’aiguille du midi :

  • première partie à plat sur le fil : client devant, piolet à l’épaule (quand tu es sur le fil de l’arête il ne sert à rien), réserve de corde côté col du midi(anneaux à la main qui se déroulent librement sans serrer la main), corde tenue sans clé de blocage côté « vide » face nord. Le piolet est inutile, avec la main gauche je contrôle la tension de la corde et je rattrape un déséquilibre, le fait de voir le client permet d’anticiper. Si ça ne fonctionne pas (car on est en traversée donc plus délicat), avec la réserve de corde, je peux sauter de l’autre côté de l’arête pour bloquer la chute…
  • seconde partie de l’arête, ça descend dans la pente au dessus de la face nord : client dessous (évident), piolet en main côté amont planté le plus profond possible en cane, anneaux avec clé de blocage côté aval en maintenant en permanence la tension (voir si c’est deux « gros », en tirant fort pour avoir de la marge🫣). Ici pas de seconde chance, il faut tenir un déséquilibre sinon c’est terminé.
    -troisième partie toujours dans la pente mais au dessus du col du midi (l’arête tourne): selon les conditions de neige et la trace, je reste avec le piolet sans changement, ou je repasse piolet à l’épaule car il est peu utile et je reprends la corde à deux mains pour avoir l’effet « fusible » sur mon bras fort.
  • Dernière partie on reprend une arête plate, cf première partie.

Quand je parle de regarder les pieds du second :

  • en premier lieu ça veut dire de toujours placer le second devant sur des parties horizontales, sauf exception par exemple faire la trace.
  • même lorsque ça monte on essaye au maximum d’avoir les yeux qui traînent sur ce qui se passe derrière, on est sensé être assez à l’aise pour peu s’occuper de ses propres appuis.
    La corde et les yeux permettent d’anticiper le déséquilibre du second et de le rattraper plus facilement. Avec des clients débutants ça arrive très souvent qu’ils se prennent les pieds dans le tapis sans même s’en rendre compte, car la corde a stoppé net le déséquilibre…
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Question existentielle en effet, même si en stage on a tous retenu des chutes volontaires, en réel je n’ai eu qu’à retenir des déséquilibres ( grâce a l’application des bons enseignements rappelés par Rob), mais en pratique je me vois mal dire c’est chacun pour soi si je me sens responsable de la personne , sauf a l’avoir clairement indiqué dans la prépa de la course. On retrouve d’ailleurs le même problème en rocher ( genre sortie de voie herbe/ rocher « facile » ou il y a déjà eu des cartons similaires), ça pose aussi la question des liens qui unissent la cordée (ou pas)

La question n’est pas simple parce qu’on y adosse des valeurs morales et un gros bagage culturel (cf. différences de pratique entre ski de rando et Alpi sur des terrains identiques) qui viennent brouiller la réflexion.
Mais d’un point de vue pragmatique, utiliser la corde si elle augmente la probabilité (parce qu’un élément de plus à gérer en grimpant et une source de déséquilibre mutuel) et la gravité (2/3 victimes au lieu d’une) est une erreur, et une mauvaise pratique.
Et c’est vraiment quelque chose qui devrait être souligné lors des formations, et en particulier auprès des encadrants bénévoles.
Le piège de ces situations, c’est qu’il faut accepter que des courses d’initiation (par rapport à leur niveau technique) ne sont parfois pas accessible à des cordées sans un leader très expérimenté à cause de leur exposition… Et de manière pas toujours évidente, des courses plus techniques où on peut s’assurer sont mieux adaptées !
La bonne solution si l’encordement augmente le risque et qu’on refuse de l’enlever, c’est de changer d’itinéraire :wink:

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Lors de ma première formation avec le CAFGI en alpinisme, j’ai justement demandé au guide qui encadrait quelle était l’utilité d’un encordement court dans une cordée homogène, alors que ça risquait surtout de multiplier les conséquences d’un accident. Il disait que mon raisonnement était pas faux, mais que ce « n’était pas l’approche du CAF » qui met beaucoup d’importance sur le concept de la cordée. En plus, c’était un guide jeune…

Ensuite il a dit que ça pourrait aussi servir pour stocker la corde lors des transitions/passages très faciles (quasiment le seul endroit où j’utilise l’encordement court pour gagner du temps).