Discussions à propos du drame survenu aux Grandes Jorasses

Posté en tant qu’invité par Fann:

[i][Modération forum] : sujet dédié aux débats à propos de ce drame. Les messages de condoléances se trouvent dans cette discussion.

Edit : ce sujet visait juste à recueillir les messages de ceux qui se posent des questions quant aux circonstances du drame, pas à polémiquer sur ses causes.
Les messages polémiques et leurs réponses ont été supprimés, le titre légèrement modifié ; et pour éviter tout nouveau dérapage, le sujet a été fermé.[/i]

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Bonjour à tous,

Je ne suis pas alpiniste, mais simple randonneuse. Je suis par contre passionnée par l’histoire de l’alpinisme et par les récits d’ascension. J’ai donc vécu de près ce tragique épisode qui a touché Charlotte De Metz et Olivier Sourzac. Paix à leurs âmes, et mes plus sincères condoléances à leurs familles si elles me lisent. Qu’elles ne voient pas là une fascination malsaine, mais plutôt une volonté de comprendre.

J’en ai parlé avec un collègue alpiniste qui me soutenait que, comme il y avait eu la mort au bout, alors forcément plusieurs erreurs avaient dû être commises (absence de GPS, mince créneau météo etc etc).
Son assurance m’a étonnée car, en alpiniste et grimpeur chevronné, il n’est pas sans connaître les facéties et malices (hélas) de la montagne, et j’essaie de comprendre mais certaines choses me semblent curieuses.

Puis, en navigant sur internet pour essayer de retracer la chronologie des évènements et comprendre le « pourquoi ? », je suis tombée sur un questionnement soulevé par une spéléologue ici : http://bulleforum.net/2-alpinistes-morts-aux-jorasses-t3575.html

Je voudrais donc relayer ce questionnement, et vous poser donc quelques questions techniques.

La première, dont découlent toutes les autres, est en fait celle-ci :

  • Comment est-il possible, étant partis le mercredi soir, d’avoir fait un premier bivouac (sans sac de couchage) sans informer les secours ? (si j’ai bien compris).

Et 2 questions complémentaires :

  • Le guide n’avait pas de GPS pour donner une position exacte ? Mon collègue alpiniste me soutenait que les guides, aujourd’hui, sont le plus souvent équipés d’un GPS. Si vous pouvez me le confirmer.

  • Pour ceux qui connaissent un peu l’éperon Walker, le trou de neige dont a parlé Sourzac, a-t-il jamais existé ? Il semble que, lorsqu’ils ont été retrouvés, ils étaient un peu « installés » (réchaud sorti, assis sur des cordes etc). Cela signifierait, soit qu’ils avaient quitté leur abri (ce qui m’étonnerait fortement, pas vous ?), soit qu’ils n’ont jamais été dans un trou de neige, ce qui semble peu probable aussi (car pourquoi donner une information erronée ?).

Bref, collègues alpinistes, soyez prudents, et si vous avez des infos, j’en veux bien, car avec les éléments que j’ai, cela reste un mystère. A moins bien sûr, que l’on ne sache jamais tous les tenants et aboutissants, ce qui me semble le plus probable.

Ils n’étaient pas réfugié sur l’éperon Walker (en face Nord), mais plutôt dans la face sud, qui était leur voie de descente. C’est un parcours en grande partie glaciaire, il est donc possible d’y creuser un abri de neige.

Après coup on peut toujours chercher et trouver des erreurs et il y aura toujours des gens pour dire yavéka … Quel alpiniste peut prétendre n’avoir jamais été bien trop lent, n’avoir jamais fait de bivouac imprévu, n’avoir jamais fait d’erreur d’itinéraire, n’avoir jamais été à la rue physiquement …??? En général -et c’est tant mieux- cela n’a pas de grave conséquence. Et parfois …
Pour les questions posées je crois que la réponse toute simple figure dans le forum cité… je développe mon point de vue.
Concernant tout le matériel sophistiqué moderne, il semble que pour beaucoup sur c2c ce soit une règle évidente d’embarquer avec soi des outils modernes comme le téléphone portable ou le gps. Je sais que je passe pour un vieux croûton mais je n’ai pas peur d’affirmer que ce n’est pas le cas pour tous (dont moi-même) et je pourrais développer mais bon je ne sais pas si ça en vaut la peine. Passons.
Il est clair que si ce que j’ai lu est vrai la cordée pensait passer dans la journée, estimait que le créneau météo était suffisant et pensait redescendre rapidement. (Si on ne partait dans de grandes courses qu’à l’occasion de longs bons créneaux on ne partirait pas souvent) Et puis il y a eu un problème sans doute d’ordre physique: d’après les infos dont on dispose un des deux a coulé la bielle (il semble que ce soit charlotte) comme cela m’est arrivé une fois et peut arriver à n’importe qui, je dis bien n’importe qui, professionnel ou pas. (Peut-être aussi que les conditions de glace ont imposé un rythme plus lent que prévu.) Pourquoi ne pas alerter les secours ? parce qu’on pense que ça va passer, et parce que tout le monde n’a pas forcément cet état d’esprit. Après ça va malheureusement très vite. Quand on commence à se traîner le temps passe très vite et plus il passe moins on avance; avec le froid et l’altitude on se traîne et chaque pas est une souffrance. La descente des Jorasses (que je connais aussi pour y être forcément passé après être venu par le nord) n’est pas franchement facile. Avec du mauvais temps les pentes doivent devenir très vite très risquées, il est alors plus sûr de rester sur les zones mixtes. Si un membre de la cordée est épuisé, il faut l’assurer en permanence, éventuellement tirer des longueurs. Le brouillard peut encore compliquer les choses pour trouver le meilleur passage. Le temps passe, la fatigue augmente encore, on est pris au piège.
En alpinisme il y a et il y aura toujours une part d’impondérable (et s’il n’y en avait pas, pas sûr que beaucoup poursuivraient cette activité) et une part de chance. Le coup de pompe je le répète peut arriver à n’importe qui sans prévenir, tous les alpinistes expérimentés savent bien qu’un jour ou l’autre il n’aurait pas fallu grand-chose pour que tout bascule du mauvais côté…

Bonsoir Fanny.
voici deux trois éléments de réponse d’alpiniste qui peut permettre de comprendre certaines situations. Cela ne veut pas dire pour autant que ça correspond aux circonstances du drame évoqué.

Tout alpiniste qui part pour une course d’envergure envisage la possibilité de ne pas sortir la voie le jour même. La cordée choisit son équipement en fonction de ce qui est probable tout en se permettant de devoir supporter une nuit très inconfortable. On ne prend pas systématiquement un duvet. Il semble que c’était leur cas, ils ont réussi à passer plusieurs nuits malgré l’absence de duvet.
Une cordée d’alpiniste digne de ce nom n’appelle pas les secours sous prétexte de ne pas sortir le jour même la voie. Il s’agissait ici d’une cordée expérimentée.
De nombreuses voies techniques, notamment aux Grandes Jorasses, ont souvent comme meilleure échappatoire une sortie par le haut ce qui explique qu’ils ne soient pas redescendus. La descente reste malgré tout très technique.

Le GPS était inutile pour réaliser leur parcours, ascension du Linceul et descente par l’arête des Hirondelles. Le guide quand il pouvait communiquer pouvait indiquer suffisamment précisément sa position pour orienter les secours. Il semble qu’ils aient continué leur progression alors qu’ils ne pouvaient plus communiquer. Un GPS peut s’avérer totalement imprécis en bordure de falaise. Le GPS a été évoqué par les médias, à tort selon moi.

Dans un contexte de situation désespérée d’un point de vue météo il me semble normal de chercher finalement à fuir. Il suffit de lire la tentative de W. Bonatti au Freney et leur retraite désespérée avec Pierre Mazeaud pour comprendre que la descente peut finir par être la seule alternative envisageable.

Personne ne peut dire ce qui s’est passé là haut. Il n’y a que des suppositions. Bon bivouac la première nuit au pas ? Avec un GPS l’issue aurait-elle été différente ? Trou dans la neige ou pas ? Protagoniste en mauvaise forme ou pas ?
Fann, ton ami alpiniste a ses certitudes, sa vérité… Tant mieux pour lui.
Tu voudrais savoir, et certainement encore plus que toi, les proches d’Olivier et de Charlotte. Mais c’est impossible.
Il faut l’accepter ainsi. On ne saura jamais quels enchaînements de faits/décisions/perceptions ont abouti à ce drame.

Désolé, mais c’est un raisonnement absurde.

Les gens, qui sont mort en avion par exemple, alors suivant ton raisonnement, ils ont fait l’Erreur de monter dedans. Non aucune erreur de leur part, ils partaient juste en vacances.

GPS ou pas… difficile de se prononcer. Il est clair qu’avec un GPS on peut donner sa position à 10m près et on peut trouver son chemin même si un glacier n’est sans doute pas le meilleur endroit pour progresser avec une visibilité quasi nulle, le vent, une cliente épuisée, etc… Même avec une trace GPS exacte c’est pas gagné. On a tous fait l’expérience du jour blanc et de l’impossibilité de savoir si notre pied va se poser sur une pente montante ou descendante.

Ca m’étonne quand même que tous les guides ne soient pas équipés, ils sont chargés d’assurer la sécurité de leur client, de leur faire vivre une aventure mais de limiter les risques au maximum.
Un amateur peut chercher l’engagement mais un guide avec un client ?

[quote=« Gruyere, id: 1265569, post:6, topic:116283 »]

Désolé, mais c’est un raisonnement absurde.

Les gens, qui sont mort en avion par exemple, alors suivant ton raisonnement, ils ont fait l’Erreur de monter dedans. Non aucune erreur de leur part, ils partaient juste en vacances.[/quote]

+1
Qu’un alpiniste soit expérimenté ou non, qu’il ai commis une erreur ou non, la pierre ou le sérac qu’il se prend sur la tête ne font pas de différence. En montagne on peut mourir sans avoir commis d’erreur, ça s’appelle la malchance, ou être au mauvais endroit, au mauvais moment. C’est d’ailleurs pour cela qu’on parle de dangers « objectifs ».

Et pourquoi pas un guide avec un client? Ce n’est pas rare, et c’est une affaire qui les concerne. Le guide peut proposer une course engagée à un client; un client peut demander au guide de l’accompagner dans une voie engagée… Et chacun peut accepter, refuser, négocier… Cela devient un mandat réciproque, une histoire construite à deux…

les guides ne seraient pas des hommes ? (ou des femmes ?)

[quote=« ridgepo, id: 1265601, post:9, topic:116283 »]

Et pourquoi pas un guide avec un client? Ce n’est pas rare, et c’est une affaire qui les concerne. Le guide peut proposer une course engagée à un client; un client peut demander au guide de l’accompagner dans une voie engagée… Et chacun peut accepter, refuser, négocier… Cela devient un mandat réciproque, une histoire construite à deux…[/quote]

Le problème soulevé par J2LH n’est pas le fait de faire une course engagée ou non, mais plutôt l’utilisation du GPS, ce petit gadget qui pèse une broutille et qui peut éventuellement te sauver la vie. Du coup, c’est vrai qu’on peut se demander pourquoi certains guides n’en sont pas équipés, eux qui ont le « devoir » d’assurer la sécurité de leur client, autant que possible.

[quote=« Gruyere, id: 1265569, post:6, topic:116283 »]

Désolé, mais c’est un raisonnement absurde.
Les gens, qui sont mort en avion par exemple, alors suivant ton raisonnement, ils ont fait l’Erreur de monter dedans. Non aucune erreur de leur part, ils partaient juste en vacances.[/quote]

Je ne suis pas spécialiste en aéronautique, mais à mon avis la plupart des crash résultent d’erreurs. Evidemment pas des passagers, mais du pilote, de la maintenance, de la sécurité, de l’organisation, de la formation, de la conception de l’appareil, etc…
Et de mon point de vue, c’est la même chose en alpi : mauvaise estimation du risque météo, du temps nécessaire pour la course, du matériel à emporter, etc… Ici, ils ont pu se dire qu’ils passeraient avant la dégradation, où qu’ils étaient capable de passer dans le mauvais temps, ou qu’ils avaient de quoi tenir si le temps se dégradait. On ne saura jamais, et je ne fais aucun reproche, mais pour moi, il y a forcément erreur - ce qui arrive aux plus compétents, mais ne devrait pas nous empêcher de nous poser la question pour nos pratiques à nous.

Ou alors, donnez moi pour ce cas un scénario « sans erreur » ?

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Merci pire et Lutin pour ces explications qui préservent la liberté de choix de chacun sans enfermer dans des schémas.

je sais pas trop comment le dire, c’est peut-être pas clair :slight_smile:

Posté en tant qu’invité par distraction:

Chers lecteurs, chers modérateurs
Mon boulot m’oblige le secret professionnel mais sachez que ce post ne fera rien avancer car la base de la discussion repose sur des propos reliés par les médias ou les amis des amis des amis. Toutes les informations d’origines sont interprétées par les journalistes de manières différentes, comme ils le veulent ou peuvent. Très souvent c’est comme ils le peuvent car ils ne connaissent pas grand chose à la montagne. En plus de cela, souvent, les informations d’origines sont malheureusement « légèrement » transformées pour plus de sensationnel.
Donc chers lecteurs, chers modérateurs, sachez que ce post n’est qu’une distraction (et d’en mieux car il en faut bien dès fois) mais rien de concret. Désolé pour ceux qui veulent comprendre les circonstances précises de l’accident, mais on ne peut pas comprendre sans avoir les bons éléments au départ. Je respect la liberté d’expression mais je souhaite avertir les lecteurs. Merci pour votre compréhension.

Sur les circonstances d’un accident, il y a peut être mieux comme distraction?

C’est à peu près c’est que j’ai dit à mes collègues et qu’à ce moment là on ne pouvait qu’espérer qu’ils s’en sortent.

Je n’ai pas cette impression en ce qui concerne le gps.

Je ne connais pas du tout cette montagne, pourtant fameuse d’entre les fameuses.

Est-ce que quelqu’un a la moindre idée de pourquoi la cordée n’a pas pu tenter une réchappe, vu le calibre du leader?

Impossible à cet endroit, suicidaire vu le terrain et la météo, pas le matos suffisant, ou épuisement de la cliente…?

C’est poignant d’espérer des jours durant des secours qui ne viendront pas à temps.

[quote=« oli974, id: 1265718, post:18, topic:116283 »]Est-ce que quelqu’un a la moindre idée de pourquoi la cordée n’a pas pu tenter une réchappe, vu le calibre du leader?

Impossible à cet endroit, suicidaire vu le terrain et la météo, pas le matos suffisant, ou épuisement de la cliente…?[/quote]
je ne sais pas non plus.

mais il y a une chose que l’on sait maintenant, mais que à l’époque, personne, et encore moins eux, ne pouvaient savoir : le mauvais n’a jamais basculé coté nord (coté linceul, coté demi tour).

aujourd’hui, on se dit que peut être un retour par le nord n’aurait pas été une si mauvaise idée (abstraction faite de ts les inconvénients qu’il y a de redescendre le linceul même qd il fait beau) : mais si le mauvais n’avait basculé, ne serait-ce qu’un peu, en versant N ? imaginez…

Merci pour ta réponse, même si je ne sais pas ce que c’est que de redescendre par ce glacier: très pentu, très crevassé, rimaye et séracs terribles, je suppose.