Digression "Mur de foehn"

Le problème n’est pas les conditions incertaines mais le risque que tu prends si le mauvais temps est un peu plus mauvais qu’escompté ou arrive plus vite que prévu : sur une course tranquille avec de la marge pour faire demi-tour sans se retrouver brutalement bloqué, tu peux prendre une grosse part d’incertitude.
Quand tu as un passage délicat à 3500m ça n’a plus rien à voir.

Je crois que le piège de Tête Blanche et des sommets avoisinants, c’est que le mauvais arrive très brutalement (du beau tu passes à une visi < 2m en quelques dizaines de minutes puis à 100 km/h de vent en une ou deux heures) Comme en plus c’est une zone très fréquentée (Cham-Zermatt, PDG) ce n’est pas trop étonnant que les accidents s’y concentrent. Et c’est difficile de ne pas le savoir vu le battage médiatique qu’il y a eu à chaque accident.

Sur l’accident de dimanche on ne sait pratiquement rien à ce stade et comme il n’y a pas de survivant on ne saura probablement jamais grand chose (à part dans le meilleur des cas, ce qu’on pourrait tirer d’une trace gps si elle a été enregistrée)

Par contre sur l’accident de 2018 qui a été décortiqué par tous les bouts, on sait que le guide a eu faux sur toute la ligne et qu’il n’y avait aucune « fatalité ».

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Tt est question de choix, mais il faut choisir une course et un matériel qui permettent de s’en sortir : faire demi-tour facilement si on voit le mauvais temps arriver, ou s’en protéger si on ne peut faire demi-tour (dc avec un sac + lourd).
S’engager ds une course engagée en misant uniquement sur la rapidité serait une forme de roulette russe en cas d’imprévu. C’est valable par des conditions stables, pas si une dégradation est annoncée.

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Sur de la rando pas expo tu peux évidemment partir dans des conditions incertaines, en haute montagne et encore plus l’hiver, faut être joueur.

Mathey,le secrétaire général des guides défend la communauté des alpinistes dans les grands médias,c‘est tout à son honneur et ce n’est jamais évident de partir au charbon dans le journal de 20 h. Je n‘ai pas non plus envie de émettre un jugement sur les décisions des victimes,ce que je sais seulement c‘est que moi personnellement ,je n‘ai pris pas que des bonnes en montagne…
Néanmoins : je suis étonné par l’indulgence de traitement dans lesdites médias cette fois . Il a été différent dans le drame des Vignettes et j‘ai l’impression que si les victimes avaient été des parisiens (ou des allemands,italiens ou je ne sais pas qui d’ailleurs) et pas des habitants de la vallée,ça se serait passé différemment)

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Peut-être également, le fait qu’il n’y avait pas de guide pour ce drame, contrairement à celui des vignettes.

Tu fais un raccourcis et me fais dire ce que je n’ai pas dit.
Reprenons les bases de la gestion du risque :

L’idée n’est pas de renoncer dès que tu as 0.5% de chance que ça ne se passe pas bien, c’est au contraire d’évaluer un ensemble de paramètres influençant la sécurité de la sortie, et d’en tirer un bilan.
Une fois ces paramètres correctement identifiés, tu réfléchis aux moyens à ta disposition pour réduire les risques qu’ils créent (et ça peut varier beaucoup ; comme le présente @bens, risquer la tempête sur un glacier à 3000 ou risquer la tempête sur un sentier balisé, c’est pas la même chanson). En l’occurrence, pour la tempête c’est un risque de perte de repère et de froid, que tu peux minimiser avec des GPS, des batteries de rechange, des couches supplémentaires, des lance-flamme, des yourtes, que sais-je.
Et parfois, tu dois également mettre dans la balance la question de ce que tu acceptes de faire pour minimiser : est-ce que je veux emporter un tauntaun avec moi alors que je vais peut-être pas en avoir besoin ? Dans le pire des cas, qu’est-ce qui arrivera si je ne l’aurai pas pris ? etc.

Bref, c’est pour ça que c’est simpliste. Je suis totalement d’accord sur le fait qu’on sort parfois par mauvais temps, simplement il y a des façon de faire moins risquées que d’autres.

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Tu as raison, c’est vrai que c’est un genre de prise de parole peu évident, laissons-lui ça.
Après, l’affaire n’est pas finie, je peux comprendre que dans l’immédiat le principal soit de saluer les victimes une dernière fois. L’enquête peut bien prendre le temps qu’elle veut.

Exactement.

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>Tu fais un raccourcis et me fais dire ce que je n’ai pas dit.

Voilà ce que tu as écrit

La montagne ne décide rien, c’est nous qui décidons de partir.

Voilà et si tu écoutes bien Pierre Matthey jusqu’au bout, il parle de conditions incertaines en minutes 03’00 de la vidéo et si tu n’es pas d’accord avec lui, j’en ai déduis que tu ne partais jamais par conditions incertaines.

Personnellement j’ai trouvé son intervention très pertinente et sans jugement car il faut savoir rester humble vis-à-vis de la montagne et par respect pour les personnes disparues.

Par rapport au risque:

Celà m’est arrivé de juger une situation avec faible risque et que finalement les risques étaient plus élevé qu’estimé car la météo s’est dégradée plus vite que le bulletin le prévoyait. Celà peut arriver à n’importe quel spécialiste de la montagne tant au niveau des avalanches que de la météo, c’est en celà particulièrement qu’il faut savoir rester humble.

Il faut surtout rester humble en face de sa propre connerie. La plupart des alpinistes font des erreurs, parce qu’ils sont motivés par une sortie ou autre et laissent de coté les aspects négatif ou les risques.
Je pense que ceux qui se souviennent trop bien des galères ne restent pas alpinistes longtemps.

J’arrive très bien à m’imaginer à leur place : (ce qui suit est entièrement fictif) le mauvais devrait arriver à 14h : on va a zermatt faire le début et si ça pue on fait demi-tour. Arrivée à zermatt/disneyland sous un ciel radieux peu de vent, ambiance légère, tout le monde rigole et a oublié le risque. 10h30, le vent se lève un peu mais tout le monde est dans l’effort et personne ne soulève la possibilité du demi-tour même si quasi tous y ont pensé : la plupart se disent qu’il sera toujours temps de faire demi tour au col si le vent devient trop fort. 11h: sommet, décision de revenir très vite a zermatt, mais le temps de passer en mode descente et de manger un truc on y voit plus rien, le vent empêche de tenir debout et c’est trop tard.

Le raisonnement fallacieux qu’il faut combattre c’est qu’a ski on est tellement vite en bas qu’on peut attendre le dernier moment pour se barrer. C’est souvent vrai sauf quand ça ne l’est pas, et le fait d’aller vite fait qu’on va aussi très loin et très haut.

Un autre raisonnement c’est de penser quand il fait moche, que le risque du mauvais temps, c’est d’annuler la sortie, c’est de faire demi tour avant la fin, de faire le trajet pour rien, ou encore de ne pas apprécier le paysage, alors que le vrai risque est bien plus grave.

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Pas du tout d’accord avec toi sur ce point. Raccourci simpliste.

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  • groupe de 10 avec un seul encadrant
  • un seul moyen de navigation - smartphone - sans backup, a priori mal maitrisé
  • pas de radio ou d’autre moyen de communication opérationnel (téléphone satellite HS)
  • course longue à plus de 3000m avec avec du Foehn tempétueux annoncé dans un secteur bien connu pour sa dangerosité par ces conditions
  • passage final étroit et compliqué à trouver en cas de manque de visi
  • membres du groupe ni informés ni consultés sur le choix de la course et de ses risques
    Au refuge le matin seuls deux autres petits groupes sont partis, l’un avec deux guides de haut niveau en mode « warrior », l’autre c’est le groupe de français qui s’est fait prendre avec eux.
    A priori il n’ont pas eu d’éléments impondérables (genre casse de matériel, chute, coulage de bielle d’un participant,…) pour expliquer leur lenteur, juste des erreurs de navigations (au vu de la trace GPS) et l’inertie du groupe.
    Si ces éléments sont un « raccourci simpliste » et si tu penses que c’était juste la faute à la « fatalité » alors oui on n’est pas d’accord.

On en a débattu ici :

A la suite du reportage visible là : (avec des restrictions de pays qu’il faut contourner avec un VPN ou Tor)


Je conseille vivement le visionnage à ceux qui ne l’ont pas vu.

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tél satellite qui ne marchait pas, ok, mais tu connais bcp de guides avec un tél sat sur eux ?
passage final étroit et compliqué à trouver en cas de manque de visi : oui, et ils y étaient, puis ils ont vu les tuyaux de la cabane. ils avaient fait le plus dur, trouver le moment où tu commences à traverser à gauche.
dans le doc à charge, on ne parle pas du tout du fait que si un ou plusieurs membres du groupe connaissaient ce passage ou avaient étudié la carte, ils auraient peut-etre pu en déduire qu’ils étaient vraiment (très) proche et ça ça n’a pas du tout été évoqué. Le guide était vraiment seul… j’avais écrit un article de blog sur le sujet et pas osé le publier, je vais le retrouver. Pour m’être retrouvé au même endroit, seul, en pleine bourrasque un an avant, cet accident m’avait marqué : quand tu trouves le début du passage à gauche, tu es sauvé normalement :frowning:

Je suis désolé mais je crois qu’il faut absolument rester objectif. Ce n’est pas parce qu’un incident se termine de façon dramatique qu’on a pas le droit de mettre les points sur les « i ». Dans son intervention, Pierre Matthey (et le journaliste) adopte un ton extrêmement conciliant, flou, un peu attristé même, qui oriente son message dans une direction à mon avis très dommageable.
J’en vois les effets chez mes parents notamment, qui peinent à entendre le discours rationnel de la montagne parce qu’on est constamment bombardé de ce discours sensationnel qui fait croire que la montagne n’est qu’un jeu de hasard, et ce fait malheureux réduit leur expérience de la montagne ; ils n’osent pas faire ou telle ou telle rando parce que se focalisent beaucoup trop (comme leur apprend les médias à le faire) sur les risques, au lieu de réaliser que ces risques, avec des choix corrects, ont extrêmement peu de chance d’arriver et que s’ils arrivent, c’est pas grave (à ski, descendre 1 par 1 ce n’est pas considérer que c’est pas risqué, c’est considérer qu’une avalanche va se produire mais n’ensevelir qu’une personne au lieu du groupe entier).

Puisqu’on ne semble pas d’accord sur monsieur Matthey, quelques propos qui m’ont fait tiquer pour préciser ma pensée :

« […] là ça n’a pas fonctionné. » (en parlant du trou dans la neige)
-> Certes, mais pourquoi ? Pourquoi ne pas préciser quel matériel ils avaient ? Quelle était la taille du trou ? Comment on essaie de faire ce trou en général ? C’est des détails qui prennent 30s à dire. Mais là il choisit de rester flou en suggérant que c’est simplement pas de chance si ça n’a pas suffit.

« ça se passe à quelques centaines de mètres de la civilisation » (propos du journaliste)
-> oui, environ 7km c’est quelques centaines de mètres. Et c’est à vol d’oiseau, 7km, entre le col de Tête Blanche et les premières habitations. Si on compte le relief c’est encore plus. Un raccourci qui desserre bien la théorie d’une nature ultra-responsable.

« et l’humain, au milieu de cet immensément grand, non contrôlé non régulé, est tout petit. »
-> un grand classique. C’est étonnant, si c’est non contrôlé, que l’on arrive à jouer des coupes du monde de ski sur des glaciers. Faut arrêter, la nature est certes puissante, mais l’humain l’est au moins tout autant. C’est juste délirant tout ce qu’on arrive à faire en montagne aujourd’hui, en termes de sécurité, de prévision, de rapidité ; faire comme si tout ça n’existait pas est malhonnête.

« en tant qu’alpiniste, le même jour, je serais aussi parti pour une randonnée. »
-> ah oui ? il aurait fait Zermatt-Arolla de la même façon ? ça veut dire quoi randonnée ? 500m de D+ sur la montagne voisine c’est une randonnée. Ça ne veut rien dire son exemple, encore un propos qui renforce l’image ultra-responsable de la nature.

« les événements ont joué contre eux. »
-> sans plus de précision, encore un phrase sensas’ qui n’a que peu de sens. Quels événements ? La météo ? Le destin ? On peut tout désigner avec ça.

« très souvent nous partons avec des conditions incertaines en montagne »
-> ça veut tout et rien dire. À nouveau il est flou. Dire quelque chose comme « très souvent nous partons avec des conditions incertaines en montagne, mais nous adaptons à chaque fois notre comportement » ne prend que quelques secondes.

« le plus souvent nous avons des étoiles qui brillent dans nos yeux, dans ceux de nos clients ; aujourd’hui nous avons des larmes, mais nous faisons avec. »
-> pour le coup, très belle conclusion.

Mais voilà, à mon avis faut commencer à responsabiliser les humains. Ça fera comprendre au grand public d’une part qu’il faut faire attention à ce qu’on fait, mais aussi que par nos choix, on peut faire des choses extraordinaires qu’on pensait impossibles, et ça c’est beau ! mais c’est un message que les médias se refusent à passer.

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Un commentaire qui va dans ton sens, et qui pour moi aussi porte pas mal de bon sens.
Après est-ce étonnant d’un docu RTS quand on sait que, récemment, un certain nombre de journalistes suisses on reproché dans une lettre ouverte ou une pétition (je ne sais plus les détails) à la RTS de ne pas être assez plurielle dans ses points de vue…
La politique de la poire coupée n’aurait pas que du bon :stuck_out_tongue:

Il est dur, mais je suis assez d’accord avec tout ce qu’il dit. La plus grosse nuance que je mettrais c’est qu’il est très facile de se laisser entraîner dans un plan foireux. Je suis serai surpris si l’ami dede n’avait pas fait quelques conneries a son époque. D’ailleurs il dit lui même qu’il avait prévu une sortie qu’il a annulé le matin. Si il etait vraiment si prudent il aurait pu annuler avant…

Aujourd’hui beaucoup de guides ont des radios et il me semble qu’en cas de pépin on peut leur reprocher de ne pas en avoir.

Pour le reste je précise que je fais aussi des conneries en montagne et si j’avais un jour un accident suite à des erreurs aussi évidentes que celles dont on parle, je trouverais tout à fait normal que ça soit exposé . Ce n’est pas le guide qu’on juge, c’est ses décisions…

De ce que j’ai retenu des témoignages c’est que le guide était justement en mode « je décide seul » et il n’a rien partagé avec ses clients.
Pour le reste, par rapport aux membres du groupe j’ai compris qu’il n’y en a qu’un qui suivait un peu, le reste faisaient un confiance absolue au guide (comme c’est presque toujours le cas dans ce type de groupe)
Et je pense que quand ils ont été bloqués avant d’arriver au passage final.

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Relevés de vent et de température au Gornergrat (3129 m) & calcul du facteur de refroidissement éolien :

Journée du samedi 9 mars :

06:00 : rafales à 62 km/h; T° = -10.8°C; facteur éolien = -24°C
09:00 : rafales à 23 km/h; T° = -11°C; facteur éolien = -20°C
12:00 : rafales à 83 km/h; T° = -9.5°C; facteur éolien = -23°C
15:00 : rafales à 128 km/h; T° = -8.6°C; facteur éolien = -26°C
17:00 : rafales à 129 km/h; T° = -8.8 °C; facteur éolien = -26°C
19:00 : rafales à 114 km/h; T°= -8.8 °C; facteur éolien = -24°C
21:00 : rafales à 75 km/h; T° = -9.3°C; facteur éolien = -23°C

Le groupe de 6 randonneurs était suivi en temps réel par un traceur GPS. Une immobilisation prolongée à Tête Blanche a déclenché une 1ère alerte des secours à 16h03.
Le groupe de 6 randonneurs disposait de pelles et de couvertures de survie pour creuser un trou et s’y loger à l’abri du vent et du froid. Les randonneurs portaient de fines combinaisons de course et n’étaient que très légèrement équipés. Malheureusement, cela n’a pas suffit pour lutter contre la tempête et l’hypothermie du groupe. La colonne de secours terrestre a dû arrêter sa progression dans la nuit de samedi à dimanche à cause des conditions nivologiques défavorables rencontrées à 3000 m d’altitude (neige fraîche + formation de plaques à vent à cause du foehn violent + brouillard).

A la question de savoir si c’était prudent d’y aller en sachant qu’une tempête de foehn était prévue, voici le point de vue d’un sauveteur fin connaisseur des lieux du drame :
https://www.blick.ch/fr/news/suisse/lun-des-sauveteurs-analyse-le-drame-randonneurs-morts-en-valais-il-ne-serait-pas-faux-de-dire-que-cetait-un-projet-suicide-id19521776.html

J adore le gros poncif du journaliste : " Les victimes sont des habitants de la région qui connaissent mieux les dangers de la montagne que les touristes venus d’ailleurs. Comment en est-on arrivé là? "

ah ces journalistes… cependant en tant que valaisans, nous savons que ces lieux sont extrèmement dangereux en tant de foehn. Lors des précédents drames, les médias locaux en avait énormément parlé. Mais on sous estimera toujours la rapidité du changement de temps du au foehn. Je m’étais d’ailleurs fait piégé dans la Noire de Peuterey il y a fort longtemps, pourtant je vis avec le foehn depuis tout gamin!!!