Digression littéraire autobiographique

Posté en tant qu’invité par laster:

Le mythe autour du métier de guide est bien réel, véhiculé par la littérature alpine romancée ou les récits que nous avons tous lus â la lueur blafarde de nos lampes de chevet.Le guide, c’est ce grand frère qui détient les clés d’un univers qui, lorsque j’étais ado, demeurait à la fois inquiétant et fascinant.Sa démarche lente, régulière, chaloupée et son accent inimitable pour rassurer ou prévenir marque l’inconscient collectif.

Digression issue d’une discussion sur le probatoire : /viewtopic.php?id=241156

Posté en tant qu’invité par laster:

Les années passent, l’expérience se forge.Au hasard des chemins d’altitude, on croise et salue respectueusement celui qui fut ce grand-frère , devenu désormais un copain qui a partagé jadis des moments intenses rangés sur l’étagère des souvenirs.Le sevrage a opéré. On imite le guide, il reste un modèle,mais l’envie d’être autonome prend le dessus.Le métier de guide est perçu différemment,au service des autres, invariablement.On prend de l’assurance, il est un recours pour des courses exceptionnelles ou à la suite d’un désistement.Il est presque l’égal, moins les contraintes d’une vie exigeante.Le demi-dieu est devenu humain, respectable et respecté.

Posté en tant qu’invité par laster:

L’élève a dépassé le maître.Il rentre d’une longue course, fourbu.36 heures à galérer, transpirer, s’émerveiller, douter, jurant que l’on ne l’y prendrait plus.Le pire, c’est le réveil à 3h00 ! Le petit-déj qui ne passe pas, la longue marche dans l’obscurité, l’esprit confus et le sentiment d’être conduit à la boucherie, les chutes de pierre, de séracs, la fissure en 6, le rocher froid…le soleil se lève, les idées se mettent en place.Dans l’action, on retrouve ses facultés et la motivation, le sommet se profile.C’est la fin, il faut redescendre dans la vallée, on pense à prendre soin de soi, de ses proches et à échaffauder
de nouveaux projets.Il n’a pas croisé son ami, trop occupé à ramener ses clients d’un sommet cent fois parcourus, à rejoindre un nouveau refuge sans embrasser le petit dernier, à rentabiliser une saison compromise par une météo agitée…le choix est fait.

Posté en tant qu’invité par Antinombriliste:

[quote=« laster, id: 1584949, post:3, topic:139372 »]L’élève a dépassé le maître.Il rentre d’une longue course, fourbu.36 heures à galérer, transpirer, s’émerveiller, douter, jurant que l’on ne l’y prendrait plus.Le pire, c’est le réveil à 3h00 ! Le petit-déj qui ne passe pas, la longue marche dans l’obscurité, l’esprit confus et le sentiment d’être conduit à la boucherie, les chutes de pierre, de séracs, la fissure en 6, le rocher froid…le soleil se lève, les idées se mettent en place.Dans l’action, on retrouve ses facultés et la motivation, le sommet se profile.C’est la fin, il faut redescendre dans la vallée, on pense à prendre soin de soi, de ses proches et à échaffauder
de nouveaux projets.Il n’a pas croisé son ami, trop occupé à ramener ses clients d’un sommet cent fois parcourus, à rejoindre un nouveau refuge sans embrasser le petit dernier, à rentabiliser une saison compromise par une météo agitée…le choix est fait.[/quote]

C’est quoi ce délire ! L’élève a dépassé le maître !? Guide c’est pas grimpeur de haut niveau comme entraîneur de foot c’est pas marquer des buts mais gérer l’équipe pour qu’elle les mette !

En tout cas c’est plutot bien écrit !
Et merci pour le petit récit d’un morceau de vie d’un guide, ça montre assez bien que les choses ne sont jamais figées :slight_smile:

[quote=« laster, id: 1584949, post:3, topic:139372 »]L’élève a dépassé le maître.Il rentre d’une longue course, fourbu.36 heures à galérer, transpirer, s’émerveiller, douter, jurant que l’on ne l’y prendrait plus.Le pire, c’est le réveil à 3h00 ! Le petit-déj qui ne passe pas, la longue marche dans l’obscurité, l’esprit confus et le sentiment d’être conduit à la boucherie, les chutes de pierre, de séracs, la fissure en 6, le rocher froid…le soleil se lève, les idées se mettent en place.Dans l’action, on retrouve ses facultés et la motivation, le sommet se profile.C’est la fin, il faut redescendre dans la vallée, on pense à prendre soin de soi, de ses proches et à échaffauder
de nouveaux projets.Il n’a pas croisé son ami, trop occupé à ramener ses clients d’un sommet cent fois parcourus, à rejoindre un nouveau refuge sans embrasser le petit dernier, à rentabiliser une saison compromise par une météo agitée…le choix est fait.[/quote]
Belle plume bien inspirée. Bravo Laster (écrivain de montagne?)

Posté en tant qu’invité par laster:

Salut Ethanol,
Salut MMD,
Merci pour les compliments ! :wink:
Totalement improvisé, d’un seul jet, et qui met en scène un grimpeur amateur (autobiographique) qui donne son point de vue, sa perception du métier de guide.
Bonne soirée.

Posté en tant qu’invité par laster:

PS: autobiographique certes, mais avec l’ajout de quelques fantaisie du genre « l’élève dépasse le maître ».Je n’ai jamais eu la prétention d’être meilleur que le guide lol.Pour le reste, c’est du vécu (et désolé pour les fautes d’orthographe/syntaxe…dans la précipitation…).

Posté en tant qu’invité par jeanf:

@laster… bien écrit merci pour ton partage :slight_smile:
@tous… chacun sa route, chacun son chemin passe le message à ton voisin…

Ca me fait penser à un court metrage que j’avais vu où des grimpeurs américains découvraient le massif du mont blanc, ils arretaient pas de citer Nietzsche et de faire référence à la litterature. Il y a un gros potentiel littéraire chez les grimpeurs en fait, et c’est surement plus inspirant que le dernier livre de Musso :slight_smile: ! Pour avoir fait pas mal de philo y aurait moyen de faire un bon bouquin sur le sujet !

Posté en tant qu’invité par laster:

Il.m’arrive régulièrement d’aller me ressourcer sur la Côte d’Azur, histoire de changer totalement d’environnement.Il y a à Eze-sur-mer un itinéraire, le « sentier Nietzsche », qui grimpe jusqu’à Eze-village (-400m de dénivelée). Il s’élève en lacets réguliers face à un des plus beaux paysages de la Riviera entre l’Isoletta et St-Jean-Cap-Ferrat.Une balade splendide en vérité.

Toute la pensée de Nietzsche a été élaborée en marchant, il passait des heures par jour à marcher. Pour lui, la philosophie était avant tout un corps, et ce n’est pas étonnant que les défenseurs de positions nihilistes étaient assis sur une chaise quand celui qui a conceptualisé l’Eternel Retour était constamment en mouvement… La marche a des effets très bénéfique pour la réflexion. Kant faisait tous les matins la meme marche à l’aube, et Heidegger avait le même besoin de marcher longtemps pour pouvoir réflechir correctement.

Posté en tant qu’invité par laster:

J’ignorais cela.Tout est cohérent : la prochaine fois, je verrai le sentier Nietzsche d’un oeil différent.

Tout comme Aristote qui enseignait en déambulant. La philosophie péripatéticienne qui s’effectue en déambulant et en échangeant des propos, des réflexions intellectuels …

C’est chouette et bien écrit.

Sans oublier Rousseau, bien sûr, qui disait que « La marche a quelque chose qui anime et avive mes idées; je ne puis presque penser quand je reste en place »

Sinon joli texte, merci à Laster (attention à ce pseudo en univers germanophone, ça veut dire « vice » en allemand…)

Posté en tant qu’invité par laster:

Merci à vous tous pour vos encouragements !

(bien pris pour le pseudo, involontaire mais assumé lol :wink: )

[quote=« laster, id: 1585309, post:85, topic:135424 »]Bonjour,
C’est dommage, tu en dis trop ou pas assez ! Cela aurait été enrichissant pour ceux qui veulent embrasser la carrière.En même temps, je comprends ta discrétion sur le sujet pour des raisons diverses, pudeur, devoir de réserve, respect à l’égard des confrères ou manque de temps…[/quote]

La fameuse pudeur du vieux guide à la démarche chaloupée et à l’accent traînant qui ne conte ses exploits qu’à certains privilégiés à la lueur blafarde de l’unique ampoule du vieux refuge en bois qui sent bon le bon vieux temps :smiley:

Non je plaisante, mais il faut renouveler un peu tes références littéraires laster