De l'analyse des accidents de montagne

Posté en tant qu’invité par GC:

Bonjour
Un petit exemple et quelques petites questions qui montrent la difficulté de faire passer les consignes de sécurité face aux habitudes…
Donc : des stagiaires à qui l’on fait enlever les accessoires accrochés aux « portes matériels » arrières du baudrier -car en descente avec crampons il y a un risque important de les accrocher- ( ceux qui l’ont vérifié ne sont souvent pas ici pour en parler…)
Dans un premier temps , ils les enlèvent… dans un second temps ils les remettent …par habitude …
Dans ce cas là … les habitudes liées aux pratiquent les plus courantes reviennent au grand galop , comment faut il faire passer le message pour qu 'il reste ? ( on entre dans ce cas là dans des techniques qui ne sont pas transposables entre 2 pratiques proches)
Faisant pas mal de formation nous avons identifié de nombreux cas ou les techniques basiques de sécurité ne sont plus ou pas respectées par les pratiquants actuels … ( les causes et leurs effets ont été répertoriés, mais il est difficile de les faire comprendre et changer sans passez pour des e …s )
Que faire ? interdire les baudriers avec porte matériel? interdire d’utiliser en permanence les portes matériels? ou…?
Avez vous des idées ?
GC

J’ai travaillé sur le sujet dans le secteur de l’industrie chimique.
La prise de conscience de chacun face à ses propres comportements indésirables est difficile à admettre et donc a modifier. Il est considéré comme normale qu’un pratiquant, un professionnel, l’expérience s’accroissant fasse évoluer ses habitudes et donc son comportement pour en tirer des avantages qu’il n’aurait pas eu sans. ça a été montré par le Prof Marcel Simart de l’université de Montréal dans ce qu’il a appelé le modèle ABC (Antécédents, Behaviour, Conséquences). comme je l’ai dit précédemment la prise en compte du facteur humain fais partie de la mise en place d’une culture de sécurité propre à chaque activité.

Tu travailles à l’ensa?

Ah ben j’apprends qqch. mais je ne changerais pas mes habitudes : je conserve le matos sur le baudar à porter de main, indispensable en cas de chute en crevasse. Par contre je n’ai rien de plus long qu’une broche, je ne vois pas comment accrocher ça avec mes crampons (de toute façon ma souplesse légendaire ne me permet pas de monter le talon si haut).

Il y en a déjà :

  • Analyses de « presqu’accidents » ?
  • avez vous déja eu un accident qui aurait pu vous couter la vie ?
  • étude haute montagne
  • temoignage accident montagne pour mémoire
  • la vie … suite (un témoignage)
  • Pour analyser les accidents ? (discussion sur le même thème que celle-ci).

[quote=« GC, id: 887893, post:21, topic:88098 »]Que faire ? interdire les baudriers avec porte matériel? interdire d’utiliser en permanence les portes matériels? ou…?
Avez vous des idées ?[/quote]
N’utiliser que les 2 portes-matos de devant; et pour le reste le bas des bretelles du sac à dos. C’est nettement plus accessible de toute façon avec un sac que les 2 portes-matos de derrière, qui sont souvant cachés sous le sac (en tout cas pour les petites personnes)!

Posté en tant qu’invité par GC:

[quote=« cairn-oc, id: 887935, post:22, topic:88098 »]


Tu travailles à l’ensa?[/quote]

Non, mais je participe au sein de la commission nationale alpinisme de la FFCAM à la mise au point et au choix des techniques à enseigner, pour essayer d’améliorer l’autonomie et la sécurité des cordées .
Pour plus de détails tu peux me contacter sur mon mel g.cretonATwanadoo.fr

[quote=« Bubu, id: 887954, post:23, topic:88098 »]

Ah ben j’apprends qqch. mais je ne changerais pas mes habitudes[/quote]
Oups désolé, je n’avais pas tilté que c’était les portes matos arrières seulement… Ok avec la remarque de GC du coup.

Posté en tant qu’invité par Max421:

J’ai le même souhait que toi de trouver des témoignages et analyses d’accident pour apprendre et progresser.
C’est difficile sans doute, mais pas impossible puisque j’ai déjà lu ici et là plusieurs témoignages très instructifs.
On y trouve rarement des choses exploitables globalement (sur le facteur humain et ce genre de chose…) mais plutôt une somme de petits trucs à ne pas faire (pour ne pas se mettre en galère) et à faire (pour essayer de s’en sortir…)
C’est moins marquant que les expériences qu’on peut faire soi-même mais ça fait quand même progresser.

Pourquoi ne pas faire ici une rubrique spécifique en aidant le posteur à structurer son témoignage ? A mon avis il faut laisser le témoignage brut sans possibilité de le commenter directement, sinon on peut être sûr que ça partira immédiatement en vrille avec les nombreux donneurs de leçons qu’on peut trouver sur ce forum.

Dans un autre domaine, la mer, le journal Voiles et Voiliers édite tous les mois un article « ça vous est arrivé » avec d’une part le
récit de l’accident/incident écrit par celui à qui c’est arrivé, un résumé avec « ce qui a marché/à faire », « ce qui n’a pas marché/à ne pas faire » et un commentaire du journaliste. Je trouve ça instructif et bien fait.

d’où l’intérêt une fois de plus de faire ça dans le topoguide (par contre, c’est plus difficile d’utiliser un pseudo de circonstance si on n’assume pas), les commentaires invitent moins au hors sujet.

exemple : http://www.camptocamp.org/outings/100749/fr/barre-des-ecrins-voie-gamma

Dans la revue de l’ANENA, par exemple, il y a une rubrique « témoignage ». Par contre, les accidents mortels sont bien présents dans la revue mais traités de façon scientifique, « désincarnée »…
Comme la revue ne parait que tous les trois mois, il ne peut y avoir de réactions « à chaud » sur ces accidents et la réflexion est donc plus sereine.

Voici un exemple d’analyse d’accident d’avion, par des amateurs et des professionnels, sur un forum publique dédié à l’analyse d’accidents d’avion.

http://www.crash-aerien.com/forum/1-vt11597.html

Plus de 250 morts et les gens arrivent à parler avec objectivité et respect.
Je ne vous cache pas qu’en tant que modérateur, je suis jaloux.

Peut être la différence est qu’en un accident d’avion les victimes ne sont pas responsables tandis qu’en montagne l’alpiniste est toujours responsable de son accident (plus ou moins). Donc dés que l’on cherche des causes on arrive toujours à mettre en question la responsabilité de la victime, ce qui pour certains est insupportable. Et ça fait dégénérer le débat.

Mon argument ne tient pas la route si l’on considère que les pilots, ils sont souvent victimes ET responsables (plus ou moins), et pourtant quand on parcourt l’exemple que je vous ai donné on voit que l’analyse des causes possibles (y compris les erreurs humaines) se fait avec grand respect et modération.

Une autre explication de cette différence entre analyse d’accidents d’aviation et de montagne sur un forum publique qui me vient à la tête est la suivante:

Dans l’aviation la probabilité de mourir est petite et l’analyse des accidents apporte des améliorations qui diminuent encore cette probabilité.

En montagne la probabilité de mourir est grande, et l’analyse des accidents ne diminue pas cette probabilité (*). Et je pense que se confronter à ces deux idées n’est pas bien accepté par beaucoup et donne lieu à des tensions trop facilement.

(*) Remarquez qu’en montagne plus de connaissance et mieux matériel n’amène pas l’individu à évoluer de façon plus sure dans un terrain de jeu prédéterminé, sinon à élargir son terrain de jeu (plus difficile, plus haut, plus raide…). Ainsi il revient toujours au même niveau de risque. Celui qu’il détermine (conscient ou inconscientment) comme tolérable. Grand différence avec l’aviation.

[quote=« Dani, id: 888066, post:31, topic:88098 »]Voici un exemple d’analyse d’accident d’avion, par des amateurs et des professionnels, sur un forum publique dédié à l’analyse d’accidents d’avion.

http://www.crash-aerien.com/forum/1-vt11597.html

Plus de 250 morts et les gens arrivent à parler avec objectivité et respect.[/quote]
Pas toujours, loin de là !
Sur ce forum comme d’autres, y’a de tout et en particulier des gens qui échaffaudent un tas d’hypothèses sans être au courant de rien.

[quote]Dans l’aviation la probabilité de mourir est petite et l’analyse des accidents apporte des améliorations qui diminuent encore cette probabilité.

En montagne la probabilité de mourir est grande, et l’analyse des accidents ne diminue pas cette probabilité[/quote]
Oui, c’est le pont de vue que j’avais exprimé dans des posts précédents au sujet de l’analyse des accidents.
Pour la probabilité de mourir, elle est différente pour les aviations commerciale et légère.

Là n’est pas la question. D’ailleurs d’autres méthodes du même type sont enseignées en france non ? sinon c’est qu’elle n’ont pas une utilité reconnue mais c’est un autre débat…

C’est parce que le facteur humain est un élément prépondérant dans beaucoup d’accidents que les expériences des uns pourraient servir aux autres.

+1
D’ailleurs, il y a déjà un certain nb de sorties qui parlent de conneries ou de « presqu’accident ». Le pb actuel est qu’on tombe dessus par hasard, et qu’il est difficile de les retrouver. Pour améliorer leur visibilité et faciliter les recherches, je verrais bien un truc comme pour les sorties TC :

  • dans un 1er temps, lister toutes ces sorties dans un article (mais on risque d’en rater)
  • dans un 2e temps, ajouter un champ « presqu’accident » (libellé à trouver) dans les sorties que le gars choisit de cocher s’il pense donner des infos utiles là-dessus dans ses commentaires. Il faudrait pouvoir filtrer sur ce champ, et ajouter un picto dans les listes (de sorties et/ou itinéraires) pour les repérer plus facilement.

c’est un truc comme ça que je voyais, à l’exemple duconcours changer d’approche ou des chroniques d’ouverture

Je suis moins convaincu… à mon avis, si l’article imaginé ci dessus marche bien (contenu et visibilité), les gens le complèteront d’eux même.
Il faut juste amorcer la pompe

Bonsoir Gérard,

Un petit retour d’un de tes anciens stagiaires.
Personnellement, je n’utilise plus du tout les portes matériels en alpi, ni à l’arrière comme tu nous l’a appris ni à l’avant non plus.
Je me suis rendu compte à l’usage que le seul moyen de ne rien mettre derrière par habitude était de s’astreindre à utiliser exclusivement la bandoulière (et éventuellement les bretelles du sac).

Merci encore pour tous les conseils que tu nous a prodigués ( et pour l’ambiance des stages).

Jean-Pierre

Posté en tant qu’invité par GC:

Salut JP
En fait le choix d’interdire les accrochages arrières est une façon de commencer le travail de réflexion pour amener les stagiaires a ne plus rien mettre sur le baudrier ( en alpinisme bien sûr ) . Pour faire passer le message je demande aux participants de s’asseoir sur leurs talons ( proche de la position de descente sur neige) et de se vérifier mutuellement que rien ne passe près de la semelle de leurs chaussures … et d’en tirer les conclusions qui s’imposent pour la sécurité.
@+
GC

C’est bien de ça qu’il est question !
Un accès aux rapports d’enquêtes une fois celles-ci terminées, avec éventuellement le commentaire d’un professionnel et son analyse. Le tout publié dans une revue ou sur un site spécialisé accessible au plus grand nombre.
Une rubrique presqu’accident me parait très instructive, mais une étude des éléments ( maitrisables ou non !) qui ont conduit à un accident réel le serait certainement d’avantage.

Tout à fait d’accord.

Heu, en France l’accès aux enquêtes officielles dépend du bon vouloir des parties (victimes et mis en cause), et du parquet une fois l’enquête terminée s’il n’y a pas de suites judiciaires. En cas de suite judiciaire la pratique autorise la presse à consulter les dossiers avant l’audience. En clir cela passe par une bonne relation avec les journalistes spécialisés.

Autrement je n’ai pas l’expérience de l’aviation mais un peu du parapente, et j’ai eu professionnellement quelques accidents à traiter judiciairement en aviation légère. Je n’ai pas vraiment constaté de grande différences avec la montagne quand au rôle du facteur humain,

Peut-être est-ce différent pour l’aviation commerciale. Quant aux militaires le non respect d’un certain nombre de consignes est institutionnalisé et couvert par la hiérarchie, notamment le rase motte en montagne. J’ai vu des Mirages en dessous de l’église de St Christophe, ou à 100 m sol chez moi alors que je m’apprêtais à décoller en parapente… de quoi se retrouver chiffon si j’avais été en vol !

Posté en tant qu’invité par Hugues725:

Non pas toujours. Prenons l’exemple des 3 personnes tués par une chute de séracs sur la voie normale du dome des écrins l’été 2007. Ils ont suivi l’itinéraire emprûnté par tout le monde (y compris les guides) depuis toujours mais n’ont pas eu de chance.
En montagne, il y a souvent beaucoup de dangers objectifs qu’on ne peut que limiter (en respectant des horaires matinaux, en s’encordant, en mettant un casque,…) mais jamais totalement supprimer, sauf à rester chez soi.
On peut très bien aussi être victimes de l’erreur d’une cordée au-dessus de la sienne dans un passage un peu délicat ou exposé qui déclenche par mégarde une avalanche ou une chute de pierre.

Modération : des réponses à ce message ont été déplacée dans la discussion : Gestion du risque et fatalité.