Alors là c’était hier où effectivement le pghm a dû aller de nouveau récupérer une cordée sur cr même sommet.
2 fois en 2 jours.
merci à @enli et @leobiz d’avoir entré leur bellle sortie. J’étais inquiète en voyant encore l’hélico hier
Bivouac non prévu en montagne
Voilà. Ce que tu décris correspond à un horaire tardif n’impliquant pas vraiment de décision sur la sécurité.
Quand tu as besoin du jour pour faire les bons choix, ou de regel ou autre raison valable pour ne pas aggraver ta situation, la question elle est vite répondue.
Fin août 89 au Cervin. Dévorés tous deux d’ambition et de reconnaissance comme on peut l’être à 25 ans, mon camarade et moi partons pour une traversée Lion-Hörnli. Sûr qu’avec ça on va impressionner nos collègues de bureau (qui s’en tapent comme de l’an 40), nos parents (qui seront juste terrorisés) et les filles (ben, comment dire, on était chacun encore vieux garçon bien des années après…). J’avais pourtant déjà failli y passer à la Meije un an plus tôt, mais il parait qu’on apprend de ses erreurs. Bref.
Bon j’accélère un peu : on se retrouve à Carrel samedi soir avec une cinquantaine d’Italiens, en train de se bagarrer pour savoir qui aurait le droit d’aller casser les dernières plaques de glace sale derrière le refuge pour faire de l’eau. On décide donc d’une stratégie imparable pour le lendemain : comme on est là pour s’amuser et pas pour stresser, on va les laisser tous partir devant et faire la course peinards derrière. Bon le bulletin météo (téléphone 162, pour les fossiles de l’époque pré-internet) parle bien de cumulus et d’un risque d’orages en montagne en fin d’après-midi, mais ils disent ça tout l’été. On attaque donc vers 7h sûrs de notre coup.
Le rocher est un peu givré et je découvre vite qu’en tête et en Koflach plastique le super grimpeur que je suis fais un peu moins le malin. 1ère corde fixe : une bonne partie des 50 Italiens sont encore au pied, 30mn d’attente. 1ère échelle de corde : idem, +45mn. Et ainsi de suite. Bref on finit par arriver au sommet mais il est déjà 15h et le ciel a déjà bien changé de couleur. Le temps de virer les crampons sous les passages enneigés en face N et le 1er éclair tombe sur la Dent d’Hérens. Merde, ce coup-ci ça sent le vinaigre - mais il est désormais tiré et nous le boirons jusqu’au bout.
On attaque la partie raide et technique du Hörnli avec les 1ères giboulées de neige, qui recouvrent rapidement tous les rochers. Mon pote suggère de remettre les crabes, mais je préfère faire fissa - sitôt dit sitôt fait, 10 secondes plus tard je pars en zipette sur les dalles de la face E. Ce n’est pas bien raide et l’accélération est progressive, mais impossible de m’arrêter. J’ai à peine le temps de me dire que c’est en général comme ça que finissent les faits divers relatés le lundi matin (« les 2 alpinistes ont fait une chute de 600m en face est ») que mon camarade parvient à sauter de l’autre coté de l’arête et à bloquer la corde.
On continue la descente en tremblant et en assurant cette fois-ci chaque mètre. Mais la foudre s’en mèle. Je m’étais toujours demandé ce que ça faisait d’être sur une arête rocheuse au coeur de l’orage (en vrai, hein, pas juste en lisant Bonatti), ça fait en gros ça : une lumière blanche, un gros crrrraaaac au même moment, de grosses étincelles entre les gants et le rocher (authentique !), et la sensation claire qu’au prochain coup on sera soit cramé par le courant soit éjecté dans le vide. Le cri de mon pote me distrait de ces sombres pensées : il vient à son tour de se gameller - de dévisser comme on disait à l’époque; à moi de sauter derrière un bout de rocher pour arrêter les dégâts. Comme quoi parfois ça marche ailleurs que dans les manuels d’alpinisme. Un partout le piolet au centre…
L’ennui c’est qu’il a le nez cassé, que ça pisse le sang, qu’il est en larmes, et qu’il commence à faire sombre. Pas de bol on voit bien le refuge Solvay 100m en dessous, mais on réalise vite qu’en insistant il n’y aura pas de 3ème joker --> c’est le bivouac, 1ère décision sensée de la journée. Improvisé et glacial comme chez Terray & co. Etonnamment on retrouve 2 Italiens en perdition pour partager le coin de terrasse - au moins on pourra papoter durant la soirée. La neige et la foudre cessent, le ciel se dégage, le froid s’intensifie, les minutes passent comme des heures - bref l’ordinaire du genre maintes fois décrit dans la littérature autorisée.
Le lendemain il fait beau mais on est évidemment dézingués physiquement et moralement - et surtout toute la suite est en conditions totalement hivernales avec un bon 20cm de poudreuse sur les dalles. On prend donc la 2ème (et dernière) décision sensée du WE : appeler les secours…oui mais comment ? Y’a bien sûr pas de portables à cette époque et qui montera dans des conditions pareilles ?
Epilogue : UN guide audacieux entreprendra l’ascension du Hörnli ce jour là avec son client, c’est lui qui nous apercevra et appellera l’hélico. 30mn plus tard nous sommes à Zermatt. Une vieille Allemande nous prendra même en pitié au point d’insister pour nous offrir à boire et à manger après nous avoir fait raconter qu’on avait passé « 24h là-haut sans rien »…Mon camarade rentrera finalement à Paris pour se faire soigner, rien de bien grave au final (et puis les cicatrices héroiques ça impressionne les filles…ben non finalement !). Avouons qu’on s’est bien calmés par la suite…
Alors Frison-Roche avait faux ? Quand il neige on peut encore se prendre la foudre sur la tronche ?
J’ai toujours aimé les bivouacs, prévus ou imprévus. A mon goût, ils rajoutent ce qu’il faut d’épices pour donner toute leur saveur à certaines ascensions. Dans les courses où le bivouac est prévu, ce qui pimente particulièrement c’est quand les difficultés sont situées le deuxième jour. Là tu as tout ton temps pendant là nuit, pour te demander si, vraiment, tu as le niveau de cette course et s’il n’est pas encore temps de descendre … Quant aux imprévus, ils ont tout le charme du cheveu dans le potage … Tu avais justement tout prévu, tout calculé. Les conditions, la météo étaient bonnes, mais …
A 1h00 du matin après une trentaine de minutes passé à somnoler sur le parking de la Bérarde, nous partîmes d’un bon pas vers le ravin de Cloute-Favier direction la goulotte Grassi en face nord de l’Ailefroide Occidentale. Dans le sac : deux barres de céréales, un thermos de thé et une couverture de survie chacun. On devait être rentré à la voiture vers 17h, 18h au plus tard. Normal, on était en pleine forme et largement au niveau de la voie. L’approche puis la remontée du glacier Long furent rondement menées. Mon camarade attaqua la première longueur à 7h00, puis toute l’ascension dans les fines goulottes en plein milieu d’immenses parois rocheuses se déroula comme dans un rêve : escalade sure et plaisante, itinéraire évident, relais faciles à installer. Un peu avant 11h, nous rejoignîmes enfin la plaque de glace supérieure, en théorie les difficultés étaient derrière nous, et je me souviens avoir dit à mon copain : « dans 2 heures tout au plus, on sera au sommet , puis au col d’Ailefroide vers 15h/15h30, et de là, même en étant lent, on ne mettra pas plus de 4h à descendre en rappel le col, traverser les glaciers du Coin, puis de la Pilatte et revenir à la Bérarde. De toute façon, du col il n’y a qu’à se laisser descendre».
Mais on a beau tout prévoir, on n’avait justement pas prévu que cette plaque de « glace » supérieure ne serait justement pas en glace, mais en rocher délité recouvert juste d’une couche de neige uniforme qui tenait plus de la semoule que de la glace ou de la neige couic … Trop occupés à serrer les fesses dans ce terrain instable, nous ne vîmes pas le temps filer. Enfin, nous débouchâmes sur la crête, il était presque 16h00. Malgré une étude approfondie de la descente à partir des différents topos, surs de notre flair et notre expérience, nous empruntâmes un couloir en face sud qui ne débouchait évidemment sur … rien. Plutôt que de remonter, nous continuâmes en posant des rappels. A vue de nez, nos cinq pitons devaient nous suffire pour atterrir sur le glacier. Mais c’était sans compter sur la chute de pierre qui sectionna un des deux brins pendant le premier rappel. Utilisant au mieux le terrain pourri de la face sud, doublant nos amarrages avec des becquets, nous réussîmes à atteindre le glacier à coup de rappels de 25 m.
En cette fin d’après-midi, la neige molle de la remontée vers le col d’Ailefroide contribua encore à nous ralentir et nous ne débouchâmes à ce col que lorsque le soleil se couchait. L’unique piton rescapé de la série de rappels précédents nous permit d’en équiper un en fil d’araignée. La nuit était tombée quand un dernier rappel nous déposa sur le glacier du Coin. Puis, après avoir rejoint l’autre extrémité de ce glacier, nous nous penchâmes au dessus de la moraine surplombant le glacier de la Pilatte. A la lumière des frontales, celui-ci nous semblait impossible à atteindre : probablement plusieurs dizaines de mètres raides, difficile à rejoindre sans rappel. Nous primes la décision de dormir là, sur la caillasse. J’ai la chance de peu souffrir du froid et soigneusement enroulé dans ma couverture de survie, je ne tardai pas à sombrer dans un profond sommeil. Quant à mon partenaire, il ne ferma pas l’œil de la nuit, passant celle-ci à faire les cents pas sur la moraine pour se réchauffer.
Aux premières lueurs du jour, mon camarade me réveilla en gueulant : «viens voir! » Je me mis debout et me penchant également au dessus du glacier, je constatai, comme lui, qu’hier soir, la fatigue avait eu raison de notre lucidité et que ce qui nous semblait inatteignable à la palote lumière des frontales, n’était distant que d’une dizaine de mètres, aisés à descendre.
Nous filâmes vers la Bérarde.
Bonjour à tous.
Pas mal de bivouacs imprévus ou de retours très tardifs en ce qui me concerne, et dès le début de ma « carrière » d’alpiniste: ma troisième course, l’arrête est du Pic Coolidge, où le leader, qui l’avait faite 15 ans auparavant, et soi-disant connaissait, s’est en fait trompé, ce qui fait qu’on est monté par une arrête de plus en plus péteuse et qui se terminait par un couloir raide complètement délité et impraticable (tout s’écroulait). Bref, demi tour en essayant tant bien que mal de tirer des rappels avec deux brins de 30m. Et au premier, en tirant la corde, le rocher part et éclate le casque de l’un de mes compagnons, ce qui nous a obligé à une très grande prudence et donc beaucoup de lenteur pour la suite des rappels (on était 2 cordées de 2). Bref, nous sommes finalement arrivés à notre bivouac sur le glacier noir à 4h du matin, puis après un repos, au camping d’Ailefroide à 9h pour rassurer les copains (mais qui n’avaient pas encore songé à appeler les secours: à l’époque,si il faisait beau, on attendait la mi-journée pour une cordée en retard).
Bon, là, il ne s’agissait pas d’un vrai bivouac imprévu, puisqu’on était retourné à notre bivouac d’origine.
Mais j’en ai deux autres en réserve, des vrais ceux-là: l’un au sommet de la Pointe Holmes (rocher délité qui s’écroule), il y a une quinzaine d’années, et l’autre au sommet du Tour Noir (erreur d’itinéraire de descente), 5 ou 6 ans plus tard, que je raconterai éventuellement dans des posts ultérieurs.
P’tit’ étoile.