Avalanches l'après-midi!

Message ayant pour but une mise en garde.

Retour d’expérience:
Hier, au terme d’une (trop) longue boucle au départ de la Bérarde, nous sommes descendus de la brêche de Charrières (dominant le vallon de Bonnepierre) dans l’après-midi.
Après une descente pleine de précautions liées au fort risque annoncé (que nous pressentions moindre en raison d’un meilleur regel nocturne qu’annoncé), alors que étions arrivés au pied des dernières barres à quelques centaines de mètres de la moraine et que nous pensions être hors de danger, une énorme coulée nous a frôlés. Nous avions vu auparavant plusieurs coulées dans les pentes raides s’arrêtant en contrebas… Or, celle-ci était d’un tout autre acabit et d’une autre origine: c’était le résultat de la rupture spontanée d’une énorme plaque où tout le manteau est parti. Départ de la coulée: clot de la Somme, sous les falaises sommitales, à droite. Avalanche énorme descendue jusqu’au pied du vallon de Bonnepierre, en recouvrant une partie des traces de montée au pied de la moraine.
Nous n’avons vu la coulée que lorsqu’elle a sauté les grandes falaises qui nous dominaient. Nous ne pouvions imaginer qu’une avalanche arrive au-dessus de nous à cet endroit.
Nous lui avons échappé de justesse.

Pour ma part, j’avais surestimé le regel possible des lundi et mardi, alors que les dégâts avaient déjà été largement faits le week end précédent: manteau pourri en profondeur, bon regel apparent, mais uniquement en surface (c’est mon analyse a posteriori).

Il doit y avoir un peu partout d’autres monstres tapis qui ne demandent qu’encore un tout petit peu plus de chaleur pour venir rejoindre les fond de vallée avec une violence inouïe. Tout est et était écrit dans le BRA. Très grand danger l’après-midi!!!

C’est ce que j’avais à dire, par altruisme et responsabilité.

Evitez s’il vous plait les leçons.

Les conseilleurs ne sont pas les payeurs.

Si il fait de nouveau chaud, le regel ne tient plus…

Posté en tant qu’invité par pat 40:

Bonjour Thierry,

Pour info, a quelle heure avez vous commence la descente et à quelle heure s’est passée la coulée ?

Merci

Pat

[quote=« Thierry C, id: 1162314, post:1, topic:109698 »][/quote]
Ben… euh… je ne voudrais pas te casser ton coup, mais les grandes avalanches de printemps, dues à la chaleur de l’après-midi, c’est très classique.
Cela dit, une petite piqure de rappel ne fait jamais de mal.

cette année semble plus mauvaise que d’autres quand même

Merci pour les infos. C’est le genre de « détail » qu’il serait intéressant de faire apparaître dans le compte rendu : http://www.camptocamp.org/outings/269500/fr/breche-de-la-somme-couloir-n-occidental-en-boucle-depuis-la-berarde (tu as les droits pour modifier la sortie vu qu’Olivier t’as associé)

vous avez des photos de la cassure ?

Comment est-il possible de commettre d’aussi grosses erreurs en montagne ? J’ai du mal encore aujourd’hui, alors que ce monstre hante chacune des minutes de mes journées, à comprendre ce qui nous a poussé à descendre ce couloir sachant qu’on allait se mettre sérieusement en danger au retour. La connerie ? Je vais avoir 42 ans et j’ai fait ma première sortie en ski de rando à 14 ans. Mes parents ont failli être emportés par une avalanche de fond sous le refuge de Chabournéou dans les années 80. Je connais les risques au printemps et j’ai toujours respecté les horaires. Pas mercredi.

D’abord on a été très lent et on est sans doute partis trop tard. On a perdu beaucoup de temps pour trouver l’entrée du couloir, pour nous décider à y descendre, pour installer un relais qui tienne, pour désescalader sous le rappel. La remontée à la brèche de Charrière a été très pénible, on enfonçait presque jusqu’au genoux dans une neige pourrie en train de regeler. On a tout essayé : à pieds, avec les skis, puis à pieds. Cette remontée a été interminable. Si bien qu’on s’est retrouvé en haut de la brèche à 17 h 30. Oui, 17 h 30 ! Et il fallait descendre un versant SW compliqué, baigné de soleil, avec deux verrous plus raides dont celui du bas très exposé aux avalanches, un jour où le BRA annonce risque 4 l’après midi. Là encore on aurait pu faire demi tour, rentrer par Villard d’Arène, tant pis pour la voiture. Non, on est descendu dans le Clot de la Somme en s’appliquant, en essayant de minimiser les dangers, en évitant certaines zones, en skiant l’un après l’autre, en se protégeant quand on pouvait. Chaque virage dans le verrou du haut déclenchait des petites coulées qui venaient mourir sur le replat dessous. Sous le verrou le ski était même presque bon. On se sentait presque rassuré car des coulées moyennes qui se déclenchaient spontanément dans les raides pentes ouest de la Tête Sud de la Somme venaient s’arrêter sur le glacier. Le verrou du bas a été un peu difficile à descendre : recherche d’itinéraire, déchaussages, …

Sous les dernières barres, alors que j’entamais la dernière traversée nous ramenant dans le vallon de Bonne Pierre, j’ai entendu un grondement sourd. Thierry, trente mètres derrière moi a crié : « Attention Olivier ! ». J’ai levé la tête : une énorme masse de neige est restée comme en suspend au dessus de moi. J’ai fait un virage et j’ai essayé de m’échapper latéralement. J’ai pris le maximum de vitesse. L’avalanche était tombée, le bruit était de plus en plus fort. L’air s’est brouillé, de petites boules de neige m’ont dépassé. Elle était juste derrière moi. Je ne me suis pas retourné. Devant moi une sorte de mini moraine non enneigée faite de blocs rocheux allait m’empêcher de fuir. J’ai pensé que je devais la traverser ou je mourrais. Le contact avec les rochers a été rude. Les skis se sont tout de suite bloqués et n’ont évidemment pas glissé. Je suis tombé. J’avais encore un ski. Je me suis retourné : une large chute continue, charriant des blocs rocheux, sautait la barre. Je me suis mis en boule. Un souffle a aspiré mon chapeau. Je recevais des petits fragments de neige. J’ai cru que c’était fini. Mon ski à deux mètres de moi a été emporté par le bord de la coulée qui est venue lécher le pierrier. Une deuxième vague presque aussi forte est arrivée. Je me suis relevé, j’ai franchi le pierrier un ski au pied et je me suis éloigné.
Tout s’est joué à une poignée de secondes. Une petite hésitation à essayer de traverser ce pierrier à ski et j’étais emporté.
La fin de la descente a été très difficile avec un ski dans un manteau complètement pourri. Il a fallu traverser deux fois le champ de la coulée. En prenant du recul on a pu observer qu’une partie du versant ouest sous la glacier de la Somme est descendue. Une cassure bien nette large de 100 à 200 m était visible vers 2900 m. L’avalanche a traversé la trace de montée de la Brèche de la Somme et s’est arrêtée dans le ruisseau de Bonne Pierre vers 2000 m.

Je n’avais jamais vu d’avalanche de fond. Je ne mesurais pas la puissance que cela pouvait dégager et ne pensais pas qu’un versant entier pouvait partir spontanément.
Nous n’avons pas vu avec Thierry la course dans sa globalité, focalisés sur ce couloir difficile qui était notre objectif. J’ai du penser en m’engageant : « Le retour, on verra bien… ». J’ai honte de moi. Il faudra sûrement du temps pour que j’oublie.

Posté en tant qu’invité par Troll:

apparemment, vous avez bien flippé :confused: en te lisant j’ai eu peur, heureux que vous soyez là.

En ce moment ca purge à fond, les vieilles plaques partent sous le réchauffement, et quand ca part c’est gros :confused:

Merci pour ton témoignage.

En ce moment les températures sont 10 à 15 ° au dessus de la normale saisonnière.

bon courage

Outre le regel médiocre, on trouve pas mal de zones constituées de transfo/plaque portante en surface, avec une épaisseur importante de gobelet au fond, et ce, depuis plusieurs semaines (mois?).

De nombreux contributeurs ont déjà rapporté ce genre de nivo dans leur CR.

Perso, en ce moment, je ne considère plus le « ski de printemps » (synonyme de stabilité ‹ béton ›) sous le même oeil…

En tout cas, bien content que vous soyez passés à travers !

Posté en tant qu’invité par Carduelis carduelis:

c’est ce que je dis toujours: l’expérience en ski de rando est un facteur de risque supplémentaire (que ce soit pour les amateurs, les « chefs » de course ou les professionnels comme les guides). Beaucoup de sorties sans accidents, la fausse impression de comprendre et de maitriser. Le profil type du skieur qui se retrouve entre quatre planches.
D’ailleurs la grande majorité des victimes d’avalanches sont expérimentées.

Merci de ton témoignage.

Et… t’as même pas fait une petite vidéo :stuck_out_tongue:

« Beaucoup de sorties sans accidents, la fausse impression de comprendre et de maitriser. »

C’est malheureusement souvent comme ça que ça se passe, jusqu’au jour où… Et là, on ne voit plus du tout les choses de la même manière !
Pas forcément l’impression de comprendre et de maîtriser, simplement le fait de n’avoir pas vécu un accident et d’avoir eu de la chance pendant des années de pratique…

Vous avez eu de la chance sur ce coup ! :wink:

Merci à Zef et à tous pour vos messages de soutien.
On sort traumatisés et choqués de cet événement.

C’est clair. Notre retard, qui est la cause de notre mise en danger, est aussi à une minute près à l’origine de cette chance immense: avec 1 à 2 min d’avance sur notre horaire, on aurait été balayés par la coulée sans possibilité de s’échapper.

Posté en tant qu’invité par ARP:

Traynard, mort il y a peu, disait l’an dernier ds MMagazine n’avoir jamais vu d’avalanche, (sur combien de centaines de sorties??), en ne pratiquant il est vrai que le ski de printemps au sens strict, et en partant toujours extrêmement tôt. Je suis toujours frappé par les accidents d’après-midi, généralement printaniers et meurtriers, qui concernent en particulier les raquettistes? N’y voyez aucun ostracisme, mais il me semble que l’appréhension du risque n’est pas la même entre les deux populations? Existe-t-il une base de données qui recenserait par saison pour chaque avalanche connue conditions, heure, exposition… et population concernée?
Bravo à Olivier et Thierry pour leur honnêteté, leur clarté, leur sang-froid. Même si comme l’écrit François cette notion est connue, il me semble que se l’entendre répéter par un miraculé la grave un peu mieux dans nos esprits.

Oui, il me semble que l’ANENA catégorise le type de population : skis, raquettes, alpi, etc.

Source ?
Si je regarde le bilan ANENA des accidents en France pour 2009-2010 je compte 5 accidents recensés concernant des raquettistes, contre une 30aine concernant des randonneurs à ski. Et le dernier accident à raquette recensé date du 20/2…En 2008-2009, 2 accidents recensés à raquettes, en décembre et en janvier.

C’était pour lancer le troll du vendredi ?

[quote=« GLaG, id: 1162797, post:18, topic:109698 »]

Source ?
Si je regarde le bilan ANENA des accidents en France pour 2009-2010 je compte 5 accidents recensés concernant des raquettistes, contre une 30aine concernant des randonneurs à ski. Et le dernier accident à raquette recensé date du 20/2…En 2008-2009, 2 accidents recensés à raquettes, en décembre et en janvier.

C’était pour lancer le troll du vendredi ?[/quote]

Est-ce que tu as regardé l’heure des accidents, puisque c’était ça aussi la question ?
Une même course se réaliser en général sensiblement plus vite en ski qu’en raquettes.

Posté en tant qu’invité par mush691:

une chose est sure , je vois trop souvent des randonneurs qui partent alors que je termine ma balade en revenant aux voitures.

je sais bien qu’il est difficile de se lever le matin , mais quand même !!!