Posté en tant qu’invité par Yvon:
La course prévue initialement les 19 et 20 août au programme du Club de Sierre était l’Arête de Rochefort. Etant donné les conditions météo et les prévisions pour le week-end, notre guide Claude a jugé plus prudent d’y renoncer et de faire une excursion plus facile en un jour – soit le samedi seulement – et nous a laissé le choix entre Le Castor/Zermatt ou Le Mont-Blanc de Tacul/Chamonix.
Nous sommes donc partis très tôt samedi matin afin de prendre une des premières bennes de l’Aiguille du Midi, à 07h00 environ.
Les cordées de notre groupe de sept clubistes (plus le guide Claude) étaient composées de la manière suivante : Claude, Marie-Madeleine et Ottilia ; Maurice, Yvon et Monique ; Sylvain et Pierre.
Depuis l’arrivée du téléphérique, une courte descente permet d’atteindre le Col du Midi, avant de débuter à 08h30 environ l’ascension du Tacul – une progression quelque peu malaisée, à cause de la neige et d’une montée en altitude trop rapide. Claude fait la trace : il est remplacé occasionnellement par le premier d’une cordée de 2 alpinistes Français que nous avons dépassée au début de la montée : celle-ci est pénible, mais aucun membre ne craint l’effort.
Le sommet est atteint à 12h15 : le temps de quelques photos, des félicitations d’usage et d’une tasse de thé, on redescend immédiatement, car les conditions météo, variables, changent rapidement (nuées de brouillard, neige fine/petit grésil, éclaircies passagères, mais absence de vent).
Dans la première heure du retour, la cordée de Claude rattrape les deux Français qui n’étaient pas allés au sommet. L’ordre des cordées au moment de l’accident est donc le suivant : celle de Claude en tête de la descente, puis les deux Français, la cordée de Maurice ensuite, à l’arrière Pierre et Sylvain.
À un moment donné, alors que toutes les cordées sont pratiquement sur une même ligne de niveau, à l’altitude 3’900 – 3’950 m, une plaque à vent se détache à quelques mètres devant la dernière cordée, la fracture se propage rapidement en direction de celle de Claude sur plus de 100 m de largeur, et toute la pente descend jusqu’au Col du Midi (3’530 m). La hauteur de la cassure est estimée entre 30 à 50 cm.
Pierre et Sylvain assistent, impuissants et pétrifiés, à l’événement : les trois cordées devant la leur (deux suisses et la française) sont emportées et disparaissent rapidement de leur vue !
Les deux premières cordées glissent sur 500 m environ alors que la troisième s’arrête après 150 m. Dans leur chute, les cordées franchissent plusieurs barres de séracs de 15 à 25 m de hauteur : toutes les cordées restent pratiquement en surface de l’avalanche.
Au Col du Midi, Claude dégage rapidement Ottilia et Marie-Madeleine. Puis il porte secours aux Français, mais découvre vite qu’ils sont décédés.
Les secours sont alertés par Sylvain (via un ami en Suisse) et par le gardien du Refuge des Cosmiques qui a assisté à l’accident. L’hélicoptère arrive sur les lieux avec les sauveteurs 12 à 15 minutes après l’avalanche. Il emporte Ottilia, Marie-Madeleine et Claude, tous trois blessés.
Plus haut dans la pente, sur leur petite plateforme de neige, les trois alpinistes de la cordée de Maurice sont apparemment indemnes. Ils sont cependant dans une angoisse terrible : entre les cordées, personne ne se voit ni ne s’entend à cause de la pente et la distance, et tout le monde imagine le pire pour les autres.
Tous les participants sont finalement pris en charge par l’hélicoptère et redescendus à Chamonix.
Ottilia souffre d’un léger traumatisme crânien, de cotes et de vertèbres blessées et/ou froissées. Hospitalisée à Sallanches, elle a été transférée le lendemain par hélicoptère à l’hôpital de Sierre. Elle en est sortie avant-hier.
Marie-Madeleine a la cheville droite brisée. Admise à Chamonix, elle a été opérée le lendemain à Sallanches, puis transférée par la route à l’hôpital de Sierre mercredi 23 août. Elle a été opérée à nouveau ce matin à Sion, et restera hospitalisée jusqu’à ce jeudi/vendredi.
Claude s’est cassé une cote dans la chute. Hospitalisé à Chamonix, il a été transporté par hélicoptère à l’hôpital de Sion le soir même. Il est rentré chez lui depuis mardi passé.
Pour Monique, Maurice et Yvon, c’est respectivement quelques tuméfactions, un trou de crampon dans le mollet et un traumatisme thoracique.
Nos remerciements au PGHM : c’est très certainement grâce à leur expérience et à leur professionnalisme dans l’organisation et la conduite des opérations des secours et que nous devons le bonheur d’être aujourd’hui valides.
Nos plus sincères condoléances aux familles des alpinistes français qui n’ont pas eu la même chance que nous, et avec qui nous avons partagé un petit bout de chemin dans la grande montagne.
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