Voyage en car en Corse: "tourisme et rando"

Digression à partir du sujet: /viewtopic.php?id=202980

[quote=« TVG, id: 1247099, post:36, topic:114431 »]Comment imaginer qu’un pseudo-guide puisse exercer en toute impunité alors que dans le milieu de la montagne, tout le monde se connait et qu’il serait très facile de vérifier le diplôme ou non en passant par un bureau et non par internet où les pièges existent dans toutes les professions …
J’ai du mal à comprendre les gogos qui se font avoir aussi facilement ?[/quote]

Je ne suis pas vraiment du style « gogo » … et pourtant, je me suis (un peu, pas trop quand même …) fait avoir.

Faut que je vous raconte …

Une agence de voyage belge propose des voyages en car sur le thème « tourisme et rando ».
En France, en Autriche …
De beaux programmes, vraiment.
Avec un guide de montagne agréé - « Robert » - pour les journées rando. Dixit la brochure du voyagiste.
Des amis en sont déjà revenus satisfaits lors des années précédentes, et voilà donc ma femme qui « craque » pour une semaine en Corse.
Au programme, il y a un peu de tout : au nord, le classique chemin des douaniers, puis un peu de « Mare a mare Norte », et, sur le GR20 une belle boucle sur les aiguilles de Bavella : à partir du col, remontée du GR par le sentier « normal » et retour par la variante dite « alpine ». Deux groupes seront formés : les « randonneurs », capables de marcher vite (c’est la définition donnée par le guide), et puis les autres … qui se contenteront en général d’une ballade plus modeste

[Dans un groupe comme dans l’autre, la majorité dépasse les 60 ans, certains ont fêté leur 70ème anniversaire. La majorité des participants n’a jamais randonné en montagne : ce sont des marcheurs de plaine. Même si certains sont vraiment forts, ils sont surtout habitués aux marches « fléchées » des clubs de marche …]

Allez, je ne connais pas la Corse, c’est l’occasion pour moi de me frotter à une difficulté (optionnelle) du GR20 en profitant de la guidance d’un pro. Pour la première fois de ma vie, me voilà donc parti en « voyage organisé ». Pour la première fois de ma vie, je marcherai derrière un Guide!

Ce fut et cela restera unique …

Dès la première rando, j’ai vu le professionnel :

  • partir sur le mauvais sentier; bon, cela peut arriver à tout le monde. Ici, il lui faudra une petite demi heure pour s’en rendre compte. Les deux groupes confondus prennent une heure de retard et 150 m de dénivelé imprévu dans les pattes.
  • être incapable d’exploiter une information GPS disponible. C’est normal, le leader n’avait de toute façon qu’un bout de carte photocopiée noir et blanc, sans les références du quadrillage.
  • foncer ensuite « bille en tête » pour rattrapper le retard, sans se soucier de ceux qui avaient du mal à suivre, sans entendre les cris d’une personne de son groupe qui, en tâchant de suivre le rythme, avait fait une chute : blessures à la pommette et à l’arcade sourcillaire, douleur au poignet.
  • à l’arrivée, faire la sourde oreille aux doléances du mari, et ne prêter strictement aucune attention à la dame blessée - une personne de 61 ans.

Commentaires de certains qui avaient déjà eu affaire à ce guide : « Hé oui, Robert, il est comme cela, il ne regarde pas derrière lui … »
Ajoutons à cela que Robert est effectivement une locomotive … Il est retraité (de quoi?) mais il a conservé un sacré coffre. Suivre son rythme est possible, mais il ne faut pas vouloir prendre une photo, ni être surpris par un besoin physiologique urgent …

Oui, Robert est vraisemblablement un ancien professionnel de la montagne, qui arrondit ses fins de mois en offrant ses services à un voyagiste belge … Le Luxembourg n’est pas loin, on peut s’arranger …

Est-ce réellement un ancien accompagnateur en montagne?
Possible, mais en tous cas il semble complètement ignorer ses deux responsabilités principales : assurer la sécurité de ses « clients » et leur rendre une rando « intéressante ».

Robert a donc fait sa boucle de Bavella avec une quinzaine de bons marcheurs.
Sans moi.
Par curiosité, j’ai interrogé les braves à leur retour :
" Bravo, et toutes mes félicitations! Cela vous-à-t-il donné envie de parcourir le GR20?

  • Plus jamais!"

Réponse unanime.
La moitié d’entre eux n’ont pas pu avaler leur repas (pique-nique) de midi, par manque de temps, par manque de souffle.
Une dame est arrivée en pleurant au passage de la chaîne …
Dans la descente finale, nous avons vu (à la jumelle) les participants arriver par petit groupes …
Robert, pour une fois fermait la marche. Le premier était 20 minutes devant lui (chrono). Sans carte, sans topo, sans l’habitude de tels sentiers, il aurait facilement pu se fourvoyer dans un passage dangereux, se briser les os, sans aucune chance d’être secouru rapidement.

J’ai dit qu’il y avait deux groupes.
La responsable du deuxième groupe était la compagne de Robert.
C’est une personne très gentille, qui ne prétend pas détenir un quelconque diplôme ou brevet d’accompagnatrice.
D’ailleurs, elle ne détient même pas une petite trousse de secours dans son sac …

Je me pose les questions suivantes :

  • Comment savoir si Robert, dont je ne connais pas le nom de famille, a bien le droit d’exercer?
  • Comment « dénoncer » son manque de professionalisme, comment l’arrêter, avant qu’un accident sérieux ne se produise?

Posté en tant qu’invité par grostof:

Tu lui demande sa carte professionelle (obligatoire en France pour pouvoir excercer contre rémunération), ce sera la première piste à explorer.

S’il n’a pas de carte professionnelle, tu appelles la gendarmerie, ça suffit… Exercice illégal de la profession.

S’il a une carte professionnelle à jour, tu peux informer l’organisateur du séjour des problèmes rencontrés. Les autres démarches peuvent être de s’adresser à la section locale du syndicat qu pourra prendre contact avec lui pour évoquer les difficultés rencontrées. Tant qu’il n’y aura pas eu de faute consitutée et/ou de dommages, pas de raison de l’empêcher de travailler. Normalement, ce sont les clients qui feront le tri tout seuls…

Merci

Trop tard … je suis rentré à la maison.
Un retraité (ce qu’il reconnaît être) peut-il avoir une carte professionnelle et exercer?
Peut-il, sans carte professionnelle, avoir comme client ou employeur un voyagiste étranger?
Le brevet d’état d’AM ou de guide reste-t-il valable pour un retraité?
Un retraité peut-il suivre des recyclages d’AM?

Robert est un merveilleux saltimbanque, capable d’amuser tout le monde dans le car ou le soir à l’hôtel.
Alors, les gens, qui ne se savent pas ce que devrait être un vrai AM, lui pardonnent tout.

C’est un malin aussi : en fin de séjour il délivre un joli « diplôme de randonneur » à tout le monde, et puis il fait circuler un livre d’or, lors de la dernière soirée, après avoir fait rire tout le monde …

Même les « râleurs » ne vont pas faire une esclandre ou simplement écrire une méchanceté. Certains se contentent de s’abstienir et puis c’est tout …

Posté en tant qu’invité par grostof:

OUI

Sans carte professionnelle, il est dans l’illégalité. Cela n’empêche pas certains de travailler quand même : ils ne respectent pas la loi et c’est donc dans ce cas répréhensible. L’excercice rémunéré (indépendant ou salarié en CDD, CDI ou vacation) est soumis à délivrance d’une carte professionnelle.

Le BE est délivré à vie. L’autorisation d’excercer est soumise à recyclage obligatoire tous les 6 ans. Elle est suspendue tant que le recyclage n’a pas été effectué (de même, la délivrance de la carte professionnelle, renouvelable tous les 5 ans, est conditionnée par un recyclage à jour).

OUI.

La retraite n’est pas synonyme d’arrêt total d’activité, surtout qu’en général AMM est rarement une activité à temps plein.
Tout au plus aura-t-il des ennuis avec sa caisse de retraite, mais peut-être que comme pour les professions agricoles il y a un plafond permettant de conserver une activité minimale ?

Il n’y a pas que ça, il y a aussi le code du Sport auquel il y a contravention sans carte professionnelle ou recyclage, …
C’est alors du ressort des DDCSPP (qui ont normalement aussi un rôle de police du sport).
En outre, et sans exclusion, la question de l’assurance professionnelle (RCPro) obligatoire se pose elle aussi.

Mais en l’état, s’il est réellement diplômé, il y aura certainement au départ un rappel à la réglementation avant tout autre action, sauf à ce qu’il y ait manifestement un danger manifeste pour les clients.

[quote=« Freenours, id: 1250782, post:5, topic:115442 »]La retraite n’est pas synonyme d’arrêt total d’activité, surtout qu’en général AMM est rarement une activité à temps plein.
Tout au plus aura-t-il des ennuis avec sa caisse de retraite, mais peut-être que comme pour les professions agricoles il y a un plafond permettant de conserver une activité minimale ?[/quote]

Et si vous vous cotisiez pour louer les services d’un tueur professionnel afin d’éliminer ''Robert" comme dans le film ‹ ‹ Louise-Michel › › (sic).
Ca ne doit pas être trop difficile en Corse…

Ok, merci à vous pour vos éclaircissements.
Finalement, ce n’est pas très différent des pratiques en Belgique, dans des secteurs que je connais mieux.

Alors, il faudra laisser vivre Robert en paix.
Ce ne sera pas le premier « vieux de la vieille » à sévir longtemps avec une qualification obtenue loin dans le passé, quand la performance physique (ou technique) était le premier, voire l’unique critère.

Le copinage, le bagoût, et l’art de mettre les rieurs de son côté … ça aide aussi - dans tous les domaines !

Posté en tant qu’invité par Matt:

Un truc m’échappe Bis47 : ton interlocuteur sur ce sujet ne devrait-il pas être avant tout l’agence de voyage qui t’a vendu ce voyage et a fait appel à ton « copain » Robert ?
On peut imaginer que leur intérêt n’est pas de mécontenter leurs clients et de gérer d’éventuelles conséquences d’accident.
Il doit bien y avoir d’autres AMM pouvant offrir leurs services pour ce type de randonnée, non ?
La question du diplôme est à mon avis relativement secondaire, si le diplôme seul faisait la qualité d’un guide ou d’un accompagnateur, ça se saurait !

[quote]Un truc m’échappe Bis47 : ton interlocuteur sur ce sujet ne devrait-il pas être avant tout l’agence de voyage qui t’a vendu ce voyage et a fait appel à ton « copain » Robert ?
On peut imaginer que leur intérêt n’est pas de mécontenter leurs clients et de gérer d’éventuelles conséquences d’accident.
Il doit bien y avoir d’autres AMM pouvant offrir leurs services pour ce type de randonnée, non ?
La question du diplôme est à mon avis relativement secondaire, si le diplôme seul faisait la qualité d’un guide ou d’un accompagnateur, ça se saurait ![/quote]
Bien d’accord avec toi.
Bien sûr, le voyagiste va recevoir un rapport circonstancié.

Parce que je sais pertinemment où mène le comportement de Robert.
Parce que j’ai quelques connaissances et que je sais écrire un rapport compréhensible, même à un « patron » qui n’y connaît rien à la montagne.
Je vais y passer le temps qu’il faudra pour bien le « charpenter », ce rapport.

Mais j’ai bien peur que cela soit de peu de poid.

Robert fait rire dans le car.
Robert anime les soirées par des sketches hilarants … il est doué!
Robert insiste lourdement pour recueillir des mots gentils dans son livre d’or.
C’est un bon animateur, sa compagne est la gentillesse même .
Le couple sait se vendre …

Pour le voyagiste, Robert est un atout : à relire la brochure, et en réfléchissant bien à tout ce qui s’est passé, je crois que c’est Robert le véritable instigateur du programme « Tourisme et Rando », et qu’il a su vendre son idée au voyagiste.

Le voyagiste a donné à remplir un formulaire de satisfaction.
Quelqu’un m’a dit : « Je préfère ne pas le remplir que de dire du mal partout ».
Les participants « oublient », pardonnent, et en tous cas ne vont pas lui laisser une appréciation négative, sauf peut-être le mari de la personne blessée et laissée sans soin. Finalement, les gens sont là en vacances, et, même au retour, ils sont peu enclins à « chercher misère ».

Car dire du mal de quelqu’un, pour de vrai, c’est délicat, on n’a pas le droit de se tromper.
Faut être sûr de son coup, pouvoir justifier …
Alors on préfère se préoccuper des photos à trier, des lessives à faire …
Après tout, tout s’est bien passé … pour la plupart des participants, qui ne connaissent pas les véritables devoirs d’un accompagnateur en montagne.

Un exemple frappant, à moitié hors sujet : suite à divers aléas, le chauffeur n’a pas respecté ses temps de repos.
Mais alors là … on était en plein dans le rouge!
Un peu compliqué à expliquer, mais à vue de nez, il y a eu une manoeuvre frauduleuse impliquant un conducteur fictif.
Manoeuvre qui donne d’ailleurs à penser que le patron est complice …

Toujours est-il qu’au soir du premier jour en Corse, nous sommes renvenus à l’hôtel par les petites routes de montagne, de nuit, avec un chauffeur qui avait dormi trois heures la nuit précédente …

Tout le monde était crevé, d’ailleurs … Mais les passagers ont trouvé cela « acceptable », car cela a permis de respecter le programme prévu. Complètements inconscients des risques encourus, ils ont trouvé que le chauffeur était un « pro » …

Pas évident de sensibiliser les gens …
Pas sûr de sensibiliser le patron par un simple rapport, même bien charpenté.

Posté en tant qu’invité par bexi:

Peut être qu’un double de ton courrier à cette adresse www.upmm.be pourrait faire éviter à d’autres clients cette piètre prestation d’AMM ?

Bien vu,

J’en parlerai aussi au CAB …
Je compte faire le maximum pour mettre le patron en face de ses responsabilités.

Il comprendra, je l’espère, qu’en cas de problème grave, il ne lui sera pas possible de dire qu’il ne savait pas.
Dans ce contexte, la première intéressée, celle qui peut donner à réfléchir, c’est la compagnie d’assurance …

Il doit bien y avoir aussi un organisme « de surveillance » des voyagistes et en particulier des exploitants d’autocars.

Encore quelques recherches … avant la salve des courriers recommandés.