Posté en tant qu’invité par strider:
@lain a écrit:
En réalité je comprends le point de vue de « Strider ».
En fait nous sommes sur un quiproquo où plus exactement nous ne
parlons pas de la même chose.
Perso ma modeste réflexion ne se place pas sur le plan des
sciences humaines mais sur le plan de la recherche en
biomécanique et physiologie du sport.
je veux bien le comprendre, mais là on parle de pratique des skieurs, or il n’y a pas que les aspects physiques… et les sciences « biomécanique et physiologie » ne peuvent être le seul critère d’appréciation, l’aspect sociologique, géographique fondé sur le pratiquant lui-même est indispensable.
Voilà pourquoi je dis que c’est réducteur de regarder que sur un plan physiologique.
parlons de manière plus générale : les gens qui viennent des sciences humaines sont souvent excédés de voir que beaucoup de labos de recherche dites « dures » refusent les approches interdisciplinaires parce qu’en terme d’applications sur les sociétés, ça pourrait nuancer, relativiser et/ou remettre en cause leurs résultats…Pourtant nous savons tous que l’avenir de la science appliquée aux hommes est dans l’interdisciplinarité.
Par exemple, sur un autre débat que le notre : dans la crise écologique que nous apprêtons à résoudre, c’est une aberration honteuse de voir que des labos de recherche refusent l’interdisciplinarité parce que ça change leurs visions sectorielles bien campées confortablement dans leurs positions. C’est de l’arrogance. Alors que cette crise écologique est fondée sur des phénomènes naturels/humains qui interagissent et rétroagissent ensemble et qui demandent des approches interdisciplinaires pour être bien compris!
Placer mes remarques sur le plan humain c’est évidemment les
analyser comme sectorielle et cartésienne….
c’est là le vice, celui de « l’évidence », du « ça va de soit »…la démarche sectorielle marche pour les sciences « dures » mais appliquée aux sciences humaines, elle relève du déterminisme et conduit à des aberrations de pensées, à des raccourcis inévitables. Car dans un lien de cause à conséquences, tu oublies tous les éléments extérieurs qui peuvent jouer, sans compter les rétroactions des phénomènes. Les choses ne sont pas binaires dans un unique rapport cause-conséquence, elles sont bien plus complexes que cela. sinon ça ferait longtemps que les hommes auraient tout compris de leurs problèmes, qu’ils les aient inventé ou pas.
L’esprit cartésien est le seul qui ma paraisse pertinent pour
véritablement accompagner une démarche scientifique.
C’est là qu’en sciences humaines on s’insurge devant un tel positionnement, car l’approche cartésienne déterministe a fait énormément de mal dans les sciences humaines. Les choses, en terme d’humain, ne sont pas « carrées » et « faisant sens par elles-mêmes » comme ça arrangait bien Descartes. Si c’était le cas, le destin des hommes serait tout tracé.C’est d’ailleurs exactement ce que reprochait à juste titre Spinoza à Descartes…Dans ses excès, la démarche déterministe a été même conduit, manipulée dans les dérives idéologiques, au pire qui existe, du genre « l’espace vital » des aryens ou autre déterminisme complèment dingue. De manière moins extrème, elle a fait du tord à nos spécialistes qu’ on a accusé de balancer des vérités sur les hommes qu’on a jamais pu vérifier.
ex la géographie française a longtemps été arriérée vis à vis des géographies allemande et américaine car elle est restée très (trop) longtemps déterministe…on a déblayé tellement de conneries ( du genre caractéristation d’une population vis à vis de la géologie de son espace ou de son BV) et de clichés par le passé sous prétexte d’un déterminisme qu’aujourd’hui, on regarde différemment les choses. Les notions de « frontière naturelles » ou autres inventions déterministes ont été sérieusement remises en causes.
Don effectivement je revendique ma réflexion comme cartésienne
et sectorielle.
Mais l’étape analytique du raisonnement n’interdit pas ensuite
une analyse systémique.
L’analyse systémique est une analyse relativisée…elle part du principe que plus que les éléments , ce sont les interactions entre ces éléments qui font sens, ce qui inclus :
-une vision relativisé
-une vision évolutive dans l’espace et le temps
-une vision forcément interdisciplinaire
= en conséquence, la vision systémique, introduit par les sciences écologiques, sociologiques en terme d’humain est incomparablement plus fine d’analyse et plus prudente que la vision déterminste qui balance des vérités confortables mais qui malheureusement bien souvent ne riment à rien en terme d’humain.
la vision systémique est moins confortable mentalement que la vision déterministe car elle n’abouti pas à des grands énoncés de vérités…elle émet des tendances, des évolutions, des interactions. Mais elle se rapproche mieux de l’être humain, ou du système du vivant, qui est une réalité hautement complexe. Si c’était simple, ça se saurait, on ne serait pas en train de débattre là-dessus!
C’est amusant aujourd’hui de voir comment les nouvelles médecines, prenant en compte le traitement de la douleur par exemple, comme un facteur qui joue un rôle parmi les autres, mais aussi la pluri-factorialité des causes et les rétroactions en terme de maladie, épidémiologie, intègre de plus en plus les notions de systémique dans leurs analyses. L’approche cartésienne a fait aussi du mal à la médecine, elle a longtemps incité à une surenchère d’anti-biotiques en disant que c’est la cause à traiter par ce moyen etc…elle a conforté ce contexte de surenchère de médicaments tout court. Même et surtout en médecine, le déterminisme cartésien a fait beaucoup de tords.
Et pareil au niveau du droit, il est de plus en plus relativisé, notamment par la jurisprudence qui permettait cette relativisation absolument nécessaire.
Cela dit bien évidemment si c’est sous la manière outrancière
que majoritairement les skieurs perçoivent mes remarques sur la
préparation physique alors je préfère aller voir ailleurs vers
des pratiquants plus tolérants !!!
moi je le perçois comme ça, mais ça ne veut pas que je suis intolérant, simplement je n’aime pas les simplifications et les réductions.
Il ne faut pas confondre le théoricien qui utilise des modèles
pour construire une recherche… avec le praticien qui vit sa
pratique !!!
quand tu fais une enquête tu n’es pas pour autant théoricien dans le but de faire un modèle…tu essais de dégager des tendances, des phénomènes toujours dans une vision relativisée dans l’espace et le temps, donc pas la part théorique ne relève pas de « lois » mais de choses bien concrètes.
Bien évidemment lorsque je fais du ski avec ma compagne je ne
me pose pas la question de savoir dans quel registre je me
place : mon seul but est de passer une superbe journée avec une
pause casse-croute la plus idéale possible…un scrabble sur la
terrasse d’un refuge peut devenir un moment inoubliable !!!
de même pour moi
La recherche de catégorie de pratiques pour enclencher une
réflexion n’a vraiment rien à voir avec un objectif de
confort…ni encore moins avec l’idée sulfureuse d’un «
déterminisme à deux balles »
quand je parlais de déterminisme à deux balles, je parle de nombreuses enquêtes pondues par des journalistes ou des statisticiens qui sont fondées sur une approche déterministe où on ne mobilise qu’un seul phénomène, qu’une seule hypothèse pour expliquer des résultats souvent mal traités…même les questions sont fondées sur des postulats déterministes et c’est bien là le problème, c’est qu’on peut faire tout dire ce qui nous arrange sur les résultats.Voilà pourquoi une vision relativisée est absolument nécessaire.
merci alain pour cette réflexion très intéressante…