Séquence altérée dans le film Jirishanca

Le film Jirishanca, par ailleurs assez impressionnant, présente une séquence retouchée où l’alpiniste Alik Berg a été enlevé de l’image entre 29:55 et 30:06.
Il y a une polémique dans un commentaire de la vidéo youtube et un article d’Alpinemag sur le sujet.
La présence d’Alik Berg au sommet n’est pas juste « omise » par un montage astucieux mais les images ont été carrément modifiées sans être présentées comme telles.
La raison invoquée par les réalisteurs [1] convoque un argument de storytelling: il s’agit d’éviter de distraire du fil de l’histoire qui est centrée sur une cordée.

Je trouve que c’est un produit édifiant de notre époque où le storytelling est plus important que la réalité.

On trouve certes régulièrement des séquences « illustratives » et donc non-réelles crées pour l’occasion dans les documentaires mais elles apparaissent en général clairement comme telles. C’est par exemple une animation ou une scène jouée par des acteurs. Parfois c’est un peu plus flou: le run d’enchainement n’a pas été filmé et c’est plus ou moins clair qu’on a un beau montage pour raconter l’histoire.

[1] la réponse des réalisteurs:

Hi, it’s the filmmakers from Reel Rock. Quentin and Alik’s climb was incredible - it was honored with the Piolet D’or and deserves to be told as its own story. But for the story we set out to tell, of Josh and Vince’s deeply personal, multi-year journey on Jirishanca, seeing an additional climber on the summit, who was only visible from some angles and not from others, during the emotional climax of the movie, was very distracting. It would have required a lot of explanation and new information about who he was and how he got there, during the last 30 seconds of the movie. So we made the creative decision to avoid showing Alik on the summit. We can see how some people might object to that decision, but as storytellers we are constantly making choices about what to include or omit as it’s impossible to follow every thread. Certainly no disrespect to Quentin and Alik! We recommend reading their great write-up about their climb from the American Alpine Journal: AAC Publications - Dragon Mushrooms: The First Ascent of Reino Hongo on Jirishanca

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Je suis d’accord. Surtout qu’ils disent que le sommet n’a pas de voie facile, et n’a été que très peu fréquenté. Je pense que c’est d’avantage problématique car il y a tout cet histoire de « regarde comment Josh Wharton est modeste, il ne se vante jamais » et à priori c’est réellement le cas en ce qui le concerne. J’imagine que ça lui a du faire un peu chier.

De toute façon, la presence d’une autre cordée arrivée au sommet par une autre voie n’enlève rien à l’exploit. Donc pourquoi le cacher. L’argument tenu par les réalisateurs est peu convaincant, car c’est en effet très simple de l’expliquer, ni particulièrement distrayant. Ça relève un certain mépris pour le publique, au moins à mon avis perso.

Dommage, car le film était plutôt bon.

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Comme tu le souligne, la présence d’une autre cordée au sommet ne change rien sur le fond. Donc la raison est à chercher dans la forme, je pense que c’est juste une recherche d’esthétisme et de belles images qui a poussé l’équipe qui réalise le film à cette pirouette. Cette cordée qui est sur le plan final c’est un peu un photobomb (involontaire).
C’est dommage, clairement l’éthique en prends un coup, mais est-ce très différents des films de grimpe où une voie est répétée plusieurs fois (alternance de plans « dans la voie » et de plans larges aériens où il n’y a aucune trace de cameraman pendus dans des cordes fixes) ? Peut être est-ce le prix à payer pour des films ultra esthétiques où chaque plan est méga chiadé.

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Pour les puristes peut-être si, mais pour moi non. Car le fait de répéter quelques séquences pour avoir des images plus claires (et oui, jolies) ne change pas le caractère de l’ascension. Alors que faire croire qu’on est les premiers au sommet depuis quelque temps sans faire reference à l’autre cordée présente le jour même, et aller jusqu’à effacer un autre grimpeur, c’est un peu malhonnête.

D’ailleurs, j’aime aussi les films d’escalade dont il y a aussi un peu de temps dédié au travail des cameraman etc. je trouve ça plutôt beau et humain.

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C’est vrai que c’est nase. Les américains exagérent sur le storytelling, car les images parlent d’elles même.
le jeune fou devenu sage et le gros dur, qui bien que gros dur à été traumatisé c’est vrai que c’est sympa mais un peu cliché.
J’ose pas imaginer si Alik et quentin avaient été des femmes :sweat_smile:

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Je partage également votre avis. Vraiment très surprenant comme choix. Surtout qu’en terme de belle histoire, se retrouver synchrone au sommet en arrivant de 2 itinéraires différents puis d’effectuer la descente ensemble, c’est difficile de faire mieux en terme de scénario.

D’ailleurs les récits des 2 équipes dans l’American Alpine Journal insistent tout le long sur ce hasard fortuit qui a encore magnifié leur aventure et qui en était une caractéristique essentielle.

On en vient même à se poser la question si ce trucage n’a pas pour unique but de créer la polémique pour faire le buzz ! Bref, dommage de s’abimer dans des trucs alambiqués comme cela alors l’histoire telle qu’elle était avait tout ce qu’il fallait pour faire un beau film.

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Oui c’est étonnant et décevant que les images de cette rencontre au sommet ( exigu) aient été caviardés.

Donc ce storytelling altère aussi le vécu des alpinistes eux-mêmes et leur émotion au sommet. C’est un récit lisse centré sur l’esthétique d’une ligne, du climbing pr*n.

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