Questions pour les PROS

Posté en tant qu’invité par marmouset:

A mon avis c’est peut-être la « forme » de cette journée qui rebute un peu les jeunes ou les accros à l’effort.
Je prends mon cas ( je pense être suffisament jeune, j’ai 26 ans) : on m’a proposé de venir à cette journée mais franchement la perspective de passer tout un samedi enfermée dans une salle à faire de la théorie ne m’a pas tenté.
Je ne considère pas pour autant pouvoir me dispenser de m’informer et me former mais je pense qu’il y a d’autres façons de le faire :
Pour la théorie, le CD rum édité l’année dernière par montagne magazine me paraît contenir déjà pas mal d’infos, ou encore le miniguide tout terrain de Robert Bolognesi « Attention avalanche ». D’autres ouvrages permettent d’approfondir en nivologie mais à mon avis ensuite c’est plus par soif de connaissances que par réel besoin qu’on ira les consulter.
Pour la pratique des journées de sensibilisation aux risques de ski hors piste ou des journées de « formation ARVA » sont régulièrement oragnisées en station et valent parfois le détour (comme quoi les stations n’ont pas que des défauts).
Enfin, partager l’expérience et les connaissnaces des plus « anciens », sur le terrain, me paraît aussi une très bonne école.

Posté en tant qu’invité par Paul G:

Pour ceux qui ont déjà des connaissances, un des intérêts de ces journées est de les valider, en vérifiant qu’elles correspondent au discours, et en posant des questions aux guides et spécialistes présent.

Parce qu’à mon avis, il n’y a rien de + dangereux que les certitudes.

Pour ma part, j’avais été très frappé par un film où l’on voit le déclanchement d’une grosse plaque dans une forêt peu raide (j’aurai dit moins de 30°). Pas le genre d’endroit où l’on se sent en danger. C’est sûrement bon de voir ce genre d’image, pour « ressentir » réellement le danger.

Posté en tant qu’invité par John D l’aventurier:

Francois a écrit:
Primo rendons à J2LH ce qui lui appartient:

John D l’aventurier a écrit:
A mon avis il ne faut pas confondre les connaissances en
nivologie et la prise de conscience du risque d’avalanche. Tu
auras beau tout connaître de la transformation de la neige,
sur
le terrain tu prendras peut-être plus de risques que celui
qui
n’y connaît pas grand chose mais a pris conscience du risque.
L’erreur serait de penser que parce qu’on a des connaissances
en nivologie on peut y aller, ça devrait plutôt inciter à la
prudence.

Il y a trois niveaux de connaissance:

1/ Tu ne connais pas.
Suivant ton caractère, soit tu fonces n’importe où tête baissée
et naseaux fumants, soit tu ne prends aucuns risques, mais
vraiment aucuns.

2/ Tu connais.
Tu t’imagines tout savoir, ça te monte à la tête et tu prends
des risques inconsidérés.

3/ Tu connais bien, tu es un expert.
Dans ce cas là, plus tu connais et plus tu t’aperçois que
finalement, tu ne sais pas grand chose. Et alors?
Et alors dans ce cas, profil bas.

Secundo: je partage votre analyse sur les 2 premiers points, par contre sur le 3ième, permettez-moi d’avoir un autre avis.
Ca doit dépendre des caractères des personnes, mais je suis au regret d’avouer que j’éprouve du plaisir dans la gestion d’un risque (encore faut-il que le risque soit correctement identifié), et il faut bien se rendre à l’évidence que c’est aussi une des raisons qui me fait aller en montagne.
Je sais, c’est une perversion. J’en ai beaucoup discuté dans mon club et autour de moi suite à un accident (bien fini, heureusement), et je me suis aperçu que je suis loin d’être le seul dans ce cas, mais que finalement peu de monde se l’avoue.
La longue liste des experts qui se sont faits avoir est là pour l’attester (Jacques Villecrose, même s’il n’est pas mort en montagne, Jean-François Roy, Chapoutot cet hiver, etc …), sans compter les professionnels.
A chaque fois, le risque avait été identifié, a priori correctement. Et pourtant ils y sont allés. POURQUOI ???
C’est ce que tentent de décrire Alain Duclos et Ian Mac Camming dans l’article:
http://skirando.camptocamp.com/article751-20.html
que je vous encourage fortement à lire.

[%sig%]

Posté en tant qu’invité par Paul G:

Pour répondre à John D, toute la question est de savoir où l’on se place soi-même : 2 ou 3 ? On peut se croire 3, et n’être que 2. Là est le vrai danger.

Qu’est ce que tu entends par « gestion du risque » ?
Il y a une balle dans le barillet, j’y vais.
Il y a 2 balles dans le barillet, je me pose des questions.
Il y a 3 balles dans le barillet… ?

Et à 5 balles ?
La « gestion du risque », c’est montrer qu’on est encore capable d’y aller ? C’est de montrer qu’on sait qu’il reste un espace vide ?

Focément, si tu répètes l’opération, le coup finira par partir. Même les experts n’échappent pas aux mathématiques.

Posté en tant qu’invité par J2LH:

Francois a écrit:

1/ Tu ne connais pas.
Suivant ton caractère, soit tu fonces n’importe où tête baissée
et naseaux fumants, soit tu ne prends aucuns risques, mais
vraiment aucuns.

2/ Tu connais.
Tu t’imagines tout savoir, ça te monte à la tête et tu prends
des risques inconsidérés.

3/ Tu connais bien, tu es un expert.
Dans ce cas là, plus tu connais et plus tu t’aperçois que
finalement, tu ne sais pas grand chose. Et alors?
Et alors dans ce cas, profil bas.

Tu peux également avoir certaines connaissances, savoir que tu les as, savoir que tu n’es pas un expert et que même les experts se font avoir et donc rester prudent tout en sachant que ça ne suffira peut être pas.

Posté en tant qu’invité par J2LH:

Paul G a écrit:

Qu’est ce que tu entends par « gestion du risque » ?
Il y a une balle dans le barillet, j’y vais.
Il y a 2 balles dans le barillet, je me pose des questions.
Il y a 3 balles dans le barillet… ?

Pour moi ce serait plutôt de ne pas appuyer sur la détente si je sais qu’il y a ne serait-ce qu’une balle dans le barillet.

Posté en tant qu’invité par Loïc:

Oui mais le problème avec la neige c’est qu’il y a quasiment toujours une balle dans le barillet. Donc on ne sortirait jamais à ce compte là.

Posté en tant qu’invité par J2LH:

Loïc a écrit:

Oui mais le problème avec la neige c’est qu’il y a quasiment
toujours une balle dans le barillet. Donc on ne sortirait
jamais à ce compte là.

Il y a peut-être toujours une balle dans le barillet mais la différence avec la neige est qu’au total tu peux mettre plusieurs milliers de balles dans le barillet et que tu peux avoir plusieurs centaines de balles ou une seule et malheureuse balle.Ne pas appuyer sur la détente ne veut pas forcément dire ne pas sortir mais plutôt éviter les pentes suffisament pentues pour qu’une avalanche puisse se produire.

Posté en tant qu’invité par John D l’aventurier:

Tu peux faire ce raisonnement pour la raquette, encore que ça doit quand même pas mal limiter le choix des sorties. Pour le ski, c’est impossible: les pentes les plus sympas à skier sont justement celles les plus propices au déclenchement de plaques. (30° à 45°). Le regretté Gérard Chantriaux avait résumé ça en: « Les avalanches aiment autant les pentes raides que vous, et la tradition n’est pas prête de se perdre ».
Donc en ski, il y a toujours une balle dans le barillet. Ce n’est pas par hasard que l’échelle de risque débute à 1: le risque zéro sur la neige n’existe pas.
Le fait de sortir sur la neige implique l’acceptation de ce risque, c’est à cause de ce risque que nous mettons tous (j’espère) un Arva. (Et aussi une pelle et une sonde dans le sac).
Et ce risque, il faut le gérer. Et à plusieurs. D’où l’importance du facteur humain.
Pour répondre à Paul, voici les étapes que j’entends dans la gestion du risque:

  1. Identification du risque: à l’endroit où je me trouve, au moment où je me trouve, quel est le risque prépondérant (il peut y en avoir plusieurs).
  2. Quelle est la probabilité pour que ce risque se réalise ? (et les autres aussi).
  3. Quelles seraient les conséquences immédiates de la concrétisation de ce risque?
  4. Quelles mesures peut-on mettre en oeuvre pour réduire ce risque (espacements, etc …ça peut aller jusqu’au demi-tour, si c’est possible, voir au bivouac).
    4bis: le groupe est-il capable de mettre en oeuvre ces mesures correctement ?
  5. Le risque ainsi réduit est-il acceptable pour moi?
    5bis Le risque ainsi réduit est-il acceptable pour le groupe?
    Si on se loupe à une quelconque de ces étapes, alors on est en danger.
    On applique la même méthode pour gérer un risque industriel, et les pilotes d’avions ont une formation la-dessus.
    De là à penser que les formations en montagne ont 20 ans de retard…(Alain Duclos en pense visiblement autant)
    PS: là je suis obligé de préciser que je suis instructeur FFCAM en ski-alpinisme, et que je suis persuadé qu’on peut s’améliorer, ce que j’essaie de faire chaque année avec d’autres instructeurs qui se posent les mêmes questions.

Posté en tant qu’invité par Francois:

La problématique est bien résumée. Reste une question: qu’appelle-t-on « risque accetpable? »

Posté en tant qu’invité par J2LH:

John D l’aventurier a écrit:

Tu peux faire ce raisonnement pour la raquette, encore que ça
doit quand même pas mal limiter le choix des sorties.

C’est vrai que je fais ce raisonnement pour la raquette mais ça ne limite finalement très peu le choix des sorties parce qu’on a tout un réservoir d’itinéraires quasiment sans risques et qui sont très souvent excellents précisément quand le risque est élevé suite à une chute de neige. Mais c’est aussi souvent une question de choix de trace à la descente, à raquettes le but est rarement d’aller se faire un couloir, une pente qu’on a repéré. On aime bien profiter des pentes en poudreuse à la descente mais le raisonnement est tout de même sensiblement différent.

A raquettes on est moins souvent dans des situations à risque et il y a beaucoup moins d’accidents mais ça a un effet pervers. Les raquettistes considèrent qu’il y a très peu d’accidents donc très peu de risques à raquettes en oubliant que si il y a très peu d’accidents c’est qu’il y a moins de raquettistes dans les pentes à risque que de skieurs mais que quand ils sont dans ces pentes à risques ils sont tout aussi exposés. Au cours d’une réunion de préparation de la journée nationale de la raquette où étaient présent les représentants des différentes fédérations et organisations concernées (FFCAM, FFME, FFRP, accompagnateurs, etc…) j’ai entendu le responsable de la FFRP dire qu’il fallait arrêté de parler de la sécurité parce qu’il y a avait très peu d’accidents.

Résultat les personnes qui encadrent les raquettistes dans les clubs sont mal formées. Je dis ça parce que je l’ai constaté dans le CAF où j’encadrais (et que je sais que dans d’autres clubs ce n’est pas mieux) : sur une quinzaine d’encadrant la moitié des personnes qui encadraient la raquette n’avaient qu’un brevet pour le ski de fond, la plupart ne savaient pas se servir d’un ARVA, quand elles demandaient à ce que les randonneurs prennent l’ARVA (ce qu’elles faisaient rarement parce qu’elle trouvait que la randonnée revenait alors à trop cher) elles prenaient au mieux 2 pelles et 2 sondes pour un groupe de plus de 15 personnes, etc… Bien sûr les personnes encadrées, qui étaient pourtant souvent demandeuses de formation, auraient été totalement incapables d’intervenir en cas d’avalanche. Beaucoup ne savaient même pas mettre leur ARVA en début de rando. J’en parle au passé mais c’est toujours comme ça dans ce club.

PS: là je suis obligé de préciser que je suis instructeur FFCAM
en ski-alpinisme,

J’ai suivi une partie de cette formation mais en tant que raquettiste dans un monde de skieurs puisque j’étais le seul à raquettes. C’est d’ailleurs ce que j’ai constaté dans d’autres stages, en UV2 N&A j’étais le seul à raquettes sur 17 participants, en UV3 N&A j’étais également le seul pour une quinzaine de participants.

Posté en tant qu’invité par Paul G:

Avec cette définition, John D, ca ma va bien.

Pourquoi dis-tu que les formations ont 20 ans de retard ? Celles que j’ai suivi dans le cadre CAF m’ont semblé tout à fait valables ?

Posté en tant qu’invité par John D l’aventurier:

Francois a écrit:

La problématique est bien résumée. Reste une question:
qu’appelle-t-on « risque accetpable? »

Ca dépend de beaucoup de choses. Déjà dans un groupe, tout le monde n’aura pas le même niveau d’acceptation, en fonction de son « background » (caractère, situation familiale, mauvaise expérience précédente), et chaque individu en fonction de l’instant (état de stress ou de fatigue, euphorie du sommet ou autre). C’est ce qu’examine Alain Duclos. Il a mis en évidence que dans les groupes où les décisions sont prises de manière consensuelle, le niveau de risque accepté était plus bas (moins d’accidents), comme s’il l’effet collectif était minorant: qui oserait contraindre un pote à prendre des risques qu’il n’accepte pas ? De plus, je pense qu’en état de fatigue ou de stress (dernière pente à franchir en fin de course, pépin dans le groupe, etc) on aura tendance à accepter plus de risque (déjà que dans ces conditions, en général la perception est diminuée …)
Ensuite, il est évident que lors d’une course à la journée en aller/retour, on aura un niveau de risque accepté plus bas que dans une sortie à la journée en boucle (et si le dernier col qui ramène à la voiture présente un passage craignos ?), lui même plus bas que celui qu’on accepterait en raid. Ne parlons pas des expés. Il semblerait que l’altitude fasse perdre la tête à beaucoup de monde: progression sur glacier décordés, franchissement de pentes carrément craignos, passage direct sous des séracs monstrueux, etc.
Pour répondre à Paul: je ne vais pas décrier les formations que je réalise. Techniquement elles sont tip top, même des guides participaient il y a encore 7 ou 8 ans aux UV III Neige et avalanches du CAF, merci JPZ (depuis l’ENSA a revu sa copie). Mais je pense que le petit monde de la montagne (c’est vrai aussi en alpinisme) est en retard sur la gestion du risque, appelons ça la gestion du facteur humain, c’est plus correct politiquement. On n’en parle pas assez, et les 2 autres instructeurs de mon club sont aussi de cet avis. C’est comme si on avait un blocage à ce niveau. C’est ce que je disais avant-hier: peu de monde ose avouer qu’il prend du plaisir à gérer un risque.
Enfin bon, début Janvier, il y aura un rassemblement de chefs de course et d’instructeurs pyrénéens à Gavarnie, je pense qu’on parlera gestion du risque et facteur humain.
C’est bien sympa d’élever un peu le débat, de vous écrire ça m’a aussi permis de réfléchir, et quelque part de retrouver des repères pour me reconstruire après mon accident.
Merci.
Pour J2LH: j’ai suivi la formation instructeur à l’ENSA en 2002 en compagnie de Yannick Tonner (CAF Orthez), éminent raquettiste que j’ai appris à connaître à cette occasion. Le connais-tu ?

[%sig%]

Posté en tant qu’invité par Paul G:

John D "Mais je pense que le petit monde de la montagne (c’est vrai aussi en alpinisme) est en retard sur la gestion du risque, appelons ça la gestion du facteur humain, "

Je suis d’accord aussi.
Je pense qu’en général, en parlant des accidents, on préfère invoquer la fatalité que d’aborder le facteur humain.
Je crains qu’il n’intervienne au moins en partie dans la majorité des accidents. Cf par exemple les CR d’avalanche dans la revue de l’ANENA.

Posté en tant qu’invité par Régis Cahn:

Compte rendu de la journée ici :

http://www.acamontagne.com/index.php?option=com_content&task=view&id=201&Itemid=41