L'alpinisme est-il en déclin ? En vue d'un article pour la Revue Suisse

Bonjour,

Est-ce qu’il ne faut pas chercher ce déclin dans la définition même que l’on donne de l’alpinisme ?
Certains nient ce déclin en intégrant dans cette activité l’escalade, la cascade de glace, voir le trail. Il est vrai que la cascade de glace ou l’escalade sont des techniques utilisées en alpinisme, pourtant, il est impossible de confondre une voie de cascade de glace réalisée au milieu d’une station, avec la voiture garée à 10 mn comme à Ceillac et la réalisation d’une goulotte dans un cadre isolé ayant nécessité un jour d’approche et un bivouac. On voit bien qu’entre les 2, le curseur est passé de Divertissement sportif à Alpinisme. Idem entre une couenne ou une voie à la Tète de la Maye et une voie rocheuse en montagne.

On doit pouvoir trouver une raison à ce déclin dans cela même qui caractérise l’alpinisme : l’isolement, la capacité à s’assumer seul dans un environnement inhabituel. Quelqu’un le comparait à l’évolution de la voile et de la haute route, ça me parait totalement pertinent.
D’où aussi la discussion entre Bubu et La baltringue sur le niveau. L’un parle de niveau physique et technique, l’autre de niveau psychologique (dit aussi mental).
La population française à crue de 50% en peu de temps, et la plupart des gens vivent en ville. Ne serait-ce pas une explication possible ?
( par contre, cette explication trouve ses limites dans une course comme le Mont blanc avec 200 pèlerins à la file. C’est un autre aspect de l’alpinisme …)

[quote=« Bubu, id: 1762104, post:18, topic:156679 »]Oh ben si c’est juste ça, on peut faire des t-shirt « j’ai passé 3 jours dans la face N du Pic Sans Nom » :slight_smile:
(alors qu’en fait ça passe à la journée mais faut pas le dire)[/quote]

:stuck_out_tongue: Tu peux le faire, ca marchera dans certains labo ou bureaux d’etudes grenoblois, mais à part dans ces lieux, personne ne connait le pic sans nom.

Ceci dit, cette valorisation par la montagne existe encore dans certains lieux encore pétris de culture montagne.
Certaines sorties sur internet, notamment en ski de pente, sont (il me semble que c’est moins le cas maintenant) rentrées uniquement dans ce but… me souviens d’une époque où fallait absolument rentrer le Mayer Dibona ou la face Nord de la petite lance de Domène, sinon t’étais un loser. :stuck_out_tongue:

[quote=« Bubu, id: 1762104, post:18, topic:156679 »]

Euh, pour faire un premier saut en base jump, il faut bien plus d’entrainement que pour faire une première course en alpi !
Ca demande un peu plus de motive (et d’argent, car les XX sauts en chute libre depuis un avion ce n’est pas gratos).[/quote]

Je n’ai jamais dit le contraire : ce que j’ai voulu dire, c’est que le base jump est, me semble-t-il, plus directement versé dans le régime de l’adrénaline. Y compris et notamment dans son rapport au temps (et à l’espace bien sur, ou devrais-je dire « au vide »). Quand bien même grosse préparation il y a.

Or, je n’ai pas connaissance qu’on cherche spécialement l’adrénaline quand on fait de l’alpinisme, je dirais même que pour beaucoup elle est plutôt subie, dans des situations d’exposition mal gérées…enfin si j’en crois mon vécu assez limité et de nombreuses expériences partagées en la matière.

Après je pars du postulat que l’adrénaline tient une place importante (ne serait-ce que physiologiquement) dans le base jump, mais c’est le postulat d’un non-pratiquant.

hola,
Suite a la naissance de nouvelles disciplines,leur développement et la transformation de l’homme en homo-economicus :stuck_out_tongue:
-on peut mettre en avant le côté multi- pratiques,par exemple :
une même personne fera de l’escalade,du parapente et du ski de rando (touche a tout des activités montagnes) ,ou du TA,de la cascade et du trail,…etc
-ce qui était un tout dans le passé « l’alpinisme »,se retrouve scindé en pratique a part entière: escalade,TA,cascade,ski de rando,…

[quote=« fredoche, id: 1762116, post:21, topic:156679 »]Bonjour,

Est-ce qu’il ne faut pas chercher ce déclin dans la définition même que l’on donne de l’alpinisme ?
Certains nient ce déclin en intégrant dans cette activité l’escalade, la cascade de glace, voir le trail. Il est vrai que la cascade de glace ou l’escalade sont des techniques utilisées en alpinisme, pourtant, il est impossible de confondre une voie de cascade de glace réalisée au milieu d’une station, avec la voiture garée à 10 mn comme à Ceillac et la réalisation d’une goulotte dans un cadre isolé ayant nécessité un jour d’approche et un bivouac. On voit bien qu’entre les 2, le curseur est passé de Divertissement sportif à Alpinisme. Idem entre une couenne ou une voie à la Tète de la Maye et une voie rocheuse en montagne.[/quote]

c’est sur que les limites sont plus floues. Pour moi faire de la goulotte, cascade à la journée ou à la demi journée c’est de l’alpi. Par contre pas ce n’est pas de l’alpi aventureux comme demandait le post initial, du coup je l’ai volontairement exclu dans ma réponse. ces activités sont en plein boom il me semble…

Mais l’alpi « aventureux », les grandes courses, pas forcément dure mais longues et engagées me semble moins pratiqué. A vérifier avec des données objectives, comme je le disais dès le début…

[quote]On doit pouvoir trouver une raison à ce déclin dans cela même qui caractérise l’alpinisme : l’isolement, la capacité à s’assumer seul dans un environnement inhabituel. Quelqu’un le comparait à l’évolution de la voile et de la haute route, ça me parait totalement pertinent.
D’où aussi la discussion entre Bubu et La baltringue sur le niveau. L’un parle de niveau physique et technique, l’autre de niveau psychologique (dit aussi mental).
La population française à crue de 50% en peu de temps, et la plupart des gens vivent en ville. Ne serait-ce pas une explication possible ?
( par contre, cette explication trouve ses limites dans une course comme le Mont blanc avec 200 pèlerins à la file. C’est un autre aspect de l’alpinisme …)[/quote]

je pense pas que l’aspect « urbain » soit pertinent, dans les années 70 déjà la plupart des gens étaient des urbains. Et une bonne partie des plus grands alpinistes sont urbains (en france les allain desmaison paragot berardini) et je parle même pas des anglais.

Pour le mont blanc on est clairement dans un phénomène de valorisation sociale, très peu de ces gens referont de l’alpi après, c’est très comparable aux gens qui font des trails ou des marathons.

Posté en tant qu’invité par gédéon3:

Quelques réflexions sur la désaffection pour l’alpinisme:

  • la mode des « hyper traileurs » qui pratiquent seuls en mode minimaliste dévalorise l’alpiniste amateur qui ne voit plus dans son sport une discipline élitiste mais l’expression d’une mise en oeuvre d’un matériel lourd et encombrant pour parvenir au même résultat. Cette tendance extrême génère de nouvelles manières de pratiquer la montagne mais tire l’alpinisme vers le bas.
    -la métamorphose d’ un environnement qui se modifie à vue d’oeil : glaciers en recul, parois qui s’assombrissent, éboulements, chutes de pierres. …tout cela en l’espace d’une génération, c’est spectaculaire et peut déstabiliser les pratiquants.
  • une modification dans les comportements: prendre des vacances de courte durée mais plus souvent ne favorise pas l’apprentissage et l’expérience nécessaires pour progresser en alpinisme.
    -la promotion de courses en montagne prêtes à consommer où certains sommets (M-B) sont vendus comme des trophées abordables sans background montagne, la condition physique étant le seul prérequis.
  • La « montagne pour tous » a atteint un pic au delà duquel la pratique n’est plus concevable: surfréquentation, pollution, etc.

non
même en pleine saison, certaines zones sont totalement vides, y compris le dimanche
il n’y a surfréquentation que sur les sommets prestigieux ou à la mode (Mt Blanc, Dibonna, … )

Posté en tant qu’invité par gigi74:

A mon humble avis, le vendeur dans magasin de sport que tu as interviewe se trouve dans un station style Saas Fe ou Zermatt.
De même pour les guides.

Maintenant en lisant les posts je suis clairement alarmé, puisque je réalise que je ne fais plus d’alpi !
Les courses en ski de rando ca ne compte plus, l’escalade de même, et probablement les grandes voie et la cascade de glace aussi.
Aller faire le Mont Blanc non plus, et les autres 4000m tape l’œil pas plus. Des que tu porte des basket tu es un trailler et non alpiniste.
Et quand tu amène ton téléphone portable, franchement tu accepte pouvoir être sauver par le PGHM, de la triche quoi.
Lire des CR sur camptocamp, la meteo ou le bulletin avalanche aussi.

Alors oui l’alpi est mort il y a environs 25 ans, probablement un mardi après-midi.

Ben là justement pour ce qui concerne le trail ou le marathon c’est en train de changer. Un ultra n’est plus « l’oeuvre d’une vie ». Le phénomène est tel que d’un WE à l’autre, d’une course à une autre, d’un marathon à un autre, et même d’un ultra à un autre, tu retrouves les mêmes personnes qui enchaînent les courses pendant toute une saison.

Et leur arrêt (provisoirement, de longue durée, ou définitif) vient plutôt par la saturation, la fatigue, la blessure sportive. En ce sens qu’il est subi. Le problème vient du caractère traumatisant lié aux chocs répétés de la foulée, notamment en descente (mais pas seulement) Moi j’ai mis stop à ma modeste carrière de trailer par lassitude des blessures à répétition, une vraie chianli d’être comme un petit pépé pétri de douleur en dehors des courses. Je n’arrivais pas à maintenir mon corps dans un équilibre me permettant de poursuivre l’activité.

D’ailleurs sans être jaloux des trailers toujours en activité, ni mauvais prédicateur, je pense que les problèmes musculo-squelettiques vont mettre un bon coup de frein à la vague du trail. Le corps médical, très impliqué dedans, commence à le dire. Et puis comme tout phénomène, il y a une naissance, un développement, un « age d’or », une condensation puis une saturation, et un essoufflement. C’est vrai pour la plupart des pratiques, pas propre au trail.

D’ailleurs le trail s’est déjà éclaté, il y a les ultra-trailers, les KVistes, les cross-trailers, les skyrunners etc…

Posté en tant qu’invité par gédéon3:

[quote=« vref, id: 1762142, post:27, topic:156679 »]

non
même en pleine saison, certaines zones sont totalement vides, y compris le dimanche
il n’y a surfréquentation que sur les sommets prestigieux ou à la mode (Mt Blanc, Dibonna, … )[/quote]

Certes, mais il faut s’interroger sur le fait qu’elles restent non fréquentées…elles n’empêcheront pas la désaffection pour l’alpinisme. Il faut se poser les bonnes questions !

Proposer un sommet annexe à un amateur qui rêve d’un sommet très précis n’est pas la meilleure promotion en faveur de l’alpinisme !

[quote=« gigi74, id: 1762143, post:28, topic:156679 »]A mon humble avis, le vendeur dans magasin de sport que tu as interviewe se trouve dans un station style Saas Fe ou Zermatt.
De même pour les guides.

Maintenant en lisant les posts je suis clairement alarmé, puisque je réalise que je ne fais plus d’alpi !
Les courses en ski de rando ca ne compte plus, l’escalade de même, et probablement les grandes voie et la cascade de glace aussi.
Aller faire le Mont Blanc non plus, et les autres 4000m tape l’œil pas plus. Des que tu porte des basket tu es un trailler et non alpiniste.
Et quand tu amène ton téléphone portable, franchement tu accepte pouvoir être sauver par le PGHM, de la triche quoi.
Lire des CR sur camptocamp, la meteo ou le bulletin avalanche aussi.

Alors oui l’alpi est mort il y a environs 25 ans, probablement un mardi après-midi.[/quote]

t’as décidé de troller ou alors juste tu ne sais pas lire. Je me cite ( :stuck_out_tongue: )

et on semble tous d’accord sur ce point. A ceillac, à la Grave, à presles ou dans les combes des aravis t’as l’impression de faire de l’alpi aventureux ?

ben si !!
il faut simplement lui prouver qu’un sommet secondaire peut être aussi, voir plus intéressant que le sommet dont il rêve !!
mais ça, c’est peut être ce que ne font plus les guides et encadrants de club …

Mon cousin n’a jamais compris ma passion pour la montagne, et on vivaient en Val.
Depuis 3-4 ans je vois une diminution de touristes chez nous, mais d’un autre côté il y a une augmentation de voyages à l’étranger sur des destinations « spot »; çà c’est pour l’aspect bling bling :wink:
Le nombre de magasins ne cesse d’augmenter.
Au CAS tu organises une sortie, mais si il y a plus de 30 min de marche, les jeunes ne sortent pas! :rolleyes:

les mentalités changent!

[quote=« strider, id: 1762151, post:29, topic:156679 »]Ben là justement pour ce qui concerne le trail ou le marathon c’est en train de changer. Un ultra n’est plus « l’oeuvre d’une vie ». Le phénomène est tel que d’un WE à l’autre, d’une course à une autre, d’un marathon à un autre, et même d’un ultra à un autre, tu retrouves les mêmes personnes qui enchaînent les courses pendant toute une saison.
.[/quote]

oui c’est vrai, les traileurs ne s’arretent pas tous dès leur premier ultra fini. j’avais plus en tête les gens qui se fixent un objectif du genre marathon de paris.

Pour le reste 100% d’accord j’ai suivi le même parcours que toi, après qq années de trails j’ai vite compris que je pouvais retrouver ces sensations dans d’autres sports beaucoup moins destructeurs :stuck_out_tongue:

Posté en tant qu’invité par gédéon3:

[quote=« vref, id: 1762156, post:32, topic:156679 »]

ben si !!
il faut simplement lui prouver qu’un sommet secondaire peut être aussi, voir plus intéressant que le sommet dont il rêve !!
mais ça, c’est peut être ce que ne font plus les guides et encadrants de club …[/quote]

T’as trouvé la réponse toi-meme ! S’ils ne le font pas, c’est bien que ça ne fonctionne pas avec la grande majorité des apprentis-grimpeurs !

Adolescent, je ne retirais qu’un plaisir très mitigé de courses qui m’était imposées (parfois pour des raisons pécuniaires et je le comprends parfaitement) et ne correspondait pas à mes souhaits. …

Comme mentionné plus haut, il faudra d’abord s’appuyer sur des donnes objectives pour confirmer s’il y a bien un déclin et si oui l’ampleur de ce déclin. Pourquoi ne pas consulter le livre d’une cabane au départ de courses d’alpinisme variées en haute montagne et comparer l’évolution des courses mentionnées dans le livre au cours des années? Ça de doit pas être trop compliqué d’avoir accès à ces registres de la part des gardiens. Ça permettrait de voir s’il y a une désaffection pour les courses de grande ampleur et engagées au profit des voies normales par exemple. L’évolution du climat et la chaleur peut aussi expliquer que certaines faces sont moins pratiquées car plus en condition actuellement, du moins l’été.
Pardon si cela a déjà été dit ou suggéré plus haut.

[quote=« gigi74, id: 1762143, post:28, topic:156679 »]Maintenant en lisant les posts je suis clairement alarmé, puisque je réalise que je ne fais plus d’alpi !
Les courses en ski de rando ca ne compte plus, l’escalade de même, et probablement les grandes voie et la cascade de glace aussi.
Aller faire le Mont Blanc non plus, et les autres 4000m tape l’œil pas plus. Des que tu porte des basket tu es un trailler et non alpiniste.[/quote]

Eh oui ! Je comprend que ça fiche un coup au moral !!

En fait, c’est surtout qu’il y a autant de définition de l’alpinisme que de pratiquant !

Vu que Camp to Camp commence a avoir pas mal d’année, il serait aussi intéressant de regarder l’évolution des sorties :slight_smile:

Perso, je trouve qu’il y a quand même pas mal de vitalité, et il reste des courses bien dures dans les comptes rendus…
De même si on regarde l’évolution du ski de pente raide, c’est fou le nombre de mecs qui vont maintenant en face nord de l’aiguille du midi, et au delà de cet accès mécanique, il y a une grosse pratique dans le bassin d’argentière par exemple… Cette pratique demande d’être acclimaté, entrainé, et se trouve à des années lumières d’une approche consumériste du hors-piste! Sans parler des risques et de l’engagement que ça demande…

Autre exemple en octobre dernier, on pouvait voir environ 20 cordées à la fois dans la face nord des Grandes Jorasses! Il y avait ça il y a 25 ans??

Ce mois de juin j’ai emmené des amis à l’Aiguille du tour. Le refuge Albert 1er était plein plus de 2 semaines avant… Au départ de ce refuge, pas de Mont-Blanc ni de 4000 « bling ». En revanche, des courses d’initiations, et des courses plus dures au Chardonnet.

Du coup j’ai du mal à croire au déclin :wink:

" Dans mon cas, l’alpinisme est en déclin. C’est chose sûre, et l’on peut me citer. "
(Borut Kantušer)

:lol:

On est d’accord; je questionnais seulement ton choix des mots…