Posté en tant qu’invité par Francois:
Comme ça ne marche pas pour le ferment bulgare, je vais parler de la pomme de Newton. Heureusement que j’ai un petit stock dans lequel je peux taper. Vous en avez de la chance, petits canailloux!
Par la fenêtre de mon bureau, je vois un arbre. Un arbre sur une pelouse verte. Un arbre dont le feuillage chatoie dans la douce lumière de l’automne.
Ce matin, un méchant coup de vent, une bourrasque cruelle, a dégarni l’arbre de son habit de lumière. Il a maigri tout d’un coup et ressemble maintenant à un balai de sorcière.
Triste avatar…
Les feuilles en collège tumultueux se sont dispersées dans l’espace puis sont retombées doucement sur l’herbe verte, et la pelouse n’est plus verte ; ainsi des premiers cristaux annonciateurs des tourmentes hivernales, sur l’alpage abandonné.
« Nul n’a surpris, nul n’a connu, au plus haut front de pierre, le premier affleurement de cette heure soyeuse, le premier attouchement de cette chose fragile et très futile, comme un frôlement de cil. »
Et ma pensée agile errant au gré de mon cerveau fragile rêvait… tombent les feuilles, tombe la neige…
Mon imagination vagabonde se prend soudain les pieds dans les lacs d’une réalité inévitable : la gravitation universelle… Newton (sir Isaac, né en 1642 à Woolsthorpe ; à ne pas confondre avec Newton, sir Charles Thomas, né à Bredwardine en 1816, archéologue).
Newton ! la pomme !
La pomme de Newton !
Bon sang !..
Des images défilent dans ma tête… sir Isaac (il n’était pas sir à l’époque, il est devenu sir après la pomme. A ce sujet, on ne manquera pas de remarquer l’importance de la pomme dans l’imaginaire judéo-chrétien) sir Isaac assis sous le pommier, un livre à la main, le dos bien calé contre le tronc, sir Isaac, les yeux dans le vague, pensant qu’il serait urgent de faire réparer la serrure de la porte d’entrée, qui grince (« oh ! it’s very unpleasant ! ») et tout à coup …
Une pomme qui tombe !
Sir Isaac en est tout éberlué… (on se demande bien pourquoi… il ne s’attendait tout de même pas à voir tomber une courge.)
A cet instant précis, cet instant où sir Isaac voit tomber cette pomme et en est tout éberlué, cet instant où cette pomme acquiert le statut historique de « pomme de Newton », à cet instant précis, donc, une hypothèse me traverse l’esprit :
- Et si, me dis-je, Isaac eut été assis sous un cocotier (au lieu d’un pommier) ? la face du monde en eût-elle été changée ?
Eût-on parlé de « noix de coco de Newton » ?
C’eût été insatisfaisant. Euphoniquement d’abord, et ensuite du point de vue de la représentation symbolique. Une noix de coco, je vous demande un peu ! Imagine-t-on ce brillant sujet de sa très gracieuse majesté britannique en pagne sous un cocotier ?
Shocking ! very shocking !
Je sais bien qu’à l’époque les anglais étaient à peu près partout chez eux, distribuant à pleine main les bienfaits de la civilisation occidentale aux peuplades primitives, mais enfin…
« La noix de coco de Newton »… non… vraiment, non… ça ne colle pas.
Quant à savoir ce qu’il se fût passé si Newton eût été assis sous un chêne…
Mais Newton lui-même, prévoyant déjà les ricanements grivois de l’Histoire et conscient du danger pour sa postérité, prit bien garde d’éviter les chênes.
[%sig%]