Posté en tant qu’invité par Michel:
Quelles sont les difficultés que l’on rencontre dans les randonnées glaciaires ? Cette question est somme toute difficile, mais sur le fond une randonnée glaciaire va consister à se promener sur seulement deux éléments, de l’eau (H2O) et de l’air (mélange d’azote et d’oxygène). On conçoit alors que marcher sur ces deux seuls éléments présente déjà en soi une grande difficulté ; ces deux éléments peuvent acquérir une certaine consistance, si à un moment ou un autre la température est descendue durablement en dessous de zéro degré. Il faut donc que l’eau présente une phase solide sous forme de glace ou de cristaux pour qu’on puisse espérer poser le pied dessus ; c’est pourquoi je n’ai jamais pu faire de randonnées glaciaires à la Martinique ou au Sahara.
Néanmoins, les combinaisons que l’on rencontre entre l’eau liquide, l’eau sous forme de glace et l’air sont extrêmement nombreuses et définissent toute la complexité que l’on peut attendre du milieu glaciaire, à la fois passionnant et troublant : ceci explique aussi que certaines combinaisons peuvent représenter des dangers, l’eau liquide et l’air n’ayant guère de consistance. Entre une poudreuse froide (90 % d’air, pas d’eau liquide) et la glace vive plus ou moins froide, quelle différence de perception ! Entre la neige dure du matin et la neige humide de midi, le comportement est radicalement différent. Entre une neige croutée, travaillée par le vent et une neige vitrifiée par une pluie verglassante …, il vaut mieux adapter les bons souliers pour marcher dessus.
La randonnée glaciaire se déroule donc sur un milieu qui n’est constitué que d’eau et d’air : néanmoins, entre un bon névé parcouru au début du dégel et une pente de glace, la difficulté n’est tout de même pas la même. Il faut donc imaginer en randonnée glaciaire comment se sont constituées les différentes couches sur lesquelles on marche : le glacier et ses fractures mécaniques (crevasses, séracs…), mais aussi les couches superficielles de neige plus ou moins vieille et plus ou moins transformées par le vent, le soleil … mais aussi le passage d’autres randonneurs. Disposer d’une trace bien creusée facilite grandement le passage dans certaines zones, il suffit de voir à ce sujet les diverses voies normales du mont Blanc.
La difficulté au final est d’arriver à bien anticiper les conditions qui vont être rencontrées dans l’itinéraire projeté à l’heure du passage où l’on se trouvera. Il existe en effet de grandes différences dans la journée dans certains itinéraires, je pense en particulier au couloir Whymper à l’Aiguille Verte. Mais on rencontre aussi parfois des conditions imprévues, je me souviens ainsi fin août d’être descendu du refuge de l’Aigle (Massif des Ecrins) et d’avoir rencontré vers 2800m d’altitude une pente de glace à 35° bien plus difficile que le névé que j’avais prévu de descendre en ramasse !! Une neige récente sur un glacier peut cacher de profondes crevasses.
Tout ceci pour dire que le milieu naturel d’évolution en randonnée glaciaire est un milieu qui nécessite beaucoup de modestie (et/ou d’expérience) pour l’appréhender. D’où l’intérêt de se faire accompagner éventuellement par des professionnels.
Bonne rando tout de même.
Michel,