Je ne suis pas complètement sûre que cette rubrique soit le meilleur endroit, donc n’hésitez pas à déplacer mon sujet s’il n’y a pas sa place.
Je me posais la question de la réaction qu’ont les personnes suite à un accident non bénin.
@Lulu002 nous a montré une formidable résilience.
Qu’en est-il de vous autres ?
Quel a été l’impact dans votre pratique, voire dans votre vie ?
Impact psychologique des accidents
J’ai eu un gros accident il y a une dizaine d’années, mais qui ne m’a laissé aucune séquelle physique ou psychique.
ça n’a pas vraiment eu d’impact sur ma pratique, que j’ai pu reprendre dans les semaines qui ont suivies. J’imagine que le fait de ne pas avoir laissé s’installer d’appréhension ou de trauma a pu m’aider.
Dans ma vie quotidienne, dans les mois/années qui ont suivies j’ai eu un comportement un peu différent, plus calme et détaché, parceque je considérait que tout le temps passé depuis l’accident était « du bonus » que je n’aurais pu ne pas connaitre. J’ai fait plusieurs gros changements dans ma vie à l’époque, mais c’est dur de dire si je ne les aurait pas fait aussi sans l’accident. Avec le temps ça s’est estompé et aujourd’hui je ne crois pas être si différent d’avant : je crois être plus mature mais c’est surement autant à mettre sur le compte de dix années écoulées.
Par contre mon compagnon de cordée n’a jamais repris la montagne, même si il m’a toujours juré que ça n’était pas lié à l’accident.
Je ne sais pas si ça répond à ta question, je me considère comme un miraculé mais le fait que mon accident, objectivement grave, n’ai pas eu de conséquences fait que je vis ça de manière assez légère, comme on se souviens d’une vieille galère dans une course. Je pense que c’est très différent si tu en sort avec des séquelles toi ou ton/tes compagnons, et j’admire chaque jour la résilience de personnes comme @Lulu002
Moi, depuis un accident, nettement moins grave que celui de lulu, je pense à mettre un slip pas trop troué avant de partir en montagne pour pas avoir trop honte à l’hosto et j’ai un chargeur de tel et son cable dans la voiture pour pas etre sans tel.
Mais oui, je me retrouve beaucoup dans tes propos ! C’est un cadeau de palper de si près notre condition de mortels…!
Tout le monde n’a pas la chance de toucher du droit sa mort et d’en réchapper (y laisser quelques doigts est le prix à payer ?..)
Grâce à c2c, j’ai même eu droit à mon éloge funèbre en live, une expérience rare (de son vivant ) pourtant fort émotionnante !
Probablement.
C’est pour cela que j’ai du mal à identifier ce qui est dû à l’accident (« j’ai failli mourir et bim me revoilà ») et ce qui est dû au handicap.
L’absence de bras a le mérite de me rappeler chaque jour ma chance d’avoir survécu, alors que tous les « ce caillou n’est pas passé loin » des années précédentes se sont évanouis avec le temps…
Mais les décharges électriques toutes les nuits, les immenses vagues de tristesse d’un deuil infaisable, les frustrations du quotidien sont moins funs.
Alors votre histoire de résilience ne me parle guère, j’avance avec ce que j’ai et ce que je n’ai plus, comme chacun d’entre nous en fait. C’est juste plus visible chez moi (ouep je n’suis pas dans une période hyper gaie, marre des fantômes qui débarquent avec leurs couteaux gniark gniark).
Comme toi j’ai également du mal à distinguer ce qui est dû à l’accident ou tout simplement au temps qui passe… Et à la maternité qui est arrivée en synchro, et ces boudchous qui sont venus m’aider à moins sombrer !
Humpf je réalise en te lisant qu’il y a différents stades d’accidents…
Certes je n’ai aucune pudeur, mais déjà lors de mon sauvetage épique apres fracture du plateau tibial au fond du Maroc, j’ai souvenir de scènes de pipi au bassin dans l’ambulance avec le pote qui nettoie les dégâts au tee-shirt qui traîne… ça ne m’avait franchement pas « gênée » vu la douleur bien plus préoccupante que ces détails…
Franchement quand t’es au bout y a d’autres priorités que le slip troué : si t’es encore en état d’en avoir honte, c’est super bon signe !
Perso j’ai été gênée d’imposer la vision de mes chairs lacérées aux sauveteurs suisses, leur provoquant un haut-le-coeur…
Il me semble compliqué de tirer si ce n’est des conclusions, ne serait-ce que des grandes lignes…
En parlant si « global » du moins, car les conséquences peuvent être vastes du trauma à l’oubli au handicap visible ou pas…
Peut-être qu’en ciblant les réactions du genre « est-ce que le rapport à la montagne ou à la sécurité (par exemple) a changé ? » ça affinerait peut-être le truc…
Personne ne t empêche d affiner ta réponse dans une direction qui te semble pertinente.
Disons que comme le sujet est vaste, chacun peut y voir ce qu il veut.
J ai eu l occasion de faire tomber la pièce du bon côté suite à un gros carton en parapente, disons que j avais 4 chances sur 100 d’être présent pour noel, selon les statistiques en vigueur. J’ai eu de la chance au tirage et sans aucunes séquelle exceptées quelques marques discretes indélébiles sur le corps.
Alors que est ce qu’on en tire. Je dirai des anecdotes pour les soirées au coin du feu, le souvenir de l infirmière au déchocage qui indique clairement que j’avais pas mis l’option slip troué, une gentillesse infini en réanimation et le retour à la réalité, les mois passés en rééducation à essayer de comprendre pourquoi toi tu pourras recourir et pourquoi la personne à côté va devoir apprendre à faire des Weelings pour passer les trottoirs.
Au début tu te dis que cette 2eme naissance qu’on te donne, tu vas la chouchouter et ne plus voir que le verre à moitié plein.
Puis le temps passe, et la vie s’amuse à te remettre dans cette routine sans que tu t’en rendes compte. Au final ce n est qu’un reset, même joueurs jouent encore.
La montagne tu l’as toujours devant les yeux, la corde est toujours là, ne manque juste que ta doudoune découpée en morceaux.
Alors tu reprends l alpinisme, la grimpe le ski comme si de rien n’était, mais au fond de toi tu as maintenant cette petite voie qui te dit,:"tu te souviens de l hélicoptère, rappels toi quand on devait te torcher,tu n’as pas oublié que tu n’as pas vu tes enfants 3 mois, ça ne t’a pas manqué ? "
Au final, engager devient plus compliquer, mais tu y retournes quand même.
Cette dualité je l’ai en moi, en ayant eu un aperçu du bordel occasionné.
Chaque jour est du temps de gagné mais j’essaye d’être moins égoïste. Les enfants ont grandi, le temps passé avec eux est précieux. Plus intense et memorable que mon petit plaisir personnel.
Mais j’ai toujours mes crampons dans le placard pour quelques escapades…
Ps: merci lulu pour les échanges que nous avons eu dans les moments où je ne me sentais pas dans un pic de forme étincelant…