Grignotage de la zone Coeur du Mercantour

Je viens de voir ca sur FB

[quote] □En cette rentrée, nous constatons que la mission première du Parc National du Mercantour qui est « est de protéger la nature, les paysages et la diversité biologique de ses territoires qui ont justifié sa création » (source : Les missions du Parc | Parc national du Mercantour) notamment sur sa zone cœur représentant 679 km2 (soit moins de 0,11% du territoire français) semble aujourd’hui compromise face aux demandes des intérêts politiques et privés locaux.
C’est pour cette raison que Vigilance Mercantour a interrogé la Ministre de la Transition Ecologique et Solidaire ainsi que la Présidence du Parc National du Mercantour sur plusieurs points constatés ces derniers mois et réinterroge sur des faits datant de 2012 (courriers recommandés envoyés lundi 02 septembre)
Nous faisons également le choix de diffuser la lettre aux différents acteurs du territoire, aux associations de protection de la nature, à la presse locale ainsi qu’aux citoyens intéressés par l’avenir du Mercantour.

Vigilance Mercantour
Association loi 1901

A Madame Élisabeth BORNE
Ministre de la Transition écologique et solidaire
Hôtel de Roquelaure
246, boulevard Saint-Germain
75007 Paris

Le 30/08/2019

Objet : Parc National du Mercantour, grignotage de la zone cœur et demande d’évolution de la réglementation sur les nuisances.

Madame la Ministre,

Notre association a pour objectif principal de veiller au respect de l’environnement sur l’ensemble du massif du Mercantour, et en particulier dans la zone cœur du Parc National du Mercantour (PNM).

Malheureusement, nous constatons que cette zone cœur est attaquée en plusieurs points.

  • Grignotage du périmètre de la zone cœur du PNM

Premièrement : nous avons déjà alerté au mois d’Août 2012 Madame Delphine BATHO, alors Ministre de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, sur des déplacements physiques, constatés sur place par nos soins, des marques indiquant les limites de la zone cœur du PNM.

Les limites officielles du parc (en vert sur les cartes jointes) ont été sur site effacées et déplacées au détriment du cœur de parc.

Une première anomalie est située sur le versant Est de l’Authion dans la commune de Breil sur Roya, au lieu-dit Maurigon. Sur le chemin de la balise 152 en direction de la Crête de Maroun, les marques remontent à gauche à l’endroit où elles devraient descendre à droite sous le sentier.
La deuxième anomalie est située sur le versant Est du Mangiabo, au-dessus du col de Brouis. Les marques de la limite ont été grattées le long du chemin où elles devraient figurer. De nouvelles marques ont été placées à peu près 200 mètres plus haut.

Le cœur du PNM se trouve ainsi amputé de plus d’une quarantaine d’hectares. D’après ce que nous avons pu voir sur site, les parties ainsi sorties de la zone cœur doivent particulièrement intéresser les chasseurs, comme en témoigne la présence de ce qui ressemble fort à un poste de tir, situé à la limite entre la forêt et la pelouse alpine.
(carte et photos communiquées)

Sept années ont passé, et rien n’a changé sur place. Nous réitérons ici notre demande de rétablissement des limites du cœur de Parc conformément à son décret de création.

Point notable : de telles distorsions entre ce que montrent les cartes IGN que tout le monde se procure aisément et la réalité sur place posent de sérieux problèmes de sécurité et donc de responsabilité. Par exemple un randonneur venu faire dans les secteurs hachurés (voir cartes ci-après) des photos d’animaux se croira à l’abri en zone cœur d’après la carte IGN, alors qu’en période de chasse, il risque d’être victime d’un accident !

Deuxièmement : plus récemment, toujours sur le secteur Roya du PNM, un chantier de rénovation d’un ancien bâtiment militaire à l’abandon, au lieu dit « Gias de la Gasta » a démarré. Selon nos informations, le bâtiment rénové est destiné à une exploitation commerciale privée. Lors de notre visite sur site, les travaux avaient démarré alors que le panneau réglementaire de Permis de Construire ne contenait aucune information.

D’après les contours officiels du PNM sur Géoportail ainsi que d’après les documents cadastraux officiels et publics édités lors de la création du Parc, dont nous avons copie, ce bâtiment se trouve en zone cœur. Nous avons questionné le PNM sur nos préoccupations concernant un tel projet, voici la réponse que nous avons obtenue : « …localisation du bâti en aire d’adhésion de Tende, selon les limites du parc apposées sur le terrain ».

Nous en déduisons que, comme pour le premier point, les marquages du cœur du PNM matérialisés sur place ont été arrangés pour satisfaire des intérêts privés.

Troisièmement : sous l’impulsion de Mr Christian ESTROSI, Président de la Métropole Nice Côte d’Azur, un projet de développement de l’activité VTT à assistance électrique (VTTAE) dans le territoire du Mercantour se concrétisera en juin 2020. Il consiste à proposer un parcours Auron - Nice en 7 étapes à VTTAE, avec mise en place d’équipements dont des bornes de recharge.

Le problème est que le parcours envisagé traverse plusieurs secteurs en zone cœur du PNM, dont un très sensible entre Isola 2000 et le Boréon.

Dans l’article que Nice Matin a consacré à ce projet, on peut lire : « … plus délicate a été l’obtention de l’accord du Parc du Mercantour… ». Nous en déduisons que le Parc n’a pas eu d’autre choix que de se taire sur le fait que la pression sur ce milieu hyper sensible – entre autre habité par le tétras lyre - va encore augmenter.

Un parcours alternatif valorisant des secteurs et villages périphériques peu fréquentés du Mercantour aurait à notre sens été plus pertinent.
Nous demandons :

  • une sanctuarisation du cœur de Parc, à savoir :
    o le retour d’un marquage sur site conforme aux limites définies lors du décret de création du Parc
    o l’arrêt de tous travaux en zone cœur.

  • une plus grande fermeté du Parc face aux demandes des intérêts politiques et privés locaux : le Parc ne doit pas être un argument marketing, mais réellement un espace dédié à sa mission première : une protection renforcée et ferme de la nature et de la biodiversité

  • une évolution statutaire dans la gestion des Parcs Nationaux : des associations comme la notre ne devrait-elle pas être partie prenante de façon institutionnelle dans les instances décisionnelles des Parcs Nationaux ?

Autre grave préoccupation, la multiplication des nuisances sonores

En Mars 2019, nous avons constaté le déploiement à grande échelle de rotations d’hélicoptères à but purement commercial à partir de la station de ski d’Isola 2000.

Notre association a été fortement sollicitée afin de nous opposer à cette pratique polluante et bruyante, très dérangeante pour les usagers eux-mêmes de la station, et bien évidemment pour la faune dans un domaine qui jouxte de très près la zone cœur du PNM.

Même si les hélicos ont respecté toutes les réglementations en vigueur concernant d’une part l’aviation civile et d’autre part l’interdiction de survol de la zone centrale du Parc National, le bruit ne connait pas la limite du Parc et ne peut qu’effaroucher la faune bien au-delà du domaine skiable, donc EN PLEINE ZONE CENTRALE DU PARC.

Nous avons mis en ligne une pétition qui a recueilli plus de 6000 signatures en 48 h, amenant la station d’Isola 2000 à très rapidement abandonner la promotion des baptêmes d’hélicos sur son domaine.

D’autres sources de bruit issues des stations de ski impactent également la zone centrale du Parc : les puissantes sonos des commerces et restaurants en front de neige d’Isola 2000 ont été entendues par des randonneurs en plein cœur du Parc, à plusieurs kilomètres de la station, le bruit ayant franchi plusieurs crêtes de montagne au gré des vents.

Enfin nous redoutons le développement prochain de nuits électro géantes en pleine montagne comme cela s’est malheureusement vu à l’Alpe d’Huez avec le festival « Wonderland ».

Nous dénonçons également une autre forme de nuisance, issue elle des pouvoirs publics qui cherchent à déneiger les routes d’altitude, au premier rang desquelles la route emblématique de la Bonette, de plus en plus tôt, sans prendre en compte les dérangements que cela induit sur la faune, en particulier en pleine période très sensible de reproduction des lagopèdes. Ainsi des tirs de mine ont été constatés en limite du PNM, sans que celui-ci ait été consulté.

Pour toutes ces raisons, nous proposons et demandons une évolution de la réglementation des Parcs Nationaux : lorsqu’une source de nuisances se trouve en dehors de la zone cœur d’un Parc National mais que ces nuisances touchent largement ladite zone, le Parc National devrait pouvoir intervenir afin d’exiger la suppression de la source des nuisances.

Vous remerciant par avance pour vos réponses,

Pour l’association Vigilance Mercantour,

Son Président

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