Dites le avec des mots

Posté en tant qu’invité par toyotam:

Il y a bien longtemps, jeune et pas si insouscient, je partais à l’âge de 15-16 ans faire mes premières courses en montagne avec des copains de mon âge ou plus âgés, mais toujours en leader ou coleader. Un jour, à cette époque ou un peu plus tard, ma maman, avec toutes ses qualités et ses défauts, s’est arrêté dans le repas que nous préparions ensemble et m’a dit quelque chose qui a structuré toute ma pratique : « Si un jour tu meurs en montagne, je t’en voudrais toute ma vie ».
Une pratique dangereuse alors que tant de gens vous attendent et vous espèrent ne m’a pas empêché de poursuivre une longue carrière d’alpinisme…

Pourtant je ne peux absolument pas imaginer la douleur que je causerai à ma femme ou à mes enfants si l’alpinisme m’amenait à disparaitre. Et je n’imagine pas arrêter la fréquentation de ce milieu dans lequel je me trouve si bien, si étonné, si calme, si reposé. Mais aussi, je n’imagine pas la douleur que je pourrais ressentir en cas de décès de l’un d’eux non plus. Nous en avons longuement parlé avec ma femme et mes enfants, l’attachement que nous ressontons les uns pour les autres a été formulé, on peut mourrir en montagne mais aussi en voiture, en moto, en sortant de boite, de chez des copains, etc… Et jamais on ne pourra le justifier…

Vous ne croyez pas qu’il faut dire et redire avec des mots que vous aimez ce qui vous entourent et que leur perte vous affectera dans des dimensions inimaginables… Au moment de prendre un risque, ce petit cailloux dans leur coeur, cette toute petite ficelle d’affection, ténue, les retiendra peut être dans ce monde ci ? Non ? Que faites vous ?

Une très affectueuse pensée à tout ceux qui traversent ces moments si terribles

Posté en tant qu’invité par chanceux:

je n’apprécie pas du tout le chantage affectif. Prendre des risques est une forme d’initiation dans ce monde d’aseptisés. Mais étant donné que j’ai pris des risques inconsidérés dans mon adolescence en montagne et escalade, et que j’ai eu une grande chance, il est primordial pour les moins chanceux que les jeunes gens soient bien formés avant de les lâcher dans cet univers; à vingt ans j’ai eu de la chance d’avoir connu des guides très pédagogues!
De plus je trouve la montagne plus dangereuse qu’il y a 20 ans: le réchauffement climatique, hiver comme été, rend la neige instable et certaine course de rocher très casse gueule.
Mais je reconnais que pour l’amour de mon entourage, j’ai renoncé à terminer certaines ascensions ou solos trop dangereux

Posté en tant qu’invité par toyotam:

je n’apprécie pas du tout le chantage affectif.

Oui, c’est vrai, moi non plus. Le probleme n’est pas tant ce que l’on apprécie, qui concerne notre égo, que ce que l’on fait, qui touche les autres.

As tu parlé à tes enfants des sorties alcoolisées entre copains et des retours à la maison dans la nuit ?
As tu parlé à tes enfants ou à tes amis de la mort en montagne, du sentiment de vide, de désastre, de dévastation affective ressentie par les proches ? Voila le sujet de mon post… Parler de la mort, tant qu’on est en vie pour faire toucher du doigt, par anticipation, l’injustifiable d’une disparition même dans le plus beau des cadres, même dans la plus belle des ambiances…
Liberté, liberté chérie, certes, mais à quel prix…

Posté en tant qu’invité par chanceux:

ça, c’est la réalité de tout guide de montagne…

sommes nous libres en faisant de la montagne ou de l’escalade ou tout autre activité dangereuse, alors qu’à la maison il y a paix, amour, calme, confiance?.. :rolleyes: