A lire son blog, je ne trouve pas que cela manque d’humilité, c’est juste qu’il passe rapidement du coq à l’âne.
Il est capable de se remettre en question aussi :
[quote]Grimper dans ce secteur me renvoie une vingtaine d’années en arrière, à l’époque jeune alpiniste sans peur et avec encore pas trop de reproche, j’avais choisi de grimper le Lagarde en solo. Je viens juste de faire le Fil à Plomb dans le même mode, je maîtrise tout, je suis trop fort ! C’est curieux comme la solidité des ponts de neige évolue avec l’age. A 25 ans, pas de soucis pour traverser un glacier seul. Passer le pont de neige d’une rimaye, Pffffftt, c’est du fun. Les cordées qui redescendent car elles brassent trop, un détail. Inconscient mais serein, je remonte ce couloir sans difficulté. A un moment, il se sépare en deux…merde, évidemment j’ai pas de topo et je n’ai rien demandé à personne. Je me fie à mon bon sens, la montagne je connais, ben ouaih, j’en fait depuis…3ans et puis ne suis-je pas membre de l’équipe FFME d’alpinisme, la crème de ma génération ! Sûr de la justesse de mon choix, je pars dans la branche droite. Je vois bien un petit ressaut rocheux au-dessus de moi, mais qu’importe ça doit être facile. Effectivement, c’est pas trop dur mais bon pas si facile non plus. La cerise, c’est quand je me rétabli sur l’arête. Je me voyais à une porté de crampon des 4001 m et en fait non. Une sale arête délicate, pas le choix, je monte. Le vide de la face nord ne me détend pas vraiment ! A un moment, je suis au pied d’un passage raide. Je trouve un piton avec une cordelette. L’option qui se dessine est aussi simple que terrifiante. Il faut basculer coté raide en priant pour que le clou soit béton ! Je passe mes lames dans la cordelette, je me laisse pendre dans le vide et je rejoins une banquette de glace. OUF ! Joker n°1 cramé, mais comme toujours en montagne, on ne connait pas son capital. Peu après, un ressaut de 4/5 m me domine, pas d’issue, va falloir forcer. Putain, c’est raide mais bon les prises sont corrects. J’avance lentement, vérifiant chaque prise, je tend le bras pour attraper la suivante quand la prise du bas casse. Un court instant en équilibre sur les pointes des « Black ice » et je me rue sur la prise du dessus. Joker n°2 carbonisé…Je sors en tremblant, et me rétabli en larme sur une arête de neige sans consistance. Pas de portable, pas de radio, personne autour de moi, que faire ? Je pleure encore, j’hurle « au secours, à l’aide, venez me cherchez ». Absolument inutile et sans effet, mais moralement ça aide. Je suis vidé, hors de question de continuer. Je tasse la neige, m’assoit, m’enroule dans ma couverture de survie et patiente. En effet, devant rentrer le soir, mes parents vont s’inquiéter, appeler le PGHM, et demain on vient me chercher. Pas très éthique mais dans mon état, fichtrement convaincant. La nuit est longue car en 1/2 heure ma couverture de survie est déchirée et ma barre énergétique avalée, la flotte c’est simple : j’en ai pas !
Une longue nuit à claque des dents s’annonce, je suis gelé. A l’époque, je n’avais pas les moyens d’avoir une bonne grosse doudoune light dans le sac ! Quand le jour se lève, un bruit d’hélico me sors de ma torpeur, cool c’est fini, SAUF que… le sommet est pris dans le nuage. L’hélico tourne puis le bruit s’éloigne. Seul. Rien d’autre à faire que continuer, la nuit à resserrer le manteau neigeux, la sortie s’annonce mieux. Néanmoins (enfin) prudent, je m’autoassure dans un petit passage glacé. Le sommet est atteint dans le vent et les nuages. Quelques rappels et le glacier est atteint. Un peu halluciné par les dernières heures, je suis des traces, en fait des boules qui ont roulées dans la pente. Fin de la connerie. Enfin pas vraiment, 1 semaine plus tard, arrivant d’une voie de la face nord mais ce coup-ci encordé, je retrouve mes traces, les suis et…tombe dans une grosse crevasse. Merci Joker n°3. Depuis mon point de vue sur le solo et les soloistes à bien évoluer, d’icônes ils sont passés à inintéressant. Je préfère (pas en fait) vivre l’aventure humaine de Benoist/Graziani que parler à ma main pendant quelques heures.[/quote]